Quelques-uns des congrès du mouvement
syndical français sont bien connus. Tels celui d’Amiens, en 1906,
qui vit le vote de la célèbre Charte du même nom; ou la réunion
de Lille de 1921 qui précéda l’éclatement de la CGT; ou encore
les assises de Toulouse, en 1936, durant lesquelles se réunifièrent
presque tous les syndicats de la Confédération.
Après nous, peut-être, les militants
et les historiens parleront du Congrès de Grenoble, en 1978, où
une partie de la CGT, avec Georges Séguy, secrétaire général de
l’époque, essaya d’adapter la centrale à la situation économique
et sociale nouvelle qui commençait à se profiler. C’était la fin
des Trente Glorieuses; la crise d’ajustement et de modernisation
technique avait commencé déjà d’engendrer un chômage persistant
et une précarisation des contrats de travail qui allaient s’accroître
jusqu’à aujourd’hui. On sait que la tentative d’ouvrir la CGT,
d’en démocratiser les structures et de s’associer aux autres centrales
syndicales pour essayer d’endiguer la désyndicalisation grandissante
échouera. La direction du PCF entendait toujours contrôler au
plus près la confédération – et Georges Séguy, dans les mois qui
suivirent, fera valoir ses droits à la retraite.
Est beaucoup moins connu le premier
congrès de la CGTU, la Confédération générale du travail unitaire,
tenu à la Bourse du travail de Saint-Etienne du 24 juin au 2 juillet
1922, en quelque sorte le congrès fondateur de la nouvelle organisation
qui se constitue après la grande déchirure de la fin de 1921.
Il se révèle pourtant d’une très grande importance, plus que ne
l’ont perçue nombre d’observateurs ou même de participants. A
l’exception de quelques-uns, comme nous le verrons.
Un historien moderne estime que ce Congrès
de Saint-Etienne a marqué la première étape de ce qu’il nomme
la « révolution copernicienne » du mouvement syndical
français. Bouleversement qui, à son achèvement, aura inversé complètement
les valeurs qui structuraient jusque-là, en France, la majorité
du mouvement ouvrier révolutionnaire. Alors que ce dernier, jusqu’au
commencement des années vingt, se reconnaissait dans un syndicalisme
révolutionnaire fort imprégné d’idées libertaires, un congrès
de la CGTU, moins de dix ans plus tard, en 1929, reconnaîtra le
rôle dirigeant du parti communiste sur l’organisation syndicale.
L’instant essentiel de ce basculement,
le constat net du renversement de majorité se situe exactement
durant ces quelques jours de l’été 1922, lorsque le congrès repousse
les deux motions présentées par Pierre Besnard, au nom d’un rassemblement
de syndicalistes « purs » et de libertaires, pour adopter
les orientations que soutiennent Gaston Monmousseau et ses camarades
du groupe de la Vie ouvrière ainsi que la majorité des militants
du PCF.
Dès cet instant, le PCF et l’Internationale
communiste utiliseront les syndicats et la structure de la nouvelle
confédération afin de développer l’influence du marxisme-léninisme
dans la classe ouvrière française et y recruter leurs meilleurs
militants.
Nous publions, dans ce premier numéro
des Temps maudits, revue syndicaliste révolutionnaire et anarchosyndicaliste,
en prélude à une étude plus fouillée des débats de Saint-Etienne,
un survol des événements qui amenèrent la CGT, centrale syndicale
à vocation essentiellement unitaire, à se briser en deux. Les
divers incidents du premier congrès de la CGTU – ainsi que les
interventions qui y furent prononcées notamment par Monmousseau,
Losovski, Frossard, Besnard, Borghi, Lecoin – seront examinés
en détail dans notre prochaine livraison.
La guerre mondiale et les orientations
prises alors par la direction confédérale en août 1914 doivent
être regardées comme les causes profondes et véritables de la
scission, la première et la plus grave – et
qui annonçait déjà les suivantes – de l’organisation ouvrière
française.
En effet, lorsque l’heure de vérité
sonna pour la CGT, quand il devint nécessaire de commencer à appliquer
les résolutions de congrès qui proclamaient haut et fort qu’elle
répondrait par une grève générale à un ordre de mobilisation,
le comité confédéral tergiversa.
Dans un manifeste publié le 2 août,
tout en réaffirmant encore sa croyance en une paix possible –
mais ne s’agit-il pas là d’une clause de style ? – la CGT reconnaît
son impuissance devant les événements qui l’ont submergée. Tout
en déplorant le fait accompli, elle en rejette implicitement la
faute sur « le prolétariat qui n’a pas assez unanimement
compris tout ce qu’il fallait d’efforts continus pour préserver
l’humanité des horreurs d’une guerre ». […] Le gouvernement
a fait preuve d’habileté en maintenant les troupes à 10 kilomètres
de la frontière et en présentant la guerre comme la défense nécessaire
du pays agressé par l’impérialisme prussien : bien des militants
qui auraient refusé une guerre de conquête acceptent de se mobiliser
pour défendre la République .
Lors de l’enterrement de Jaurès, assassiné
le 31 juillet, Léon Jouhaux, secrétaire général de la CGT, déclare
: « Comment trouver des mots ? Notre cerveau est obscurci
par le chagrin et notre cœur étreint par la douleur. […] Au nom
des organisations syndicales, au nom de tous les travailleurs
qui ont déjà rejoint leur régiment et de ceux – dont je suis –
qui partiront demain, je déclare que nous allons sur les champs
de bataille avec la volonté de repousser l’agresseur : c’est la
haine de l’impérialisme qui nous entraîne. » La direction
de la CGT souscrit à la guerre.
Beaucoup d’observateurs et de militants
constatent à ce moment-là la force de mobilisation du nationalisme.
« Le 2 août, écœuré, réduit en
poussière moralement, je suis parti dans un wagon à bestiaux avec
d’autres hommes qui gueulaient : “A Berlin !”, dira Dumoulin.
J’ai senti une autre faillite que celle de la CGT, la faillite
intellectuelle de notre pays. La faillite des
éducateurs – nous étions aussi des éducateurs – et la faillite
intellectuelle du pays qui nous a conduits à la guerre. »
Très vite, la direction de la CGT prend
sa place au sein de l’organisation de « l’union sacrée »
: Léon Jouhaux accepte, à titre personnel, un titre de « commissaire
à la nation » et siège, à côté de Charles Maurras et de l’ancien
préfet de police, Louis Lépine, au Secours national. Peu à peu,
les garanties et les quelques acquis des salariés disparaissent.
« Il n’y a plus de droits ouvriers, plus de lois sociales;
il n’y a plus que la guerre », répondra Millerand à une délégation
de la Fédération des métaux; les réunions syndicales peuvent être
interdites à tout moment et les soldats en uniforme ne peuvent
y assister. Plus tard, au Congrès de Lyon, Pierre Monatte déclarera
:
« Je ne ferai pas au bureau confédéral
le reproche de n’avoir pas déclenché la grève générale devant
la mobilisation; non ! Nous avons été impuissants, et les uns
et les autres; la vague a passé, nous a emportés. Nos ennemis
de classe ont agencé leur entreprise, ils ont affolé le pays.
Mais si la masse pouvait, à un moment précis, se laisser entraîner,
il est des hommes qui devaient attendre que le vent ait passé
pour se redresser. Or ils ne l’ont pas fait. »
Le naufrage de la direction confédérale
en août 1914, s’il a marqué une terrible rupture dans la vie de
la CGT, ne doit pourtant pas être surévalué s’agissant des causes
profondes de la scission. La plaie ouverte eût pu se refermer
si un « redressement » s’était opéré.
« La confiance mise par la CGT
dans la démocratie et l’Etat bourgeois, pendant et après la guerre,
[…] était en opposition flagrante avec la charte d’Amiens, qui
rompait publiquement avec cette démocratie et son Etat et n’attendait
rien que de l’action directe des travailleurs. […] Dès qu’on a
cessé de reconnaître que la lutte de classes est un fait indéniable,
pour pratiquer ou tenter de pratiquer la collaboration continue
du Travail et du Capital, on a créé une tendance qui ne permettait
plus à la CGT de grouper en son sein, en dehors de toute école
politique, tous les travailleurs conscients de la lutte à mener
pour la disparition du patronat et du salariat. Une partie d’entre
eux en étaient exclus idéologiquement, moralement. […] Il ne faut
pas chercher ailleurs la cause de la première scission… »
Les deux caractéristiques de la nouvelle
orientation de la direction confédérale – l’absence d’opposition à la guerre et la collaboration
de classes qui en est le prolongement – expliquent le caractère
double de l’opposition qui se constitue peu à peu, surtout à partir
du refus du comité confédéral d’envoyer une délégation à la conférence
que les socialistes des pays neutres se proposent d’organiser,
fin 1914, à Copenhague.
On a souvent dit que cette opposition
comportait deux courants, l’un pacifiste et l’autre révolutionnaire,
chacun représenté respectivement par Merrheim et Monatte. Ces
motivations différentes, d’abord convergentes avec la lutte contre
la continuation de la guerre puis divergentes avec la paix de
1918 et le développement de la Révolution russe, expliquent sans
doute le rapprochement de Merrheim et de Dumoulin, deux militants
de l’opposition au prestige intact, avec Jouhaux et la majorité
d’union sacrée.
Au cours d’une conférence extraordinaire
tenue à Clermont-Ferrand fin décembre 1917, après de très longs
débats, un texte est voté à la quasi-unanimité.
La motion d’unanimité déclare que les
formules qui sont celles du président Wilson et de la révolution
russe ont toujours été et sont restées celles de la classe ouvrière
française (pas d’annexions, droit des peuples à disposer d’eux-mêmes,
pas de contribution de guerre, pas de guerre économique succédant
aux hostilités, arbitrage obligatoire, Société des nations). Cette
motion affirme le droit, pour la classe ouvrière, de participer
à une conférence internationale et de la susciter au besoin. Quel
sont les sentiments qui ont permis cette motion d’unanimité ?
Au nom de la minorité, Merrheim les exprime à la conférence :
c’est un geste de conciliation destiné à permettre une action
plus énergique en faveur de la paix .
Lors du Congrès de Paris, en juillet
1918, quelques mois avant l’armistice, le vote majoritaire, de
908 voix contre 253, comprend également nombre d’anciens opposants
à la guerre. Merrheim s’en explique au cours de la discussion
:
« J’aurais pu donner satisfaction
à mes rancunes personnelles… J’estimais que je n’avais pas le
droit d’écarter cet homme… et que la CGT aurait été [par la
division] frappée d’impuissance. Cela, à quel moment ?
A un moment où tous les dangers pouvaient se présenter pour nous,
à un moment où notre pays, comme nous, pouvions être placés dans
la situation de vaincus, et nous aurions été dans l’impossibilité d’agir et même de continuer
à faire de l’action purement syndicale. Voilà les préoccupations
qui m’agitaient et comment il faut comprendre les crises à travers
lesquelles j’ai passé. Et c’est pourquoi, pensant à la CGT, à
son avenir, à l’action internationale, à l’action ouvrière, j’ai
abandonné le mot « regret » et, ce faisant, j’ai loyalement
mis ma main dans la main de Jouhaux pour ne pas diviser davantage
la classe ouvrière. »
Au Congrès de Lyon, en septembre 1919,
Monatte, démobilisé et fort de son passé de militant qui a refusé
la guerre, attaque la majorité sans la ménager. « Notre devoir,
dit-il, est bien clair : aider la Révolution russe.
Comment ? Par la Révolution. » Pour lui et les nouveaux
minoritaires, dont se sont séparés ceux qui n’étaient que pacifistes,
l’heure est à l’action et, affirme-t-il, la CGT tourne le dos
à la révolution, à la tactique traditionnelle du syndicalisme
: elle fonde aujourd’hui sa politique sur l’entente avec le patronat,
avec l’Etat. La CGT n’est plus « dans l’action nationale
comme dans l’action internationale qu’un rouage gouvernemental ».
« Le congrès blâme l’attitude du
comité confédéral pendant toute la guerre : la CGT s’est laissé
lier à l’œuvre de guerre dont elle partage la responsabilité.
Le congrès condamne aussi la politique de collaboration de classes,
inauguré par le comité confédéral », proclame la motion minoritaire,
pour se conclure par une appel au volontarisme révolutionnaire :
« La grève générale révolutionnaire
peut être le résultat de grèves partielles qui s’étendent, se
communiquent de proche en proche, ou d’autres événements inattendus
qu’il faut savoir saisir délibérément : toutes les énergies révolutionnaires
dont dispose le prolétariat doivent être transformées en actes. »
Dumoulin, au nom de la majorité, lui
répond que la guerre a changé la situation. La théorie des minorités
agissantes ne répond plus aux circonstances. Les méthodes de lutte
doivent s’adapter, continue-t-il : les masses « non instruites,
non éduquées » accordent au syndicalisme une confiance que
doivent justifier des réalisations concrètes. Pour conserver ces
nouveaux syndiqués, des conquêtes progressives nécessitent des
négociations et des accords.
Cette dernière orientation est votée
par 1 633 mandats contre 324.
L’affrontement entre les deux tendances
devient alors un conflit permanent qui aboutit, deux ans plus
tard, à la scission.
C’est à partir de l’été 1920 que la
menace apparaît, autour de la Fédération des chemins de fer, déchirée
entre une minorité désorganisée par une répression qui frappe
– grâce à la trouvaille du « complot » – bien au-delà
de la corporation cheminote et une « majorité » qui
met à profit cette situation pour reprendre la direction fédérale.
En septembre 1920, au lendemain d’un congrès confédéral où les
minoritaires, décimés et démoralisés, s’étaient battus « dans
le brouillard », ils décident de s’organiser réellement dans
les « comités syndicalistes révolutionnaires » (théoriquement
créés depuis novembre mais en fait […] à l’état embryonnaire),
dont le but est d’arracher la CGT à l’équipe, qualifiée de « réformiste »
qui la dirige alors. En novembre 1920, puis en février 1921, celle-ci
riposte en dénonçant un « noyautage » qui expose ses
auteurs à des mesures de discipline. Tandis que s’éternise la
confuse bataille pour le contrôle de la Fédération des cheminots,
des exclusions sont prononcées par quelques fédérations d’industrie
contre des syndicats adhérant aux CSR, sans que se trouve pour
autant freinée l’impétueuse crue de la minorité. Le congrès confédéral
de Lille, réuni en juillet, apparaît, malgré certaines péripéties
rocambolesques, comme une accalmie dans le processus de scission.
Mais, dès le mois d’août, réapparaissent les exclusions, que codifie
et organise la comité confédéral de des 19-21 novembre 1921. Dès lors,
c’en est fait de l’unité syndicale. La minorité, menacée d’asphyxie
par le garrot des exclusions, décide alors, le 29 novembre 1921,
de convoquer […] un congrès « unitaire et extraordinaire
de tous les syndicats confédérés ».
Lors du Congrès d’Orléans, de fin septembre
et début octobre 1920, l’opposition entre les deux tendances s’affirment,
en particulier par les discours opposés de Merrheim et de Frossard,
alors secrétaire du parti communiste.
Frossard :
« Les camarades de la minorité
ont déclaré de la façon la plus nette qu’ils demeurent partisans
de la Charte d’Amiens, qu’ils la considèrent comme une règle d’action
vivante, que le syndicalisme tel qu’ils le conçoivent est à la
fois un syndicalisme de réalisations immédiates, de revendications
révolutionnaires et de transformations sociales. » Frossard
défend donc l’autonomie du mouvement syndical; quels seront donc
les rapports du mouvement syndical avec les partis politiques
qui se réclament de la Révolution russe et s’inspirent des thèses
de Lénine ? « Je suis de ceux, continue Frossard, qui placent
sur des bases d’égalité la CGT et le parti… Sans nous, la CGT
ne fera pas la Révolution sociale, et nous ne la ferons pas sans
elle. Pour l’instant, je dois dire que l’interprétation que j’ai
donnée à notre volonté d’autonomie du mouvement syndical a été
très vivement combattue par le comité exécutif de l’Internationale
communiste. On a insisté très vivement auprès de moi pour que
je renonce à la position que j’avais prise. Je n’y ai renoncé
à aucun moment. Camarades, lorsque nos camarades russes nous proposent
une subordination du mouvement syndical au mouvement politique,
ils tiennent compte de leur propre histoire, ils ne tiennent pas
assez compte de l’histoire des autres mouvements ouvriers. »
Merrheim :
« Nos camarades révolutionnaires
russes ont appliqué une doctrine complètement opposée à la nôtre,
à nos principes d’organisation de la Charte d’Amiens, et ils veulent
nous forcer d’adopter leur doctrine sous la surveillance de l’exécutif
de la troisième Internationale. […] Je me suis permis de dire
qu’un régime établi dans les conditions morales et matérielles
tel qu’il est à l’heure actuelle en Russie ne pourra, au moins
pendant une génération, se maintenir que par la dictature. […]
Comment s’exerce-t-elle ? Par les noyaux communistes… J’ai montré
l’inconciliable opposition des deux doctrines. »
Une partie de la minorité, avant même
la scission, craint elle aussi l’influence des consignes de l’Internationale
communiste. En juin 1921, une conférence des CSR élit une nouvelle
direction de militants qui entendent maintenir l’autonomie du
syndicalisme envers tous les partis politiques.
« Les syndicalistes sentent, au sein des CSR, la tutelle
qu’on veut leur imposer. Ils se dressent contre les hommes de
Moscou : Monatte, Monmousseau, Rosmer, Souvarine, Loriot, etc.,
révèle Besnard quelques années plus tard. C’est la première bataille
qui se livre pour l’indépendance du syndicalisme révolutionnaire. »
Ce sera ce nouveau bureau des CSR qui
décidera la convocation du congrès « extraordinaire et unitaire »
de la fin de 1921.
On a beaucoup écrit sur les responsabilités
de cette première scission.
Dumoulin, en 1955, reprochait encore
à Monatte de porter une grande part de cette responsabilité, parce
que ce dernier avait été une des créateurs des CSR, et par là
même d’avoir initié l’implantation du parti communiste et ses
thèses dans le mouvement syndical.
Monatte, quant à lui, déclarait dans
la préface à Socialisme et Liberté, de Fritz Brupbacher,
que la « scission fut en réalité l’œuvre des réformistes
qui creusèrent une chausse-trape et celle des anarchistes et des
syndicalistes dits “purs” qui s’y précipitèrent ».
Chacune de ces positions gomme précisément
la responsabilité des courants syndicalo-politiques dont les deux
hommes étaient les porte-parole et au nom desquels ils s’affrontèrent
durant toutes ces années. Le premier, Georges Dumoulin, qui défendit
et fit voter par le CCN de septembre 1921 la motion qui appelait
et justifiait l’exclusion des syndicats adhérant aux CSR, c’est-à-dire
en stoppant le développement de la minorité, tous les syndicats
oppositionnels se trouvant en situation d’être exclus. Le second,
Pierre Monatte, qui paraissait avoir oublié qu’il fut une des
promoteurs les plus actifs et les plus écoutés des conceptions
de Lénine.
Comme nous le verrons dans un prochain
article, le Congrès de Saint-Etienne sonnera le glas du syndicalisme
révolutionnaire français comme force organisée et importante.
Réduit à sortir de la vieille CGT pour éviter un éparpillement
par exclusions successives, il sera bientôt minorisé par la coalition
du groupe de la Vie ouvrière et des membres du parti communiste.
Jacques
Toublet.
1 Jean Charles, « Syndicalisme révolutionnaire
français et communisme international », in Prolétaires
de tous les pays unissez-vous ? Les difficiles chemins de l’internationalisme,
1848-1956. Publications de l’Université de Bourgogne, p. 132.
2 « Il n’est pas niable qu’à la fin du XIXe
siècle et au début du XXe, le syndicalisme communément
qualifié de « révolutionnaire » […] exerce son hégémonie
intellectuelle sur l’ensemble des travailleurs français et possède
l’initiative dans l’action », J. Julliard, Fernand Pelloutier
et les origines du syndicalisme d’action directe, le Seuil
éditeur, pp. 258 et 259 de l’édition de poche. « Le
syndicalisme tel qu’il a été vécu par des hommes comme Pelloutier
n’a pas été seulement un moyen de changer la société, mais bien
une conception libertaire de l’existence », ibidem,
p. 262.
3 Michel Dreyfus, Histoire de la CGT, Editions
Complexe, p. 136; la résolution affirmait que la CGTU travaillerait
« sur tous les terrains en accord étroit avec le parti communiste,
seul parti du prolétariat de la lutte des classes révolutionnaires…
seule avant-garde prolétarienne dirigeante du mouvement ouvrier ».
4 M. Dreyfus, ibidem, p. 82.
5 En fait, Jouhaux ne partira
pas.
6 Pierre Besnard, article
CGT de l’Encyclopédie anarchiste, p. 403.
7 Edouard Dolléans, Histoire
du mouvement ouvrier, Armand-Collin, t. II, p. 221.
8 Michel
Dreyfus, op. cit., p. 85.
9 Edouard
Dolléans, op. cit., pp. 222 et 223.
10
P. Besnard, op. cit., p. 411.
11
E. Dolléans, op. cit., p. 270.
12
E. Dolléans, ibidem, p. 276.
13
E. Dolléans, ibidem, p. 318.
14 Sic. les documents édités plus tard par la commission administrative
provisoire de la CGTU portent des « 19-21 septembre ».
15 Jean Charles, « A
propos de la scission syndicale de 1921 », in Mélanges
d’histoire sociale offerts à Jean Maitron, les Editions ouvrières,
p. 59.
16 E. Dolléans, op. cit., pp. 342 et
343.
17 E. Dolléans, ibidem.
18 Edition de la
Baconnière, Neuchâtel, p. 26.
19 Pierre Monatte « avait
accepté l’idée de la dictature du prolétariat […]. De même, il
avait fait sienne l’idée de l’Etat telle que Lénine la définit
dans son livre l’Etat et la Révolution », F. Brupbacher,
op. cit., p. 264. Notons néanmoins que les
anciens de la Révolution prolétarienne affirmaient que Monatte
avait toujours été partisan de l’autonomie syndicale