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Origine :
http://multitudes.samizdat.net/article.php3?id_article=1841
Paru dans la revue "Confrontation"
titré "Après le sujet qui vient" numéro 20 hiver 1989
Qu’est-ce qui vient après le sujet ? demande-t-on
à l’auteur de ces lignes. Comment le saurait-il ? Comment
le montrerait-il ? Le commentaire qui lui revient régulièrement
de son auditoire n’est-il pas justement qu’on ne sait
jamais où il veut en venir. Il sait aussi, bien évidemment,
que ne pas savoir est une manière un peu trop commode de
réfléchir son image en portrait du philosophe, d’autant
plus commode que la question philosophique a coutume d’en
savoir plus que son destinataire. Ne savoir ici qui nommer, c’est
aussi s’installer dans l’après qui peut-être,
désignant le lieu ou la patrie de cet inconnu, en dit assez
sur son identité.
C’est que la question sur le temps est toujours avantageuse.
Dire la fin, l’après, le post héroïse la
pensée qui enregistre la fin du temps où les choses
étaient en ordre et le sens établi. Jadis, naguère,
il y a eu, il y aurait eu un temps où tout reposait à
l’ombre des grands récits sur le moi et le monde, sur
Dieu et sur le peuple. Maintenant s’annoncerait la hardiesse
des matins nouveaux et des chemins d’aventure... Mais le geste
même par lequel cete déréliction proclame son
effort héroïque ou sa dérive joyeuse rétablit
la certitude tranquille du lien et du lieu : nous sommes dans la
fin ou l’après. Toute ruine recèle un temple
habitable, déjà habité. Le temps signalé
comme celui de la perte est encore celui de la continuité,
de l’archéologie, du patrimoine. Il fais sens et donne
lieu. Cela veut dire aussi qu’il rassemble : dire l’époque
ou l’époqual, c’est mettre ensemble dans un même
destin le rassemblement de ceux qui pensent à la hauteur
de l’après et la masse indistincte dont on suppose
qu’elle habite les ruines sans le savoir, qui se définit
par cette supposition même et donne par là à
la corporation la mission de penser pour elle ce qu’elle vérifie
jusque dans son mutisme.
On sait que la tranquillité de cette double relation ne
va pas sans quelques soubresauts. De temps en temps l’actualité
rend trop évident que les neuf dixièmes de l’humanité,
ou un peu plus, souffrent de ce que l’époque a depuis
longtemps dépassé : les histoires archaïques
de la faim, de la foi et du peuple. C’est l’heure pour
les prêcheurs moroses ou les procureurs pugnaces de dénoncer
la duplicité des penseurs de l’après. Tradi-comédies
et vaudevilles se jouent alors sur fond d’holocauste. Tantôt
le gardien du temple annonce que la corporation a trahi et qu’il
faut revenir à ce qui était avant : l’assurance
du sujet qui recueille les significations et assigne les valeurs.
Tantôt l’exhibeur de cadavres vient lui faire honte
de ce que ses valeurs - ou leur oubli, ou les deux à la fois
- ont servi les tueurs. Une autre fois la corporation, naguère
orgueilleuse de ses hardis voyages loin des terres paternelles du
sujet, se resserre pour préserver de toute atteinte parricide
le penseur de la fin de la métaphysique qui est aussi le
seul membre notable de la corporation à avoir entretenu quelque
lien, si ténu qu’on le dise, avec les tueurs.
Ces tribunaux, périodiquement dressés aux points
où les affaires de la corporation rencontrent quelque affaire
et quelque sens supposés communs sont peut-être la
rançon de la commodité qu’elle s’était
octroyée : celle de la capitalisation interminable d’un
malheur à la péripétie indéfiniment
suspendue. Le temple et le charnier évoqués à
ses frontières comme présentifications de son origine
oubliée ou de sa fin inavouée dénoncent à
ses deux bords l’espace - temps où s’est volontiers
installée l’activité philosophique : celui du
commencement de la fin.
Quelle que soit en effet la bonne volonté philosophique
à radicaliser la question de l’après, elle n’empêche
pas que son terrain ne soit fermement balisé par trois figures
de mise en scène passées à l’état
de configurations doxiques. C’est d’abord la théorie
psychanalytique qui fait de l’après-coup le temps même
de l’avènement du sujet, dissimulant peut-être
la tâche énigmatique de la fidélité à
cet à-venir derrière la visibilité donnée
à l’événement parricide comme origine
de l’enchaînement signifiant. C’est ensuite la
figure de l’extermination. Celle-ci représente l’anéantissement
du sujet non pas simplement sous la forme de la liquidation en masse
des individus mais sous celle de la mort sans reste - sans trace,
monument ni immortalité. Elle ouvre ainsi l’horizon
d’un commencement de la fin, projeté dans les deux
dimensions du passé et de l’avenir. D’un côté,
les généalogies de l’horreur traquent depuis
une origine toujours plus reculée le commencement de la mauvaise
histoire, celle du sujet porteur de mort, et elles en suivent les
avancées les plus infimes. De l’autre les pensées
du lendemain s’intallent dans les temps crépusculaires
qui commencent à l’avènement de l’impensable.
Mais derrière l’énigme et l’horreur se
lève, toujours plus conquérante, une tierce figure,
la figure de cette singulière rédemption qui s’exerce
dans le développement de l’entreprise patrimoniale.
Celle-ci met en œuvre une nouvelle immortalité, attachée
désormais au monument et non plus à ce dont il était
monument : gigantesque assurance contre la mort, l’holocauste
et le parricide, propre à tout immortaliser, à restaurer
tout temple, mais aussi à monumentaliser tout objet, à
familiariser toute étrangeté dans la filiation d’un
sens soustrait à la mort.
On voit les ressources infinies que procure l’agencement
de ces trois configurations qui est aussi un cumul des temps. Enoncer
le commencement de la fin, énoncer à son enseigne,
c’est faire siens les pouvoirs de la mort suspendue et du
voyage à travers les temps. Nous disons au présent
l’amarre rompue, l’image défaite ou le nom raturé.
Mais nous nous installons surtout dans la figure singulière
de l’apocalypse rétrospective : nous réécrivons
indéfiniment au passé la prophétie du mauvais
commencement (oubli, voile - ou, tout aussi bien, leurre du voile
ou de l’oubli) qui n’en finit pas de nous faire souffrir
: l’enchaînement des maux qui tient à la mauvaise
figure, à la figure oublieuse de la subjectivité.
La fidélité éthique à l’incertitude
reconnue du sujet et à l’acte de son à-venir
s’adosse alors à la pensée de l’extermination
pour s’installer dans les prophéties rétrospectives
du commencement de la fin. Mais aussi l’apocalypse au passé
échange sans cesse les pouvoirs performatifs de la menace
de mort avec les ressources d’immortalité de l’entreprise
patrimoniale. Ainsi la philosophie succombe-t-elle au charme de
réécrire, avec l’infinité des métonymies
autorisées par la richesse de son texte, les phrases de son
histoire. Elle se donne comme avenir interminable et elle donne
à l’époque comme destin cette réécriture
qui ponctue chaque phrase du texte comme menace de mort et chaque
énoncé de l’événement présent
comme répétition déplacée d’une
phrase du texte. Ces allées et venues entre le texte et l’événement,
entre le passé et l’avenir, entre la mort et l’immortalité
définissent la figure d’une ressource infinie étrangement
semblable à cette réserve où le discours heideggerien
de l’apocalypse reconnaît l’essence de la domination
technique. Le patrimoine, la technique nouvelle de l’immortalité,
est peut-être devenu l’élément vital de
la même philosophie qui trouve dans la dénonciation
de la domination technique son ressort. En assurant à la
philosophie le temps nouveau de son énoncé, il lui
permet d’identifier l’inventaire de son propre héritage
au déchiffrement de l’énigme mortelle des temps
nouveaux, il assure sa revanche sur le savoir social qui l’avait
reléguée. De là à ce qu’elle soit
au premier rang de toutes les manifestations qui pensent et célèbrent
le monument, l’archive ou le musée, la conséquence
semble bonne.
Sans doute cet usage conquérant du commencement de la fin
serait-il à étudier dans la continuité de ce
dont j’avais naguère esquissé la figure : la
fonction déterminante du temps, de sa disponibilité
ou de son manque, comme ligne de partage mettant en scène
l’activité philosophique en séparant ceux qui
ont le loisir de penser et ceux dont ce n’est pas l’affaire
(l). J’avais alors esquissé la continuité qui
va de la franche affirmation platonicienne des privilèges
de la skkole à la tortueuse analyse sartrienne des effets
de la fatigue qui ôte au prolétaire le temps de penser.
La substitution du temps de l’urgence et de la fin commencée
à celui du loisir de la parole philosophique serait à
penser au titre des figures qui redéfinissent aujourd’hui
la mise en scène de l’activité philosophique,
qui organisent sa doxa, dans les conditions nouvelles où
elle se rapporte à son autre : maîtrise qui s’annonce
au nom même d’un temps caractérisé comme
celui de la déréliction, discours qui tient sa gravité
d’énoncer en s’y comptant le destin commun de
l’humanité mais qui sépare du même coup,
comme au VIIe livre des Lois, les guetteurs de la nuit commencée
du sommeil de la masse oublieuse.
Ce qui pourtant m’intéresse ici est autre chose :
la façon dont ce cumul des temps joue avec l’horreur
et la mort, les convoque à l’orée du discours
pour les maintenir indéfiniment à distance. La philosophie
joue là avec ce qui fut son affaire : l’assomption
de la mort, l’affrontement de la peur et des passions qui
ont la peur pour foyer : la frustration du “ n’avoir
pas encore assez ” et la crainte du “ ne plus être
” qui accompagnent la destinée du vivant saisi par
la parole et la représentation. Dans le renvoi infini de
la prophétie apocalyptique et de la rédemption patrimoniale
un certain logos se déploie qui a pour principe paradoxal
ce qui fut jadis désigné comme le principe même
de la passion : la confusion des temps, le perpétuel enjambement
du présent. Ce présent que le maître stoïcien
recommandait de circonscrire pour éloigner les passions croisées
de l’attente et du regret, il ne cesse au contraire sous nos
yeux de se dilater, de s’enfler des allers et retours, des
pertes et profits inclus dans l’idée du commencement
de la fin, dans l’échange de l’holocauste et
du patrimoine. Tout se passe comme si l’exhibition de la représentation
avait exactement remplacé l’“ usage des représentations
”, comme si la passion, c’est-à-dire la confusion
des temps - était devenue méthode.
Bien sûr l’anachronisme ne vaut ici que comme déplacement
de la perspective. Nous n’avons à notre disposition
ni “ nature ” à accompagner ni “ partie
hégémonique ” garantie pour cet usage. Mais
là est justement le problème : est-ce que les thèmes
de la fin ou de la mort (éventuellement interminable) du
sujet ne vivent pas de l’identification de toute figure subjective
aux archétypes du subjectum ou de la substantia ? Est-ce
que cette identification du “ sujet ” avec la figure
mauvaise de la présence (et donc avec la présence
du mal) n’est pas la manière trop commode d’évacuer
la question du présent, c’est-à-dire aussi bien
la question de la raison ? S’il fallait jouer au jeu répandu
chez nous des “ oublis ” et des “ retours ”,
je dirais volontiers que ce qui est aujourd’hui le plus oublié
ou défait ce n’est pas l’Homme, la Pensée,
la Rationalité, le Sens ou quelque autre de ces victimes
sur lesquelles se penchent les pleureuses mais la simple raison
dans sa définition nucléaire : l’art pour chacun
de régler son compte avec la confusion des temps et les passions
de l’attente et du regret qui y trouvent leur principe. Art
du présent d’autant plus nécessaire que s’est
perdue l’assurance de la présence exactement circonscrite
d’un sujet capable de se précéder lui-même.
Evacuer “ le ” sujet avec cette figure, le présent
avec la présence, n’est-ce pas supprimer l’instance
de ce qui - celui qui - est concerné par ce règlement
du temps et de la peur ?
Qu’est-ce qui vient après le sujet ? Nous dirons,
en un sens : rien ne vient après le sujet. Car il est précisément
celui qui vient après, celui qui prend le risque de continuer
à son compte un texte déjà engagé, une
histoire déjà commencée, de transformer selon
la formule de Zarathoustra, le es war en un so wollte ich es, acte
où précisément le présent a la tâche
de suppléer au manquer de son propre temps. Identifier en
toute circonstance ce vouloir du risque à une “ volonté
de volonté ” conçue comme la forme achevée
de l’oubli, c’est ne laisser en retrait, en arrière
ou au-delà du “ sujet ” que la figure d’un
quelque un auquel rien n’arrive jamais : non-sujet soustrait
au discernement des figures spécifiques de l’oubli,
de la détresse ou de la mort, soustrait à la nécessité
d’énoncer ce discernement et de faire quelque chose
- quelque acte - de cet énoncé. Au-delà du
sujet, en ce sens, au-delà de son ich wollte, reste le seul
consentement à ce qui se passe, où quelque un s’échange
avec tout autre dans la nuit de l’indiscernable. Que l’on
lise par exemple le commentaire que fait en 1946 Heidegger d’un
poème de Rilke énonçant en 1925 la figure poétique
de ce “ vouloir du risque ” : la splendeur même
du commentaire qui reproche au poète d’avoir ainsi
manqué le fond de l’abîme est aussi celle du
silence fait sur un trou, sur l’entretemps de ces vingt années
allemandes dont rien de distinct n’est, dans ce discours,
nommable. Après le sujet, dans l’identification de
l’après au commencement de la fin, il n’y a plus
d’emploi du temps.
Que l’on pense donc le maintenant, si l’on veut, sous
la forme de l’après, sous la forme de la dissociation
de la présence et du présent. Mais dire là
la mort du sujet ou son épuisement c’est abandonner
la seule chose qui compte, qui fasse la différence : l’intervalle
du es war au so wollte ich es. De cet intervalle, de l’emploi
de son temps, en bref de l’effet de sujet, nous ne savons
au contraire que trop peu de chose. Et ce trop peu de savoir est
justement lié au trop grand crédit que nous accordons
aux apparences de la consistance du sujet, spécialement quand
ce sujet prend la figure de l’autre, de celui qui est supposé
reposer dans sa présence béate, faire corps avec sa
représentation.
C’est du moins ce que j’avais essayé de montrer
en affrontant la figure de cet autre privilégié de
la modernité politique, ce sujet diversement appelé
“ prolétariat ”, “ classe ouvrière
” ou “ mouvement ouvrier" successivement représenté
comme héros d’une épopée glorieuse, fauteur
d’holocauste et enfin sujet mort par desuétude d’un
récit archaïque (2). J’avais tenté de déconstruire
la fiction de cet animal laborans sorti des antres noirs de l’usine,
de la mine ou du taudis, formant son image de soi dans la contemplation
et l’orgueil de son outil, et se groupant pour l’assaut
autour des drapeaux de son être collectif. A la base des formes
d’identification et du discours “ propre ” qui
fondaient l’idée d’une classe et de son combat
j’invitais à reconnaître le phénomène
singulier d’une production de sens qui n’était
ni la systématisation des idées nées de la
pratique de l’animal laborans ni la conscience d’une
avant-garde formée aux raisons de la science objective mais
le produit de l’activité d’un réseau aléatoire
d’individus mis, par des chemins divers, dans la position
à fa fois centrale et hors-jeu, de porte-paroles : non pas
des gens portant la parole des masses, mais des gens portant la
parole tout court ; des individus séparés de leurs
supposés semblables parce qu’ils avaient été
saisis, entraînés dans le circuit d’une parole
venue d’ailleurs et conduits à signer le discours de
la classe et du mouvement, à leur donner une identité,
en raison même de leur impossibilité de trouver le
lien de leur propre identification. Derrière la supposition
d’un animal laborans levant le drapeau, héroïque
ou funeste, d’un nouvel homo politicus, il fallait rencontrer
la figure, à la fois commune et singulière d’un
animal rationale croyant aux mots de ses drapeaux comme croit tout
être parlant, tout mortel saisi par le langage, comme on croit,
en général, à ce qu’on dit : sous la
forme de la duplicité. L’Hercule chrétien célébré
dans les années 1840 par le rédacteur de l’Atelier
a même figure que le Cavalier - ou Centaure - au ciel étoile
du sonnet rilkéen : union de deux qui vont ensemble sans
signifier la même chose au terme de leur visée ; figure
toujours suffisante et à jamais décevante du lien,
comme est en général toute jonction de mots et tout
rassemblement d’êtres parlants autour de certains mots
(3). Penser l’après où nous pouvons être
par rapport à l’histoire de cette conjonction exige
au moins que nous prenions en compte le pas encore, le juste un
moment et le déjà plus qui la scandent en chacun de
ses temps, par lesquels seuls elle est une histoire.
De cet exemple qui est plus qu’un exemple puisqu’il
touche aux figures exemplaires de l’autre et du deuil qui
ont structuré notre temps, je tirerai seulement cette modeste
morale : qui veut dire quelque chose sur le temps qui vient doit
répudier en même temps la figure du commencement de
la fin et celle de la naïveté supposée de l’autre.
Le discours sur le temps et le discours sur l’autre font système
et clôture. Qui souhaite en sortir - ce à quoi nul
n’est tenu - doit s’ouvrir à la question du sujet,
de sa raison et de sa passion, en tant qu’elle n’est
pas seulement l’affaire des spécialistes mais de tous
ceux qui vivent l’écart de la représentation,
le travail de déchiffrement de soi dans le es war et l’essentielle
fragilité du pacte qui fait d’un déchiffrement
singulier le principe d’une communauté nouvelle. Il
doit s’ouvrir à l’effort pour délivrer
ce travail errant du sens, cette philosophie en dehors d’elle-même
de toutes les cages (classes, cultures, mentalités, etc.)
où doit sans cesse l’enfermer une raison savante à
la fois soucieuse de garantir sa spécificité par l’objectivation
naturalisante de son autre et désireuse de tenir à
disposition ce monde substantiel de significations. Cet effort correspond
à ce que, dans un autre travail, j’ai analysé
comme vérification de l’égalité :exercice
d’une raison qui ne se fait entendre que dans la répudiation
de toute temporalité propre à celui qui sait, de tout
partage présumé entre une élite de gardiens
nocturnes et une masse d’endormis (4). Cela peut aussi s’appeler
exploration de la raison ignorante : ce peu de raison suspendu à
sa seule décision de fidélité, joué
chaque fois dans l’aventure qui va vers la fin de la phrase,
la justesse du mot, le signe de l’entente, la jonction et
la disjonction toujours recommencées.
Maintenant, après... le temps est propre à l’exploration
de cette raison ignorante, de ce peu de raison mêlé
en chaque un à la folie du monde et toujours suspendu à
l’acte de sa fin, au visage inattendu de son déchiffrement.
Morale définitivement provisoire, accompagnement d’une
nature absente. Maintenant, après... il y a le lieu de cette
aventure : ce sujet qui dit sa vérité dans la division
et trouve sa paix dans la liaison. Il y a la fragilité de
la communauté raisonnable qui tient ensemble des êtres
parlants sans la garantie d’aucune loi d’avant la loi
; communauté qui donne le loisir de rechercher le mot juste
tout en se protégeant à toute force de ses blessures.
Maintenant, après... il est temps de retourner à l’envoyeur
non pas la question qui en sait trop mais la solitude fraternelle
du lieu où elle ne cesse de ressurgir : “ Sieh, nun
heisst es zusammen ertragen Stückwerk und Teile, als sei es
das Ganze. Dir helfen wird schwer sein ” (5)
Janvier 1988.
1. Le Philosophe et ses pauvres, Paris, Fayard, 1983.
2. La Nuit des prolétaires, Paris, Fayard, 1981.
3. Sonnets à Orphée, Première partie, sonnet
XI.
4. Le Maître ignorant, Paris, Fayard, 1987.
5. “ C’est l’heure, vois-tu, de supporter ensemble
Pièces et morceaux comme si c’était le Tout.
T’aider, ce sera dur ”. Sonnets à Orphée,
Première partie, sonnet XVI.
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