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LA POLITIQUE COMME PUR ACTE DE GUERRE : CLAUSEWITZ, SCHMITT ET FOUCAULT
Jean-François Thibault

Origine : http://www.mondecommun.com/index.php/revue/la_politique_comme_pur_acte_de_guerre_clausewitz_schmitt_et_foucault/

PUBLIÉ LE 12 Décembre 2007

… c’est un des traits fondamentaux des sociétés occidentales que les rapports de force qui longtemps avaient trouvé dans la guerre, dans toutes les formes de guerre, leur expression principale se sont petit à petit investis dans l’ordre du pouvoir politique.

– Michel Foucault 1

Nous sommes donc en guerre les uns contre les autres; un front de bataille traverse la société toute entière, continûment et en permanence, et c’est ce front de bataille qui place chacun de nous dans un camp ou dans un autre. Il n’y a pas de sujet neutre. On est forcément l’adversaire de quelqu’un.

– Michel Foucault 2


Il est de bon ton en philosophie politique d’opposer la politique et la guerre et de faire contraster le calme de la vie pacifiée dont témoignerait l’existence d’un lien social harmonieux avec la violence des discordes qu’illustrerait cette fois l’absence d’un tel lien. Du méson que louaient les Grecs de l’époque classique au contrat que célèbrent quant à eux les Modernes, la conviction apparaît la même selon laquelle la politique participerait principiellement d’une domestication des conflits et d’un dépassement des différends effectuée en vue d’une réconciliation qui serait autre chose qu’un simple modus vivendi.

Mais n’y a-t-il pas là, dans cette insistance que semble vouloir mettre la philosophie politique à nier les conflits et à éviter les différends, quelque chose comme la crainte de voir resurgir de la violence de ces possibles discordes et des désordres qu’elles provoqueraient, un horizon indépassable? En effet, ne juge-t-on pas que dans de telles circonstances la politique finirait en quelque sorte par ne plus être la politique pour, tout au contraire, sombrer à nouveau tête première dans la guerre? Ainsi se trouverait-on contraint, du fait même du travail de représentation de l’ordre pacifié que s’est donnée comme tâche la philosophie politique, d’épouser une démarche qui ne semble en mesure de « reconstituer les conditions de l’intelligibilité générale de l’agir politique […] qu’à condition d’en supprimer l’âme discordante »3. Pour cette philosophie politique, le conflit et le différend demeureraient donc largement indicibles puisque leur apparition marquerait, de fait comme de droit, la limite d’une représentation idéale atteignant justement là, c’est-à-dire dans ce désordre qu’elle ne parvient précisément pas à exprimer, sa frontière tant redoutée. Toute transgression conduirait celui qui oserait néanmoins s’aventurer au-delà de cette frontière à la perdition.

Toutefois, l’impression demeure que lorsque le conflit ou le différend sont ainsi occultés et placés hors de portée de la philosophie politique, « quelque chose de décisif reste en dehors du cadre »4. Aussi bien pour les Grecs que pour les Modernes, se pourrait-il que cette facticité de la politique soit, malgré tout ce que cela pourra impliquer comme épreuve pour la réflexion, indispensables à une compréhension du politique véritablement satisfaisante5?

Postulant qu’il s’agit là d’un impératif auquel doit pouvoir se confronter la philosophie politique, notamment dans un contexte où l’idée selon laquelle une communauté qui soit à la mesure de l’orbe du monde serait aujourd’hui à inventer gagne rapidement les esprits6, l’objectif de cet article est d’explorer le caractère de l’hypothèse relative au rapport existant entre la politique et la guerre que Michel Foucault développait dans son cours de 1976 au Collègue de France intitulé « Il faut défendre la société ». Plus spécifiquement, nous présenterons tout d’abord ce qu’il convient d’identifier comme la formulation classique de ce rapport entre guerre et politique telle qu’elle se trouve chez le stratège prussien Carl von Clausewitz. Nous nous attarderons ensuite à ce que ce Foucault envisage comme un renversement de ce rapport entre guerre et politique. Après avoir contrasté ce renversement à la lumière de la réflexion d’un autre critique de la philosophie politique libérale, Carl Schmitt, nous l’inscrirons alors plus nettement dans le cadre de la réflexion sur les dispositifs de savoir/pouvoir qui occupaient Foucault à la même période.

1. La subordination de la guerre : la politique chez Clausewitz

Clausewitz apparaît ici comme une figure particulièrement importante puisqu’il formalise en quelque sorte la représentation conventionnellement acceptée de ce rapport entre la politique et la guerre. Rapport qui fait non seulement de la guerre un simple moyen de la politique – quoiqu’un moyen par ailleurs absolument essentiel – mais également un moyen qui n’a d’autre fin que la paix elle-même, par laquelle se réglerait, dans un « résultat commun », le conflit7.

L’on connaît la formule de la guerre comme simple « continuation », « poursuite », « manifestation » ou « réalisation » de la politique d’État « par d’autres moyens » avec laquelle Clausewitz tentait de fonder la rationalité et l’intelligibilité de la guerre dans les rapports de subordination que celle-ci se devait nécessairement de conserver avec la politique8. Pour ce dernier, la formule signale en effet que la politique représente tout naturellement « la matrice dans laquelle la guerre se développe »9; la matrice qui précisément fournirait « le mobile initial de la guerre »10. La guerre serait donc ici de part en part un acte politique, lequel pénétrerait « l’acte de guerre entier en exerçant une influence constante sur lui »11. Aussi la conduite de la guerre serait-elle, du moins « dans ses grandes lignes », la poursuite de la politique même12. Pour Clausewitz, la guerre « ressemble » donc à la politique13 puisqu’elle y « appartient » et qu’elle constitue même une dimension de ces rapports politiques qu’entretiennent ensemble les États. En somme, la guerre serait simplement comme la « partie d’un tout qui diffère d’elle »14, comme une partie de la politique qui « saisit l’épée au lieu de la plume »15 et « livre bataille au lieu de rédiger des notes »16.

Nul doute donc à ce que ce soit la politique qui détermine ici les desseins, les motifs et les fins de la guerre. Dans ces circonstances, celle-ci ne serait précisément rien d’autre qu’un moyen, parmi plusieurs autres disponibles telle la diplomatie par exemple, pour atteindre les objectifs fixés par la politique. Un moyen car contrairement à la politique qui repose sur le dialogue, sur la ruse et sur la modération, la guerre suppose quant à elle, et c’est très précisément là que résiderait selon Clausewitz son caractère spécifique, l’usage de la violence, de la force et de la démesure. La guerre est en effet une manière de régler les différends « par le sang » et, pour notre stratège, c’est d’ailleurs uniquement « en cela qu’elle diffère des autres conflits »17.

En tant qu’instrument de la politique, et sous peine de céder trop facilement le terrain à l’irrationnel nourri par les passions et le hasard, la guerre ne pourrait dès lors pas être pensée indépendamment d’un entendement politique subjectif équivalent pour Clausewitz à l’« intelligence de l’État personnifié »18 et correspondant plus ou moins à ce que nous entendons aujourd’hui en évoquant la notion d’intérêt national19. Dans ce contexte, la politique exprimerait «le point de vue le plus élevé de la conduite de la guerre »20; laquelle devrait tout mesurer à son « aune »21. Ainsi, dans cette définition de la guerre qui vaut à toutes fins pratiques comme une « décision par les armes »22, Clausewitz suggère-t-il l’existence d’une « séparation rigoureuse entre paix et guerre »23.

Pourtant, si l’on peut dire qu’il y a effectivement pour Clausewitz une grammaire de la guerre (comme il y aurait une grammaire de la diplomatie) distincte de celle de la politique – d’où découle l’idée qu’il existe une séparation rigoureuse entre la paix et la guerre – l’idée même d’une continuité entre guerre et politique ne signale-t-elle pas également, comme il le note d’ailleurs lui-même24, que l’une et l’autre participent au fond d’une même « logique »? Cette logique indiquerait que tant la guerre que la politique s’inscrivent finalement au sein d’une unité qui ne serait autre que ce « duel à une plus vaste échelle » qui voit s’affronter les États, les nations et les gouvernements25.

C’est précisément dans le contexte d’un tel affrontement que surviendrait le risque de voir la guerre prendre le dessus sur la politique en montant aux extrêmes. Glissant vers la forme absolue d’une « lutte à la vie à la mort »26 provoquée par un « déchaînement des passions » ou par une « indétermination de la volonté »27, une telle montée aux extrêmes traduirait alors l’incapacité dans laquelle se trouverait la politique de parvenir à contrôler cet instrument qu’est la guerre. Dans une telle situation, qui pour Clausewitz demeure plausible malgré son caractère exceptionnel et où, nourrie par les seuls «motifs» d’une guerre qui finirait par « suivre ses propres lois comme une chose tout à fait indépendante »28, l’hostilité deviendrait pure et la violence extrême, « le point de vue politique disparaîtrait »29 et la guerre prendrait finalement « la place de la politique »30.

Tel semble être l’horizon sur lequel ouvrirait, au-delà de la subordination de la guerre à la politique, l’idée d’une continuité entre la guerre et la politique qui donne néanmoins à cette dernière le privilège de la victoire. Mais de quelle victoire s’agit-il au juste? Car, malgré sa résistance à vouloir explorer les conséquences d’un renversement de la formule et donc à vouloir explorer la possibilité d’une « subordination » de la politique à la guerre – il s’agirait là, selon Clausewitz, d’une pure absurdité31 – et malgré son insistance à faire de la paix un aboutissement qui met effectivement « un terme aux affaires de guerre »32, la ressemblance entre la guerre et la politique que le stratège suppose en avançant l’idée d’une continuité n’ouvre-t-elle pas également la porte à certaines implications dont celle nous autorisant à concevoir l’hypothèse d’un renversement de ce rapport de subordination de la guerre à la politique? En effet, si la guerre conserve effectivement une certaine spécificité en usant de la violence armée, le fait demeure qu’une telle action suppose également, du fait de sa subordination à la politique, un champ, des acteurs et parfois même des objectifs qui, eux, seraient à proprement parler « identiques »33. Insistant que la guerre n’est qu’un nouveau moyen qui s’ajoute à ceux dont disposent les États, les nations et les gouvernements dans les relations politiques qu’ils entretiennent les uns avec les autres, Clausewitz entend affirmer du même coup :

que la guerre elle-même ne fait pas cesser ces relations politiques, qu’elle ne les transforme pas en quelque chose de tout à fait différent, mais que celles-ci continuent à exister dans leur essence, quels que soient les moyens dont elles se servent, et que les fils principaux qui courent à travers les événements de guerre et auxquelles elles se rattachent ne sont que les linéaments d’une politique qui se poursuit à travers la guerre jusqu’à la paix.34

À la lumière de telles circonstances, c’est-à-dire de ce que les « linéaments » de la politique se « cachent » au cœur même de la guerre35, ne pourrions-nous pas inférer que toute vie politique est en dernière instance traversée par un conflit et qu’au lieu que ce soit la politique qui donne son sens à la guerre, ce ne puisse finalement être la guerre, laquelle ne serait au fond qu’une manière un peu « plus exigeante de négocier »36, qui donne son sens à la politique?

Une telle conclusion ne serait pas valide selon Clausewitz puisque la véritable politique, la seule qui justement serait en mesure d’engendrer la guerre telle qu’il la comprend, est celle qui existe entre les États, les nations et les gouvernements. Dans ces circonstances, vouloir renverser la formule consisterait à adopter une autre définition de la politique qui inclurait par exemple la politique intérieure et qui, à l’image de la Révolution française, mettrait en scène une vie civile faite d’un foisonnement « d’activités, d’intrigues et d’affrontements, de luttes et de succès, de crainte et d’espoir, de terreur et de joie ». Pour Clausewitz, cela signifierait inclure dans notre compréhension de la politique, ce qui ne serait en fait qu’une «anomalie» ou même qu’une « déviation morbide de l’action ».37

2. Le renversement de la formule de Clausewitz

Pour Michel Foucault, précisément parce qu’il faudrait cesser de concevoir la politique à la seule lumière d’un modèle juridique étroitement associé au principe de souveraineté et ce faisant à la « genèse idéale » de cet État territorial revendiquant « pour son propre compte », selon la formule de Max Weber, « le monopole de la violence physique légitime »38, il conviendrait d’adopter une autre définition de celle-ci conduisant à renverser la formule de Clausewitz qui fait de la guerre un pur « acte de souveraineté ».39 Ce qu’il faudrait plutôt envisager, c’est la possibilité que la politique ne soit finalement rien d’autre que la guerre continuée sous une autre forme; soit envisager faire de la politique un pur acte de guerre. Dès lors, libérer la philosophie politique du principe de souveraineté, c’est-à-dire couper la tête du roi une fois pour toutes40, de manière à re-politiser l’espace dépolitisé qui entourerait jusqu’alors le souverain, et donc envisager l’hypothèse d’un renversement de la formule de Clausewitz, signifieraient fondamentalement trois choses.41

Cela signifierait d’abord « que les rapports de pouvoir […] ont essentiellement pour point d’ancrage un certain rapport de force établi à un moment donné, historiquement précisable, dans la guerre et par la guerre ». Dans ces circonstances, et si l’on peut effectivement penser que «le pouvoir politique arrête la guerre», cela signifierait surtout que cette démarche de pacification « aurait pour rôle de réinscrire perpétuellement ce rapport de force, par une sorte de guerre silencieuse » qui traverserait de part en part le corps social. Par conséquent, envisager une telle hypothèse signifierait ensuite qu’« à l’intérieur de cette “paix civile”, les luttes politiques, les affrontements à propos du pouvoir, avec le pouvoir, pour le pouvoir, les modifications des rapports de force […] tout cela […] ne devrait être interprété que comme la continuation de la guerre ». Ainsi l’histoire de la paix et des institutions sur lesquelles celle-ci repose ne constituerait en pratique qu’un « déplacement de la guerre elle-même» qui persisterait, mais sous une forme moins absolue parce qu’apparemment moins violente. Dès lors, envisager cette hypothèse signifierait enfin que « la décision finale ne peut venir que de la guerre, c’est-à-dire de l’épreuve de force où les armes, finalement, devront être juges ». En somme, la dernière bataille, signalant la fin de la guerre, marquerait pour Foucault la suspension définitive de l’exercice du pouvoir. Autrement dit, cette victoire marquerait « la fin du politique » et non pas simplement la fin de la guerre en tant que telle.42

Si la guerre représente donc effectivement la « nudité des rapports de force », alors la politique telle que se la représente idéalement la philosophie politique à l’horizon du principe de souveraineté, c’est-à-dire à l’horizon de la paix et des institutions sur lesquelles cette paix repose, ne serait rien de plus que le masque dissimulant la permanence de tels rapports de force que le pouvoir tenterait simplement, de cette manière, de rendre plus « acceptables » ou, encore, plus « tolérables ».43 Derrière cette pseudo victoire sur la violence quotidienne et sur la guerre privée qui témoigne, au sortir du Moyen Âge, de la concentration entre les mains d’un pouvoir central des pratiques et des institutions de guerre qui se virent déplacées à la frontière, c’est-à-dire « aux limites extérieures des grandes unités politiques »44, il ne s’agirait en pratique que de « l’éviction du fait de la domination et de ses conséquences » dans les conceptions et les représentations que nous nous faisons de la paix.45

C’est pourquoi il conviendrait plutôt, selon Foucault, d’approfondir l’hypothèse consistant à tenter de penser la politique en fonction des rapports de force qui la traversent constamment et donc tenter d’identifier le « principe d’intelligibilité de l’ordre, de l’État, de ses institutions et de son histoire » dans « la confusion de la guerre » et dans « la boue des batailles »46 plutôt que dans ce qui, sous la forme du droit, n’en représente selon toute vraisemblance que l’apparente conjuration visant précisément à dissimuler le fait que « dans le moindre de ses rouages », la paix fait encore et toujours « sourdement la guerre ».47

À première vue, et bien qu’il ne le mentionne pas, Foucault semble ici étonnamment proche de la réflexion d’un Carl Schmitt pour qui « ce sont, en effet, toujours des groupes humains concrets qui, au nom du Droit ou de l’Humanité ou de l’Ordre ou de la Paix, luttent contre d’autres groupes humains concrets ».48 Pour Schmitt comme pour Foucault, à l’arrière-plan de ces contrats qui sont réputés fonder la politique moderne, il y aurait en effet toujours quelque chose comme « une éthique de la guerre civile ».49 Aussi bien pour l’un que pour l’autre, c’est donc la guerre qui donnerait finalement son sens à la politique.

Mais contrairement à Schmitt qui rejoint ici Clausewitz, Foucault ne raisonne cependant pas en terme d’intérieur et d’extérieur et il ne cherche donc pas à reconduire la guerre aux frontières extérieures de l’État, là où seule se jouerait la politique au « sens plein »50. Foucault ne raisonne pas non plus, comme Schmitt tend à le faire, à partir d’un modèle apparemment « normal » de la vie politique qui risquerait simplement, mais pour ainsi dire à tout moment, de retomber dans la guerre civile ou encore dans un état d’exception prenant plus ou moins la forme d’une guerre civile légale51. Aussi les rapports de force qui traverseraient le corps social lui-même ne pourraient-ils pas être ramenés pour Foucault à une forme de guerre civile larvée. Pour celui-ci, en effet, la guerre apparaît très précisément comme « ce qui permet au droit d’exister »52 alors que pour Schmitt tout au contraire la guerre civile apparaît essentiellement comme la suspension du droit, laquelle traduirait « la désintégration de l’État »53.

Aussi, en cherchant, à l’instar de Schmitt, à déchiffrer la guerre sous la paix, Foucault s’en écarte-t-il néanmoins puisque celui-ci persiste justement à apprécier le renversement du rapport entre la politique et la guerre à la lumière du modèle juridique de la souveraineté. C’est-à-dire que contrairement à Foucault, Schmitt recherche toujours le pouvoir du côté de son centre ou de sa tête, précisément du côté de la décision, c’est-à-dire là où se décide, en toute légalité, la « situation exceptionnelle »54. Exception bouleversant et suspendant l’ordre politique, certes, mais « en vue du rétablissement » de cet ordre et donc précisément en vue du retour à une situation normale qui, pour Schmitt, demeure « la condition nécessaire pour que les normes du droit soient reconnues »55.

Foucault, tout au contraire, cherche explicitement à se soustraire à ce principe de souveraineté puisque la question ne consiste justement pas pour lui à s’interroger pour déterminer « au niveau de l’intention ou de la décision » qui constituent ici l’horizon de Schmitt, « qui donc a le pouvoir »56 et de quelle manière ce pouvoir s’organise-t-il, pour ainsi dire mécaniquement, « autour et à partir de l’existence physique du souverain »57. Enfin, alors que pour Schmitt le concept de politique ne se prête guère à une interprétation « pluraliste » dans la mesure où la nature spécifique du politique – qui ne renvoie pas ici à un domaine d’activité particulier mais au « degré d’intensité d’une association ou d’une dissociation d’êtres humains »58 – ne pourrait pas être véritablement appréciée ou même « prise en considération »59. Pour Foucault, bien au contraire, les rapports de pouvoir ne seraient tout simplement pas en position « d’extériorité » ou en position de « superstructure »60 face à d’autres types de rapports sociaux et ce serait précisément pour cette raison qu’il conviendrait de lire l’ensemble de ces rapports immanents à la lumière d’un « ordre de bataille »61.

3. Guerre et pouvoir

Au-delà de la proximité qui existe peut-être entre Schmitt et Foucault quant au rapport quasi organique qu’entretiennent la guerre et la politique, la recherche de Foucault s’inscrit donc assez nettement ici dans la continuité de ses recherches, contemporaines du cours de 1976, portant sur l’analytique du pouvoir. À bien des égards, elle en représente d’ailleurs l’autre volet, le volet du pouvoir stratégique plutôt que le volet du pouvoir disciplinaire. Les deux volets stratégique et disciplinaire – qui correspondent ici à qu’il identifiait comme un schéma guerre-répression opposé au classique schéma contrat-oppression – s’enchaînant pour ainsi dire l’un dans l’autre tels les deux bras armées du pouvoir qu’aussi bien le droit que la vérité représentent foncièrement pour lui.

Guerre et répression constitueraient en quelque sorte pour Foucault les deux axes autour desquels le pouvoir moderne se serait finalement articulé : l’un réprimant, l’autre guerroyant; l’un s’appuyant sur la production de normes de vérité, l’autre s’appuyant sur la production de règles de droit et tous deux s’offrant, sur un mode qui apparaît éminemment polémique, comme l’ « effet de la simple poursuite d’un rapport de domination »62. Dans cette face stratégique, le pouvoir se serait exercé selon Foucault derrière le voile du droit et sur la base d’un « modèle juridique de la souveraineté ». Lequel, à l’instar du modèle disciplinaire et du voile de la vérité, aura servi de « code » à partir duquel ce même pouvoir se sera présenté et aura à toute fin utile prescrit « qu’on le pense », tout en masquant par ailleurs les « faits et procédures » qui sont les siens63.

L’intelligibilité d’un tel pouvoir décentré ne renverrait pas tant à un objet déterminé et susceptible de faire l’objet d’une théorisation, qu’au « domaine spécifique que forment les relations de pouvoir » et à ce que Foucault caractérisait comme une analytique du pouvoir64, c’est-à-dire ces mécanismes sur lesquels reposerait l’exercice du pouvoir. Dans ces circonstances, l’analyse du cours de 1976 ne porterait pas tant sur la guerre à proprement parler que sur la forme guerre ainsi que sur le jeu stratégique que cette dernière suppose chez celui qui réfléchit, parle ou agit dans la perspective d’une permanence de la guerre65. Cette permanence de la forme guerre comprise « au-delà et en deçà de la bataille »66 n’illustrerait rien d’autre que la généralisation des rapports de pouvoir lorsque ceux-ci sont lus hors des codes politiques conventionnels que représentent la loi, la norme et la souveraineté. C’est donc la « trame épistémologique »67 que représente cette généralisation comme instrument d’analyse de l’histoire du pouvoir qui retient l’attention de Foucault.

Ce qu’il s’agit pour lui de mettre en évidence par l’intermédiaire d’une telle analytique du pouvoir politique comme continuation de la guerre, c’est que l’on ne fait pas tant « la guerre pour écrire l’histoire, mais qu’on écrit l’histoire pour faire la guerre »68. L’histoire ne serait fondamentalement que le calcul d’un rapport de force et, au-delà de la dichotomie des vainqueurs et des vaincus, elle ne serait qu’un reflet de la fragmentation du corps social pris dans les rets d’une guerre permanente et généralisée qui traverserait « tout le corps social et toute l’histoire du corps social »69.

C’est ainsi pour se déprendre des fils tissés par le modèle juridico-politique du pouvoir, c’est-à-dire pour s’écarter d’une lecture de l’histoire qui se déroule à l’intérieur d’un État qui aurait repoussé la violence à ses frontières et qui serait donc pacifié, que Foucault avance l’hypothèse de la politique comme pur acte de guerre. Après tout, le pouvoir n’est rien d’autre pour lui que le nom que l’on « prête à une situation stratégique complexe dans une société »70. Si, de manière assez conventionnelle, la guerre apparaît bel et bien comme la « grille d’intelligibilité » par excellence du bouleversement et de la suspension de l’ordre politique, ne pourrait-elle pas également, comme le suggère la lecture que Foucault fait de Boulainvilliers, nous « permettre de déterminer le rapport de force qui soutient en permanence un certain rapport de droit »71?

Après avoir été pour la philosophie politique un objet politique, les rapports de pouvoir apparaissent ici comme un objet historique au sein duquel la guerre constituerait la « matrice de vérité », soit tout à la fois « ce à partir de quoi parle le discours et ce dont il parle »72. Aussi l’histoire philosophico-politique, par exemple celle que raconte Thomas Hobbes dans le Léviathan ou, plus proche de nous, celle que raconte John Rawls dans son Theory of Justice, ne serait l’une et l’autre rien d’autre que l’histoire du pouvoir que le pouvoir se raconte à lui-même sur lui-même. Ainsi le discours historique devient-il dans ces circonstances l’une de ces « pièces de stratégies »73 permettant de dire le droit et la paix tout en continuant, mais subrepticement, à faire la guerre. À l’inverse de cette lecture d’une politique qui apparaît donc « sans histoire »74 , Boulainvilliers aurait proposé une politique de l’histoire comme domination en déchiffrant les luttes qui traverseraient « toutes les institutions du droit et de la paix »75. La guerre racontée par l’histoire du droit et de la paix ne serait autre ici que « l’histoire traversée par cette guerre qu’elle raconte »76.

À l’opposé d’un « chant du pouvoir sur lui-même »77, Foucault distingue donc chez Boulainvilliers un perpétuel rapport de force qui représenterait quelque chose comme la substance même de l’histoire. C’est ce « rapport historiquement indéfini, indéfiniment épais et multiple de domination »78 qui, en pratique, révèle que l’on ne serait jamais ni dans le droit ni dans la souveraineté en tant qu’horizon vraisemblablement idéalisé de la paix et de l’armistice politique. En effet, puisque, par principe, l’on n’échappe pas aux rapports de force et donc à la domination, l’on ne sortirait pas non plus de l’histoire qui prend précisément naissance dans l’âme discordante du politique. Bien au contraire des prétentions de la philosophie politique à occuper une position « d’arbitre, de juge [ou] de témoin universel »79, l’histoire n’offrirait finalement rien d’autre pour Foucault qu’une « guerre qu’elle fait elle-même ou qui passe par elle »80.

Conclusion

Que penser de cette approche de la politique comme rapport de guerre? L’hypothèse est-elle féconde eu égard à la situation dans laquelle se trouverait la philosophie politique évoquée au départ quant aux limites d’une réflexion sur la politique qui en supprimerait invariablement l’âme discordante? Est-il suffisant ici de simplement renverser le rapport entre guerre et politique et de subordonner cette dernière à la première? Est-ce que ce renversement de la formule de Clausewitz ne le fait pas retomber dans une vision éminemment belliqueuse de la vie politique où la guerre traduirait une hostilité radicale que, contrairement à Schmitt, Foucault hésitera à admettre81? Plus fondamentalement, ce renversement ne conduit-il pas Foucault à perdre de vue tant la spécificité de la guerre que celle de la politique? Peut-on, en effet, réduire l’action politique à une forme de guerre82 sans par ailleurs risquer, en faisant de la guerre le « trait permanent des rapports sociaux » et en marquant « du sceau de la guerre le corps social tout entier »83, de perdre de vue la spécificité même du « politique »84?

Ces interrogations sont importantes et Foucault ne nous offre apparemment guère de piste permettant d’y répondre. Mais il s’agit bien moins ici des limites de sa propre pensée que des limites mêmes de la pensée politique. Ce que ces interprétations négligent en effet, et c’est ce que Foucault met plus nettement en évidence dans sa tentative de réfléchir sur un renversement du rapport entre guerre et politique sans pourtant vouloir sur cette base développer une véritable théorie du pouvoir, c’est que les conflits et les différends surgissent de la vie politique et qu’ils animent plutôt qu’ils n’en sont une forme d’antithèse que celle-ci se devrait impérativement de dépasser pour exister85. Ainsi, et dans un contexte largement dominé par une doxa libérale faisant de la réconciliation et du consensus un véritable standard moral en matière de philosophie politique, la question telle que la pose Foucault consisterait à penser la politique sans constamment chercher à « éviter [...] les questions [...] sujettes à controverses »86 qui semblent constamment faire échouer ces tentatives de réconciliation et sans cesse éclater les consensus.

Éviter ces questions, c’est rendre possible de se représenter philosophiquement un ordre que l’on estimera potentiellement consensuel, certes, mais au prix très élevé d’une neutralisation par la pensée elle-même des rapports de pouvoir qui l’ont précisément rendu nécessaire; rapports de pouvoir qui, en resurgissant, finissent un jour ou l’autre par fragiliser la réconciliation. C’est cette aporie à laquelle est confrontée la philosophie politique, c’est-à-dire l’incapacité de se représenter philosophiquement le conflit et le différend autrement qu’en le neutralisant politiquement, que Foucault fait pour ainsi dire paraître au grand jour en renversant le rapport entre guerre et politique.

NOTES

1. Michel Foucault, Histoire de la sexualité, volume 1 : La volonté de savoir, Paris, Gallimard, 1976, p. 135.

2. Michel Foucault, « Il faut défendre la société », Cours au Collège de France. 1976, Paris, Hautes Études/Gallimard/Seuil, 1997, p. 44.

3. Roberto Esposito : « Réflexions sur l’impolitique », Philosophie, 51, 1996, p. 73.

4. Esposito : « Réflexions sur l’impolitique », p. 71.

5. Sur la pensée grecque, consulter Nicole Loraux : La cité divisée. L’oubli dans la mémoire d’Athènes, Paris, Payot, 1997. Sur la pensée moderne, consulter Chantal Mouffe : Le politique et ses enjeux, Paris, La Découverte/M.A.U.S.S., 1993. Nous développons cette hypothèse en rapport avec la réflexion que consacre John Rawls aux relations internationales dans Jean-François Thibault, « L’interprétation limitée du politique dans “The Law of Peoples” de John Rawls », Politique et Sociétés, 20, 2-3, 2001, p. 159-179.

6. Consulter Étienne Tassin : Un monde commun. Pour une cosmo-politique des conflits, Paris, Seuil, 2003.

7. Carl von Clausewitz, De la guerre [1832-1834/1952], trad. de Denise Naville, Paris, Minuit, 1955, p. 558.

8. Clausewitz, De la guerre, p. 67.

9. Ibid., p. 145.

10. Ibid., p. 59.

11. Ibid., p. 66-67.

12. Ibid., p. 710.

13. Ibid., p. 145.

14. Ibid., p. 703-704.

15. Ibid., p. 710.

16. Ibid., p. 706.

17. Ibid., p. 145.

18. Ibid., p. 68.

19. Raymond Aron : Penser la guerre, Clausewitz, volume 2 : L’âge nucléaire, Paris, Gallimard, 1976, p. 227.

20. Clausewitz, De la guerre, p. 706.

21. Ibid., p. 59, 710.

22. Ibid., p. 79.

23. Raymond Aron, Penser la guerre, Clausewitz, volume 1 : L’âge européen, Paris, Gallimard, 1976, p. 109-110, 435.

24. Clausewitz, De la guerre, p. 703.

25. Ibid., p. 51, 703.

26. Ibid., p. 705.

27. Aron, Penser la guerre, volume 1, p. 184, 197.

28. Clausewitz, De la guerre, p. 66-68.

29. Ibid., p. 705.

30. Ibid., p. 66.

31. Ibid., p. 706.

32. Ibid., p. 71.

33. Emmanuel Terray: Clausewitz, Paris, Fayard, 1999, p. 100.

34. Ibid., p. 703.

35. Ibid., p. 145.

36. Ibid., p. 685.

37. Carl von Clausewitz : Écrits et lettres, trad. de Marie-Louise Steinhauser, Paris, Gallimard, 1976, pp. 406-407, cité par Terray, Clausewitz, p. 103.

38. Michel Foucault, « Résumé de cours [1976] », in Foucault, Il faut défendre la société, p. 239. Max Weber : Le savant et le politique [1917-1919], trad. de Julien Freund, Paris, Plon, 1959, p. 125. Les italiques sont dans le texte.

39. Gérard Mairet : Le principe de souveraineté. Histoire et fondements du pouvoir moderne, Paris, Gallimard, 1997, p. 119.

40. Foucault, La volonté de savoir, p. 117.

41. Je laisse ici de côté l’historiographie dans laquelle s’engage Foucault, c’est-à-dire sa plongée dans un courant qu’il nomme l’historicisme politique, pour plutôt m’intéresser à ses remarques analytiques concernant la relation entre guerre et politique. Sur cette historiographie, on consultera Franck Lessay: « Joug normand et guerre des races : de l’effet de vérité au trompe-l’œil », Cités, 2, 2000, p. 53-69.

42. Foucault, « Il faut défendre la société », p. 16-17.

43. Foucault, La volonté de savoir, p. 190, 113.

44. Ibid., p. 41-42.

45. Ibid., p. 24.

46. Ibid., p. 40-41.

47. Ibid., p. 43.

48. Carl Schmitt : La notion de politique - Théorie du partisan [1932-1963], trad. de Marie-Louise Steinhauser, Paris, Calmann-Lévy, 1972, p. 114. Sur les liens entre Foucault et Schmitt, consulter Terray, Clausewitz, p. 110; Mika Ojakangas: «Sovereign and Plebs: Michel Foucault Meets Carl Schmitt», Telos, 119, 2001, pp. 32-40; Beatrice Hanssen: Critique of Violence. Between Poststructuralism and Critical Theory, Londres, Routledge, 2000, p. 97-157; Miguel Vatter, « La politique comme guerre: formule pour une démocratie radicale?», trad. de Badr El Fekkak, Multitudes, 9, mai-juin 2002. Consulté en ligne à l’adresse suivante : http://multitudes.samizdat.net/article.php3?id_article=35; Marie Gaille-Nikodimov : « L’ordre conflictuel du politique : une formule ambiguë. Schmitt et Foucault, lecteurs de Machiavel », Multitudes, 13, été 2003. Consulté en ligne à l’adresse suivante : http://multitudes.samizdat.net/article.php3?id_article=1108.

49. Carl Schmitt, Parlementarisme et démocratie [1923], traduit par Jean-Louis Schlegel, Paris, Seuil, 1988, p. 150.

50. Schmitt, La notion de politique, p. 45.

51. Sur cette notion de « guerre civile légale », on consultera Giorgio Agamben, « Réflexion sur l’état d’exception », Le Monde, 12 décembre 2002 ainsi que Giorgio Agamben, État d’exception, Homo Sacer, II, 1, traduit par Joël Gayraud, Paris, Seuil, 2003.

52. Consulter Diego Venturino, « À la politique comme à la guerre? À propos des cours de Michel Foucault au Collège de France (1976) », Storia della Storiografia, 23, 1993, p. 138.

53. Schmitt, La notion de politique, p. 88. Sans compter que, pour Schmitt, « les troubles » qui se développent à l’interne ne seraient pas susceptibles de voir se développer une « discrimination de l’ami et de l’ennemi » (Ibid., p. 67). Consulter Gaille-Nikodimov, « L’ordre conflictuel du politique ».

54. Carl Schmitt, Théologie politique. Quatre chapitres sur la théorie de la souveraineté [1922] et Théologie politique II. Une légende : la liquidation de toute théologie politique [1969], traduit par Jean-Louis Schlegel, Paris, Gallimard, 1988, p. 15.

55. Schmitt, La notion de politique, p. 87. Consulter également Étienne Balibar, « Le Hobbes de Schmitt, le Schmitt de Hobbes », dans Carl Schmitt, Le Léviathan dans la doctrine de l’État de Thomas Hobbes. Sens et échec d’un symbole politique [1938], traduit par Denis Trierweiler, Paris, Seuil, 2002, p. 38.

56. Foucault, « Il faut défendre la société », p. 25.

57. Ibid., p. 32.

58. Schmitt, La notion de politique, p. 79.

59. Ibid., p. 86.

60. Foucault, La volonté de savoir, p. 123-124.

61. Foucault, « Il faut défendre la société », p. 41.

62. Ibid., p. 17.

63. Foucault, La volonté de savoir, p. 116.

64. Ibid., p. 109.

65. Foucault, « Il faut défendre la société », p. 145. Consulter également Daniel Defert, « Le “dispositif de guerre” comme analyseur des rapports de pouvoir », dans Jean-Claude Zancarini (textes réunis par), Lectures de Michel Foucault, volume 1 : À propos de « Il faut défendre la société », Lyon, ENS Éditions, 2001, p. 63.

66. Foucault, « Il faut défendre la société », p. 141.

67. Paolo Napoli, « Michel Foucault et les passions de l’histoire [1993] », traduit par Judith Revel, Futur antérieur, 18, 1993/4. Consulté en ligne à l’adresse suivante : http ://multitudes.samizdat.net/article. php3?id_article=537

68. Ibid.

69. Foucault, « Il faut défendre la société », p. 143-144.

70. Foucault, La volonté de savoir, p. 123.

71. Foucault, « Il faut défendre la société », p. 144.

72. Ibid., p. 146.

73. Consulter Lawrence Olivier, Michel Foucault. Penser au temps du nihilisme, Montréal, Liber, 1995, p. 119.

74. L’expression est celle de Loraux, La cité divisée, p. 49.

75. Foucault, « Il faut défendre la société », p. 153.

76. Ibid., p. 155.

77. Ibid.

78. Ibid., p. 96.

79. Michel Foucault, « Questions à Michel Foucault sur la géographie [1976] », dans Michel Foucault, Dits et écrits, volume III : 1976-1979, Paris, Gallimard, 1994, p. 29.

80. Foucault, « Il faut défendre la société », p. 154.

81. Michel Foucault, « L’œil du pouvoir [1977] », dans Michel Foucault, Dits et écrits, p. 206. Hanssen (Critique of Violence, p. 157) met bien en lumière les termes de cette tension qui traverse la pensée de Foucault.

82. Venturino, « À la politique comme à la guerre ? », p. 151.

83. Foucault, « Il faut défendre la société », p. 140.

84. Mark Neocleous, « Perpetual War, or “War and War Again”. Schmitt, Foucault, Fascism », Philosophy & Social Criticism, 22, 2, 1996, p. 47-66.

85. Ainsi s’explique le glissement théorique qui, de la problématique trop simpliste de la guerre, conduira rapidement Foucault à privilégier dans les années suivantes la problématique plus complexe et aussi plus riche de la gouvernementalité. Consulter Michel Foucault, Sécurité, territoire, population, Cours au Collège de France. 1977-1978, Paris, Hautes études/Gallimard/Seuil, 2004; Michel Foucault, Naissance de la biopolitique, Cours au Collège de France. 1978-1979, Paris, Hautes études/Gallimard/Seuil, 2004.

86. Selon la formule de John Rawls, « La théorie de la justice comme équité : une théorie politique et non pas métaphysique [1985], traduit par Catherine Audard, dans John Rawls, Justice et démocratie, Paris, Seuil, 1993, p. 214.