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Immigration et misère ?
liste de diffusion Antenne ASSEDIC
Infos du 14 janvier 98

Les migrations des populations sont dues à des raisons différentes :
- Il y a les migrations dues aux cataclysmes, aux guerres (les déplacements de population pendant les dernières guerres furent importantes; en Afrique, cela touche aujourd'hui des millions de réfugiés).

- Il y a les migrations dues aux déplacements forcés, l'exemple le plus fort est celui de la traite des noirs africains vendus comme esclaves aux Amériques et aux Antilles ; il y a eu aussi les déplacements important en
URSS sous le régime stalinien .

- Il y a les migrations dues à la misère, les gens migrent parce que la terre ne peut plus les nourrir, parce que les conditions de vie ne sont plus supportables. L'histoire est pavée de ces migrations. Ces migrations ne sont pas le résultat de projets collectifs. Elles passent par des myriades de projets individuels. C'est bien cette dernière catégorie qui nous concerne principalement en France et en Europe. Or aujourd'hui tous ceux et celles qui ont un minimum de regard objectif sur cette migration s'accordent pour dire que, régulière ou clandestine, rien ne peut l'arrêter.

Nous envisageons dans ce texte de comprendre quelques mécanismes des migrations dues à la misère et de voir les caractéristiques nouvelles ou leur évolution, ainsi que les perspectives que nous pouvons en tirer.

Ce qui est spécifique à ces migrations depuis 2 ou 3 siècles, c'est qu'elles ont été étroitement liées au développement du capitalisme. Les gens migraient dans les pays où le capitalisme se développait. L'exemple le plus fort a été sans doute la migration des européens vers les Amériques, mais aussi entre les pays européens. Le capitalisme était loin d'avoir atteint les limites de son développement tant quantitativement que géographiquement telles qu'on les connaît aujourd'hui. Cela ne veut pas dire pour autant que les gens s'installaient dans le bonheur. C'était souvent la misère, la faim, la maladie, ... Mais parce que le capitalisme qui se développait dans ces pays avait besoin de main d'»uvre, la perspective de trouver du travail et de s'enrichir allait au-delà de l'espoir, c'était une réalité.

Cela ne veut pas dire qu'il n'y avait pas de conflits entre les immigrés et les autochtones qui leur reprochaient de casser les salaires, d'accepter n'importe quoi.
Cela ne veut pas dire qu'il n'y avait pas de racisme, de xénophobie.

Aux USA, le développement était très communautaire, mais beaucoup de primo-arrivants s'y sont fait une place malgré tout.
Par le travail, les migrants s'intégraient, faisaient souche et enrichissaient la culture. Cette situation a duré jusque dans les années 60. Les deux périodes de reconstruction après les deux guerres mondiales ont été une pompe aspirante de l'immigration à la fois volontaire et forcée.
Certes, il y a eu des périodes de récession dont les immigrés ont été les premiers à faire les frais. On peut penser au renvoi des polonais dans leur pays pendant la crise des années 20. On était loin pour autant de la création de l'Europe des barbelés qui se met en place depuis 1974.

La différence aujourd'hui et qui se fait de plus en plus nette depuis 25 ans, c'est que la période d'expansion a atteint ses limites. Le travail n'est plus essentiel pour le capital pour deux raisons :

Premièrement le capital financier a pris un tel poids qu'il acquiert une certaine autonomie face au travail et qu'il génère des profits par lui-même sans le travail, En second lieu l'augmentation de la productivité du travail
détruit le travail lui-même.

Il n'y aura plus de conquêtes de l'Ouest, (sauf à nous envoyer sur Mars ou Vénus) les limites de la planète elle-même sont devenues pour l'instant les limites du capitalisme. Le mythe de la croissance infinie
s'est effondrée et a montré ses ravages écologiques, de santé, ...

Aujourd'hui, les migrants partent là où il y a de l'argent, là où il y a un mode de vie meilleur que le leur. Aussi, la migration ne peut plus être associée aux conquêtes du capitalisme, au développement de la croissance, mais doit se comprendre dans le contexte mondial de la domination du Nord sur le Sud ou l'Est. En ce sens l'immigration est structurelle de notre monde contemporain et le restera tant que les rapports de force impérialistes ne seront pas modifiés. On comprend que vouloir lier régularisation et travail devienne une gageure. Comment exiger des immigrés de trouver du travail pour avoir une carte de séjour quand 5 millions de personnes ne peuvent en trouver (si on se réfère aux chiffres donnés par Chevénement). La migration pose la question du partage des richesses. Hier, cela passait par la rémunération au travers du travail. Travail qui permettait aussi aux patrons de s'enrichir toujours davantage.

Aujourd'hui, le travail salarié et les différentes allocations qui lui étaient liées (Sécurité sociale, Allocations chômages, familiales, Etat providence, ...) ne peuvent plus être ni le médiateur de ce partage des richesses, ni celui de l'intégration.

Les dominants de nos pays essaient de gérer la situation en vue d'une «préservation » du niveau de vie occidental et du maintien de leur situation de privilégié. En ce sens l'Europe est un camp de consommation. Le prix à payer, c'est :

-l'utilisation des clandestins pour faire baisser le coût de la main d'oeuvre (cf l'exemple du Grand Stade),
- la fermeture des frontières,

- la suspicion et la répression pour les étrangers vivants en France et en Europe,

- le maintien de la misère du Sud ou de l'Est,

- les noyades à Gibraltar,

- les clandestins qu'on pousse par-dessus bord dans certains bateaux,

- les trafics en tous genres pour passer les frontières,
- etc...

La source de la misère ne vient pas de l'immigration, mais du capitalisme. Combattre la misère passe par d'autres formes de solidarité qui sont à inventer ou à maintenir quand elles existent.

Les gens d'ici sont d'ici !

Personne n'est illégal !

Georges Birault et Philippe Coutant Nantes le 16 Octobre 1997


Origine : http://www.internatif.org/antenneassedic/0114/18.html