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Origine : http://blog.jeanlucraymond.net/post/2007/04/04/Isabelle-Sorrente-decrypte-le-happy-slapping
Physicienne et romancière, Isabelle Sorrente s'est fait une
spécialité d'analyser dans ces écrits les travers
de notre société moderne. Dans le numéro d'avril
2007 de Philosophie Magazine (n°8), elle s'intéresse
au phénomène du happy slapping.
De quoi s'agit-il ? Un complot destiné à filmer l'agression
physique d'une personne sans qu'elle ne soupçonne ni l'agression,
ni son tournage. Le terme s'applique à des gestes d'intensité
variable, de la simple vexation aux violences les plus graves, y
compris les violences sexuelles. Le terme tire son origine de (en)
happy, joyeux ou heureux, et de (en) slapping, donner une bonne
claque.
Isabelle Sorrente tente de décrypter le happy slapping avec
un article intitulé "Jeux de mains, jeux de vilains"
dont voici un extrait :
"Aucune compassion dans ces images. L'agresseur - le slapper
- n'apparaît pas. Invisible et tout-puissant, il devient la
force brutale du hasard, la légende urbaine qui s'abat sur
sa victime. Cette victime n'est plus qu'une "tête à
claques", au visage flou et déformé : une image,
dont le ridicule légitime a posteriori l'agression. C'est
la même sensation que l'on éprouve dans certaines émissions
de télévision, dans lesquelles les invités
sont transformés en "têtes à claques"
par les animateurs, comme pour démontrer une différence
radicale, une infériorité qui légitimerait
après coup l'humiliation.
La force invisible et victorieuse du slapper se veut sans point
commun avec l'image, défaite et grotesque, de sa victime.
Une image que l'on peut tordre, maltraiter pour divulguer ensuite
à tous, sur la Toile, son statut d'indignité. La victime
mérite ce qui lui arrive, la preuve : c'est une image.
La souffrance est gommée ; l'être est anéanti
: voilà ce qui constitue la vraie violence, plus encore que
la force des coups (certaines vidéos de bagarres sont très
brutales, et cependant moins inquiétantes.) Comment éprouver
de la compassion pour une image ? (...)
L'image se nourrit de corps, de chair. La catharsis est impossible,
repoussée dans la perspective d'une violence toujours plus
grande, pour arracher de force une expression de vérité
: le réel manque cruellement."
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