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origine : http://nopasaran.samizdat.net/article.php3?id_article=267
Le terme « homosexuel » est assez récent à
en lire les écrits de Marie-Jo Bonnet : « En 1869,
Karoly Maria Benkert, (...), emploie pour la première fois
le mot « homosexuel » dans une lettre ouverte au ministre
allemand de la Justice, Leonard, écrite dans le but de supprimer
de la législation pénale le paragraphe 143 réprimant
les relations sexuelles entre hommes » (1)
Auparavant, on utilisait des termes tels que « sodomite »,
« pédéraste », ou tout autre mot péjoratif
désignant des relations considérés «
contre nature ».
Un peu d’histoire
Quant aux femmes, ce sont les mots « tribadisme »,
« lesbianisme », qui ont qualifiés leurs relations
des siècles durant. Jusqu’au XXème siècle,
les lesbiennes ont bénéficié d’une certaine
indigence, on parlait d’avantage de « tendre amitié
» pour évoquer les relations de deux femmes entre elles.
Seuls la pénétration et le pénis ayant une
valeur, les lesbiennes ont souvent échappé aux législations
anti homosexuelles et d’une fa« on générale
à une partie des préjugés discriminatoires
de l’opinion commune ( même si des générations
d’hommes de lettres, d’érudits, de médecins
et plus récemment de psychiatres se sont évertués
à condamner les plaisirs clitoridiens et à édicter
des normes sexuelles). Cependant, il ne faut pas oublier qu’en
tant que femmes, et comme toutes les autres, leur statut et leurs
libertés étaient limités.
A La fin du XIXe, les psychiatres, bien occupés à
mettre au jour la pathologie sexuelle, théorisent «
l’homosexualité » et vont reprendre des termes
issus de la médecine officielle, tombés en désuétude
au fur et à mesure des recherches. Un exemple : le discours
sur le « clitorisme », mis en place à la moitié
du XVIIe, sera développé par le Dr. Fournier (2),
mais abandonné le temps où les artisans de l’ordre
moral quittèrent le terrain des maladies physiques pour trouver
un nouveau débouché à leurs envies castratrices
dans les maladies mentales.
Homosexualite, pedophilie
La totalité des ignominies, des théories élaborées
(sans aucun doute, finalement par des frustrés, des fabricants
de morales, des partisans du conditionnement humain ...) n’ont
heureusement pas traversé les siècles jusqu’à
nous, les démonstrations scientifiques et le ridicule en
ayant anéanti bon nombre !
Cependant, il est des convictions homophobes qui tiennent encore
aujourd’hui et qui prennent racines, il y a plus de 2 000
ans. Je pense ici plus particulièrement à l’association
homosexualité-pédophilie.
Cet amalgame tient ses origines de la Grèce antique où
les jeunes (plutôt les nobles), considérés comme
disciples, avaient un maître chargé de leur éducation.
Les relations « éraste-éromènes »
comportaient également l’apprentissage de la sexualité.
Ceci-dit, une fois le jeune devenu mâture, plus question de
revoir son maître. D’ailleurs, en Grèce, ce sont
surtout les philosophes qui ont encensé l’homosexualité
( comme tremplin vers l’amour pur, dématérialisé),
alors que pour le reste, elle était communément condamnée
en dehors des relations initiatiques d’un éraste avec
un éromène.
Il est fort à parier que ceux qui entretiennent l’amalgame
aujourd’hui entre homosexualité et pédophilie
(sous la grande catégorie du « contre Nature »),
n’en connaissent même pas l’origine et ne peuvent
pas non plus expliquer rationnellement pourquoi ils le véhiculent.
On peut aussi se demander si ces homophobes-là ont un cerveau
(ou s’ils en font usage) puisque 90% des affaires récentes
de pédophilie ont concerné des hétérosexuels
(... conclusion ?).
Au passage, je ferais remarquer que pour bon nombre de gens «
l’homosexuel pédophile » est forcément
un homme, ce qui sous-entend que seuls les petits gar« ons
sont victimes de pédophilie, ce qui, loin de la vérité,
est en plus implicitement misogyne (les attouchements d’adultes
sur petites filles n’auraient-ils aucune importance ?, ou
seuls les petits gar« ons seraient-ils attirants ?)
Remarque sur la famille
Une bonne partie des préjugés homophobes contemporains
ne datent pas d’aujourd’hui et sont le fruit d’intoxications
cultuelles et religieuses. J’emploie le terme culture au sens
politique, les mots « culture judéo-chrétienne
» signifiant simplement qu’au fondement d’une
organisation socio-politique (en France, étatique), se trouvent
certaines idées, sur lesquelles reposaient déjà
des religions. L’exemple même est celui de la famille.
Il a toujours était plus facile de contrôler mentalement
et physiquement une population lorsqu’elle est répartie
en petits groupes d’individus stables. A tous les assoiffés
de pouvoir, la famille est apparue très tôt comme pilier
de la conservation d’un ordre qui n’a pas mis longtemps,
dans l’histoire de l’occident, à être établi.
Devenus sacro-saints, les liens de sang sont encore primordiaux
pour bien des occidentaux. Après des siècles de conditionnement
moral, « a fonctionne encore aujourd’hui, même
de fa« on laoeque.
Lors des campagnes contre le PACS, une affiche d’un syndicat
étudiant d’extrême droite (3) présentait
une famille dans un panneau de circulation en triangle, sous-titrée
« PACS, attention, famille en danger ». Au delà
de la fausseté de cette affirmation, on peut se demander
pourquoi il serait si grave de passer, par exemple, d’un mode
privé (donc parcellaire) d’éducation des enfants
à un mode collectif ? Mais, ne nous emballons pas, les partisans
du PACS, comme de l’homo-parentalité n’en sont
pas vraiment à se poser ce genre de question.
Bon, bref, si je trouve aberrant que tant de gens gobent les discours
sur la « Famille », il n’en est pas moins qu’elle
est tellement intégrée comme « fait naturel
», que ce qui s’en écarte est atypique et des
fois anormal. Les homosexuel-le-s sont donc des anormaux, pour l’instant.
Pour l’instant parce que, ne nous illusionnons pas, beaucoup
d’homosexuel-le-s ne cherchent pas à construire autre
chose, mais à rentrer dans la norme, à être
considéré-e-s comme « normaux ». Et même
si l’on peut penser le mariage entre homos et l’homoparentalité
comme des avancées anti sexistes, c’est surtout la
grande valeur de la Famille qui retrouvera son piédestal
(d’avantage mise en danger par la mono-parentalité,
par exemple). Les normes sexuelles en prendraient un coup, l’homophobie
reculerait probablement dans certaines régions, sur certains
aspects, mais le patriarcat n’en serait pas pour autant inquiété.
M’enfin, aujourd’hui et ici, la Famille est monogamique
et hétéro-normée ; l’homophobie latente
de la culture judéo-chrétienne prend racine, en grande
partie, dans cet état de fait inculqué dès
le plus jeune âge et auquel se raccrochent maniaquement et
inconsciemment des millions d’individus sur terre.
Ajoutez à cela une bonne « politique nataliste bureaucratique
» (4), et l’on a toutes les chances d’assister
longtemps encore à certaines manifestations d’homophobie.
La pre-orientation sexuelle
De manière générale, la démarche que
met en avant Daniel Borillo (5) consiste à ne pas stigmatiser
l’homophobie comme anomalie sociale horrible et monstrueuse,
mais bien plutôt à démontrer la place qu’elle
détient dans l’organisation de la société
actuelle.
Il l’identifie donc tout d’abord comme relevant structurellement
du sexisme. Se référant aux travaux du sociologue
Daniel Welzer-Lang (5bis), il écrit : « l’homophobie
générale n’est qu’une manifestation du
sexisme, c’est-à-dire de la discrimination des personnes
en fonction de leur sexe (mâle/femelle), et plus particulièrement
de leur genre (féminin/masculin). […] Et lorsqu’on
lance « pédé ! », on dénonce le
plus souvent un non-respect des attributs masculins « naturels
», plutôt qu’on ne songe à la véritable
orientation sexuelle de la personne ». Les diktats genrés
de la société moderne, qui obligent les gar«
ons et les filles à construire leur identité en rapport
avec les stéréotypes masculins et féminins,
sont donc mobilisés à nouveau pour discriminer toute
personne qui s’écarte du « droit chemin ».
Mais au-delà de ce rapport aux comportements, c’est
aussi la sexualité en elle-même que questionne Borillo.
Pour lui, l’homophobie se construit grâce au statut
de normalité conféré à l’hétérosexualité.
On sait aujourd’hui le caractère profondément
construit et donc relatif de la sexualité humaine (même
dans des mises en situation érotiques, les enfants sauvages
ne possèdent pas de désir sexuel (7) ), et pourtant,
l’hétérosexualité apparaît toujours
comme allant de soi. Ainsi, la porte est ouverte à toutes
les théories différentialistes qui, sous couvert de
considérer l’homosexualité comme simplement
déviante, justifient alors tous les traitements spécifiques
et inégalitaires, y compris en Droit.
L’hétérosexualité masculine (réciproquement
féminine), au même titre que les comportements considérés
comme virils (réciproquement féminins), sont donc
deux facettes d’un même stéréotype social
: le « vrai » homme (la « vraie » femme).
Le rejet des personnes échappant à cette catégorisation
(homosexuel-le-s, hommes éffeminés ou femmes masculines…)
permet donc de se rassurer sur sa propre « normalité
». Pour citer Daniel Borillo : « le stéréotype
joue un rôle psychologique majeur, puisqu’il permet
d’apaiser l’angoisse identitaire de se voir un jour
déserter son statut ou de se faire rejeter par son groupe
d’appartenance, surtout lorsque celui-ci apparaît comme
le modèle à suivre ». C’est donc en opposition
à des a-typiques, à des a-normaux, que la personnalité
masculine peut se construire. Dit autrement, c’est dans le
rejet de l’homosexuel que le genre masculin se constitue.
Selon C. Gentaz (6) : « l’homophobie, en raison de sa
fonction sociopsychique, préserve, tel un condom, les hétérosexuels
de la féminité en empêchant toute forme d’intrusion
masculine extérieure : c’est une douanière du
genre masculin. Nous pourrions dès lors supposer que l’homophobie
est constitutive de la psychogenèse de tout individu masculin
».
Voici donc la thèse principale de l’auteur exposée.
L’homophobie n’est pas une anomalie de la société
moderne, mais un de ses piliers. Ni excroissance monstrueuse, ni
phobie irrationnelle, la peur et le rejet de l’homosexualité
sont des principes organisateurs de la personnalité des individus,
dans le plus pur respect des genres sexués préétablis.
On conditionne les enfants à devenir ces hommes et femmes
par un ensemble d’attentes, d’exigences, d’attitudes,
de cadeaux, de remarques, d’apprentissage manuels et intellectuels
différenciés selon le sexe de l’enfant que l’on
a devant soi (8). Il ne s’agit pas d’une simple répartition
dans l’organisation de la vie en générale, mais
de confiner les femmes dans des rôles d’infériorité
et de soumission à l’égard du « sexe fort
». Un enjeu majeur à la clé ... le pouvoir sur
autrui, celui qui permet de disposer d’un ou de plusieurs
êtres humains pour son plaisir, pour satisfaire son orgueil
(sentiment très gourmand et exigent si on ne le refuse pas)
en s’affirmant supérieur, puisqu’au dessus d’autres
individus. Pour que « a marche bien et longtemps, il faut
que l’ensemble des hommes acceptent d’incarner, de valoriser
et d’imposer à l’ensemble des femmes leur domination.
De la même fa« on, il faut que tout un chacun soit persuadé
que la marche de la vie, c’est faire des enfants, c’est
trouver quelqu’un-e- avec qui réaliser cela.
Chaque individu qui refuse d’être englouti dans ces
ensembles ou dont les comportements dérogent à ceux
sensés découler « naturellement » de cette
grande division entre hommes et femmes, déstabilise, met
en péril « l’ordre naturel des choses ».
Alors, avant que les enfants aient pu réfléchir à
leur attirance, leurs sentiments les uns envers les autres, on se
charge de leur fixer des cadres à l’amour. Thatcher,
qui pensait que l’homosexualité se propage quand on
en parle, avait interdit qu’il en soit fait mention dans les
manuels scolaires. Mais regardons en France, pas besoin de décret,
je n’ai trouvé aucune histoire d’amour entre
deux personnes du même sexe dans les manuels scolaires. (9)
Je partage avec George Orwell l’idée selon laquelle
il faut commencer par supprimer les mots qui s’y réfèrent
lorsqu’on veut faire disparaître quelque chose (une
idée, un sentiment ... voire même quelqu’un)
(10). Et, par conséquent, il est homophobe de nier certains
sentiments, certaines relations humaines en ne les mettant pas en
scène, en ne permettant pas de mettre des mots dessus. De
plus, c’est bien souvent lorsque l’on ne peut (ou ne
veut) pas mettre de mots raisonnés sur des choses que l’on
sent, que l’on voit (...), que se forment des gènes,
des peurs, voire des phobies. Les peurs de l’homophobe sont
« apprises au berceau, réitérées durant
l’enfance, envers ce qu’on dit étrange, non conforme,
« monstrueux » » (11).
Alors, à quand l’homosexualité « inscrite
dans les manuels scolaires avec la même clarté que
les relations hétérosexuelles » ? (12). C’est
sûr, pas tant que, chez une majorité d’adultes,
le pénis sera une valeur, sainte et sûre, qu’être
pénétré-e- sera l’apanage de l’inférieur(e),
que la sodomie sera prise pour la pratique la plus fréquente
des homos et que les actes sexuels sans pénétration
seront considérés comme une forme de sexualité
incomplète.
Le concept de « pré-orientation sexuelle »n’est
donc pas vide de sens. Et, pour ceux et celles qui n’attendront
pas d’être marié-e-s, d’avoir des enfants,
pour s’apercevoir, se révéler leurs homosexualités,
rien, du côté de la découverte, de l’affirmation
de soi, ne sera facile. L’adolescent-e- homosexuel-le trouvera
rarement dans le cadre scolaire des situations dans lesquelles se
projeter, des personnages auxquels s’identifier alors que
l’on sait que toute personnalité se forge dans l’imitation
et l’identifications à des semblables. Très
peu de mots également sur le million d’homosexuel-le-s
mort-e-s dans les camps de concentration... pas de mémoire
collective, de passé à s’approprier pour s’inscrire
dans et construire le présent, pas d’Histoire.
Le rapport au plaisir, au corps
Comment donc accepter qu’on procure à autrui ou qu’autrui
se procure le plaisir que soi-même, on se refuse ?
Je crois en effet qu’un des noeuds de l’homophobie
se trouve dans la frustration sexuelle, dans la limitation des plaisirs
et, d’une fa« on générale, dans la conception
restrictive et brimante du corps. A voir la profusion des régimes
amincissants, des journaux de mode(s), des accessoires d’
»esthétique », on se rend bien compte que le
corps n’est toujours pas sorti de ses chaînes, qu’il
s’agit encore d’avantage de répondre présent-e-s
à l’appel de toutes les valeurs normées et normatives
que de chercher à mieux connaître son corps et la richesse
des plaisirs qu’il peut offrir.
Du fait même que les homos ne procréent pas, il y
a de grandes chances qu’ils et elles fassent l’amour
dans un honnête but de plaisir..., non mais, vous vous rendez
compte ? Alors que Jésus, lui, atteint sa gloire, rejoint
Dieu lorsqu’il est troué, meurtri dans sa chair (propre),
de simples âmes s’abaissent à trouver du plaisir
dans ce corps vil, sale, matériel, et surtout bien vivant
(tout est dit).
Si je pense que cela a à voir avec la haine vouées
aux homosexualités, je ne dis pas pour autant que les homosexuel-le-s
sont exempt-e-s de la répression sexuelle ambiante ni de
l’enfermement du corps dans des schémas. La preuve
pour moi est visible dans la bi-phobie (13) si répandue dans
« le milieu ».
La lesbophobie
(Une question que je me pose encore et qui a sans doute orienté
mes recherches sur ce thème est de savoir si l’on peut
être militante homosexuelle sans être féministe.)
La lesbophobie est une catégorie de l’Homophobie,
qui, comme la gay-phobie, comporte des particularités. Par
exemple, il faisait meilleur vivre lesbienne il y a quelques siècle
qu’aujourd’hui, mais, parallèlement, il fait
meilleur être femme aujourd’hui qu’il y a cent
ans. Et les deux ne sont pas dissociables quand on envisage l’homosexualité
des femmes. Homosexuelles, hétérosexuelles, bon nombre
de femmes furent brûlées, torturées, violées
du même fait d’une misogynie parfois sanguinaire, en
tout cas séculaire. Accuser une femme de s’être
« travesti en homme » a pu conduire à son exécution
ou son emprisonnement. Sachant que se travestir en homme signifiant
« revêtir le costume masculin », ce sont toutes
les femmes qui étaient concernées, quelles que soient
leurs sexualités (14).
Parallèlement, je disais plus haut, les lesbiennes en tant
que telles ont beaucoup moins fait les frais de leur orientation
sexuelle que les gays. Là encore, rien de surprenant, c’est
vrai, qu’est-ce que peuvent faire deux femmes ensemble ? Rien...
pas grand chose, enfin, rien de bien méchant quoi ?! Comment
contredire cela. Cela fait à peine trente ans que le plaisir
des femmes entre en ligne de compte dans les discours sur les relations
hétérosexuelles, qu’on parle ouvertement et
simplement (quoique...) de ce fameux clitoris ! Qu’est-ce
que le cunnilingus ? Une caresse ? Un acte sexuel ? Je répondrais
: un acte symboliquement et moralement moins chargé que la
fellation.
La négation de toute sexualité propre aux femmes
a beaucoup contribué à ce qu’on les tiennent
à l’écart des ratonnades, des rafles. Certes,
elles dérogent à leur rôle de procréatrice,
mais en même temps elles participent d’elles-mêmes
à mettre un terme à ce fléau communément
nommé femme (15). Et puis, finalement, elles peuvent être
utiles aux hommes, au regard des différents types de productions
pornographiques. Ceci-dit, tout n’est pas rose pour les lesbiennes
et elles ne sont pas non plus épargnées en tant que
simples objets de fantasmes masculins. Avec la stigmatisation de
la « camionneuse », nombre d’hommes se sentent
attaqués dans leur virilité (ou « croyance en
leur supériorité »), et répondent par
la violence ; tu veux jouer à l’homme, tu vas voir
!
Collectivement contre l’homophobie
A quand cette fameuse « révolution sexuelle »
dont j’ai ouoe dire qu’elle s’était déjà
produite ? Je reste persuadée qu’on coupera certains
ponts avec l’homophobie en faisant reculer la répression
sexuelle, en émancipant le corps de ses carcans, en donnant
un sens neuf aux mots « libération sexuelle ».
Lutter contre l’homophobie, c’est d’abord, je
pense, refuser de penser l’homosexualité, et d’en
débattre, dans des termes de « inné-acquis »,
« naturel-contre nature ». Tout simplement parce que
ce qui est « naturel » est finalement acquis puisque
change selon les modes, les politiques... et surtout parce que le
débat qui cherche à élucider les « causes
» des homosexualités nous détourne de la question
de savoir comment bien vivre ce que nous voulons être, et
au quotidien.
Je pense qu’il faut également être présent-e-
à chaque occasion où le concept de « visibilité
» se trouvera manifesté concrètement. Sortir
du silence, du placard et ce, collectivement.
Par ailleurs, je me demande s’il faut (comme c’est
déjà le cas) lutter pour la reconnaissance des homos
comme groupe social. D’un côté les homosexuel-le-s,
transexuel-le-s pousuivi-e-s dans un pays du fait de leur orientation
sexuelle, ne peuvent pas prétendre à l’asile
politique de ce fait même qu’ « homo » n’est
pas un groupe social. Mais de l’autre côté, c’est
un vrai lobby qui se met en place (que l’on a pu observer
lors des débats sur le PACS) avec tout ce que cela implique
: participation à un système politique pourri, défense
d’intérêts économiques et commerciaux,
promotion d’une culture propre, enfermement de la population
dans des catégories... Tout pour faire pâlir mon sens
de l’universalisme.
Lutter contre l’homophobie, c’est aussi à la
racine, refuser tout discours enfermant les hommes ou les femmes
dans des stéréotypes, refuser qu’il soit dégradant
d’appartenir au sexe féminin, et finalement peut-être
se décharger d’un coup de boule à chaque «
femmelette », « enculé » etc..., qui vient
nous squatter l’encéphale par les oreilles. Pour ne
pas conclure, je m’arrêterais sur une citation de Jacques
Fortin : « Notre lutte contre l’oppression, pour les
alliances nécessaires et possibles avec les femmes, dont
la cause ébranle si fort l’ordre établi des
genres, avec les exploités dont le combat attaque l’ordre
établi des classes, nous mène, hors des sentiers battus,
sur la voie inexplorée de modes de vie émancipés,
encore inédits. » (16)
(1) : Marie-Jo Bonnet, Les relations amoureuses entre les femmes,
ed. Odile Jacob, coll. Opus sept 1995, p.284 : Le mot « homosexuel(le)
» fait sa 1ère apparition dans le supplément
du Nouveau Larousse illustré aux alentours de 1900.
(2) : « Le clitorisme est cet acte au moyen duquel les femmes
suppléent, par une sorte d’artifice, au plaisir que
la nature réserve aux seules approches amoureuses des deux
sexes . » Dictionnaire des sciences médicales,par une
société de médecins et de chirurgiens, Paris,
ed. Panckouke, 1812-1822, Dr. Fournier, article « Clitorisme
»
(3) : l’UNI
(4) : Jacques Fortin, Homosexualités, l’adieu aux
normes,ed. Textuel, coll. La discorde, 2000, p. 35
(5) : Daniel Borillo, Que sais-je ? L’homophobie, ed. PUF,
2000
(5bis) : ibid. p. 87
(6) : La peur de l’autre en soi. Du sexisme à l’homophobie,
sous la direction de D. Welzer-Lang, P. Dutey et M. Dorais, Montréal,
1994, p. 219
(7) : Mémoires de singes et paroles d’hommes, Boris
Cyrulnik, Points Seuil
(8) : Pour décortiquer plus en profondeur les processus
de construction des genres masculins et féminins, je vous
invite à lire l’article sur ce même sujet dans
le No Pasaran 75, mars 2000
(9) : Je n’affirme pas pour autant avec certitude qu’il
n’en existe pas puisque je n’ai pas lu la totalité
des manuels existants et qu’il y en a un paquet !
(10) : cf. le fameux roman 1984
(11) : Jacques Fortin, cf. Plus haut, p.69.
(12) : idem p.41
(13) : je précise : « biphobie » = peur, haine
des bisexuel-le-s.
(14) : Bonaparte interdit aux femmes le port du costume masculin.
Ce n’est qu’en 1886 que commence une campagne de la
Ligue pour l’Affranchissement des Femmes contre ce fait et
cette loi.
(15) : cf. Françoise d’Eaubonne, Le sexocide des sorcières,
n°47 de l’Esprit frappeur, 1999.
(16) : cf.(4), p.9
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