"Nouveau millénaire, Défis libertaires"
Licence
"GNU / FDL"
attribution
pas de modification
pas d'usage commercial
Copyleft 2001 /2014

Moteur de recherche
interne avec Google
"Harcèlements"
Film sur le harcèlement moral au travail

Origine : http://www.france5.fr/articles/W00068/962/


HARCÈLEMENTS

Film sur le harcèlement moral au travail, "Harcèlements" montre la souffrance, celle qui ronge et détruit tout doucement. Raconté par des victimes qui se battent pour retrouver leur dignité, il donne aussi la parole à ceux qui tentent de prévenir et de combattre cette violence perverse et insidieuse.

Il y a d'abord le cas de Ginette, 38 ans, chef d'équipe dans une grande fabrique de médicaments. Licenciée depuis quinze jours, elle raconte : "On a crevé les pneus de ma voiture, on a volé mes tenues de travail, mes chaussures de sécurité, les gens se moquaient de moi..."

Il y a aussi Michèle, 46 ans, cadre supérieur dans un conseil régional, en arrêt maladie depuis quinze mois. Elle aussi a accepté, courageusement et difficilement, de témoigner devant la caméra, pour dire les insultes, les menaces, les agressions dont elle fut victime.

Comme elles, Vincent, 26 ans, opérateur chimiste, évoque son histoire : il a démissionné, il y a un an, de son premier emploi, victime de la bêtise d'un groupe de collègues, sans que sa direction juge bon d'intervenir. Enfin, il y a ces quatre hommes, tous agents d'assurances, qui racontent comment, à la suite de la fusion de leur groupe, les salariés furent poussés à la démission, purement et simplement.

Tous exemplaires, ces cas de harcèlement moral au travail donnent la mesure d'un phénomène désormais condamné par la loi du 20 janvier 2002, qui concernerait plus d'une personne sur trois en France. Si la définition de ce processus d'emprise psychologique − qui a toujours existé − reste très complexe, ses effets sont d'autant plus terribles qu'ils touchent à la dignité humaine.

Institué en méthode de management ou pratiqué par un chef pervers ou un groupe s'acharnant sur un salarié, le harcèlement moral est d'autant plus destructeur qu'il agit sur le non-dit. Et souvent, souligne Michel Debout, professeur de médecine, "c'est la victime que l'on va accuser de ses propres turpitudes". D'où, de la part des "harcelés", un immense besoin de reconnaissance − tant pénale que morale − et la nécessité d'une écoute, comme celle que leur apporte l'association Mots pour maux au travail.

Une prévention difficile

Outre l'écoute et l'information, celle-ci offre de prévenir le phénomène, rejoignant ainsi les actions menées depuis peu par les directions des ressources humaines et la médecine du travail. Mais l'exercice est périlleux : "On doit prévenir des choses dont les frontières ne sont pas clairement définies", dit Marie-Christine Arthuis, DRH.

Certains, comme Loïc Le Scouarnec, président d'une association contre le harcèlement, tentent de sensibiliser les syndicats à cette question. D'autres, comme le Cnam à Nantes, organisent des débats ou montent des pièces de théâtre mais mettent aussi en garde : "Ne considérons pas tous les managers et tous les collègues comme des harceleurs potentiels ou réels", dit Christian Poissonneau, auteur de la pièce Harcèlement mutuel.

Toutes ces initiatives en disent long cependant sur la difficulté à "traiter" et à prévenir ce phénomène. Reste la souffrance des victimes, immense, et qui fait honte à toute une société.

Diffusion le lundi 20 janvier 2003 à 16h35 (hertzien) et à 20h50 (câble et satellite).


Avez-vous eu des difficultés pour inciter les victimes à témoigner ?

Bernard Cazdepats, réalisateur : Ce fut très difficile. Ce qui les a convaincues, et c'est extrêmement courageux de leur part, c'est l'idée que soient montrés des exemples. En les voyant, on comprend combien on peut souffrir au travail. Et c'est terrible de voir des gens souffrir autant. Il faut que chacun fasse un peu attention aux autres.

Dominique Le Pivert, productrice : Il a fallu beaucoup de respect, d'écoute. Notre but était de montrer, sans juger. Montrer que ces situations ne sont pas tolérables et qu'il faut dire "stop" tout de suite. Car tout le monde peut être victime.

Vous est-il arrivé de douter de leurs propos ?

B. C. : Au début, on s'interroge beaucoup. Et puis, on se rend compte qu'elles ne délirent pas du tout. Ces personnes sont anéanties, déstabilisées, elles ont du mal à prendre du recul. Mais si elles sont ainsi, c'est parce qu'on les a poussées à bout.

D. L. P. : Le doute de soi les a cassées. Vincent, par exemple, est contraint de s'exiler : ce qu'il a vécu est trop lourd à porter, toute sa famille est ébranlée. Ce sont des souffrances qui se referment très difficilement.

Le harcèlement au travail est-il un phénomène contemporain ?

B. C. : Avec la loi de janvier 2002, on a enfin mis un mot sur un phénomène qui a toujours existé mais qui prend une dimension nouvelle dans notre société, très dure et individualiste : on laisse faire sans réagir, on se met du côté du pouvoir...

D. L. P. : Cette forme d'assassinat est rendue possible parce que les solidarités n'existent plus dans l'entreprise. Les DRH commencent à y réfléchir, les choses bougent, mais certains aussi veulent remettre en cause la loi. Pourtant, ces souffrances ont un coût social et humain conséquent.