Origine : http://www.cnam.fr/lipsor/dso/articles/fiche/arendt.html
LES FICHES DE LECTURE de la Chaire D.S.O.
"un bon poème est un bon poème, fut-ce une ode
à Staline"
"derrière la politiques des régimes totalitaires,
se cache un concept entièrement nouveau, celui du pouvoir"
"la cité est fondamentalement périssable ; sa
survie ne dépend que de nous"
"toute cette fureur porte sur des faits, mais pas sur des
théories ou des idées"
Table des Matières
Biographie
Hannah Arendt ou la vie d'une juive allemande
* Née en Allemagne en 1906, Hannah n'était qu'une
enfant lorsque son père meurt. ingénieur de formation,
il avait étudié avec passion les auteurs classiques
Grecs et Latins. Sa mère pratiquait le français et
la musique, tous deux étaient persuadés de la nécessité
d'éduquer les jeunes filles
o De 1924 à 1929 elle suit des études secondaires,
durant lesquelles elle montre une précocité extrême
en philosophie, puis elle effectue ses études supérieures.
Elle est successivement élève de Husserl, de Heidegger
et de Jaspers. Sous sa direction elle soutient son doctorat sur
"le concept d'amour chez Saint Augustin".
o De 1929 à 1931 naît à travers d'évènements
douloureux chez cette jeune femme, la conscience de son identité
juive. Elle est arrêtée par la Gestapo. Elle en réchappera
miraculeusement. Suivent d'amères déceptions relatives
à l'attitude de nombreux amis, en particulier, celui qui
demeurera jusqu'à la fin de sa vie son maître et son
amant, Martin Heidegger.
o De 1931 à 1939 Elle réside à Paris. Au contact
d'intellectuels de l'époque, Sartre, Raymond Aron, Stéphan
Zweig, Bertolt Brecht, elle milite dans des organisations sionistes
et facilite le départ vers la Palestine de nombreuses personnes.
Après des séjours dans les kibboutz, elle revient
émerveillée mais préoccupée par l'aveuglement
des sionistes vis à vis de la question arabe. Elle rencontre
à Paris Heinrich Blücher qui deviendra quelques années
plus tard son second mari, il sera le révélateur de
sa passion pour la philosophie politique.
o De 1940 à 1945. Elle fuit le régime de Vichy après
avoir été internée quelques semaines suite
à la rafle du "Vel' d'Hiv", elle émigre
au Etats Unis avec sa mère et son mari. A la faveur des connaissances
qu'elle avait acquises sur le comportement de la Droite française,
elle publie une étude sur L'Affaire Dreyfus. C'est dans cette
période qu'elle s'interroge, rédige de nombreux articles
et propose d'autres solutions que la création d'un état
juif excluant les arabes. Dès 1943 elle a connaissance avec
Blücher de "la solution finale" à laquelle
elle ne veut pas croire.
o De1945 à 1948 elle travaille à ses premiers ouvrages
fondamentaux dont "L'origine du totalitarisme", dirige
la commission pour la renaissance de la culture juive en Europe
et travaille au côté des existentialistes.
o 1948 marque un tournant dans sa vie car elle retourne en Europe
sans cacher sa joie d'entendre de nouveau parler la langue allemande.
Elle retrouve Heidegger qu'elle n'abandonnera jamais malgré
l'engagement momentané de celui-ci au côté des
nazis.
o A partir de 1951 elle est déclarée citoyenne américaine
et publie les origines du totalitarisme, ouvrage passionné
où elle tente de savoir "ce qui s'était passé,
pourquoi cela s'était passé et comment cela avait-il
pu se passer". Elle y démontre le caractère inédit
du phénomène totalitaire, révélation
d'un mal absolu dont la cause tient dans l'existence de crimes non
punissables autant qu'impardonnables.
o 1952 marque l'année de sa rupture avec la politique de
l'état hébreux, suite aux massacres de Kybia.
o De 1953 à 1958 elle donne de nombreuses conférences
dans les plus prestigieuses universités qui seront reprises
dans des ouvrages comme "la crise de la culture", "la
condition de l'homme moderne" et "l'essai sur la révolution".
Elle critique au cours de ces années à la fois le
Marxisme et la société américaine qui favorisent
les écarts entre la pauvreté des uns et la richesse
des autres.
o De 1958 à 1961 outre de nombreuses interventions à
l'Université de Berkeley dont elle ne conserve que l'idée
douloureuse de l'obligation de parler 5 fois par semaine devant
un public. Elle publie de nombreux ouvrages regroupés maintenant
dans l'introduction de la "condition de l'homme moderne"
ainsi que des essais sur la pensée de Tocqueville, "toute
époque moderne demande une nouvelle politique". C'est
au cours de ces années qu'elle achève, "La condition
de l'homme moderne" qui interroge l'œuvre le travail et
l'action puis l'ouvrage intitulé: "La vie d'une juive
allemande" commencé dès 1928.
o En 1961 elle demande à couvrir, pour un journal new yorkais,
le procès d'Adolf Eichmann. Le récit de ce procès
donne naissance à un livre très controversé
:"un procès à Jérusalem, rapport sur la
banalité du mal". Elle expose dans cet ouvrage des idées
personnelles sur la responsabilité des bourreaux et des victimes,
sur la responsabilité des comités juifs. Elle déclare
par exemple : "Eichmann n'est pas un Richard III, il ne lui
serait jamais venu à l'idée de faire le mal par principe".
Elle affirme que son seul crime est de ne pas avoir pensé
qu'il faisait le mal et que, dans un monde privé de repères,
bien des hommes sont dans l'incapacité de distinguer le bien
du mal. Ces écrits déclenchent des réactions
d'une rare violence de la part de la communauté juive internationale.
Accusée par certains d'avoir des faiblesses pour des nazis
(rejaillit alors à la surface sa liaison avec Heidegger),
elle est victime d'une véritable cabale internationale. Pour
celle qui déclare quelques années plus tard que "toute
catastrophe liée à l'état d'Israël m'affecterait
plus que tout au monde", l'incompréhension aveugle dont
elle fait l'objet la marque jusqu'à la fin de sa vie. La
complexité de sa pensée rend simple toute interprétation
politiquement facile. Beaucoup de ses détracteurs trouvent
dans cette simplification une méthode efficace pour réduire
celle qui fut l'analyste majeure de la pensée politique de
notre siècle au rang d'exégète d'une pensée
politique romantique.
o En 1968 elle publie "la crise de la culture", huit
exercices de pensée politique dédiés à
son maître Blücher dans lesquels elle se demande:"comment
penser dans la brèche laissée par la disparition de
la tradition entre le passé et le futur".
o De 1968 à 1975 outre de nombreuses conférences,
elle publie des articles sur l'analyse de la pensée politique,
sur Emmanuel Kant dans sa "critique de la façon de juger".
Elle ne terminera jamais son dernier livre majeur,"La vie de
l'esprit" dont le titre traduit bien les orientations nouvelles
de sa pensée vers une analyse plus approfondie de la métaphysique
domaine privilégié des philosophes. Elle meurt en
1975 une année avant son maître Heidegger.
Principaux ouvrages
* Les origines du totalitarisme
* La crise de la Culture
*
1958 La condition de l'Homme Moderne
* Eichmann à Jérusalem
* L'essai sur la révolution
* La vie de l'esprit
Postulats et hypothèses
"Notre héritage n'est précédé
d'aucun testament"
La brèche entre Passé et Futur
Cette citation de René Char destinée à figurer
le gouffre qui s'ouvre sous les pieds de tous les peuples après
la deuxième guerre mondiale, éclaire la pensée
générale de l'auteur dans "La crise de la Culture"
.
Dans cet ouvrage, elle explique cette absence de "testament".
J'écrirais, pour tenter d'élucider cette métaphore,
qu'elle analyse une situation qui se définirait :"en
rupture avec la tradition".
Elle traduit cette idée dans 3 questions importantes qu'elle
reporte sur l'idée politique de définition du rôle
du l'homme et du philosophe dans la vie de la cité.
- qui choisit et nomme
- qui transmet et conserve
- qui indique où sont les trésors et quelle est leur
valeur
Dans l'étude des différences fondamentales de la
perception du rôle politique de l'homme dans la "Polis"
ou "cité" transmises par les philosophes Grecs
et Romains, elle questionne les champs de la métaphysique
classique à travers l'Histoire.
Il semble qu'aucune continuité dans le temps ne soit proposée
et donc qu'il n'y ait humainement parlant ni passé ni futur.
Elle parle du développement biologique de l'être humain
et avec lui du devenir éternel du monde et des êtres
vivants.
C'est dans cette étude qu'Hanna Arendt tente de réécrire
l'histoire intellectuelle de notre siècle non comme celle
de générations successives dans laquelle l'historien
respecte à la lettre l'enchaînement des théories
et des attitudes, mais comme la biographie d'une personne singulière.
Pour l'auteur, les huit essais sont des exercices, leur but est
d'acquérir de l'expérience en "comment penser".
Ils ne contiennent pas de prescriptions sur ce qu'il faut penser
ou dans les vérités qu'il convient d'affirmer. Il
ne s'agit surtout pas pour l'auteur de renouer le fil rompu de la
tradition ou d'inventer quelque succédané ultramoderne
destiné à combler la brèche entre le passé
et le futur. Tout au long de ces exercices, le poids de la vérité
est laissé en suspens; on se préoccupe seulement de
savoir comment se mouvoir dans une telle brèche. Il s'agit
de trouver la seule région où la vérité
pourra apparaître un jour. Ces exercices se meuvent entre
le passé le futur. Ils contiennent une part de critique comme
une part d'expérimentation. Les expériences citées
ne visent pas à dessiner une sorte de futur utopique, sa
critique du passé et du concept traditionnel d'histoire politique,
ne cherche à rien à détruire. Les quatre premiers
chapitres sont plus critiques qu'expérimentaux et les autres
plus expérimentaux que critique.
Elle nous explique comment le "trésor" n'a pas
été perdu à cause des circonstances historiques
et de la malchance. Aucune tradition n'avait prévu sa venue,
sa réalité, aucun testament n'avait légué
sa réalité à l'avenir.
La "perte" inévitable en terme politique, fut
consommée par l'oubli, par un défaut de mémoire
qui atteint tout à la fois les héritiers, les acteurs
et les témoins. Ceux qui "avaient tenus le trésor
dans leur mains", ceux qui avaient vécu tous ces instants.
Les ressources du cadre
Le souvenir n'est qu'une modalité de la pensée. Il
est sans ressource hors d'un cadre de références préétabli
et l'esprit humain n'est qu'en de très rares occasions, capable
de retenir quelque chose qui ne soit relié à rien.
Ainsi les premiers qui oublient sont ceux qui ont possédé
"le trésor" sans le reconnaître, sans lui
donner un nom. Sur le moment ils ne sont pas tourmentés,
connaissant assez bien le sens de ce qu'ils font, mais que dire
après :
"L'action qui a un sens pour les vivants, n'a de valeur que
pour les morts et d'achèvement que dans les consciences qui
en héritent et la questionnent".
La tragédie commença quand, après la "Libération"
du pays, il n'y avait plus aucune conscience pour hériter,
questionner, méditer et se souvenir.
Transmettre le sens
Tout événement doit avoir dans les consciences de
ceux qui racontent l'histoire, un sens après l'acte, un achèvement
de la pensée.
Sans cette articulation de la pensée accomplie, il ne reste
aucune histoire qui puisse être racontée.
Quelle démonstration
Un livre de pensées à l'essai
"tout ce que j'ai fait et écrit est expérimental"
déclare Hannah Arendt en préambule à l'un des
huit articles qui composeront plus tard la "crise de la culture".
Ce livre, publié quelques années après, est
un véritable "essai" d'une forme littéraire
aboutie. C'est un livre d'exercice de la pensée qui pourrait
contenir bien plus de questions traitées sans changer l'unité
du tout.
L'unité du tout
C'est justement cette unité qui est la justification de
leur rapprochement dans cette publication. Ce n'est pas un enchaînement
démonstratif, c'est une succession de mouvements écrits
dans une même tonalité. A l'opposition des variations
Goldberg qui nous font parcourir demi-ton par demi-ton la gamme
complète, elle rappelle des œuvres de Schumann aux tonalités
semblables ou relatives.
Construite autour de trois thèmes :
La rupture moderne de la tradition avec en sous-thème une
tentative d'explication du remplacement des concepts de la métaphysique
traditionnelle par celui d'histoire
Les concepts d'autorité et de liberté ne sont compréhensibles
que si aucune des réponses fournies par la tradition ne sont
plus bonnes ni utilisables.
Les quatre derniers articles sont des tentatives d'application
du mode de pensée défini dans les deux premières
parties. Elle n'apporte pas de solutions abouties, mais tente de
clarifier les problèmes.
La disparition de la tradition
Que sont l'autorité et la Liberté quand les réponses
proposées par la tradition grecque de l'activité de
l'homme au sein de la "Polis" ou la tradition romaine
de "la transmission des valeurs de l'origine de Rome"
ne sont plus valables. Comment faut-il maintenant penser l'événement,
la crise de la Culture, de l'Education, l'avènement du mensonge
en politique, la conquête de l'espace ?
Penser suppose avoir le courage de le faire, affronter la pluralité
de nos semblables et proposer de nouveaux commencements.
"renoncer à penser c'est renoncer à être
homme"
Chaque mot est signifiant, chaque concept expliqué. S'arrêter
à l'idée que suscite la première lecture, c'est
se condamner à errer dans la Tradition qui repose sur l'idée
romaine de répétition, de validité systématique
de l'antériorité ou de simplification conceptuelle
apaisante.
Résumé
Revenons à nos classiques
Les 2 premières parties du livre exigent un retour à
nos classiques, Platon et Aristote. Il faut avant tout se remettre
deux noms en mémoire et plus que deux noms deux œuvres
Platon
427-347 av JC. Fils d'une famille noble athénienne, à
l'âge de 20 ans, il rencontre Socrate. Sous son influence,
il choisit la voie de la philosophie. Pour l'un comme pour l'autre
elle doit avoir une destination politique. Trois tentatives pour
établir des gouvernements justes en Sicile auprès
de trois tyrans, se soldent par un échec. Platon meurt à
Athènes à l'âge de 80 ans. Son œuvre, constituée
"de dialogues", ou art méthodique d'interroger
et de répondre, est séparée en 3 parties: les
dialogues de jeunesse de la maturité, de la vieillesse. Quelques-uns
portent des sous-titres qui sont parvenus jusqu'à nous,
- l'apologie de Socrate,
- le banquet,
- la République,
- les lois.
Être et savoir
Qu'est-ce que savoir? C'est connaître des définitions
universelles. La définition recherchée doit avoir
"un objet" qui lui corresponde. Si une définition
est possible, c'est que la chose définie existe. Il s'agit
donc d'un savoir authentique, non changeant, éternel. C'est
ce que Platon appellera "l'objet".
Dialectique de la raison et de l'amour
La connaissance est conçue par Platon comme une conversion
spirituelle. On se détourne du monde sensible, (mythe de
la caverne) et donc aussi du corps. Philosopher, c'est apprendre
à détacher l'âme du corps. Là où
le mathématicien conclut des hypothèses aux conséquences,
le philosophe remonte des hypothèses vers les principes.
C'est le fondement de la dialectique. Par la contemplation de l'intelligible
et de la beauté, Aristote invente la dialectique de l'amour.
Pour lui, on passe de la beauté des corps à celle
de l'âme, de celle de l'âme à celle des conduites
morales, puis aux principes absolus.
réminiscence et maïeutique
Platon pratique l'art "d'accoucher les esprits". Son
interrogation vise à permettre à ses interlocuteurs
de se révéler la vérité. C'est la maïeutique.
Cette doctrine débouche sur une autre, la réminiscence.
Il s'agit de reconnaître la vérité. L'esprit
a déjà contemplé cette vérité,
l'à oubliée. Elle s'est incarnée dans un accord
sensible. On appelle aussi cette idée "la migration
des âmes".
Morale et politique
Dans le mythe de la caverne, le but dernier du philosophe et de
redescendre dans l'obscurité. Il ne doit pas vivre hors du
monde sensible. Il doit s'y comporter moralement c'est-à-dire
en juste. Pour Platon l'immoralité n'est pas une pratique
volontaire elle n'est au fond qu'une ignorance. Il sera le premier
philosophe à penser "qu'il faut éclairer l'homme
pour le rendre meilleur".
Aristote
382- 324 av JC. Elève de Platon à Athènes
il est appelé à la cour du roi de Macédoine
pour être le précepteur du futur Alexandre le Grand.
De retour à Athènes, il fonde sa propre école,
"Le lycée". Il publie une œuvre immense qui
sera la référence de toute la philosophie du moyen
age et qui reste de nos jours la base de toute étude métaphysique.
Forme et matière
Disciple de Platon, il s'en détache surtout dans la méthode.
Il donne une part importante à l'empirisme et admet que l'on
peut découvrir en suivant les enseignements des expériences.
Il établit une distinction importante entre "matière"
et "forme". Le bloc de marbre peut devenir une sculpture
en tant que bloc nous dirions aujourd'hui qu'elle est une forme
virtuelle.
Inventeur de la logique
Il est l'inventeur de la logique formelle, celle dont la forme
diffère du contenu à travers ses célèbres
syllogismes.
La métaphysique
Regroupant des idées de Socrate, il définit la métaphysique
comme une science qui étudie les premières causes
et les premiers principes. Il étudie l'être en temps
qu'Être et le définit dans différentes catégories,
on peut ainsi le qualifier, selon sa quantité, sa qualité,
sa situation …
Il nomme cette science des premiers principes "la théologie",
c'est la science de l'acte pur, du divin. La métaphysique
apparaît alors comme philosophie première.
La Physique
Elle est la science seconde, elle est la science du mouvement,
celle qui étudie le passage de la force à l'acte.
Pour Aristote, un monde imparfait est en mouvement même si
celui-ci est circulaire. Il propose une cosmogonie se fondant sur
l'existence d'un monde rond "lunaire" et d'un monde sublunaire.
Il propose une classification des êtres vivants en fonction
de la nature de l'âme, végétative (pour les
plantes), sensible (pour les animaux) et rationnelle (pour les hommes).
La morale et la politique
Le propre de l'homme pour Aristote est la Vertu qui s'exerce dans
sa forme la plus accomplie à l'intérieur de la Cité.
L'homme est naturellement fait pour vivre en société
et la vie dans la cité est supérieure à toute
autre, (famille, village…). Il en vient parfois dans ses propos
à considérer naturelle l'inégalité entre
les sexes ou l'esclavage (qui seul permet aux Hommes de ne pas travailler
afin de se consacrer à la vie de la cité). Il distingue
comme Platon plusieurs formes de gouvernement, la monarchie, l'aristocratie
et la république, mais contrairement à Platon il ne
cherche pas à trouver un ordre préférentiel
dans ces trois entités, il cherche à analyser les
conditions de leur mise en œuvre et de leur maintien.
La tradition et l'âge moderne
Apparition du concept de "La Tradition"
Tout au long de cet ouvrage, nous allons rencontrer cette double
notion. L'auteur en étudie à la fois les principes
de développement, les évolutions et surtout les ruptures.
Pour Hannah Arendt, on peut dater l'apparition du mot et du concept
"de tradition" (dans la pensée politique), quand
Aristote, dans "la République", nous enseigne que
pour intégrer le monde élevé des pensées,
de l'imagination et de la philosophie, il faut quitter l'obscurité
et tout le cortège des activités liées au "vivre
avec".
Karl Marx marquera la fin de cette Tradition en exprimant au contraire,
que tout ce qui relève de la philosophie et de la vérité
se trouve dans les affaires des hommes. Historiquement, le philosophe
s'est d'abord "détourné" de toutes les "affaires
politiques" pour les rejoindre avec Marx et y imposer sa présence.
Dans ses idées, il veut "changer le monde" et donne
naissance à un d'un champ d'intervention qui n'était
absolument pas celui du philosophe.
C'est en lisant ces deux penseurs, que l'on prend conscience de
la fin de la notion de tradition, de l'urgence vitale de la philosophie
politique et des problèmes qu'elle pose. Dans ces deux cas,
on entend, "l'accord fondamental de la philosophie politique".
La tradition et le Travail
La question du travail est centrale dans ces deux oeuvres car l'analyse
de sa valeur détermine de façon opposée la
vie de la cité. Chez les grecs et dans toute la philosophie
de l'age moderne, il est considéré comme l'activité
des "sous-hommes", les citoyens étant ceux qui
ne travaillent pas, pour pouvoir s'occuper des affaires de la cité.
Il faut être libéré (par l'intermédiaire
des Esclaves) de ces questions. Dans la pensée de Marx la
société "idéale" est celle dans laquelle
l'administration des instruments et des structures du travail sera
assumée par "les cuisinières" selon le mot
fameux de Lénine.
Pour Marx, le philosophe rompt avec la tradition Grecque puisqu'il
n'accompagne pas ne participe pas à la vie de la société,
mais au contraire la transforme. C'est là que, dans les théories
dites "utopiques", Marx combine ses concepts scientifiques
d'approche de la philosophie politique et d'histoire. Le but de
l'action historique et politique étant la transformation
de la société. Pour définir l'histoire, Il
utilise la métaphore de "sage femme de toute vieille
société grosse d'une nouvelle". Marquant "la
rupture", cette idée de renaissance, est en opposition
avec tout ce que les penseurs romains avaient écrit sur "la
Transmission de la tradition".
Une autre rupture s'inscrit dans la phrase:"c'est le travail
qui a créé l'homme". Elle sous-entend que ce
n'est pas Dieu le créateur et pour autant que l'homme existe
il se produit lui-même, il est le résultat de ses propres
évolutions. Ce n'est plus comme chez les grecs La Raison
qui devient le laboratoire d'évolution de l'homme, mais le
Travail. Rappelons nous que cette valeur était la plus méprisée
de la société traditionnelle. Chez Marx, "l'animal
Laborans remplace l'animal rationale".
S'il nous faut encore une preuve de cette rupture de la Tradition,
regardons le rôle que Marx (qui connaissait parfaitement Platon
et Aristote) donne à la Violence. Chez les Grecs le gouvernement
de la Polis se faisait par la parole, l'obéissance étant
obtenue par la persuasion. Chez Marx, la possession des instruments
du pouvoir et de coercition, des moyens de violence, est élémentaire
pour conduire les actions de transformation et les forces d'un gouvernement.
L'état est l'outil d'oppression utilisé par la classe
dirigeante. Dans sa philosophie, Marx énonce le principe
suprême de la disparition de cet état.
La rupture du monde moderne
Tout au long de ce chapitre Hannah Arendt multiplie les exemples
de rupture de la tradition extrayant des idées de Kierkegaard
et de Nietzsche tout ce qui illustre cette rupture. Elle oppose
théologie et épistémologie, pas simplement
dans le rapport obscurantiste, néo scientiste. Elle expose
les différences entre la chose révélée
et la chose évolutive.
Conclusion
Dans cette première partie avec Hannah Arendt s'ouvre dans
l'analyse des courants philosophiques contemporains, une voie qui
insiste sur la naissance de la science moderne. Cet esprit s'exprime
déjà chez Descartes dans la définition "du
doute et de la défiance". C'est le premier cadre conceptuel
dans lequel "la tradition" n'a plus été
assurée. Il nous démontre dans son œuvre que
la vision de "la Vérité" sans parole et
sans action ne pouvait être maintenue.
Depuis que Galilée a démontré, que l'observation
des faits, leur révélation pouvait être contestée,
l'idée de la vérité comme révélation
devenait douteuse. La notion de théorie "changea de
camp" elle ne pouvait plus être décrite dans un
système de valeurs imposées, mais dans un système
démontré, après des hypothèses, une
expérimentation. Il n'est plus question de révélation
mais de fonctionnement.
Elle nous montre comment Marx a fondé sa théorie
sur l'anastrophe de toutes les valeurs et annoncé "la
révolution" dans la pensée politique. Il ne s'agissait
pas de débarrasser le monde des idées Platoniciennes,
mais de prendre acte de la confusion des valeurs qui n'étaient
plus visibles autrement.
Le concept d'histoire
Si nous interrogeons un dictionnaire philosophique l'histoire est
définie comme la science du passé. L'historien cherche
à saisir les actions humaines, les faits sociaux ou politique,
il les considère à travers des variables telles que
le temps, le lieu ou la chronologie.
Pour éviter l'élaboration d'une histoire purement
littéraire, les historiens de la fin du siècle dernier
conçoivent leur science comme un modèle positiviste.
Ils pensent ne dire que les faits, dans la chronologie, dépouillés
de toute interprétation. Nous verrons, qu' Hannah Arendt
conteste violemment cette conception de l'histoire positiviste.
Elle nous démontre clairement que "l'objectivité"
n'existe pas car elle est liée à la question de la
personnalité et de la compréhension des phénomènes.
Elle s'articule autour des actions humaines. L'histoire est une
herméneutique, une science de l'interprétation.
L'histoire antique et moderne
Tout au long de ce deuxième chapitre, elle continue son
travail d'introspection ainsi que la recherche des liaisons et de
la rupture entre le passé et le futur. Hannah Arendt examine
depuis l'Antiquité tous les grands courants de l'historiographie
depuis les présocratiques. Elle tente d'expliquer en quoi
l'évolution des sciences de la nature est liée à
la compréhension de l'histoire, concept qui sous-entend toujours
la notion d'histoire politique. Son objectif est de nous montrer
combien depuis Hegel, il y a eu basculement ,voire inversion de
la pensée politique et de l'analyse historique.
Histoire et nature
Chez les philosophes grecs, l'histoire servait essentiellement
à sauvegarder ce qui devait son existence aux hommes en lui
évitant de s'effacer dans le temps. Chez les Grecs tout ce
qui relève de l'action humaine se situe hors de l'action
naturelle et de celle des dieux, lesquels ne prétendent pas
avoir créé le monde. Quant aux "choses",
la nature n'étant pas créées par l'homme, elles
sont immortelles et n'ont pas besoin de mémoire pour continuer
d'exister. Elles appartiennent à la sphère de "l'Être
à jamais".
Naissance de l'Histoire
Le père de l'histoire, Hérodote, va reprendre ce
concept de distinction entre nature et action des hommes, mais aussi
transformer la pensée, en isolant chaque action humaine.
Il est le premier a décrire des batailles comme des actions
isolées. Dans cette période, l'histoire et la poésie
se confondent. Toutes les choses qui doivent leur existence aux
hommes sont périssables. L'histoire chez les grecs est plane.
C'est le moyen âge qui inventera la conception circulaire
des mouvements de la société. A partir de ce moment,
l'histoire est inscrite dans une conception qui la fait appartenir
à la strate de la mémoire de la vie des hommes.
Une conception paradoxale
L'histoire chez les Grecs, contient un paradoxe: comment chercher
la vraie grandeur humaine dans les actions et les paroles en comparaison
avec les choses qui sont "à jamais".
Les hommes étaient considérés plus en tant
qu'auteurs de grands faits et "diseurs de grandes paroles"
que faiseurs d'œuvres. Chez les Grecs, la volonté de
rester immortel entre en contradiction avec la vie courante et la
participation à la "polis". Platon considère
le premier que le désir de devenir célèbre,
de ne pas voir périr son nom, peut être mis sur le
même plan qu'avoir des enfants et donc accéder naturellement
à l'immortalité.
L'histoire, une poésie
Cette première rupture établit une différence
notable entre les poètes les historiens d'une part et les
philosophes d'autre part. Les premiers admettent que "le renom
immortel" imaginé par Platon ne peut être accordé
qu'aux "choses" déjà grandes. Par cette
articulation, l'histoire des hommes devient presque celle des échos
de la nature. Thucydide, dans un esprit beaucoup plus sobre, pose
les premières bases de l'historiographie. Il décrit
les Guerres du Péloponnèse "comme le plus grand
mouvement provoqué jamais connu dans l'histoire". Il
commence à mettre à mal la connexion entre histoire
et nature. L'histoire reçoit dans sa mémoire, des
mortels qui par l'action et la parole se sont montrés dignes
de la nature. En dépit de leur mortalité, ils demeureront
dans la compagnie des choses qui durent à jamais.
Histoire et science moderne
Cette conception dure jusqu'aux grands mouvements contenus dans
l'évolution des sciences, dans la nature de l'expérimentation
et toute la transformation qui vit son apogée au XIXe siècle,
en situant bien l'expérimentateur, l'historien, dans le champ
même de l'observation. L'expérience comme le récit
reste une question posée à la nature, la place de
l'observateur est interne au processus. Le concept d'impartialité
interroge les historiens et les philosophes du monde moderne. Tous
les courants qui traversent cette compréhension, durent se
confronter aux constants allers-retours entre les sciences de La
Nature et la physique.
Contrairement à l'histoire écrite au moyen âge
et à l'âge moderne, les Grecs avaient délié
le concept d'objectivité historique et d'histoire. Ils ne
faisaient pas reposer celui-ci sur l'analyse des victoires ou sur
le chauvinisme. Il parasite les récits historiques jusqu'au
XIXe siècle. L'idée Grecque que les grandes choses
sont évidentes ne sera plus reprise par l'histoire moderne.
L'apport de Descartes
L'historiographie moderne ne croit plus depuis Descartes à
la vérité de l'observable. L'époque moderne
commence avec l'observation de l'univers et la découverte
du mouvement relatif des astres et des planètes. L'homme
est hanté par le soupçon. L'histoire devient "l'école
du soupçon". Depuis le XVIIe siècle l'histoire
se fonde sur la pensée de Copernic, Galilée…
ceux-ci étant les héros qui ont remplacé Ulysse
et Homère. À l'époque moderne, l'histoire n'émerge
plus comme la composition des actions et des souffrances des hommes,
mais elle devient un processus. Avec l'avènement de l'âge
atomique, l'humain découvre qu'il peut "faire la nature"
au même titre qu'il faisait histoire. Quittant le vent et
la machine à vapeur utilisés jusqu'au XIXe, le philosophe
et l'historien parviennent à assimiler processus naturel
et processus historique. C'est encore une rencontre entre les sciences
de la nature et les sciences historiques. L'invention moderne des
sciences sociales peut avoir la même signification que la
physique autrement dit, le recours à une "expérimentation
grossière".
Histoire comme processus indépendant
Ce qui différencie l'analyse historique antique de la moderne,
c'est la question du processus. Dans l'Antiquité, le fait
historique, même si la cause et la conséquence sont
isolées (chez Hérodote) n'appartient à aucun
système. Il est rattaché aux faits par des traits
d'union. il n'existe aucune force génératrice de liaison.
Le processus historique qui traverse la compréhension des
époques est une invention réellement moderne. On peut
penser, que cette question du processus historique qui nous différencie
de l'Antiquité est une invention du monde chrétien,
cette notion est fausse. Chez Saint-Augustin l'idée de l'histoire
est toujours "actuelle". Rien n'est intéressant,
si ce n'est un "vaste inventaire". Cette analyse relie
la compréhension chrétienne de l'histoire aux antiques
et particulièrement aux Romains.
L'historiographie chrétienne
La conception d'un monde ayant une fin et un commencement n'amène
qu'un trouble plus important dans cet ensemble de données.
La datation historique ne commence pas à l'ère chrétienne.
De même les Romains datent les faits historiques depuis l'avènement
de Rome, les chrétiens utilisent la naissance du Christ,
sans pour autant faire admettre cette origine comme début
de l'histoire. Cette datation séculaire remonte au XVIIIe
siècle. Avant les historiens du moyen âge utilisent
un faisceau de dates pour situer les événements. Rien
ne peut être plus étranger à la pensée
chrétienne que le concept d'une immortalité terrestre
de l'humanité. Jusqu'au XVIIIe siècle, la philosophie
de l'histoire conserve la théologie et la métaphysique
comme pensée centrale. Il faut attendre Hegel pour que l'histoire
devienne le concept central de la métaphysique. Penser avec
Hegel que la vérité réside et se révèle
dans le processus temporel est la caractéristique de la conscience
historique moderne.
Qu'est-ce que l'Autorité
un concept évanoui
Pour faire suite au chapitre sur la rupture avec la tradition elle
remet en question la notion d'autorité comme concept fondamental
de la philosophie politique. Elle nous dit que ce dernier est tellement
brouillé, qu'il a pratiquement disparu. C'est au début
du XXème siècle que s'effondre la conception traditionnelle
de l'autorité. On peut dire qu'elle implosera. Toutes les
autorités traditionnelles se sont effondrées sans
que celui-ci ne soit le résultat direct du régime
ou du mouvement dans lequel elle s'exerçait.
L'autorité, une définition unique ?
Il n'existe pas une définition unique de l'autorité.
Il en existe de multiples que se soit chez les philosophes grecs,
romains, dans le christianisme ou dans l'œuvre de Machiavel.
Pour Hannah Arendt, l'un des indicateurs le plus significatif de
l'extinction de l'autorité, est son arrêt dans les
sphères pré-politiques comme l'éducation ou
l'instruction des enfants. Le concept du rapport maître/élève
et le rôle de l'éducation qui est d'assurer la continuité
de la civilisation se sont éteints.
S'il fallait donner une définition
L'une des plus grandes erreurs conceptuelles est d'établir
une confusion entre obéissance pouvoir et violence. Par définition
l'autorité exclut l'usage de moyens extérieurs de
coercition. Là où la force est employée l'autorité
a échoué. Elle est incompatible avec la persuasion
qui présuppose l'égalité et opère par
un processus d'argumentation. Cette question sera centrale dans
toute la philosophie grecque romaine et même plus tard dans
les oeuvres de Saint-Augustin. Le concept d'autorité élaboré
par Platon fut constamment repris par celui-ci afin de sortir de
la problématique "autorité et violence".
Une crise de la religion
Pour Hannah Arendt, la disparition de l'autorité est une
conséquence conjuguée de la disparition de la Tradition
et de la Religion. Par Tradition il faut entendre le fil conducteur,
qui nous permet de nous retrouver dans le domaine du passé.
Il ne s'agit pas, d'opposer tradition et progrès. Elle établit
une différence importante entre crise de la foi et crise
de la religion. L'une étant la représentation séculière
de l'autre. Par crise de la religion elle entend crise des croyances
et des dogmes.
Pour l'auteur la question de l'autorité se pose en priorité
dans les sociétés à régime autoritaire.
La perte de l'autorité est surtout préjudiciable aux
êtres faibles, fragiles, car ils se retrouvent sans repères
en incapacité de contourner "les agents" des systèmes.
Régime autoritaire, tyrannique ou totalitaire
La compréhension de l'autorité comme d'autres notions
qui relèvent de la philosophie politique, dépend du
point de vue de celui qui les énonce. Dans cette partie Hannah
Arendt développe à la fois ce qu'elle appelle les
thèses de l'écrivain libéral (il faut entendre
ce mot au sens anglo-saxon du terme) et les thèses défendues
par l'écrivain ou le penseur conservateur.
Avant de parler de ces différentes approches, elle s'intéresse
à la définition de trois mots, décrivant des
formes de gouvernement :
autoritaire
tyrannique
totalitaire.
Ces trois notions, sont des terminologies qui pour l'auteur font
confusion dans l'esprit de la plupart des penseurs. A titre d'exemple,
elle en compare les technostructures.
Elle établit que le gouvernement autoritaire pourrait s'assimiler
à une pyramide chaque strate successive possédant
quelque autorité mais moins que la strate supérieure.
Le siège du pouvoir, se situe au sommet, le pouvoir descendant
vers la base. Les références du pouvoir se situent
hors de cette pyramide. La monarchie de droit divin illustre très
exactement ce concept.
Quand elle parle du régime tyrannique, il est question d'un
seul qui gouverne au-dessus de tous. Tous sont égaux c'est-à-dire
sans pouvoir. C'est ce que Platon appelle "un loup à
figure humaine".
Dans un régime totalitaire, l'image prise serait celle de
l'oignon. Chaque couche est en contact avec la précédente
le gouvernement étant au centre. Quoi qu'il fasse il le fait
de l'intérieur non de l'extérieur comme dans un gouvernement
autoritaire. Toutes les couches extraordinairement multiples de
cette organisation: bureaucratie, formation, police…, sont
reliées entre elles et forment des couches protectrices autour
du gouvernement central.
Le penseur libéral prendra la mesure d'un de ces processus
au regard de la désagrégation de la liberté
tandis que le conservateur prendra la mesure de celui-ci, au regard
d'une régression croissante de l'autorité. Si nous
essayons de regarder ces interprétations nous pouvons conclure
que l'on est plutôt en présence d'un double processus
de régression de la liberté et de l'autorité.
L'analyse de l'autorité, d'un point de vue libéral
ou conservateur, sera plus le résultat d'une oscillation
violente de l'opinion que réellement un processus de pensée.
Durant quelques pages l'auteur continue à expliquer que
la lecture interprétative des deux parties en présence,
aboutit généralement à la même analyse
finale.
L'autorité chez les Grecs
Avant de faire un développement comparatif des nuances ou
des différences entre la pensée de Platon et celle
d'Aristote, Hannah Arendt, nous explique que chez les Grecs le siège
de l'autorité, c'est "la maison" et non la sphère
politique de la Cité. Le chef de famille règne en
tyran. Il n'est pas possible que les Grecs appliquent cette tyrannie
à la politique. Les affaires de la cité, sont par
définition, le lieu de la parole, de la liberté, elles
rendent le pouvoir coercitif, incompatible avec leur propre liberté,
et celle des autres. La notion de despote, est inconcevable chez
les Grecs. L'ouvrage fondamental qui traite de l'autorité
dans la philosophie politique, est "la République"
de Platon. Le pouvoir ne réside pas dans la personne ou dans
l'inégalité mais dans les idées qui sont perçues
par le philosophe. Chez Platon, ce sont les philosophes qui dirigent
la cité. On retrouve ces paraboles dans le chapitre central
de la République, "le mythe de la Caverne" .
Dans sa philosophie politique, Aristote tente d'établir
un concept d'autorité, en terme de dirigeants et de dirigés.
Il est le premier penseur à introduire le concept de domination
dans le maniement des affaires humaines. Pour Aristote le gouvernement
de "la maison" est fondé sur une seule personne
alors que celui de la cité, est par nature composé
de nombreux dirigeants.
Ici apparaît le concept de domaine privé et de domaine
public. La liberté dans le domaine politique commence après
que toutes les nécessités élémentaires
de la vie pure et simple ont été maîtrisées
par la domination. De ce fait, la domination, le commandement et
l'obéissance, le fait d'être dirigé et de diriger
sont des conditions préliminaires à l'établissement
d'un domaine public. Dans ses écrits, Aristote s'intéresse
beaucoup au concept d'éducation, et au rapport qui peut exister
entre autorité, direction et domination. Il faut attendre
la philosophie romaine, pour prétendre qu'en toutes circonstances,
les ancêtres, transmettent la pensée politique et sont
l'exemple de la grandeur pour chaque génération. On
voit bien que cette idée a profondément nourri l'ensemble
des penseurs conservateurs.
La pensée romaine
Au cœur de la pensée romaine se tient la conviction
du caractère sacré de la fondation. Une fois que quelque
chose a été fondé il demeure une obligation
pour toutes les générations futures. Tout l'empire
romain était administré de, par et comme Rome. Cette
idée forme le contenu politique de la religion romaine. Ici
religion signifie "re ligare" c'est-à-dire être
relié en arrière. Être religieux signifiait
être lié au passé. C'est dans ce contexte que
le mot même d'autorité "autorictas" qui signifie
"augmenter" apparaît. L'idée de "qui
commande" augmente constamment. L'autorité est obtenue
par transmission, par héritage. Les Romains pensent que la
maturité était dirigée vers le passé.
C'est dans ce contexte que le passé est sanctifié
par la tradition. Nous retrouverons cette notion dans la pensée
chrétienne. La source de la pensée politique romaine,
la source de l'autorité, était lié à
une Trinité: la religion l'autorité et la tradition.
La pensée Chrétienne
Nous retrouvons ce contexte de résistance de l'esprit romain,
de solidité du principe de formation après que Rome
eût chuté, quand l'héritage politique et spirituel
de cet empire passe à l'église chrétienne.
L'église s'adapte si parfaitement à la pensée
romaine, qu'elle fait de la résurrection du Christ la pierre
angulaire d'une nouvelle "Fondation". À son origine
la foi chrétienne était anti politique, anticonstitutionnelle.
C'est Constantin Le Grand qui fait appel à elle pour assurer
à l'empire la protection "du Dieu le plus puissant".
Chez les chrétiens, le concept d'autorité est associé
au mot sacré et à son corollaire dans le pouvoir temporel
royal. L'analyse approfondie de la pensée politique chrétienne,
nous permet de voir qu'elle intègre le concept grec de mesure
et de transcendance et le concept romain de commencement et d'acte
fondateur. Ce que les penseurs chrétiens ajoutent, c'est
un système élaboré de récompenses et
de châtiments pour les faits et les méfaits qui n'ont
pas trouvé leur juste appréciation sur terre. La notion
même d'Enfer naît aux environs du Ve siècle.
Cette notion d'Enfer vient de Platon, pour lequel l'immortalité
de l'âme du philosophe était déjà décrite.
Elle s'étend pour les chrétiens à l'ensemble
des humains. Chez Saint-Augustin, on peut lire de subtiles doctrines
définissant avec précision l'enfer, le purgatoire,
et le paradis. Pour les chrétiens la théologie, science
qui permet d'établir des règles de conduite pour la
multitude, ouvre les principes de la science politique. L'introduction
du concept d'enfer platonicien renforce l'autorité religieuse
à tel point qu'elle pouvait espérer demeurer victorieuse
de tous les conflits réguliers. Pour la pensée religieuse,
il est d'une ironie terrible que la bonne nouvelle des évangiles
: "la vie est éternelle" aboutisse par la suite
non à un accroissement de la joie, mais à un accroissement
de la peur sur la terre.
Les idées de Machiavel
Le concept même de rupture de l'autorité est contenu
dans l'idée politique de révolution. Le premier penseur
à se représenter la révolution fut Machiavel.
L'ensemble de l'œuvre philosophique de Machiavel, son indifférence
à l'égard des jugements et son absence de préjugés
rendent l'approche de ses théories diabolique. C'est sans
doute plus la forme que le fond qui a contribué à
sa réputation. Bien qu'il ne soit pas le père de la
science politique, il énonce bon nombre de principes qui
sont repris ensuite par des philosophes. Il affirme que dans le
domaine public de la politique, les hommes doivent apprendre à
"pouvoir n'être pas bons" jamais il a dit: "à
être mauvais".
Chez Machiavel la vertu qualité spécifiquement politique
n'a ni la connotation morale des romains ni l'essence d'une excellence
neutre des Grecs. Son mépris des traditions chrétiennes,
vise surtout une église qui a corrompu la vie politique de
l'Italie de son siècle. Tout au long de ses oeuvres, Machiavel
repousse l'idée séculière de l'église.
Il est, dans sa volonté patriotique de fonder une Italie
unifiée ayant pour pierre angulaire "l'accord politique
éternel", le père fondateur de l'état-nation
et de la raison d'état. Comme le fait plus tard Robespierre,
Machiavel pense que la fondation est l'action politique centrale
et que tous les moyens pour créer cette fondation se justifient.
On voit la l'écart qui le sépare d'Aristote et de
Platon.
Les révolutions
L'autorité comme on la connaissait jadis, naît de
l'expérience romaine de la fondation et des lumières
de la philosophie grecque. Nulle part elle n'avait été
instituée par les révolutions, ni par le moyen encore
moins prometteur de "la Restauration". Le concept de révolution
délivrant l'ensemble des hommes ne se retrouve pas dans l'état
d'esprit des courants conservateurs qui balaie souvent l'opinion.
Seul le contre-exemple de la révolution américaine
apportera une nouvelle lumière au concept d'évolution
de l'Autorité politique. Sans qu'il soit fait référence
à une fondation passée les pères fondateurs
ont agi sans violence, à l'aide d'une constitution et ont
fondé un accord politique totalement nouveau.
Qu'est-ce que La Liberté
Les origines
Soulever la question de la liberté, essayer de la définir,
semble une entreprise désespérée. Tout semble
si trouble et l'auteur nous parle même de dilemme logiquement
insoluble, de telle sorte qu'en dehors du champ de l'analyse politique,
il devient impossible de se représenter la question de la
liberté. Hannah Arendt nous ramène aux conceptions
antiques de ces idées. La liberté n'a pénétré
le champ de la philosophie que très tard, pas avant les premiers
philosophes chrétiens. Chez les Grecs le concept de liberté
est présent dans la chose politique par "la polis",
dans l'action de la cité. Nous retrouvons chez les romains,
la question de l'origine. Chez les Grecs l'action est la raison
d'être politique de la liberté, et son champ d'expériences.
la liberté intérieure
Cette liberté politique que nous tenons pour évidente,
est à l'opposé de la liberté intérieure.
Ce sentiment interne ne relève pas de la politique. Les expériences
de "liberté intérieure" sont dérivées
ou présupposent toujours un repli hors du monde. L'espace
intérieur est à l'abri du monde. Cette idée
que nous retrouverons chez les philosophes romains de l'empire tardif
et chez Saint-Augustin, nous permet de comprendre que l'homme ne
saurait rien de la liberté intérieure, s'il n'avait
d'abord expérimenté une liberté qui soit une
réalité tangible dans le monde.
l'espace public
Nous prenons conscience d'abord de la liberté ou de son
contraire dans notre commerce avec les autres. C'est là que
nous nous retrouvons en compagnie de l'espace public. Il s'agit
d'un monde politiquement organisé où chacun des hommes
libres peut s'insérer par la parole et par l'action. Dans
l'époque moderne, la montée du totalitarisme, sa revendication
à subordonner toutes les sphères de la vie, surtout
les droits de la vie privée, nous font douter de la possible
coexistence entre politique et liberté, et plus encore de
leur compatibilité. Nous sommes enclins à croire que
la liberté commence là où la politique finit.
Nous nous rapprochons du credo libéral qui dit : "moins
il y a politique plus il y a de libertés". Nous retrouverons
ces doutes, dès le XVIIe et surtout le XVIIIe siècle
chez des philosophes comme Montesquieu ou Hobbes. Pour eux, la liberté
n'est pas le but de la politique, mais un phénomène
marginal. C'est en quelque sorte la limite que le gouvernement ne
doit pas franchir à moins que ne soit en jeu la vie elle-même,
ses intérêts immédiats.
la liberté agent de l'action
La liberté s'expérimente essentiellement dans l'action.
Nous retrouvons ces idées dans Shakespeare, qui définit
le concept de liberté politique d'abord comme celui de liberté
"d'être et de faire". "Que cela soit ou nous
mourrons" déclare Brutus.
Nous ne voyons la question de la liberté entrer dans la
philosophie qu'à partir de l'approche de Saint-Paul ou de
Saint-Augustin. Ils introduisent la notion nouvelle de liberté
et de libre arbitre, ils établissent une distinction et un
décollement entre liberté politique et le libre arbitre
individuel que l'on appelle maintenant, liberté individuelle.
Nous retrouvons dans ce contexte, l'idée de la domination
de la volonté par l'homme pour Saint-Augustin, le "je
veux et je ne peux pas" apparaît comme une monstruosité.
Platon pensait que "seuls ceux qui savaient se gouverner eux-mêmes
avaient le droit de gouverner les autres".
La liberté un miracle ?
Pour terminer son chapitre, l'auteur nous explique que la notion
de liberté existe à travers la notion théologique
de "miracle". Cette notion s'appuie sur le concept d'improbabilité
infinie, qui fera que la terre, l'homme, la vie, toute chose nécessaire
à l'existence a été créée. Cette
notion fera de l'homme l'acteur essentiel ayant hérité
du double don de la liberté et de l'action. C'est cet héritage
qui lui permet d'établir une réalité.
La crise de l'éducation
Une idée transversale
Dans les chapitres précédents, Hannah Arendt évoque
avec insistance la question de la sphère pré-politique,
la place de l'éducation dans la vie de la cité. Elle
nous explique combien les phénomènes observables dans
l'éducation sont la traduction du paysage, de la pensée
politique d'un pays ou d'une civilisation. La question de l'éducation,
bien qu'elle s'en défende, est l'enjeu d'un véritable
objet intellectuel. Elle insiste beaucoup sur le fait que la pédagogie
est une affaire de spécialistes, mais que l'Education relève
des philosophes. Dans ce chapitre elle nous montre qu'avant d'enseigner,
il faut savoir, et qu'avant de savoir il faut apprendre. Ici le
lecteur est confronté à l'ambiguïté d'une
pensée qui se veut ouvertement progressiste, et des prises
de position que l'on peut apparenter à une pensée
conservatrice.
L'Education image du Politique
Pour Hannah Arendt, l'éducation est un germe de la pensée
politique car les gens chargés de la dispenser sont là
pour cultiver les vecteurs de la transmission. Elle étudie
dans la société américaine, la crise qui traverse
la structure de l'organisation de l'éducation et les principes
qui la gouvernent. Elle nous fait sentir, qu'il ne s'agit pas d'un
courant isolé, mais d'un phénomène d'amplitude
qui ne tardera pas à submerger l'ancien continent. Elle élabore
des réflexions sur la notion de société de
masse en refusant d'examiner cette crise de la culture à
l'aune des idées préconçues qui traversent
les discussions de salon. Une phrase caractérise cette pensée,
"une crise ne devient catastrophique que si nous y répondons
par des idées toutes faites".
La crise en Amérique
L'Amérique est un pays neuf, dans lequel le ciment et le
peuplement se sont faits par l'immigration. Cette réalité
met en lumière la question de la transmission nécessaire
à la survie de cette société. Elle s'appuie
sur ces principes, pour démontrer que les modifications profondes
de l'enseignement américain transcendent les classes sociales
et rendent la société plus fragile quand celui-ci
ne joue plus son rôle. Elle insiste sur la question de la
place respective des anciens et des nouveaux dans la société,
en expliquant la différence qui peut exister entre "éduquer
et simplement reproduire les choses du passé ce qu'elle appelle
"endoctriner".
Quelles sont les causes de la crise
Elle insiste sur "la crise" amenée par les théories
pédagogiques les plus modernes en expliquant comment dans
une société fondée sur la transmission ces
"dérives" ont eu des conséquences terribles.
A cause de sa grande résistance aux transformations, l'Europe
s'est tenue à l'écart de cette catastrophe. Elle montre
bien qu' il s'agit d'une révolution politique ayant un rapport
entre le transfert des valeurs et la valeur du passé. Elle
dit que: "sans y attacher une idée nostalgique",
cette crise finira par arriver aussi en Europe.
La première explication qu'elle donne à cette crise
est que la confusion sociologique est amenée par le refus
des adultes à considérer les enfants autrement que
comme des "petits adultes" ainsi que le laissait sous-entendre
Rousseau.
Elle parle de la création d'une société formée
"entre les enfants" à partir des règles
édictées par les adultes. Elle doit se gouverner elle-même.
Elle insiste sur le fait que c'est la pire des choses qui pouvait
arriver. L'enfant n'est plus en relation directe avec un adulte,
il est confronté à un groupe sans moyen de s'en protéger.
Elle réintroduit les notions psychosociologiques
de tyrannie de la majorité
de pression de conformité
d'impossibilité faite à l'enfant de résister
à la pression de son propre groupe,
elle dit même que bien peu d'adultes seraient capables de
supporter une telle situation.
Sa deuxième idée est celle de la crise de l'enseignement.
La pédagogie est devenue une science de l'enseignement en
général au point de s'affranchir complètement
de la matière enseignée. Caricaturant un peu le cadre
actuel, elle déplore avec beaucoup de véhémence
que les professeurs chargés de transmettre le savoir, ne
peuvent pas le dispenser correctement, car ils ne l'ont pas appris.
Dans la troisième idée, elle déplore le fait
que l'enseignement aujourd'hui se charge plus de transmettre "le
faire" que "l'appris". Consciente de l'aspect un
peu caricatural de cette pensée, elle développe l'idée
qu'il ne s'agit pas d'une dérive des enseignants, mais d'une
dérive instillée par l'ensemble de la société
à travers ses jugements politiques. Elle parle du dévoiement
de la notion de jeux et d'apprentissage. Si elle reconnaît
que l'une des activités fondamentales de l'enfant est le
jeu, elle dénonce le fait que des pseudo pédagogues
aient tentés à tout prix de substituer cette notion
du jeu à la notion d'apprendre. Elle dénonce l'idée
soutenue que l'on ne peut apprendre ou faire apprendre qu'en jouant.
Elle explique que le glissement entre l'apprentissage du travail
sur le jeu ne s'effectue plus, il en résulte une sacralisation
de l'autonomie du monde de l'enfant au détriment du passage
vers le Monde.
Crise de l'éducation et rupture avec La Tradition
Après avoir développé ces trois idées,
elle explique que ceci est l'aspect émergé d'une crise
profonde inversant les valeurs. Elle développe les conséquences
qui résultent de "l'abandon" de la sphère
privée, lieu protecteur de l'enfance, nécessaire à
sa structuration mentale et intellectuelle. Le mélange "privé/public"
est préjudiciable, car des êtres humains, en devenir,
sont obligés de s'exposer à la lumière de l'existence
publique. Ce fait remet en cause les conditions nécessaires
à leur développement. Elle dit que le parallèle
fait entre "émancipation de la femme et des travailleurs"
idée très positive d'une part et émancipation
de l'enfant d'autre part, a produit un dérèglement
dans le processus vital de la société: la crise de
l'éducation. Elle parle de trahison, car les enfants sont
encore au stade où le simple fait de vivre et de grandir
à plus d'importance que le facteur de la personnalité.
L'école, une voie vers le monde
L'école n'est pas le monde nous dit-elle elle est plutôt
une institution qui s'intercale, pour permettre la transition entre
la famille et le monde. C'est l'état qui impose la scolarité,
l'école représente l'état, ce monde appartient
à la sphère politique. Elle analyse à la fois
le rapport ambigu et les responsabilités données aux
éducateurs et aux enseignants, qui relèvent de la
transmission des valeurs et de l'obligation faite à ces derniers
d'être des "transmetteurs résistants". Il
est implicite que les jeunes, doivent être introduits par
les adultes dans un monde en perpétuel changement. La fonction
même de l'éducateur ou de l'enseignant, est de transmettre:
"voici notre monde".
Le paradoxe qui existe entre le refus adulte de l'autorité,
et l'impossibilité faite aux enfants de rejeter l'autorité
des éducateurs, est analysé dans le refus de ces derniers
à assumer la responsabilité du monde dans lequel ils
ont placé les enfants. L'homme moderne ne peut exprimer plus
clairement son mécontentement envers le monde, qu'en refusant
d'en assumer la responsabilité pour les enfants.
Elle pense que, l'éducation doit être animée
par un esprit "conservateur". Elle entend par ce mot,
entourer et protéger l'enfant contre le monde des adultes
et celui qu'ils ont créé pour les enfants. C'est justement
pour préserver ce qui est neuf et révolutionnaire
dans chaque enfant, que l'éducation doit être conservatrice.
Elle doit protéger cette nouveauté, et l'introduire
"comme un ferment nouveau" dans un monde déjà
vieux.
Selon l'auteur, le but de l'école est d'apprendre aux enfants
ce qu'est le monde et non pas de leur inculquer l'art d'y vivre.
On ne peut éduquer, sans enseigner. L'éducation sans
enseignement dégénère en une rhétorique
émotionnelle et morale. A ses yeux, il est très facile
et naturel d'enseigner sans éduquer.
La crise de la culture
"Je préfère au nom du ciel m'égarer avec
Platon plutôt que de voir juste avec ses adversaires".
Avec cette phrase de Cicéron, Hannah Arendt nous indique
qu'une personne cultivée devrait être : quelqu'un qui
sait choisir ses compagnons parmi les hommes, les choses, les pensées,
dans le présent comme dans le passé.
Elle étudie dans ce chapitre, le concept de culture de masse,
au regard de celui de société de masse, qu'elle avait
déjà développé dans les chapitres précédents.
Elle tente de nous montrer comment la culture est en contradiction
avec la notion de loisirs. Elle accompagne la dialectique de sa
pensée où les choses énoncées le sont
au regard de la philosophie politique et non de la solution facile.
Culture de masse
Elle écarte dès le début de ce chapitre les
cris et jérémiades de disparition, diminution et d'appauvrissement
de l'univers culturel. C'est au regard du développement d'une
société de masse dans son acception politique qu'elle
énonce, la question de la rupture entre la société
classique et la société moderne. La culture n'est
pas une question d'âge, d'époque, mais bien une question
de sciences. A ses yeux, la période la plus "coincée"
est bien le XIXe siècle durant lequel il s'agira d'ajouter
"au kitsch une dimension intellectuelle".
Les philistins
Dans les premiers paragraphes elle pense que dans toute société
il existe une contradiction entre culture du beau et culture de
l'utilitaire. En passant du philistinisme barbare des nouveaux riches
de la civilisation américaine au philistinisme culturel des
Européens, elle analyse la différence qui existe entre
le sens de la culture comme média politique et son débordement
actuel comme déterminisme de classe. On retrouve la caricature
de ce personnage en Europe dans la cour de Louis XIV, où
l'apparence culturelle ne servait qu'à cacher intrigues,
divertissements et cabales.
Une rupture dans la culture
La "société de masse", n'est pas un avatar
de l'accroissement de la population, mais elle est née de
la rupture qui existe entre les sociétés où
les populations n'étaient pas intégrées et
celles qui n'établissent plus de différence vitales
entre les classes sociales. La conséquence de cette évolution
est la différenciation économique. Il y a toujours
eu rupture, entre l'artiste et la société dans laquelle
il vit. L'artiste à l'inverse du philistin ne cherche pas
de justification utilitaire à son art. Au fur et à
mesure de son évolution, la société se met
à intégrer et à monopoliser la culture pour
ses fins propres.
L'œuvre est éternelle
En opposition aux créations dont la durée de vie
s'amenuise en fonction du développement de la société
de masse et de son corollaire la consommation de masse, seul ce
qui dure à travers les siècles peut revendiquer d'être
un objet culturel. Pour le philistin du XIXe siècle, la chose
culturelle est un moyen privilégié d'acquérir
une position supérieure dans la société. En
transformant la valeur émotionnelle en valeur d' échange,
la culture perd son pouvoir initial de nous émouvoir.
Culture et loisirs
Hannah Arendt introduit une nouvelle notion lorsqu'elle parle non
plus de culture dans la société de masse mais de la
société des loisirs. Il faut établir la différence
entre les objets culturels appartenant aux processus vitaux et ceux
dans lesquels la culture devient un objet de consommation destiné
à être usé. Il ne faut pas confondre culture
de masse et diffusion de masse. C'est la réécriture,
la condensation, la digestion des objets culturels qu'il les réduit
en un état de pacotille. Ce n'est ni le nombre ni la diffusion
qui les appauvrit. L'accroissement de la diffusion ne signifie pas
que la culture se répande dans les masses, mais qu'elle se
trouve détruite pour engendrer le loisir. Le résultat
n'est pas une désintégration mais une déchéance.
La société de masse assimilée à la société
de consommation veut nous persuader qu'en modifiant tous les objets
culturels, tous se valent. Alors "Hamlet" pourrait être
aussi divertissant que "my fair lady".
La culture qui concerne les objets est un phénomène
du monde, le loisir qui concerne les gens est un phénomène
de vie. Si la culture se trouve comme appartenant aux processus
vital de la société, elle est en danger d'extinction
totale. Ainsi si belles que soient, les cathédrales elles
n'ont jamais été construites pour en faire exclusivement
des lieux de culte. Une utilité directe aurait pu être
rendue dans n'importe quelle bâtisse. Leur beauté transcende
tout, elle est faite pour durer à travers les siècles.
Il faut donc bien établir une frontière importante
entre objet d'usage et oeuvre d'art indépendamment de leur
image visuelle. Les oeuvres ne sont pas fabriquées pour entrer
dans le processus vital elles ne peuvent être consommées.
Quand elles se sont éloignées des sphères de
la nécessité, elles prennent de l'importance: elles
deviennent des oeuvres d'art
Culture et mythes
Le résultat de cette évolution n'est pas dans une
société de masse l'apparition d'une culture de masse
qui n'existe pas, mais d'un loisir qui se nourrit des objets culturels
du monde. En accord avec Roland Barthes et Jean Baudrillard, Hannah
Arendt nous explique qu'une société de consommateurs
n'est pas capable de savoir se soucier des choses qui appartiennent
à l'espace culturel du monde parce que son attitude centrale
par rapport à tout objet, implique la ruine de tout ce qu'elle
touche.
Culture et histoire
Le terme de culture est d'origine romaine. Il dérive du
mot "colerer". Il signifie, prendre soin, entretenir et
préserver. Il renvoie primitivement au rapport romain qui
existe entre l'homme et la nature. La science des paysages, l'agriculture,
est le point de départ, de cette idée chez les Romains.
Chez les Grecs l'agriculture n'existe pas. "Ils arrachent aux
entrailles de la terre les fruits que les dieux avaient cachés".
Pour les Grecs, les arts s'apparentent à la fabrication.
Ils pensent, qu'apprécier est une qualité politique
nécessaire à la conduite de la cité. L'amour
de la beauté, l'amour de la sagesse, est une activité
plus hautement considérée que la fabrication. Les
Grecs sont les inventeurs de la notion de goût. L'amour de
la beauté demeure barbare s'il n'est accompagné par
la faculté de juger, de discerner. Rejetant très loin
la notion de philistin, les Grecs sont capables d'adorer le bon
en rejetant ceux qui se chargent de faire, artistes et artisans
car ils ont une conception trop utilitaire de l'objet qu'ils fabriquent.
La place de l'artiste
Athènes ne réussit jamais à régler
le conflit entre la politique et l'art. Les Romains n'accorderont
jamais aux artistes la dignité propre aux citoyens romains.
Nous sommes enclins à soupçonner que c'est dans le
domaine politique et la participation aux affaires que l'on retrouvera
l'origine du véritable malaise entre l'artiste et la société.
Plus qu'envers la société elle-même c'est par
rapport à l'activité politique que l'artiste élaborera
une méfiance envers les hommes d'actions.
La place de l'Art
Pour Hannah Arendt, il existe une interdépendance entre
culture et action politique. Pour paraître, l'œuvre d'art
a besoin de l'espace public. Dans le cadre de la vie privée,
les objets d'art peuvent être considérés comme
des valeurs universelles mais ne peuvent acquérir leur validité.
La culture indique que le domaine public, rendu politiquement sûr
par des hommes d'actions, offre un lieu de déploiement dont
l'essence est de faire apparaître le Beau. L'art et la politique,
nonobstant leurs conflits sont liées dans une mutuelle dépendance.
La fonction politique de l'art
Dans "la critique du jugement", Emmanuel Kant nous dit
que le goût utilise les mêmes ressorts intellectuels
que la capacité de jugement. La relation active au beau,
relève des mêmes capacités que l'action politique.
Il s'agit de déterminer un impératif catégorique
dans lequel l'action doit pouvoir être érigé
en loi générale. "Être en accord avec soi-même"
est insuffisant pour Kant, il faut être capable de penser
à la place de quelqu'un d'autre. Ainsi approche-t- il le
principe de législation du concept de goût. Il s'agit
de juger, pas d'élaborer un dialogue entre "moi et moi-même".
Les opinions deviennent légitimes, quand elles sortent de
la sphère privée.
Là se croisent encore la culture et la politique. Le goût
comme la capacité de juger, doit sortir de l'arbitraire de
l'esthétique et ne peut être traitée hors du
domaine politique comme hors de la sphère de la raison. Il
nous explique que "par nature", une belle chose aura un
caractère public. La décision du beau, rejoint le
jugement politique en ce sens qu'elle doit être un lien commun
à tous les habitants. De même il existe des classes
déterminées par les croyances politiques, de même
nous sommes tentés de ranger le goût dans les principes
d'organisation d'une société. L'artiste, est un médiateur
entre le constructeur et le politique. L'homme de goût est
avant tout un esprit libre, à même de gouverner la
cité.
Est-il indispensable que le domaine politique soit le lieu des
tromperies. Les mensonges sont considérés comme des
outils "nécessaires" dans le métier du politicien,
du démagogue, serait-ce la vocation de l'homme d'état?
L'auteur pose la question: est-il de l'essence même du pouvoir
d'être trompeur? est-il de l'essence même de la vérité
d'être impuissante? Dans le contexte de l'action politique,
la vérité impuissante est plus méprisable que
le pouvoir non soucieux de la vérité.
Vérité et politique
La vérité un facteur intangible
Dire la vérité politique, est un facteur intangible
de durée pour l'état. Kant pense, qu'elle doit prévaloir
dans tous les cas même si "toute la canaille du monde
doit mourir". Le droit humain doit prévaloir, sans égard
pour la quantité de sacrifices exigée des pouvoirs.
De tels propos deviennent de pures chimères dans le contexte
du monde politique. Spinoza pense qu'il n'y a pas de plus haute
loi que celle de sa propre sécurité. Si nous concevons
l'action politique en termes de moyens et de fins concluons que
le mensonge peut servir à établir ou à sauvegarder
les conditions de la recherche de la vérité.
La vérité objet de conflit
Dans la plupart des états il y a conflit entre vérité
et politique. Pour Platon, tant que "le diseur de vérités"
ne se mêle pas du monde, il est simplement ridiculisé.
Mais, si tous mettent la main sur un tel homme, tous le tuent. Rien
ne justifie le mensonge politique même la survie de la cité.
Pour les Grecs, la cité est le refuge des philosophes, leur
vie humaine n'a ni sens ni valeur hors de la conduite des affaires.
Pour Hobbes, une vérité qui ne s'oppose à aucun
intérêt ni plaisir humain, reçoit un bon accueil.
Il établit l'existence d'une pensée évidente:
Celle-ci est respectée même par les tyrans. Il tempère
son propos en posant la différence entre "la mise au
bûcher des hommes et celle des idées". Que pouvait
penser Galilée d'une telle déclaration ?
Le sens de la vérité
Existe-t-il une vérité hors de la liberté?
Dans ce paragraphe l'auteur introduit l'idée de vérité
des faits et de vérité de la raison. Les chances pour
la vérité de survivre à l'assaut du pouvoir
sont minces. La politique est le champ d'expression du mensonge
personnel et sociétal. Quand Trotski se vit repoussé
des encyclopédies, des images et de l'histoire, il comprit
que, plus que la vérité, sa vie était en danger.
Pour Platon le mensonge est plus grave que la tromperie, celui-ci
a son siège dans la vérité. L'auteur détaille
la notion de vérité et d'opinion. L'opinion est la
vérité du moment, celle de l'instinct. Elle est sujette
à des mouvements et dépend du nombre des personnes
qui la défendent. La vérité, fût-elle
défendue par un seul philosophe, sera toujours la vérité.
Spinoza prône la liberté de la pensée non celle
de la parole. Kant pense que le pouvoir qui priverait la liberté
"de parole" priverait la liberté "de penser".
Hannah Arendt analyse la proposition kantienne dans les régimes
totalitaires. Il est plus facile et moins dangereux dit-elle d'exprimer
des opinions hérétiques que des remarques sur le réel.
Mise sur "la place du marché", la vérité
devient une opinion et peut subir les mêmes attaques que la
parole du philosophe revenant dans l'ombre de la caverne.
La vérité de fait
Il faut distinguer la vérité de fait de celle des
opinions. La seconde se nourrit de la première. La vérité
de fait fournit des informations à la pensée politique
tout comme la vérité rationnelle fournit les siennes
à la spéculation philosophique. Au-dessus du philosophe
la vérité rationnelle s'impose sans coercition.
La somme des angles d'un triangle est égale à
180 degrés. Cette affirmation rend la persuasion inutile.
Cette vérité sera apportée par l'instruction.
Cette dernière entraîne l'inégalité,
elle est une forme douce de coercition. La vérité
mathématique apparaît comme une vérité
despotique. Elle sera haïe des tyrans. Pour Kant, le véritable
processus de formation de l'opinion est déterminé
par ceux à la place desquels quelqu'un pense. La qualité
d'une opinion, aussi bien que d'un jugement, dépend de son
degré d'impartialité. La vérité apparaît
comme une forme raisonnée, étudiée, de l'opinion.
Hors des grecs, cette idée ne pouvait naître que dans
une philosophie qui prenait au sérieux le domaine des affaires
humaines.
Mentir ou se tromper
Dans un chapitre précédent, l'auteur préfère
s'égarer avec Platon plutôt que être d'accord
avec ses adversaires, elle préfère être brouillée
avec le monde entier qu'en contradiction avec elle-même. Elle
reprend l'idée du dialogue silencieux de Platon. Pour le
philosophe, cette proposition relative au "mal fait et subi"
n'est pas moins contraignante que la vérité mathématiques.
Pour Machiavel il faut protéger le domaine public contre
le principe de la croyance. Il y voyait, lui, le principe de la
foi. Les hommes doivent se soucier peu de ce qui est "bon pour
eux-mêmes" dans les affaires du bien public. L'erreur
est toujours possible à l'égard de la vérité
des faits mais l'important est qu'il existe une autre possibilité
que la fausseté délibérée. La recherche
de la vérité est en opposition avec l'intérêt
personnel. Dans le cas contraire, elle débouchera sur une
recherche d'asservissement des opinions sur la scène politique.
La substitution systématique de la vérité dans
le monde politique n'a pas pour conséquence de remettre en
cause le mensonge, mais elle fera douter tous les hommes de la vérité
sous toutes ses formes.
Conceptuellement nous pouvons appeler la vérité ce
que l'on ne peut pas changer. Métaphoriquement, elle est
le sol sur lequel nous nous tenons et le ciel qui s'étend
au-dessus de tout.
La conquête de l'espace
La conquête de l'espace nous contraint à raisonner
sur l'importance de la place l'homme dans son monde et sur sa relativité
dans l'espace. L'analyse de sa place dans le cosmos l'oblige une
vision moins anthropomorphique moins ethno-centrée.
les visions de la science moderne
Une victoire de la science moderne a été de s'affranchir
de toutes les préoccupations anthropomorphiques présentes
jusqu'au XIXe siècle, de s'extraire d'une vision humaniste.
Pour le savant, l'homme n'est qu'un observateur de l'univers en
ses multiples manifestations. Nous avons appris que l'observation
de cet univers échappe à la perception humaine, aux
instruments. La physique n'observe plus des phénomènes,
des apparences, mais des correspondances, des traces laissées
sur nos instruments de mesure. La science qui nous a conduit sur
la Lune, ne cherche plus à augmenter et ordonner mais à
découvrir ce qu'il y a derrière les phénomènes
naturels tels qu'ils se révèlent à nous.
La place de l'homme de sciences
Jusqu'au XXème siècle la fonction des hommes de science
est de découvrir, d'approfondir des notions comme la vie
de l'homme, la connaissance. Aujourd'hui les origines et débuts
initiaux importent peu, seul compte ce qui est derrière les
apparences. Sommes-nous dans un monde que seuls les savants comprennent
? Vu dans le prisme des sciences politiques il seront les représentants
du petit nombre habilités à régir le "grand
nombre". Cette séparation entre profanes et savants
est bien loin de la vérité. Ce sont les hommes qui
ont purgé la science de tout élément anthropomorphique.
Le nouvel univers auquel nous tentons d'accéder n'est pas
seulement inaccessible pratiquement, il n'est pas pensable, car
il est faux. Penser qu'un cerveau humain ne peut pas comprendre
ce que des ordinateurs peuvent faire, est un contresens métaphysique
total sur l'idée que la compréhension est une fonction
de l'esprit, jamais un résultat automatique de l'intelligence.
L'homme de science n'est pas hors de la sphère du profane
car il peut faire, avec succès, ce qu'il n'est pas à
même de comprendre, ni d'exprimer dans le langage humain courant.
L'homme dans le Monde
L'entreprise scientifique moderne commence avec les pensée
sur la place de l'homme. Copernic imagine qu'ils se tiennent sur
le soleil. Galilée les cherche dans les étoiles. Einstein
ne fait que généraliser cette vue en introduisant
un observateur librement en équilibre dans l'espace et non
sur un point déterminé. Cette révolution balaie
l'idée que "l'univers" est encore un centre. Au
XXe siècle l'homme et le scientifique ont perdu contact.
Ce n'est pas le savant, mais "le plombier" qui a rétabli
le contact perdu entre le monde des sens, des apparences et la vision
du monde de la physique. Les techniciens ont fait descendre sur
terre les résultats des savants. La conquête de l'espace
réveille l'idée que nous devons quitter le monde de
nos sens et de nos corps non en imagination mais en réalité.
L'observateur en équilibre serait un enfant de l'abstraction
et de l'imagination. L'homme confronté "au paradoxe
des jumeaux" d'Einstein ne sera plus lié au concept
de temps. Cette idée sonne le glas de la "consolation"
de Descartes : "je doute donc je suis". En continuant
d'expérimenter les techniques de l'espace, le paradoxe du
"temps de vie", contraindra l'homme à ne rencontrer
que ce qu'il a fabriqué. En dernière analyse, en étudiant,
l'homme va vers l l'homme.
La conquête de l'espace et la science se sont périlleusement
approchées du point où le formalisme extrême
des symboles mathématiques, transcende le comportement humain.
Si jamais cette limite devait être atteinte, la dimension
de l'homme ne serait pas simplement réduite, elle serait
détruite. La construction et la technologie ne sont pas un
effort mécanique, mais métaphysique.
Conclusion
"Ce qui l'émeut, émeut. Ce qui lui plaît,
plaît. Son heureux goût est le goût du monde".
Lire, Hannah Arendt c'est d'abord vivre et éprouver pour
son propre compte ce partage de l'émotion et du plaisir,
cette disposition à partager le monde avec ces éternels
étrangers qui sont nos semblables.
Cela ne signifie pas que l'on adhère à ses thèses,
que l'ont fait sienne ses interprétations, qu'on la suit
dans ses avancées théoriques. C'est une expérience
très différente et très surprenante. On n'est
pas d'accord, on discute pied à pied, on pense que c'est
très audacieux et l'on est emporté, ravi. On trouve
que c'est imprudent, très péremptoire. Parfois, elle
exagère. On ne commente pas Hannah Arendt, on entretient
avec elle une conversation parce qu'avec elle, le monde prend la
parole.
Elle n'est pas la fantaisie qui pense les choses. Elle instaure
la distance qui permet ensuite de revenir à la densité
du monde commun. Elle montre dans cet ouvrage combien l'homme est
un "animal politique". Elle associe le pouvoir de l'imagination
et celui de nous mettre à la place de tout autre, à
la faculté virtuelle de "produire le monde commun".
L'abandon de ce pouvoir signifiant la perte du Moi, du Monde, de
la faculté de penser et d'éprouver.
Table des Matières :
Biographie *
Principaux ouvrages *
Postulats et hypothèses *
La brèche entre Passé et Futur *
* Les ressources du cadre *
* Transmettre le sens *
Quelle démonstration *
Un livre de pensées à l'essai *
* L'unité du tout *
* La disparition de la tradition *
Résumé *
Revenons à nos classiques. *
Platon *
* Être et savoir *
* Dialectique de la raison et de l'amour *
* réminiscence et maïeutique *
* Morale et politique *
Aristote *
* Forme et matière *
* Inventeur de la logique *
* La métaphysique *
* La Physique *
* La morale et la politique *
La tradition et l'âge moderne *
* Apparition du concept de "La Tradition" *
* La tradition et le Travail *
* La rupture du monde moderne *
* Conclusion *
Le concept d'histoire *
* L' histoire antique et moderne *
* Histoire et nature *
* Naissance de l'Histoire *
* Une conception paradoxale *
* L'histoire, une poésie *
* Histoire et science moderne *
* L'apport de Descartes *
* Histoire comme processus indépendant *
* L'historiographie chrétienne *
Qu'est-ce que l'Autorité *
* un concept évanoui *
* L'autorité, une définition unique ? *
* S'il fallait donner une définition *
* Une crise de la religion *
* Régime autoritaire, tyrannique ou totalitaire *
* L'autorité chez les Grecs *
* La pensée romaine *
* La pensée Chrétienne *
* Les idées de Machiavel *
* Les révolutions *
Qu'est-ce que La Liberté *
* Les origines *
* la liberté intérieure *
* l'espace public *
* la liberté agent de l'action *
* La liberté un miracle ? *
La crise de l'éducation *
* Une idée transversale *
* L'Education image du Politique *
* La crise en Amérique *
* Quelles sont les causes de la crise. *
* Crise de l'éducation et rupture avec La Tradition *
* L'école, une voie vers le monde *
La crise de la culture *
* Culture de masse *
* Les philistins *
* Une rupture dans la culture *
* L'œuvre est éternelle *
* Culture et loisirs *
* Culture et mythes *
* Culture et histoire *
* La place de l'artiste *
* La place de l'Art *
* La fonction politique de l'art *
Vérité et politique *
* La vérité un facteur intangible *
* La vérité objet de conflit *
* Le sens de la vérité *
* La vérité de fait *
* Mentir ou se tromper *
La conquête de l'espace *
* les visions de la science moderne *
* La place de l'homme de sciences *
* L'homme dans le Monde *
Conclusion *
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