"Nouveau millénaire, Défis libertaires"
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Guide du manifestant interpellé
Cami

Ce guide a pour but de permettre à chacun, participant à des manifs ou des actions, de comprendre chacune des périodes qui vont de l'arrestation au procès, dans les cas où la police a décidé de réprimer un certain nombre d'actions. Ce guide ne prétend pas donner de recettes miracles et permettre la relaxe des éventuels inculpés. Il n'entend pas non plus rentrer dans le débat sur la culpabilité. Il veut essayer de permettre à quiconque pris dans l'engrenage judiciaire, de s'en tirer au mieux, sachant que la condamnation (à du sursis) est la règle en matière de procès de manifestants, et la relaxe ou la prison ferme sont l'exception.

Le parcours d'un(e) manifestant(e) inculpé(e)
Ce texte ne prétend pas donner de comportement impératif à tenir. En effet, en matière d'actions collectives, toutes les attitudes dépendent des circonstances et des rapports de force, et il n'existe pas de règle idéale, théorique, qu'il faudrait appliquer systématiquement.
Toutefois, cette réserve faite, des principes peuvent se dégager de la pratique de manifestations ou autres, principes généraux liés essentiellement à la nécessité du collectif.
Ces principes, qui sont ceux de la maîtrise de ses actes et de son environnement, peuvent permettre une force collective surprenante et éviter des paniques suivies de débandades et d'arrestations. Mais ils ne sont pas exhaustifs et ne prétendent pas être la bonne et seule manière d'agir. Ils sont simplement des indicateurs, libre à chacun d'en faire ce qu'il veut : les règles sont bien sûr faites pour être critiquées.

Avant de vous rendre dans une manifestation :
- Tâchez de vous renseigner à l'avance sur le parcours.
- N'emmenez pas de carnet d'adresses, d'armes (même pas un opinel…), de drogues.
- Prenez des papiers d'identité et apprenez par cœur le nom et le téléphone d'un avocat.
- Votre tenue doit être la plus neutre et la moins voyante possible.
- Pensez à prendre un foulard - pas forcément un bandana rouge - contre les lacrymos (et éventuellement pour vous masquer), ainsi qu'une capuche ou une casquette (quand les lacrymogènes retombent...).
- Préférez des chaussures type baskets avec lesquelles vous pourrez courir.
- Pour les yeux, évitez les citrons, le sérum physiologique est par contre assez efficace.

Dans les manifs
Arrivez groupés, partez groupés, restez groupés et actifs. Pour la dispersion, ce sont en général les organisateurs ou la police qui décident la fin de la manif. Toutefois, lors de mouvements sociaux, la rue appartient aux manifestants qui décident parfois de continuer la marche après l'annonce de dispersion. La manif cesse alors d'être encadrée et légale. Il appartient alors aux participants de s'autogérer. Déplacez-vous de façon compacte et mobile, en prenant garde de ne pas tomber dans une souricière, c'est-à-dire que toutes les issues soient fermées par des cordons policiers. Déterminez alors vous-mêmes l'heure de votre départ collectif, en fonction du rapport de forces. Ne restez ou ne partez pas tout seul, c'est le moment privilégié des arrestations. Apprenez à reconnaître les forces de l'ordre : CRS (police) et gardes mobiles (armée) en uniformes, chargés d'encadrer et de disperser la manifestation, BAC (Brigade Anti-Criminalité) en civil, cow-boys chargés des interventions rapides et des arrestations brutales ; et enfin RG (Renseignements Généraux) en civil, police politique chargée de surveiller les réseaux militants et les événements politiques. Méfiez-vous des appareils-photo et des caméras qui pourraient ensuite être utilisés contre vous. Les charges policières ont pour but d'éparpiller les manifestants, de les effrayer afin que la manif se disloque. Ne cédez pas à la panique : mettez-vous en chaîne quand c'est possible, soyez solidaires entre manifestants. Les charges policières ont aussi pour but d'arrêter un certain nombre de manifestants : personnes repérées ou ne courant pas assez vite, I'arbitraire est total.

Le départ en fin de manif
Au moment du départ, quelques règles élémentaires de sécurité s'imposent. Tout d abord vérifiez que vos camarades sont tous avec vous et prévenus du départ, puis déplacez-vous discrètement si la manif est chaude, c'est-à-dire par petits groupes peu éloignés les uns des autres. Jetez ou cachez tout ce qui est marchandise volée, cagoule, armes, gants sales. Il y a des risques de contrôles aux alentours, mais aussi dans le métro et dans les gares. Dans le métro, ne vous agitez pas trop et ne racontez pas vos exploits à la cantonade, car vous pouvez être arrêté pour flagrant délit à n'importe quel moment.

L'arrestation
Parfois, lors de manifestations "chaudes" et de mouvements sociaux importants, le préfet décide de procéder à des arrestations immédiates. A ce moment l'arbitraire commence. N'importe qui présent sur les lieux alors que la police a décidé de procéder à des interpellations peut se trouver arrêté, tabassé et emmené au commissariat en contrôle d'identité ou en garde à vue. Il faut à la police un quota d'inculpés en contrepartie des "manifs chaudes", pour cela, n'importe qui fera l'affaire. Lors des arrestations, s'il y a encore de nombreux manifestants, tentez d'exiger la libération des arrêtés. Lors des charges où les CRS s'emploient à "nettoyer" les places, ceux et celles qui ne courent pas assez vite risquent fort une aventure judiciaire. C'est pourquoi il est conseillé aux manifestants de rester groupés et compacts, en chaîne, lors de ces charges afin de ne pas laisser la police rafler d'autres manifestants ou bien vous mêmes. Si vous êtes interpellé et seul au milieu des policiers, mieux vaut la fera mer tout de suite, refuser de reconnaître tout ce qu'ils vous diront, et attendre stoïquement la suite des événements. Si vous êtes victime de violences lors de l'arrestation ou du transport en fourgon, demandez immédiatement à voir un médecin, relevez les numéros de matricule des policiers présents. Si vous êtes plusieurs, tâchez d'échanger vos identités et téléphones afin de ne pas vous isoler si vous êtes incarcérés notamment. De plus n'hésitez pas à faire part aux autres d'un nom d'avocat que vous connaissez, ainsi que des conditions de votre interpellation, des attitudes à avoir et des suites éventuelles : garde à vue, inculpation, procès.

Au commissariat
Vous pouvez être emmené au commissariat, soit pour un contrôle d'identité (4h), soit pour une garde à vue (24h ou 48h si renouvelée). Vous allez alors être interrogé par un officier de police judiciaire (OP1), qui va rédiger un procès-verbal (PV). Celui-ci est une simple main courante si vous êtes en contrôle d'identité. Si vous êtes en garde à vue, par contre, ce PV sera utilisé lors du procès si vous êtes inculpé, comme votre première déclaration.
La règle, en matière d'action collective, est de ne rien déclarer, c'est-à-dire de décliner juste identité et source de revenus (ce qui est obligatoire), puis de répondre " je n'ai rien à déclarer, à toutes autres questions ". En effet, vous n'êtes pas obligé de répondre. Dans un cadre collectif, le risque de réponses contradictoires voire dangereuses pour les autres fait préférer un silence collectif (du moins dans cette phase).
Si malgré tout vous choisissez de répondre, faites bien attention aux questions des flics et à vos réponses lors de la rédaction du PV : tout ce que vous reconnaîtrez servira à vous condamner ou à condamner d'autres (recoupement des diverses déclarations). Ainsi il vaut mieux ne rien reconnaître de ce qu'ils vous reprochent, et ne pas signer si le procès-verbal ne correspond pas à votre version des faits. Normalement vous pouvez le modifier autant qu'il vous plaira. Si vous signez, veillez à ne laisser aucun espace blanc entre la déclaration et la signature. En règle générale, il vaut mieux ne pas le signer, quitte à le justifier devant le juge après (" j'ai reçu des pressions des policiers, j'ai été frappé, donc j'ai refusé de signer, ce qui est mon droit ", " je suis innocent ", etc.).

Vous êtes arrêté et questionné après une action :
- Refusez de répondre à tout ce qui concerne la préparation, comment vous avez été prévenu, quel était le rendez-vous, etc.
- NE CITEZ JAMAIS AUCUN NOM.
Quand vous êtes face à une question embarrassante, ne répondez pas.
- La seule chose à laquelle vous êtes obligé est de décliner votre identité et vos sources de revenus. Une garde à vue, c'est un peu long, prenez votre mal en patience et contrôlez-vous.
- Si vous êtes blessé, demandez à voir un médecin qui vous établira un certificat médical.
- Si vous êtes plusieurs, essayez d'échanger vos identités et téléphones avec les autres gardés à vue pour organiser la défense après.
- Comptez-vous : ainsi si vous sortez vous pourrez savoir le nombre et le nom des gens qui restent éventuellement, les motifs d'inculpation et toutes infos utiles.
- Vous pouvez appeler un avocat à partir de la 20ème heure de garde à vue. Sinon, vous pouvez demander avant à prévenir quelqu'un à l'extérieur, mais c'est un flic qui s'en chargera.
- Vous pouvez demander de la bouffe (payante), mais vous n'êtes pas sûr de l'obtenir.

Pour les mineurs, la situation est un peu différente : les flics sont obligés d'appeler chez leurs parents qui doivent venir les chercher au commissariat.

Devant le procureur
Le procureur (ou son substitut) est chargé de décider du motif d'inculpation sous lequel vous allez comparaître devant le juge. Vous serez confronté à lui à la fin de la garde à vue, généralement le lendemain de l'arrestation. Il représente le Parquet, et c'est lui qui décide s'il y a lieu de vous inculper ou non. C'est aussi lui qui décide des motifs d'inculpation devant une chambre correctionnelle.
En général, lors des arrestations en manif, les motifs d'inculpation sont : "outrage", "rébellion", "violence à agent", "jets de projectile", "dégradations", "port d'arme prohibée", "vol". Il est conseillé de ne jamais reconnaître aucun des actes qui peuvent constituer des délits (qui sont fort souvent reprochés à des arrêtés qui n'ont rien fait mais que le procureur a décidé de poursuivre à titre d'exemple ou pour justifier les éventuelles blessures de l'inculpé). Lors de votre visite chez le procureur, vous aurez un nouvel interrogatoire qui aboutira à un second procès-verbal. Il est très important que le procès-verbal que vous établirez chez le procureur, soit cohérent avec celui que vous avez fait au commissariat ou le démente formellement, sinon le juge vous coincera au tribunal en vous accusant de mentir. Si vous voulez démentir le procès-verbal de l'interrogatoire policier, précisez-le bien, et argumentez en expliquant la tension de la garde à vue, et le fait que vous ayez subi des pressions, mais que maintenant vous revenez sur ces premières déclarations.
Il arrive que le procureur vous invite à rencontrer une assistante sociale. Vous n'y êtes pas obligé, d'autant plus que tout ce que vous direz pourra être utilisé contre vous au procès (ex: la pratique d'un sport de combat contre un inculpé pour coups et blessures lors d'un procès de décembre 1995).

La comparution immédiate (saisine directe)
Le procureur décide de la date de votre comparution devant le juge. La procédure de comparution immédiate vous emmène devant le juge environ 24h après les faits, sans vous permettre de préparer une défense, de trouver des témoins, un bon avocat. En outre, les peines infligées à ceux qui passent en comparution immédiate sont souvent plus lourdes (prison ferme) que pour ceux qui sont convoqués plus tard, pour les mêmes motifs. Cette procédure de comparution immédiate doit être refusée par l'inculpé au début du procès, sauf cas exceptionnel, mais le juge peut alors soit décider de libérer l'inculpé et de lui donner un prochain rendez-vous, soit de le placer en détention jusqu'au procès. Vous devez alors faire plaider votre libération : I'avocat doit faire une demande de mise en liberté en fournissant des garanties de représentation au juge : certificats de travail, d'étudiant, justificatif de domicile.
Les procès des manifestants inculpés à Paris en décembre 1995 ont montré que les juges, agents d'une justice de classe, faisaient passer en comparution immédiate _ les chômeurs et les précaires et donnaient des rendez-vous judiciaires aux étudiants et travailleurs. Les quatre inculpés du Cash-Converter à Paris le 12 février
1998 ont été emprisonnés pendant 15 jours après avoir refusé de passer en comparution immédiate. Mais, le 26 mars, un mois après avoir été libérés lors de la première audience reportée, ils ont finalement eu des peines de sursis et de travail d'intérêt général (TIG), et non des peines fermes, comme cela aurait pu être le cas en comparution immédiate.

Avec l'avocat
Après la visite chez le procureur, et si vous passez en comparution immédiate, vous allez être présenté à un avocat juste avant le procès. Soit vous aurez signalé au procureur que vous avez un avocat, soit ce sera un avocat commis d'office, c'est-à-dire de permanence ce jour-là au Palais, souvent inexpérimenté, qui prendra votre dossier au dernier moment parmi plusieurs autres. Ce qui est sûr, c'est que l'avocat n'aura pas le temps de préparer une défense. C'est à lui que vous devez demander de reporter l'audience et de trouver des garanties de représentation (certificats d'étudiant, de travail, de domicile) afin qu'il puisse demander votre mise en liberté et que vous ne soyez pas placé en détention préventive. Pensez à avoir chez vous des certificats que vos parents ou amis pourront trouver facilement si vous êtes inculpé.
Si vous êtes convoqué plus tard pour le procès et remis en liberté, vous devez préparer votre défense. Pour cela, il faut récupérer le dossier d'instruction au tribunal (par le biais d un avocat), le lire de la première jusqu'à la dernière ligne, et accorder une attention particulière aux procès-verbaux (PV) des policiers témoins à charge contre vous. En effet, c'est sur ces déclarations que le procureur a décidé de vous inculper et que le juge va vous juger. Vous devez les critiquer en contestant leur version des faits, et en adoptant une défense plausible et cohérente. Pour étayer vos affirmations, il faut trouver des témoins à votre décharge. Ceux-ci doivent avoir été présents au moment des faits, et pouvoir expliquer la situation de manière différente de la version policière. Il faut qu'ils soient utiles, c'est-à-dire qu'ils amènent des éléments qui démontrent votre absence de culpabilité. Ils peuvent être écrits ou oraux au moment du procès. Vous devez faire citer les témoins oraux par un avocat, normalement quelques jours avant le procès. Le fait d'avoir des témoins à la barre est payant (l'argent étant versé au greffe du tribunal). Le tarif est moins cher si vous présentez vos témoins oraux au début de l'audience. L'avocat est un spécialiste et un technicien : généralement, c'est avec lui que vous préparerez votre défense. Toutefois, I'avocat n'est pas plus apte que vous à juger les enjeux et rapports de force : il ne doit pas vous imposer une défense, mais vous aider à exprimer et défendre vos actes et votre point de vue.

Devant le juge
Vous rentrez dans le théâtre comique. Avez-vous déjà remarqué combien les rôles sont répartis dans ces chambres ? Aujourd'hui vous êtes l'accusé. Etrange ? Comment sortir de ce cauchemar 7 Tout d'abord en étant poli avec monsieur le juge qui aime qu'on lui témoigne du respect, en étant vêtu d'habits bourgeois pour faire croire que vous appartenez à leur monde, en ayant une version des faits construite et plausible, en ne vous laissant pas impressionner par un juge retors ou franchement hostile, en ayant amené de respectables témoins qui diront que vous n'avez rien fait et que vous êtes très gentil. Si votre avocat est efficace, il aura étudié le dossier et cherchera à amoindrir les dépositions des flics qui en général regorgent d'incohérences, mais tout cela n'aura qu'un effet moindre sur l'avis du juge, qui, en bon défenseur de la loi, prendra de toute façon toujours partie pour sa police, et se ralliera généralement à l'avis du procureur. Il faut comprendre que les procès de manifestants sont généralement des mascarades : le juge ne juge pas les faits qui sont reprochés au manifestant, mais sa participation à une manifestation qu'il faut réprimer. Généralement les procès sont fabriqués sur les témoignages des policiers qui ont procédé aux interpellations et doivent donc les justifier. La question devient alors : le juge doit-il faire confiance à un accusé qui nie ou aux représentants de la loi que sont pour lui les policiers ? La réponse est vite tranchée, sauf lorsque les avocats arrivent à montrer les incohérences parfois énormes recueillies dans les témoignages policiers. Parfois, le facteur temps entre aussi en jeu. Ainsi, pour les mêmes délits reprochés, les peines que la 23e chambre correctionnelle de Paris a infligé aux manifestants du mouvement social de décembre 1995 ont été quelques mois ferme pour les comparutions immédiates, quelques mois de sursis au début des procès reportés, et huit jours de sursis pour le dernier jugé.

Après la condamnation
Vous pouvez être condamné à différentes peines. Celles-ci s'exécutent ensuite sous le contrôle d'un juge d'application des peines (JAP)

1. Peine de prison ferme (incarcération)
Si vous avez été arrêté lors d'une manifestation, vous pouvez vous retrouver en prison, soit en préventive, en attendant d'être jugé ; soit en accomplissant une peine. Vous serez sans doute dans une maison d'arrêt. (:'est soit le juge correctionnel, soit le JAP, qui vous met sous mandat de dépôt. Lorsque vous arrivez, rien ne vous est expliqué par l'administration pénitentiaire (AP). Il faut donc demander des explications aux autres détenus, pour toutes les démarches et notamment pour la cantine et les autorisations de faire entrer des fringues autres que le minimum. Normalement les autres vous prêteront ce qui vous manque jusqu'à l'arrivée d'un mandat. Ecrivez au plus vite pour prendre contact avec l'extérieur, en expliquant tout ce que vous savez du fonctionnement, notamment sur les permis de visite, les jours de cantine, les possibles envois, etc., afin que tous les problèmes pratiques soient résolus au plus vite. Vous rencontrez un éducateur à votre arrivée qui peut téléphoner à un proche, mais gardez toujours en mémoire qu'il est salarié par l'A.P.

2. Peine de prison avec sursis
Vous ne serez pas emprisonné. Toutefois, pendant un certain délai, vous êtes emprisonnable.
- Sursis simple : pendant un délai choisi par le juge (jusqu'à 5 ans), vous risquez d'accomplir cette peine de prison, si vous êtes de nouveau condamné. Puis, au bout de ce délai, vous serez délivré de cette condamnation.
- Sursis avec mise à l'épreuve (possible dans le cas où vous avez déjà été condamné) : la peine de sursis avec mise à l'épreuve est plus restrictive : pendant une durée de 18 mois à 3 ans, vous êtes placé sous le contrôle judiciaire du 1AP, et vous risquez d'être incarcéré directement en cas d'arrestation, sans même comparaître de nouveau devant un tribunal.

3. Peine de travail d'intérêt général (TIG)
C'est une peine complémentaire au sursis, et non pas alternative. il s'agit de travailler gratuitement entre 40h et 240h pour une collectivité publique, un établissement public ou une association (ex : nettoyer les chiots d'un commissariat, véridique). Quand vous aurez accompli la peine de TIG, le sursis tombera. Vous avez le droit de refuser d'accomplir ces heures de travail, censées réparer les torts que vous avez causé à la société.

4. Amendes
L'amende est une somme que vous devez payer à l'Etat en réparation du tort soit disant causé à l'ordre public. Elle peut être assortie du sursis.

5. Dommages & intérêts
Ceci est une condamnation civile, généralement suite à une plainte d'un flic (souvent, celui qui vous a interpellé). Le montant varie du franc symbolique à quelques milliers de francs, selon le nombre de jours d'incapacité temporaire de travail (ITT) dont a bénéficié le policier après vous avoir interpellé

6. Inscription au casier judiciaire
La peine à laquelle vous avez été condamné va apparaître dans votre casier judiciaire. Celui-ci est découpé en 3 bulletins :
- Bulletin n° 1 : réservé aux autorités judiciaires, il contient le relevé intégral des fiches du casier judiciaire.
- Bulletin n° 2 : il est réservé aux autorités administratives telles que préfectures autorités militaires, autres administrations. Plus restreint, entre autres il ne comprend pas les peines de sursis lorsque le délai est dépassé. Le juge peut décider de ne pas faire inscrire la condamnation au bulletin n° 2 du casier.
- Bulletin n° 3 : il est réservé à la personne qu'il concerne, ne peut être remis à un tiers. Il comprend les condamnations à des peines de plus de 2 ans de prison (ou moins si le juge a ordonné l'inscription au bulletin n° 3), et les condamnations à des interdictions, incapacités ou déchéances. Il est possible de demander la non-inscription des peines sur les bulletins n° 2 et n° 3.

Les délit imputés aux manifestant(e)s
Généralement, surtout si vous n'avez jamais été condamné, vous prendrez une peine de prison avec sursis, parfois une amende ou un travail d'intérêt général. Toutefois, quand les juges décident de réprimer, les peines de prison ferme peuvent pleuvoir. Ainsi en a-t-il été au Tribunal de Montpellier en décembre 1995 notamment, où plusieurs manifestants ont pris plusieurs mois de prison ferme pour des délits mineurs (exemple ; un homme qui avait reconnu avoir volé deux chemises a pris 12 mois ferme, puis 18 mois ferme à l'appel).Il y a plusieurs délits qui peuvent être reprochés à un manifestant inculpé. Souvent, vous en avez plusieurs pour le pris d'un, afin de vous coincer d'une façon ou d'une autre.

Le délit d'outrage est le plus léger. Il correspond aux insultes reçues par les flics dans l'exercice de leurs fonctions. Il est souvent en complément à d'autres délits reprochés, pour accentuer une impression négative de l'inculpé. Toutefois, il peut à lui seul valoir une peine de prison (avec sursis) de 15 jours à 3 mois, ainsi qu'une amende (500 à15000 F) et/ou des dommages et intérêts pour les flics outragés (et outrés).

Le délit de rébellion vous est reproché si vous vous êtes débattu lors de l'arrestation ou si vous avez fait des gestes "inquiétants" pour les policiers. Il donne droit à de la prison avec sursis (de 6 jours à 6 mois), ou à quelques dizaines d'heures de travaux d'intérêt général (TIG).

Le délit de port d'arme prohibée (pour des couteaux, des mousquetons, des canettes vides, des lacrymos) rapporte en général un bonus de sursis. Cela peut arriver si vous n'êtes pas assez prudent pour avoir laisser chez vous ces menus objets le temps de la manif, ou si vous vous êtes fait attraper avec.

Le délit de jets de projectiles correspond à toute canette, caillou, objet contondant non identifié, barrière lancé(e). Il vous est reproché par les témoignages des flics, que vous ayez atteint une cible quelconque ou non. II entraîne généralement du sursis ou des TIG.

Le délit de violence à agent est plus pernicieux, selon que le flic blessé aura porté plainte ou non. Il peut valoir très cher s'il est reconnu par l'accusé ou si le flic est très abîmé. En règle générale, les coups et blessures sont punissables s'ils ont occasionné des arrêts de travail (ITT) de plus de huit jours. Parmi les exceptions à cette règle, les coups et blessures sur un policier en fonction sont punissables pour moins de huit jours d'ITT (même zéro jour). La peine peut aller de 2 mois à 2 ans de prison avec sursis ou ferme si vous ne plaisez décidément pas au juge ou si la pression sociale est suffisamment forte pour qu'il décide de vous criminaliser. Les flics réclament en outre des dommages et intérêts.

Le délit de dégradation de biens : casse d'Abribus, de vitrines, de voitures, de magasins, de marchandises ou autres objets, est assez mal vécu par les juges dans notre société capitaliste. Il y a une distinction entre dégradation de bien public et dégradation de bien privé. L'étendue du délit de dégradation est assez vaste, puisqu'il va du simple graffiti au sabotage. Il vous offre la prison ferme ou avec sursis (1 mois à 2 ans) selon l'objet dégradé, le nombre de personnes arrêtées et l'environnement éventuel de luttes sociales, plus un bonus d'amende payable à l'Etat et/ou des dommages et intérêts pour le privé. Si le privé porte plainte, la peine s'alourdit en général.

Le délit de vol suite à une manif, essentiellement lors des manifs étudiantes, lorsqu'il y a pillage de magasins, est lui aussi mal vu, surtout si vous vous faites attraper avec le fruit du larcin, et si le commerçant porte plainte. Il est très important de ne jamais reconnaître les faits qui vous sont reprochés et basés sur des témoignages policiers. Les arrestations dans les manifs se font toujours dans la confusion générale autant pour les manifestants que pour les flics. Il est courant que les inculpés aient été arrêtés et "paient" pour des faits effectués par d'autres. Il est même arrivé, en décembre 1995, qu'un manifestant soit condamné pour avoir détruit un Abribus Decaux, alors que les débats à l'audience, et notamment une lettre de Decaux, certifiaient que l'Abribus désigné n'avait pas été endommagé. Les juges le savent très bien, vous devez donc toujours jouer le rôle de l'innocent arrêté par erreur.

Organiser sa défense juridique
Lorsque vous allez comparaître au procès, le juge va vous interroger sur les faits pour lesquels vous êtes inculpé, à partir des déclarations de policiers. Pour lui répondre correctement, il faut préparer une défense, c'est-à-dire une version des faits construite et plausible, qui vous convient. Il y a de multiples sortes de défenses, en fonction des logiques et des circonstances. Ce qui est proposé ici n'est qu'une piste. Le problème n'est pas que vous soyez innocent ou coupable, mais que vous êtes accusé par des représentants des forces de l'ordre et qu'il faut vous défendre, bien qu'a priori votre parole vaille moins que la leur devant un juge. Que vous niiez ou reconnaissiez, vous serez condamné. Toutefois, le fait de nier de façon construite et cohérente fait souvent planer un doute qui allège la peine, comparativement au fait de reconnaître les faits en espérant la clémence, logique suicidaire au niveau politique et pratique.
Mais cette distinction n'est pas aussi catégorique qu'elle le parait. Ainsi, lors du procès de Cash-Converter, plusieurs reconnurent avoir fait une chaîne passant des marchandises vers le trottoir, action symbolique qui ne s'apparentait pas à du vol. Ainsi, ils ont nié non pas leurs actes, mais la qualification juridique de vol. Cela était d'ailleurs d'autant plus justifié que la chaîne de magasins Cash-Converter n'avait pas porté plainte pour vol, craignant sans doute que sa réputation en prenne un sale coup.

Pour la défense, il est commun de prendre un avocat qui plaidera pour vous au procès. L'avocat est un spécialiste et un technicien ; généralement, c'est avec lui que vous préparerez votre défense. Toutefois, I'avocat n'est pas plus apte que vous à juger les enjeux et rapports de force ; il ne doit pas vous imposer une défense, mais vous aider à exprimer et défendre vos actes et votre point de vue. Il est important que ce soit vous qui preniez les décisions quant à la logique de votre défense, après avoir écouté et pesé les différents arguments.
Pour organiser la défense, il faut d'abord récupérer le dossier d'instruction au tribunal (par le biais de l'avocat), le lire de la première jusqu'à la dernière ligne, et accorder une attention particulière aux procès-verbaux (PV) des policiers témoins moins à charge contre vous. En effet, c'est sur ces déclarations que le procureur a décidé de vous inculper et que le juge va vous juger. Vous devez les critiquer en contestant leur version des faits, d'abord mot à mot. C'est-à-dire que vous devez lire attentivement chacun des faits que le policier avance et y opposer votre version lorsque vous n'êtes pas d'accord. Puis vous devez reconstituer l'action au travers des différentes phases contenues dans le PV, et déterminer les circonstances, la situation avant l'interpellation, les faits qui vous sont reprochés, les circonstances de votre arrestation contenus dans cette déclaration.
Puis, s'il y a plusieurs PV policiers (c'est souvent le cas), vous devez les confronter entre eux afin de détecter des incohérences, voire des contradictions entre les déclarations des différents policiers. Après avoir fait cela, il faut dégager une défense cohérente, qui puisse s'opposer à la version policière des faits. Il y a plusieurs façons de se défendre. Première distinction : nier ou reconnaître les faits. En règle générale il faut toujours nier, sauf s'il existe une preuve flagrante contre vous. En effet, ainsi, vous pouvez éventuellement bénéficier du doute, ce qui signifie exceptionnellement relaxe, et souvent sursis. Nier implique la contradiction, la contestation de la version policière.

S'il existe dans le dossier une preuve flagrante contre vous (empreintes sur arme par exemple), vous pouvez alors vous défendre, soit en assumant pleinement vos actes (malheureusement les juges n'apprécient pas), soit en plaidant la légitime défense ou la folie passagère, soit en détournant la qualification juridique (comme pour le vol au Cash-Converter). Après avoir choisi la logique de votre défense, il faut lui faire intégrer la réalité des faits, de manière cohérente. Vous pouvez par exemple reprendre les différentes phases temporelles ou factuelles dans les PV et y substituer votre version des faits, en fonction de la défense choisie. Vous pouvez aussi faire un schéma des rues puis un dessin décrivant l'évolution de la situation, autant pour permettre à l'avocat (qui était absent) de comprendre les faits, que pour vous permettre de reconstituer l'ensemble des données et de trouver une éventuelle issue.

Pour étayer vos affirmations, il faut trouver des témoins à votre décharge. Ceux-ci doivent avoir été présents au moment des faits, et pouvoir expliquer la situation de manière différente de la version policière. Il faut qu'ils soient utiles, c'est-à-dire qu'ils amènent des éléments qui démontrent votre absence de culpabilité. Ils peuvent être écrits ou oraux au moment du procès. Vous devez faire citer les témoins oraux par un avocat, normalement quelques jours avant le procès. Le fait d'avoir des témoins à la barre est payant, l'argent étant versé au greffe du tribunal. Le tarif est moins cher si vous présentez vos témoins oraux au début de l'audience.

Le soutien aux inculpé(e)s
De tous les temps de la répression politique, des comités de soutien ont vu le jour, pour s'élever contre l'arbitraire du tandem police/justice. On se souvient du célèbre Secours Rouge, qui, dans les années 50-60, organisait des comités de soutien dans les quartiers. Toutefois, depuis 20 ans, il n'y a pas de structure permanente de soutien aux inculpés, avec des avocats, des relais, des fonds, une grande capacité d'information. Des comités locaux et ponctuels s'organisent à l'égard des inculpés (souvent lorsqu'il y a un mouvement social ou lorsque les arrêtés ont été victimes de violences policières), plus ou moins radicaux, plus ou moins efficaces. Ils ont toutefois le mente de sortir les inculpés de l'isolement et la répression de l'indifférence dont elle bénéficie généralement. Ce texte veut permettre à chacun de pouvoir constituer un comité de soutien s'il y en a le besoin, afin que partout la résistance s'organise contre la répression.

Le soutien pratique s'effectue en plusieurs temps :
Lors de l'arrestation de manifestants, il faut commencer par demander à ce qu'ils soient relâchés, avec un rapport de forces conséquent. S'ils sont emmenés, il faut trouver des témoins de l'arrestation (manifestants, passants et commerçants), prendre leurs noms ou leur donner un numéro de téléphone. Puis noter l'heure et l'endroit exact, les effectifs policiers et de manifestants, les circonstances de l'arrestation, les éventuelles violences. Si les médias sont sur place, informez-les immédiatement. Après il faut prévenir un avocat des arrestations et des circonstances, afin que celui-ci puisse localiser l'endroit où ont été emmenés les arrêtés. Il est nettement préférable de connaître le nom d'un des arrêtés afin de savoir exactement où ils se trouvent. Eventuellement, vous pouvez vous rendre au commissariat où ils sont en contrôle d'identité ou en garde à vue pour, soit demander leur libération si vous êtes nombreux, soit essayer de leur faire passer de la bouffe et montrer aux flics qu'ils ne sont pas seuls. Vous pouvez essayer de glaner des informations mais il est peu probable qu'elles viennent du commissariat.

Le lendemain, si les arrêtés ont effectué une garde à vue (24h), ils risquent d'être inculpés et donc de passer en procès. Deux possibilités : le procureur les relâche en leur notifiant une convocation ultérieure pour le procès, ou il décide de les faire passer en comparution immédiate. Dans ce cas, l'inculpé passe devant une chambre correctionnelle le jour même (c'est-à-dire le lendemain de l'arrestation), sans avoir pu préparer de défense. Au début du procès, le juge est tout de même tenu de demander à l'inculpé s'il accepte la comparution immédiate ou s'il demande le report du procès. Il est vivement conseillé de refuser la comparution immédiate. Lors des procès de manifestants, pour les mêmes faits reprochés, le décalage dans les condamnations prononcées en comparution immédiate ou à une date ultérieure est impressionnant. Il peut passer du ferme au sursis (ou même à la relaxe) si les avocats ont pu plaider correctement en préparant le dossier. De plus, l'avantage de reculer la date est de mettre de la distance avec les faits. Toutefois, il faut savoir que le juge peut décider de garder l'inculpé en détention provisoire jusqu'au procès. L'avocat doit aller faire une demande de mise en liberté au juge, en apportant des garanties de représentations, c'est-à-dire un justificatif de domicile et si possible un contrat de travail.

Il est important que le soutien soit présent aux audiences des chambres correctionnelles les lendemains de manifs chaudes, avec un avocat, afin de se renseigner au greffe des chambres correctionnelles (flagrant délit) sur les éventuelles comparutions immédiates et l'identité des inculpés pour prévenir les proches éventuellement, trouver des garanties de représentations pour les mises en liberté, et puis bien sûr pour assister aux audiences, relever les motifs d'inculpation, les peines décidées, les éventuellement mise en détention. L'avocat, quant à lui, rencontre les prévenus peu de temps avant la comparution, il doit leur conseiller de refuser la comparution immédiate, même avec le risque de quelques temps en préventive, se renseigner sur les éventuelles violences, demander à l'inculpé où il peut se procurer les garanties de représentation. Hormis l'importance des comparutions immédiates ce jour-là, il faut aussi se renseigner au greffe sur l'identité et le jour de comparution des autres inculpés, éventuellement les rencontrer lorsqu'ils sortent du dépôt afin de leur proposer du soutien.

Les jours suivants, plusieurs prises de contact sont nécessaires :
- Avec les inculpés, par lettre ou par téléphone, afin de savoir s'il veulent un avocat et s'ils ont un revenu suffisant pour les payer.
- Avec les avocats connus, savoir s'ils peuvent prendre en charge certains des inculpés pour un prix réduit, en relation avec le comité de soutien.
- Avec les témoins de l'action, pour leur expliquer comment rédiger un témoignage et les mettre en relation avec l'avocat.
- Avec les incarcérés (en préventive ou accomplissant la peine) pour leur proposer un soutien financier, des visites, leur faire connaître le soutien. Pour cela, il faut se procurer les numéros d'écrou et écrire une lettre. En effet le courrier est important pour le moral, et aussi pour pouvoir régler nombre de problèmes techniques. Attention: sachez que tout le courrier est lu auparavant par l'administration pénitentiaire.
- Le nom de la maison d'arrêt se trouve au greffe de la chambre correctionnelle ou par l'avocat.
- Le numéro d'écrou peut être trouvé par les services sociaux de la prison ou par l'avocat.
- Envoi de mandats. En prison, les prisonniers "cantinent" pour pouvoir vivre. Or, toutes les transactions passent par l'Administration Pénitentiaire, par voie de mandats. Pour envoyer un mandats aux prisonniers, il faut aller à la poste avec de l'argent liquide, le nom et le numéro de l'écrou du prisonnier, le numéro du bâtiment et l'adresse de la prison. Il vaut mieux centraliser l'envois de mandats à un prisonnier, car au-delà d'une certaine somme, l'A.P garde le surplus.
- Linge et livres : Ils peuvent être déposés à la prison, même avant d'avoir obtenu un parloir. A cette occasion, la rencontre avec d'autres visiteurs peut vous permettre de vous renseigner sur le fonctionnement de la prison. Les livres doivent être non-cartonnés (couverture souple). Il y a une liste précise du linge qui peut rentrer dans la prison (généralement linge de corps et de toilette). De toute façon, il vaut mieux trop emmener, quitte à se voir refuser une partie, que pas assez. Pour le reste, il faudra demander une autorisation selon le règlement spécifique de la prison.
- Parloirs. Il faut aller demander un permis de visite au Palais de Justice, soit au Greffe de la Chambre concernée, soit apurés du juge d'instruction. Pour les membres de la famille du prisonnier, il suffit de se présenter avec sa carte d'identité et 3 photos d'identités. Sinon, il est possible de demander un parloir en qualité de concubin. Il faut aussi s'assurer que l'avocat à demandé un parloir avocat.

Après l'urgence, l'organisation du soutien politique
Avant toute chose, il faut que les comités de soutien respectent la volonté des inculpés, qu'ils soient libres ou emprisonnés. C'est à eux qu'appartiennent les choix de défense.Il faut savoir que la relaxe est exceptionnelle dans les procès de manifestants. Les comités de soutien n'apportent pas de recette miracle en matière de résultat du procès. Leur but est d'organiser la solidarité politique aux manifestants inculpés, en leur offrant un cadre de défense collective.
- L'organisation de la défense juridique. Elle se fait en relation entre inculpé, avocat et comité de soutien, mais la décision appartient à l'inculpé. Elle s'organise sur la base du dossier d'instruction, avec la lecture des PV policiers notamment.
- Le relais médiatique, la transmission de l'information. Pour cela, il faut rédiger un communiqué de presse mentionnant les circonstances des arrestations et des procès, le nombre des inculpés et les dates des procès, et le faxer aux quotidiens et hebdomadaires locaux et nationaux en leur laissant un contact téléphonique. Le mieux est de savoir quels journalistes s'occupent de cette rubrique et leur faxer directement. Ne pas oublier les agences de presse, notamment l'AFP.
- La récolte d'argent pour payer les frais d'avocat, les mandats. Celle-ci peut se faire par l'organisation de collectes, de péages, de concerts ou de fêtes de soutien, _ éventuellement par une contribution de riches associations subventionnées. Il peut être intéressant d'ouvrir un compte bancaire pour recevoir les chèques.
- Les actions de soutien politique : actions, réunions publiques dans les facs et les quartiers, manifs, rassemblements, collages, tractages, pétitions, discussions.
- L'organisation du soutien pendant les procès ultérieurs. Sachant les dates de procès, il faut essayer d'organiser une mobilisation suffisamment importante pour que tous les procès fassent salle comble, éventuellement des rassemblements devant le tribunal. Pour cela, tracter largement les dates des procès et des rendez-vous, harceler la presse jusqu'à ce qu'ils diffusent les dates, répartir les personnes sur les journées d'assistance aux procès.

Plainte contre les violences des flics
L'arme de la plainte contre violence d'un agent est à double tranchant. Il faut savoir en premier lieu qu'elle n'aboutit pas souvent, et que la procédure est très chère et peut durer des années avant que la plainte ne soit jugée. De plus, lorsque c'est un inculpé qui porte plainte contre des violences policières, il risque fort de se faire charger au procès et nécessairement condamner, afin de justifier les violences dont il a été victime. Par contre, lorsqu'un témoin, qui n'est pas inculpé, porte plainte contre les flics pour violence, et vient ensuite témoigner au procès d'un inculpé et décrit la violence policière dont il a été victime, L'effet n'est pas le même, puisque les flics n'ont pas de moyen de pression réciproque. Il faut savoir, qu'outre le fait de déposer une plainte qui n'a que très peu de chance d'aboutir, il peut être aussi efficace (et indispensable avant le dépôt de plainte), d'aller faire un certificat médical peu de temps après les faits, qui décrira les éventuelles blessures et donnera une indication de jours d'incapacité temporaire de travail (ITI).

Modèle d'un témoignage
Un témoignage écrit pour un procès en correctionnelle doit respecter une certaine forme.
Il faut, d'une part, une photocopie recto-verso des papiers d'identité, d'autre part un témoignage sur une feuille blanche datée et signée, comprenant vos nom, prénom, date et lieu de naissance, adresse, nationalité et profession, et certaines formules consacrées :
" Je soussigné, certifie avoir été témoin des faits suivants... "
" Je déclare n'avoir aucun lien de parenté et n'être ni employeur, ni employé de la personne en cause… "
" Je sais que ce témoignage va être produit devant un tribunal, et que tout faux témoignage entraînerait des poursuites pénales… ".
En plus de ces formules, vous devez raconter votre version des faits, votre perception de la situation : éventuelles violences policières, oublis du type absence de brassard, et non-déclination de la qualité de policier. Vous devez aussi parler des faits reprochés à l'inculpé, et affirmer sa non-culpabilité.

Présentation du C.A.M.I

Le CAMI (Collectif d'Aide aux Manifestant(e)s Interpellé(e)s s'est constitué en décembre 1995, pour faire face à la répression qui touchait les manifestants attrapés par la police. Il a pu trouver des avocats, de l'argent, un soutien des étudiants et lycéens grévistes qui ont été assistés aux procès. Il a organisé des débats, des fêtes de soutien, des concerts. Après le mouvement, il s'est mis "en veille", pour être réutilisé lors de la répression des soutiens aux sans-papiers en septembre 1996. Mais, lors de nombreuses manifestations à Paris ou dans d'autres villes (notamment lors des manifs anti-FN) il y a eu d'autres inculpés, qui ont parfois pris de lourdes peines sans avoir été défendus correctement ni bénéficié d'un mouvement de soutien politique.

Lors du mouvement des chômeurs et précaires de 1998, le CAMI a été réactivé après les arrestations et les incarcérations de manifestants présents lors d'une action contre un magasin Cash-Converter à Paris. Le CAMI a alors été pris en charge par une partie des personnes participant au mouvement, de façon multiple et assez efficace, la nouvelle s'étendant loin, suscitant d'autres actions contre les Cash-Converter de nombreuses personnes présentes lors des audiences, les fonds utilisés pour les mandats et les avocats étant remplacés par d'autres venus de partout. Sur l'affaire proprement judiciaire, les 4 inculpés ont passé deux semaines en prison préventive après avoir refusé la comparution immédiate, puis ont été relâchés lors de l'audience du 26 février 1998, reportée un mois plus tard à cause de l'absence des flics. Lors du procès le 26 mars 1998, ils ont tous été condamnés à des peines de sursis. Les 2 inculpés poursuivis pour atteinte aux personnes (des flics), ont été plus sévèrement condamnés (pour violence, avec7 mois de sursis avec 2 ans de mise à l'épreuve ; pour aide à la fuite avec 4 mois de sursis et 120h de TIG), alors que les autres, inculpés pour atteinte aux biens (vol et dégradation), ont été tous deux condamnés à 3 mois de sursis et 100h de TIG.
Puis a été innovée une autre méthode (qui n'a pas vraiment fonctionné). Pour le procès de Napoléon, repéré grâce à son bicorne dans l'amphi de l'Ecole Nationale Supérieure occupée le 7 mars 1998, il a été proposé que toutes les personnes présentes lors des faits et arrêtées après (300) rédigent un témoignage écrit devant servir à relaxer Napoléon. Malheureusement, il faut croire que la parole des personnes présentes vaut bien moins que celle de deux gendarmes qui se contredisent : il a été condamné pour avoir jeté une canette en verre à moins de deux mètres contre un premier gendarme, celui-ci parant de son bouclier, la canette pénétrant alors sous la visière du casque du gendarme suivant, lui fracturant le nez. En sachant que le second gendarme ne se rappelle de rien, n'a rien vu et presque rien senti ! Le CAMI, structure informelle bénéficiant d'un compte en banque et du soutien de - quelques - bons avocats, ne fonctionne évidemment pas à l'échelle de la répression des mouvements sociaux. C'est un outil qui peut être utilisé et efficace dans le cadre d'actions collectives, dans la mesure seulement où les personnes participant à ces actions prennent en charge la défense collective des personnes inculpées lors de ces actions.
Guide rédigé par le CAMI (Collectif d'Aide aux Manifestants Interpellés)
disponible sur le site de Zpajol http://pajol.eu.org/article150.html
sur le site Rap-Tag,
ou sur le site Le Libertaire au Havre: http://le-libertaire.org/