29/04/2009
Origine http://www.trends.be/fr/economie/politique-economique/12-1635-47857/grippe-mexicaine---et-si-l-industrie-etait-coupable--.html
Le premier cas de décès dû à la grippe
mexicaine a été reconnu aux Etats-Unis. Les regards
accusateurs se portent de plus en plus vers les élevages
industriels d'animaux, source supposée des virus et de leurs
mutations à grande échelle. Une faiblesse de la stratégie
sanitaire de l'OMS jouerait également un rôle.
La grippe mexicaine a causé son premier décès
officiel aux Etats-Unis : un enfant de 23 mois, qui était
allé au Mexique, est mort de cette maladie au Texas, ont
annoncé mercredi les Centres de maladie et de prévention
américains (CDC). Au Mexique, foyer de l'infection, sept
décès de la grippe mexicaine ont été
confirmés et près de 160 morts restent suspectes.
A l'heure où les cas se multiplient aux quatre coins du
monde, les regards accusateurs se portent de plus en plus vers les
éleveurs industriels. Et notamment vers le géant américain
Smithfield Foods, n° 1 mondial de la production de viande de
porc, qui «mène des activités massives d'élevage
porcin à Perote, Mexico, dans l'Etat de Vera Cruz, lieu d'origine
du fléau», relate le quotidien mexicain La Marcha.
En 1965, 50 porcs par ferme aux Etats-Unis : aujourd'hui,
plus de 1.000 !
Si le lien entre l'élevage industriel et la naissance/propagation
de la grippe mexicaine n'est pas encore fixé - il est d'ailleurs
fermement démenti par le colosse agroalimentaire US, qui
ne reconnaît d'ailleurs «aucun signe ni symptôme
clinique» de la présence de cette grippe dans ses élevages
ou ses employés mexicains - la suspicion gagne en force au
fil des heures. Car, si les virologues ont longtemps affirmé
que le système agricole du sud de la Chine en faisait le
moteur principal de l'évolution de la grippe, «l'industrialisation
de la production de viande a cassé ce monopole naturel»,
estime Mike Davis, professeur d'histoire à l'University of
California (spécialiste de la grippe aviaire), dans les colonnes
du Guardian.
«En 1965, par exemple, les Etats-Unis totalisaient 53 millions
de porcs pour plus d'un million de fermes, rappelle l'historien.
Aujourd'hui, 64 millions de porcs sont entassés dans 65.000
implantations. Autrement dit, on est passé de fermes porcines
traditionnelles à de vastes enfers excrémentiels,
contenant des dizaines de milliers d'animaux aux systèmes
immunitaires affaiblis, suffocant dans la chaleur et les déjections
tout en échangeant des éléments pathogènes
à toute vitesse.»
Dans une perspective plus médicale, un rapport, publié
l'an dernier par le Pew Research Center et cité par Mike
Davis a souligné un danger énorme : «Le cycle
éternel des virus dans les grands troupeaux pourrait augmenter
les risques de nouveaux virus, apparus par mutation ou recombinaison,
qui pourraient à leur tour résulter en une transmission
accrue entre humain.»
Le premier cas de décès dû à la grippe
mexicaine a été reconnu aux Etats-Unis. Les regards
accusateurs se portent de plus en plus vers les élevages
industriels d'animaux, source supposée des virus et de leurs
mutations à grande échelle. Une faiblesse de la stratégie
sanitaire de l'OMS jouerait également un rôle.
La grippe mexicaine a causé son premier décès
officiel aux Etats-Unis : un enfant de 23 mois, qui était
allé au Mexique, est mort de cette maladie au Texas, ont
annoncé mercredi les Centres de maladie et de prévention
américains (CDC). Au Mexique, foyer de l'infection, sept
décès de la grippe mexicaine ont été
confirmés et près de 160 morts restent suspectes.
A l'heure où les cas se multiplient aux quatre coins du
monde, les regards accusateurs se portent de plus en plus vers les
éleveurs industriels. Et notamment vers le géant américain
Smithfield Foods, n° 1 mondial de la production de viande de
porc, qui «mène des activités massives d'élevage
porcin à Perote, Mexico, dans l'Etat de Vera Cruz, lieu d'origine
du fléau», relate le quotidien mexicain La Marcha.
Les antibiotiques, utilisés à la fois pour
soigner et prévenir, sont-ils aussi responsables ?
Autre problème lié à cette industrialisation
: l'usage généralisé des antibiotiques. Pour
diminuer les risques de maladie entraînés par la promiscuité
des bêtes, les éleveurs auraient recours aux antibiotiques,
à la fois pour soigner et prévenir les infections.
De quoi, selon l'historien californien, «favoriser l'émergence
d'infections au staphylocoque résistantes».
Cette pratique, souligne Leslie Hatfield sur le site Huffington
Post, «a été reliée à la propagation
de la bactérie MRSA (staphylocoque doré méticilline
résistant), contre lequel certains voire tous les antibiotiques
ont perdu en efficacité. Mais il est peu probable qu'elle
soit la cause de l'émergence de la grippe aviaire.»
Et la journaliste de cibler davantage les «lagunes d'engrais»
(manure lagoons), «ces gigantesques réceptacles pour
les millions de litres d'excrément rejeté par ces
milliers d'animaux». Quoi qu'il en soit, c'est bien l'industrialisation
du secteur qui est en cause ici. Une tendance qui ne devait pas
s'arrêter en si bon chemin, sachant que, selon des rumeurs
rapportés par Associated Press, le n° 1 chinois de l'agrobusiness,
Cofco, serait intéressé par un rachat de Smithfield,
ni plus ni moins.
Les producteurs de l'Empire du milieu doivent en effet agrandir
leurs installations et améliorer leurs rendements, car la
population chinoise consomme de plus en plus de viande. Selon une
étude citée par Andrew Leonard sur Salon.com, «depuis
1995, la consommation chinoise de viande a crû de 112 %, à
53 kg par personne et par an». Et pour assurer cette évolution
dans leurs pratiques, les entreprises locales se tournent vers leurs
consœurs occidentales pour copier leurs business models.
OMS : une stratégie de l'isolation et de la vaccination
systématiques qui prouverait ses faiblesses
L'industrialisation serait donc l'un des responsables, mais pas
le seul. Mike Davis pointe également la stratégie
développée par l'Organisation mondiale de la santé
et les Etats en matière de protection contre les pandémies.
Une stratégie «centrée sur l'identification
et l'isolation d'un foyer de pandémie dans son rayon local
de manifestation, suivies de l'administration générale
d'antiviraux et, s'ils sont disponibles, de vaccins à la
population».
Une armée de sceptiques ont eu vite fait de critiques vertement
cette vision, affirmant notamment que «la propagation des
microbes autour du monde est désormais plus rapide que la
réaction de l'OMS et des autorités locales. Ils ont
également dénoncé la surveillance primitive,
voire inexistante, de l'étude de l'interface entre maladies
humaines et animales.»
Pourquoi cet aveuglement supposé ? «Les pays riches,
comme les Etats-Unis et le Royaume-Uni, préfèrent
investir dans leurs propres lignes Maginot biologiques plutôt
que d'augmenter drastiquement l'aide aux fronts étrangers
de l'épidémie. Sans oublier Big Pharma, qui s'est
battu contre les nations en voie de développement pour interdire
toute fabrication générique, publique, d'antiviraux
tels que le Tamiflu de Roche.»
Vincent Degrez
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