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LA GRATUITÉ, UNE TACTIQUE COMMERCIALE


Syndicat potentiel
politiques de la gratuité

LA GRATUITÉ, UNE TACTIQUE COMMERCIALE

Le terme “gratuit“ est utilisé dans le marché pour qualifier des offres promotionnelles gratuites ou partiellement gratuites et des biens donnés en supplément de tout achat. La gratuité est dans ce cas un montage financier réalisé pour rendre un bien ou une activité rentable sans faire payer directement le consommateur. L’attente du vendeur est de familiariser le consommateur à un produit nouveau sur le marché, de provoquer une rupture du verrou psychologique empêchant de passer à l’achat ou encore de provoquer un effet d’aubaine. Quand on nous propose au marché, trois salades pour le prix de deux, on aime à croire que l’on a gagné une salade supplémentaire gratuitement ; et souvent, nous achetons les salades alors même que nous n’en aurons ni le besoin ni le temps pour les consommer avant leur pourrissement. De telles aubaines nous poussant à l’achat, alors même que notre intérêt ou notre désir immédiat nous en aurait empêché provoquées parfois la dépendance pathologique de consommateurs, s’endettant jusqu’à l’insolvabilité pour ne pas rater une occasion, obtenir 20% gratuit, un cadeau gratuit, etc.

Un artiste - Matthieu Laurette - en rationalisant et en systématisant, à l’aide d’un petit logiciel, les offres de gratuité ou de remboursement sans frais proposés sur les différents produits disponibles dans les supermarchés, a proposé une méthode pour “vivre remboursé”. Or, l’effet d’aubaine n’est pas lié à l’achat : il appartient en propre à la gratuité. On connaît ces scènes illustrées dans de nombreux films et bandes dessinées ou des kilos de billets de banques sont jetés par hasard dans une foule, provoquant le retour à ce mythe : la guerre de tous contre tous. L’aubaine peut provoquer une rupture des normes sociales, mais elle peut aussi servir des tactiques politiques comme le démontre ce “buffet gratuit pour étouffer le débat politique” dont parle un article du Philippine Daily Inquirer, cité dans Courrier international (2/8 septembre 1999), lors duquel des centaines de milliers de personnes assistent à un meeting, “alléchées par l’odeur de la nourriture servie gratuitement”. Et le journaliste de conclure : “il est indéniable que les organisateurs du rassemblement de Luneta voulaient couper l’herbe sous le pied des militants réunis à Ayala”. C’est en vue de casser le verrou psychologique retenant les consommateurs de s’abonner à internet qu’un fournisseur d’accès anglais (Freeserve) a proposé gratuitement ses services pour la première fois en été 1998, en calculant qu’il parviendrait à se solvabiliser et à générer du profit en ponctionnant plusieurs francs par heure de connexion à British Telecom et surtout, en tirant parti de la publicité et du commerce électronique proposé sur son portail. Cette tactique marketing a eu le succès que l’on sait en Angleterre et en France.

Aux États-Unis, l’attente des consommateurs était moins d’accès gratuit au net que d’ordinateurs gratuits ou quasi-gratuits (Solveig Godeluck, Le boom de la netéconomie, La découverte, 2000, p. 174). De manière générale cependant, la gratuité marketing s’est répandue sur le net comme elle s’était répandue au préalable dans le marché des biens et des services. La gratuité a été d’abord un investissement permettant aux donateurs d’espace (Freeserve, freesurf, free, etc.) et de logiciels (Netscape) de capitaliser une audience qui puisse être valorisé commercialement. Aujourd’hui cependant, les offres gratuites excèdent espaces et logiciels pour concerner l’information, les services (rencontres, horoscope, recherche d’emploi, assistance juridique, dépannage informatique), les biens (photos libres de droit, plug-ins, etc.). Elles semblent êtres inscrits durablement dans les pratiques de consommation et de production immatérielle. Les données numériques sont copiables à l’infini à coût quasi nul.

Selon DeLong (cité dans Pierre Briançon, Internet, le réseau qui a tué Adam Smith, L’expansion, janvier 2000, n° 612, p. 43), les biens immatériels défient deux des principes fondamentaux de la pensée économique : la rareté et le contrôle. Le producteur ne maîtrise pas l’usage des données qu’il diffuse et ne peut en empêcher la dissémination. L’économie des biens immatériels tendrait donc par nature à la gratuité.


Le lien d'origine : http://syndicatpotentiel.free.fr/gr1.html