"Nouveau millénaire, Défis libertaires"
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Un débat sur les débats
Garas


Texte extrait de " L’autoritarisme dans les organisations libertaires, Formes et remèdes "
brochure publiée par Le Syndicat Intercorporatif Anarchosyndicaliste de Caen
Peut-on changer de société sans changer nos modes de discussion ?
Débats, prises de paroles, discussions collectives, …autant de contextes sujets aux rapports de pouvoirs. Attitudes genrées, attitudes physiques, interruptions, monopole de la parole, … autant d’outils qui entretiennent les dominations. Ceci est un appel à l’expérimentation collective et conviviale de différents modes de discussions.

La cohérence entre théories et pratiques.
On peut avoir de grandes idées sur la société, sur les mécanismes d'oppression et de domination. Et souvent on aime croire au Grand Soir, à un changement brutal qui effacerait comme par magie, ce que l'on dénonce. Mais les révolutions commencent ici et maintenant, dans nos quotidiens. Une chose est d'avoir de grandes théories sur des meilleurs rapports sociaux, une autre chose est de chercher à les mettre en pratique. Nous aspirons bien à un changement de société, mais nous pensons qu'il est important d'être critiques quant à nos pratiques quotidiennes : nous sommes parfois les premier-e-s à reproduire dans nos vies, nos comportements, les logiques que nous condamnons...

Les rapports de consommations.
Certains débats pourraient s'appeler conférences... on y vient en réalité pour écouter la bonne parole d'un-e invité-e vedette ou de plusieurs personnalités qui monopolisent la discussion. Dans ces situations, rien ne nous aide à sortir de la passivité et de la consommation d'idées : il est plus facile de ne rien dire plutôt que d'oser s'exprimer devant des personnes qui ont l'air plus " intelligentes "... on ne nous encourage pas non plus à avoir un esprit critique, tant sur le fond que sur la forme du débat...

Les rapports de pouvoirs et les rapports de genres.
Parce qu'elles sont le lieu de prises de décisions mais aussi d'élaborations de réflexions ou d'actions, les discussions collectives recouvrent des enjeux de pouvoir. Des rapports de pouvoir peuvent s'instaurer de différentes manières et revêtir différentes formes : ton de l'intervention très affirmatif ; volume élevé ; interventions longues ; monopolisation de la parole ; non-respect de la parole des autres par des interruptions répétées...
Dans notre société patriarcale, ces rapports de pouvoir sont très souvent genres. C'est-à-dire que régulièrement les hommes ont une place prédominante alors que les femmes sont en retrait voire absentes physiquement des débats collectifs. Cet état de fait n'est pas lié à une quelconque nature qui feraient des hommes des êtres plus motivés par la réflexion collective, plus à l'aise en public... il s'agit bien d'une construction sociale qui dès la naissance conditionne les individu-e-s" à adopter des comportements normes par rapport à leur sexe biologique. Ainsi les petites filles seront plus éduquées à l'écoute, à être patientes, à rester sages, alors qu'on encouragera les petits garçons à se dépenser, à se confronter aux autres, à s'affirmer...

Contre les opinions privatisées. Contre l’opinion publique.
Pour prospérer, le capitalisme a intérêt à ce que la société soit atomisée, marquée par des peurs, par la solitude, par la logique du chacun/e pour soi. Il a intérêt à ne proposer, pour souder cette société atomisée, que des principes et des moteurs vagues, lointains, consensuels, creux au possible (la nation, le football, Claude François, la croissance...). Il en va de même dans les débats : notre société encourage la privatisation des opinions, et leur somme impuissante s'échoue dans une opinion publique pleine de généralités et complètement inoffensive pour le système en place. Nous voulons construire des débats où les opinions privées, plutôt que de cohabiter ou de se "respecter" silencieusement, se rencontrent, se confrontent réellement, en prenant le temps et le plaisir nécessaires, pour s'enrichir mutuellement et aboutir à des visions collectives approfondies, claires, conscientes, mettant en valeur ' les différences...
Nous essayons pour cela de redécouvrir l'intérêt de l'écoute, de la concentration, des apports extérieurs, des prises de recul, des questionnements plutôt que des réponses toutes faites. Contre les prêt-à-penser de tout bords, vive la praxis et les théorisations fines ! Contre les compromis de type marchand, vive lés consensus réussis, qui satisfont les individu-e-s encore plus que leur première opinion privée !

Pourquoi se donner des règles pour débattre ?
La discussion parait être un mode de communication spontanée, or elle est la plupart du temps soumise à des règles implicites (celleux qui parlent le plus fort sont le plus entendu-e-s, les personnes âgées sont les plus respectées...) qui reproduisent des rapports sociaux de domination.
Pour casser cette logique d'oppression, il semble intéressant de se créer de nouvelles règles, explicites cette fois, et choisies collectivement sur des critères précis. Ainsi ces règles pourront favoriser l'écoute, la prise en compte des diverses opinions... Et, plutôt que de représenter une contrainte, elles pourront devenir une source d'épanouissement, dans la mesure où elles sont décidées par tou-te-s, où elles ne sont pas immuables et où on les fait évoluer selon le contexte.
[...]

DES RÔLES
Les différents rôles que nous proposons dans les débats ne doivent conférer aucun pouvoir : ils sont là pour limiter les prises de pouvoir qui pourraient avoir lieu spontanément durant la discussion. Ils ne font que rappeler au groupe les consignes qu'idéalement.il s'est lui-même données. Ils cadrent la forme et non le fond des débats, ils doivent permettre au fond d'être le plus satisfaisant possible. Assumer ces différents rôles est une excellente auto-formation dans l'art de la discussion... Mais les assumer de façon répétitive, en se spécialisant, peut engendrer lassitude ou pouvoir d'expert-e. Il est donc important que ces rôles tournent ! Il est également important que chaque rôle soit assumé par une personne distincte : il est très difficile d'en mener correctement deux de front...

La/le médiateur/ice
C'est en gros le rôle d'arbitre : ille est chargé-e de faire respecter les règles du jeu, de le dynamiser s'il le faut. Ille peut prendre les tours de paroles, introduire les débats, rappeler à une grande gueule qu'elle ne laisse pas de place aux autres... Ille a tout intérêt à cultiver son esprit de synthèse : son aide est souvent précieuse, dans le cours d'une grande discussion, pour résumer les différentes positions exprimées, pour recentrer et ainsi relancer le débat. Ille peut prendre la parole sans l'avoir demandée, mais son intervention doit alors servir uniquement au bon déroulement du débat, et jamais à faire primer son point de vue.

La/le scribe
lle prend des notes sur ce qui est dit. Ille veille à synthétiser les débats. par écrit, et à noter clairement les formulations qui remportent le consensus : celles, souvent, qui concluent la discussion ou ses différentes étapes . Les notes servent surtout dans la durée ; elles sont un outil de transmission, accessible à qui n'a pas pu être présent-e au débat, ou un outil de mémoire, notamment pour le groupe même s'il perdure, qui lui permet de garder des points de référence, et qui lui évite de répéter sans cesse les mêmes discussions.

La/le porte-parole
C'est un rôle qui apparaît par exemple dans les débats en petits groupes. La ou le porte-parole raconte les conclusions de son propre petit groupe à l'ensemble du collectif. Ille demande à son petit groupe d'élaborer avec lui le récit qu'il fera, ou au moins de le valider avant qu'il ne s'en aille le faire. Son récit sera le plus fidèle possible, la ou le porte-parole n'omettant pas, quand on lui pose des questions par exemple, les avis qui n'étaient pas les siens (c'est si vite fait...).

La montre
C'est la personne qui garde constamment un œil sur la montre, donc, et qui garde en tête le temps que le collectif s'est lui-même imparti pour débattre (par exemple, deux heures en tout, ou 15 minutes par point "à l'ordre du jour"...). Ille intervient sans demander la parole, très rapidement ("il reste dix minutes") et quand ça lui semble utile au groupe, pour lui donner des repères, pour le mettre en garde s'il prend du retard... Ille peut être sollicité pour connaître le temps qu'il reste pour aborder tel ou tel thème...
Festival Fraka, Tonneau de Diogène, Grenoble, 24 mars 2003.


L'intégralité de ce texte (4 A5) est disponible sur simple demande au GARAS.
Cependant vous pouvez vous le procurer en le demandant à l’Infokiosque de la Charade, place du 8 février 1962, 38400 Saint Martin d'Hères.
Profitez en pour leur demander leur liste de distribution où vous pourrez par exemple de bonnes réflexions sur le pouvoir, l'autorité, le sexisme dans les croupes et organisations...
Le plus simple reste de se mettre directement en contact avec eux. Au cas où voici l'adresse électronique et l’adresse du site :
charade at squat.net
http://charade.squat.net
Le Syndicat Intercorporatif Anarchosyndicaliste de Caen a publié une brochure sur
" L’autoritarisme dans les organisations libertaires, Formes et remèdes "
Leurs coordonnées :
Syndicat Intercorporatif Anarchosyndicaliste
B P 257
1403 Caen Cedex

s.ia at laposte.net

Plusieurs textes sont issus des travaux du GARAS
Groupe d’Action et de Réflexion Anarcho-Syndicaliste
Garas c/o Sarthe Libertaire
Maison des Associations
Salle n° 23
4, Rue d’Arcole
72000 Le Mans
garas_tours at hotmail.com


D’autres textes émanent des groupes de squatteurs/euses dont les adresses sont indiquées à la fin des textes
L’Infokiosque de la Charade, place du 8 février 1962, 38400 Saint Martin d'Hères.
charade at squat.net
http://charade.squat.net

Sans-Titre est un réseau d'individus et de collectifs pratiquant l'autogestion de diverses manières. Comme nous avons trouvé ce bulletin dans un squat rennais, l'Elkuserie, L'Elkuserie 138 bd Magineot 35000 Rennes.