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Construire le sens de sa vie.
Le 7 décembre 2004 par Rédaction Transversales
Une anthropologie des valeurs. Par Gérard Mendel, Editions
La Découverte, 2004.
http://grit-transversales.org/imprimez.php3?id_article=43
Comment penser l’articulation entre changement personnel,
évolution des organisations collectives et transformation
socio-politique ? La question nous a paru suffisamment importante
pour que, voilà trois ans, le GRIT-Transversales, sur l’impulsion
de Laurence Baranski, prenne l’initiative de créer
l’association Interactions TP-TS (1). Le dernier ouvrage de
Gérard Mendel, publié quelques semaines avant sa mort
le 14 octobre dernier, apporte des éclairages nouveaux, fort
pertinents, à cette réflexion. Dans ce livre, le psychanalyste
et sociologue français s’interroge notamment sur les
raisons du succès rencontré par les techniques de
développement personnel, depuis une vingtaine d’années,
dans les entreprises. Et si Gérard Mendel interprète
cet engouement comme une tentative de réponse au malaise
ambiant - « la condition humaine devenue difficile à
vivre » -, il précise aussitôt qu’il s’agit
là d’une fausse réponse. Car le développement
personnel, selon lui, vise essentiellement « à récupérer
certaines ressources de l’individu au profit d’une intégration
sociale conforme à l’idéologie dominante du
chacun pour soi ».
Suite à l’effondrement des systèmes de valeurs
traditionnels (transmis par le modèle patriarcal, les croyances
religieuses ou la foi dans le progrès), chacun est désormais
invité à construire le sens de son existence. Or,
l’être humain, et Gérard Mendel nous le rappelle
à bon escient, n’est jamais coupé du monde.
Aussi « pour que la personnalité puisse évoluer,
grandir, il ne suffit pas d’agir sur le psychisme, il faut
que le sujet possède du pouvoir à l’extérieur
sur sa vie ». De ce point de vue, sceptiques et cyniques ont
tort de sourire à l’évocation de la démocratie
participative, qui constitue sans doute l’un des seuls outils
efficients pour travailler sur l’articulation individu-collectif-société.
Enfin, cet ouvrage constitue un vibrant plaidoyer en faveur de l’anthropologie,
qui fait appel aux autres sciences sociales mais aussi aux grandes
sagesses et traditions religieuses pour réfléchir
à ce qui fait la spécificité de l’existence
humaine.
(1) Site Internet : www.interactions-tpts.net
Construire le sens de sa vie. Une anthropologie des valeurs
Auteur(s): Gérard Mendel - éd. La Découverte,
2004 (204 p. ; 15 €)
http://www.lien-social.com/article.php3?id_article=583&id_groupe=12
La question du mal que produit l’homme dans la société,
taraude l’histoire de l’humanité : est-il possible
que l’être humain accomplisse un jour un autre destin
que celui de la misère et du malheur ? On peut ne plus y
croire. On peut aussi décider de se battre pour mieux apprendre
à vivre ensemble. Ne pas désespérer, ce n’est
pas manquer de lucidité et nier les réalités
de l’exclusion et de l’exploitation. C’est croire
que malgré tous ces dégâts, d’autres possibles
s’ouvrent à nous.
Le livre de Gérard Mendel, qui explique comment la morale
d’une société, tout comme ses règles
et ses lois, n’intéresse pas seulement le fonctionnement
social, mais constitue aussi un repère essentiel de l’identité
individuelle. Les efforts des philosophes pour déterminer
des constantes et des invariants dans les valeurs, ont été
nombreux, tel Léo Strauss se référant à
un droit naturel, Hans Kelsen en appelant au libre arbitre, ou encore
John Rawls convaincu que la raison et la justice habiteraient le
cœur de l’homme, et qu’il suffirait d’aller
les solliciter, pour peu qu’on écarte les apparences
sensibles… Tous ces projets de morale universaliste se sont
basés soit sur une révélation religieuse, soit
sur une croyance en une immanence métaphysique. Ce qui a
fait dire à Frederik Nietzsche que toutes ces philosophies
n’avaient inventé la transcendance que pour mieux se
protéger des angoisses de la condition humaine, des changements
incessants, du tragique et de la mort. Puis, ce fut la science qui,
rejetant les superstitions, prétendit constituer une référence
fiable. Mais, échouant tant sur la question du sens que dans
la dimension de la subjectivité, elle ne permit pas, elle
non plus, de fonder une véritable éthique personnelle.
Si la possibilité de trouver une réponse universelle
semble s’éloigner, l’irrationnel habitant le
cœur humain, bien plus que la raison, la nécessité
subsiste de déterminer la ligne morale sur laquelle se tenir.
L’évolution contemporaine de nos sociétés
ayant en effet contribué à désagréger
les communautés, à affaiblir l’emprise des traditions
et à isoler l’individu, la recherche de repères
et d’identification est d’autant plus prégnante.
On est là au cœur du mal-être actuel qui ne cesse
de croître.
Jacques Trémintin
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