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Thierry Simonelli
Technique et normalisation selon Günther Anders

Origine http://dogma.free.fr/txt/TS-TechniqueNormalisation.htm

(Retranscription de la conférence du 13 décembre 2004 au séminaire du Professeur Mireille Delbraccio (Philosophie et sciences humaines), Paris, CRNS – ENS – EHESS, UMS 2267, CAPHES)

La technique et l’être-là

Dans la perspective de Günther Anders, les révolutions industrielles reposent sur un déplacement systématique du sujet, ou plus généralement, de l’homme. Dans ce sens, la technique n’est pas un phénomène de notre histoire, mais tout à fait à l’inverse, notre histoire reste suspendue à la technique. C’est elle qui détermine, par là même, notre être-là.

La première vraie révolution industrielle est réalisée quand le principe de la machine est itéré. C’est-à-dire : quand la reproduction des machines est assurée par d’autres machines. Le principe d’itération s’accompagne d’une accélération et d’une métamorphose de la production qui refoule l’être humain à la marge de la production. Toutefois, ce déplacement reste limité au temps du travail. C’est seulement durant le travail que l’être humain perd son privilège de sujet.

La deuxième révolution industrielle réintègre l’homme dans la production, mais comme ressort supplémentaire de la machine. C’est le moment où la production des marchandises est secondée par la production des besoins (la publicité, entre autres), c’est-à-dire par la production d’êtres soumis au devoir de satisfaire la « faim des marchandises [1] ». L’industrie de la culture accomplit cette inversion du sujet au sein même de son être-au-monde quotidien.

La troisième révolution industrielle n’est pas de nature technique ou économique ; elle est métaphysique. La bombe atomique représente un tournant historique indépassable. À ce propos, Anders écrit : « L’époque des changements d’époque est passée depuis 1945. Depuis lors, nous vivons un moment de l’histoire qui ne constitue plus une époque avant d’autres époques, mais un ‘délai’ [Frist] durant lequel notre être ne cesse d’être qu’un ‘être-tout-juste-encore’. [...] Cette troisième révolution est donc la dernière. » (AM 2, p. 20) La troisième révolution ne signifie pas pour autant la fin de l’histoire ; elle signifie la possibilité de la fin de l’histoire.

Anders conçoit ces révolutions industrielles comme une subversion radicale aussi bien de la conception hégélienne de l’histoire [2], que des espoirs marxiens et de l’analyse existentiale de l’être-là (Dasein) heideggerien [3].

La philosophie de la technique de Anders se présente comme une « ontologie négative » (AM 2, p. 46). Non seulement l’être des choses tend vers une liquéfaction/liquidation progressive en raison de l’accélération du cycle production-distribution-consommation, mais l’être-là, l’être humain lui-même, se dissout dans la « schizotopie » des images et la « purée temporelle » (Zeitbrei) d’une existence dépourvue de sens.

Ce changement de perspective implique une critique assez radicale de Heidegger. La « pseudo-concrétion » de la philosophie heideggerienne [4], l’abstraction de son monde et l’ignorance du corps – conditions de l’arrachement au monde requises pour la réalisation de l’authenticité –, n’interdisent pas seulement la compréhension du monde réel à Heidegger, mais rendent sa pensée disponible aux orientations politiques les plus problématiques.

Le travail à la machine

Le retard congénital de l’être humain en tant que travailleur, en tant que soldat et en tant que consommateur face à la technique donne lieu à ce que Anders appelle la pente prométhéenne (prometheisches Gefälle).
La pente prométhéenne, à son tour, donne lieu à un sentiment historiquement nouveau : la honte prométhéenne (prometheische Scham). La honte prométhéenne est ce sentiment qui nous fait pâlir devant la perfection de nos machines et devant la pitoyable défectuosité de notre propre corps.

D’où vient le péché industriel de l’homme sur terre ?

Le monde des produits ne se caractérise pas seulement par ses produits, il se caractérise encore par le processus de production. Or, avec les révolutions industrielles, ce dernier acquiert une flexibilité extraordinaire du fait de l’itération incessante de la reproduction machinale. L’adaptabilité aux conditions nouvelles et aux contextes nouveaux est inhérente à ce processus de production. La flexibilité constitue son principe vital.
Il en va tout autrement du corps humain. Le corps « du constructeur de fusées ne se distingue quasiment en rien de celui du troglodyte. » (AM 1, p. 33)

C’est ce qui amène Anders à soutenir que le sujet de la liberté a été inversé. Ce n’est plus l’être humain, mais les machines qui sont libres. L’être humain, en tant qu’être charnel, est contraint à la l’infinie répétition de l’identique.

Le monde des machines représente tout d’abord le monde du travail. C’est en travaillant que nous avons à faire aux machines. Or, le monde du travail doit être compris à partir de l’inversion du sujet de la liberté. Contrairement à Marx, Anders ne fonde pas sa lecture de la condition de l’homme sur l’agencement hiérarchique infrastructure-superstructure. Sa démarche ressemble bien plus à l’analyse existentiale. Il la nomme d’ailleurs « ontologie économique » ou encore « ontologie négative ».

Dans les Manuscrits économico-politiques de 1844, Marx notait que l’abstraction du travail inhérent au processus de production capitaliste transforme progressivement le travail humain en travail mécanique et met ainsi directement le travailleur en concurrence avec la machine [5]. De ce point de vue, le travailleur se voit ravalé à n’être plus qu’une machine et, par conséquent, il peut être géré comme tel.
Sous ces conditions, remarque Anders, le mythe d’Icare s’inverse : ce n’est plus la cire qui se montre défaillante, mais le lest d’un corps individuel, le poids de la chair figée par l’évolution, qui empêche les ailes de s’envoler vers le soleil.

La pression de la production ne peut pas se satisfaire de ce constat. Le human engineering vient à la rescousse de l’humain dépassé. À l’aide de la psychotechnique et de ce que Anders appelle la physio-technique, le projet d’une vaste offensive contre la misérable matière brute humaine est entamé. La physio-technique qui, dans le second volume de l’Antiquiertheit, se concrétise dans la question du clonage, viserait avant tout la « réincarnation industrielle » (AM 1, p. 51) de l’homme. De cette manière, nous serions enfin prêts à remonter la pente prométhéenne et à produire un être humain digne de ses machines.

La machine et l’imagination

C’est ce qui amène Anders à penser qu’aujourd’hui il n’y a plus aucun besoin d’idéologie. L’idéologie a été remplacée avec succès par la falsification de l’activité (Aktivitätsfälschung, AM 2, p.175). Car, ce qui se présente comme travail n’a plus nécessairement aucun rapport avec ce que l’on pourrait naïvement identifier au travail.

Le travail rationalisé excède doublement notre imagination. Dans le cas le plus quotidien, nous ne voyons ou ne savons pas ce que nous faisons, dans les cas catastrophiques nous ne voyons ou ne savons pas ce que nous faisons parce que notre imagination et notre sentiment en sont excédés. Nous ne pouvons pas penser, sentir ou imaginer ce que pourtant nous savons faire.

La conséquence sur le plan humain est patente. La conception unitaire traditionnelle de l’homme ou du sujet s’efface devant la fragmentation des facultés. Nous ne sommes plus des êtres humains, mais des fragments humains spécialisés, répartis en êtres producteurs, en êtres sentants, en êtres jouissants, en êtres imaginants. C’est ce qui, selon Anders, explique comment un tortionnaire peut en même temps être bon père de famille. La schizophrénie n’est plus simplement l’affaire de la psychiatrie, elle représente la condition indépassable de l’homme moderne : « Quoi que la psychopathologie et la psychiatrie veuillent bien affirmer au sujet de la schizophrénie, nous ne le comprendrons étiologiquement que si nous la mettons au jour [durchschauen] comme conséquence de la division du travail, de cette division du travail qui arrache et sépare des réalisations [Leistungen] qui normalement vont ensemble, c’est-à-dire si nous la voyons comme l’état normal de la personne travaillante aujourd’hui. » (AM2, pp. 177, 178).

La cécité téléologique du travail se présente donc comme un modèle de la cécité apocalyptique. L’absence de télos nous habitue à la cécité prospective ou anticipative. Ce que nous apprenons du travail – ne pas savoir ce que nous faisons, ne pas savoir prévoir, anticiper ou même imaginer ce que nous produisons, ce à quoi nous contribuons, moralement parlant -, altère profondément notre rapport au faire en général. Qui plus est, notre agir au travail n’est guère plus qu’un participer (Mittun, AM 1, p. 286). Nous n’adoptons ni une position active, ni une position passive, mais une position active-passive neutre que Anders nomme « médiale ». Cette perception du faire est particulièrement frappante chez les anciens nazis. Accusés d’avoir participé à la déportation, à la maltraitance, à la torture et au meurtre de centaines, voire de milliers de victimes, ces responsables se montraient systématiquement offensés de l’« injustice » qui les frappait.

Lorsque le système totalitaire fonctionnait encore, ils avaient simplement participé (mitgetan) à l’entreprise (Betrieb) du moment. Dans ce sens, ils ne se sentaient pas seulement déresponsabilisés mais, pis encore, ils pensaient avoir agi de manière tout à fait morale. D’où cette profonde incompréhension des intentions mêmes de leurs accusateurs. La question morale s’en trouvait alors réduite à une question du contexte, à une question du moment historique. Ce qui auparavant s’avérait tout à fait moral – participer, collaborer, suivre, obéir – avait simplement cessé d’être moral avec la fin du système. En principe, il serait imaginable qu’ils participent tout aussi moralement, et avec le même zèle, au nouveau système politique qui l’a emporté sur le système totalitaire.

Il ne s’agit pas là d’une position extraordinaire, d’une caractéristique de monstres sans commune mesure. Au contraire, l’incompréhension des bourreaux vis-à-vis des victimes relève de la nature la plus quotidienne de la participation active-passive neutre. Cette disposition médiale existe au sein de toute entreprise, avant, pendant ou après la guerre, aussi bien d’un côté que de l’autre du rideau de fer. Le même agir qui peut paraître normal, banal et neutre au sein d’une entreprise prend des traits terrifiants dans d’autres contextes. La suspension de la conscience au travail aplatit la différence de contexte, la différence de la signification morale du faire. Les employés des camps de la mort n’avaient pas l’impression d’agresser, d’humilier, de maltraiter, de torturer et de tuer des personnes, ils pensaient travailler (AM 1, p. 291).

Le caractère tout à fait courant de cette schizophrénie ne permet absolument pas de croire à l’impossibilité d’une répétition de la catastrophe. Bien au contraire, croire que de tels événements ne pourraient se reproduire constituerait une profonde erreur pour Anders. Car non seulement la fragmentation et l’indifférence morale qui en découle sont, elles, restées identiques, mais le progrès technique a contribué à les propager davantage et à les rendre autrement plus inévitables (AM 2, p. 405).

La machine à images

Les réflexions de Anders sur la télévision peuvent être résumées par les 8 thèses suivantes (AM 2, pp. 252-256) :

1. La télévision nous dérobe la possibilité même de l’expérience. En ingurgitant des expériences toutes faites, notre faculté de perception, notre faculté de jugement se mettent au diapason des images déversées. La seule expérience sensible qui reste est celle du mur d’images, livré à domicile à l’état liquide, imperceptible comme jugement et inaccessible à la critique.

2. De ce fait, il nous devient impossible de distinguer réalité et représentation. En devenant réalité, la représentation n’usurpe pas la place de la réalité, elle absorbe la réalité dans la représentation. La seule réalité est celle qui, susceptible de se mettre en scène, apparaît comme image.

3. Dès lors que le fantôme du monde devient matrice du monde, il conditionne une « imitation inversée ». Chaque image (Bild) tend à prendre la forme d’un idéal (Vorbild). Le monde avant ou après l’image n’a plus le droit d’exister qu’à titre de décalque du décalque.

4. La livraison liquéfiée et liquéfiante nous transforme en consommateurs permanents et nous fige dans la position de la passivité du nourrisson. De même que nous voyons des images d’un monde auquel nous ne participons pas, nous entendons des discours auxquels nous ne pouvons répondre. Voir devient ainsi du voyeurisme, écouter (hören) une variante de l’obéissance (Hörigkeit). Comme les images qui présentifient un monde absent, nous sommes, en tant que spectateurs, présents et absents tout à la fois.

5. La passivation équivaut à une perte de liberté. Mais à une perte de liberté qui ne se manifeste pas comme telle. Devant la télévision, nous ne faisons pas l’expérience de la passivité. Au contraire, nous nous retrouvons dans la position d’une toute-puissance et d’une omniscience virtuelles, vécues comme jouissives. Le monde est à la portée de la main qui tient la télécommande.

6. Du fait d’être gavé d’images, nous sommes gorgés d’idéologie. Les images isolées, séparées, décontextualisées interdisent toute représentation cohérente d’un ensemble, d’une situation, d’un fait, concrets. Cette parcellisation de l’image conditionne une sorte de cécité causale face à l’ici et au ceci.

7. L’infantilisation machinale nous fige dans la phase « orale industrielle ». L’assimilation de nourriture en vient à constituer le seul modèle de l’expérience.


8. Afin d’être le plus largement comestible, l’image doit être désamorcée. Dans le flot sursaturant des images, les différences s’estompent pour laisser place au nivellement harmonieux. De même qu’un grand nombre d’enseignes lumineuses se neutralisent et donnent lieu à une lueur uniforme (AM 2, p. 336), de même les images télévisées nous précipitent dans une indifférence générale où rien ne compte plus parce que tout y est unique et extraordinaire. L’ouverture intégrale au monde est la contrepartie de la cécité complète du spectateur.

Il s’ensuit 5 conséquences :

1. Le monde est à la taille (paßt) de l’homme
Comme tout produit, le monde des images est d’emblé adapté à la consommation. C’est un monde prêt-à-porter, ou plutôt un monde prêt à la consommation. Il n’est plus ob-jet (Gegenstand) comme il n’oppose plus de résistance ; grâce à la télévision, la résistance du monde est devenue imperceptible.

2. Le monde, en tant que monde disparaît
Le monde de la télévision fait partie de ce type d’objet qui disparaissent à l’usage : les bines de consommation. Sa seule raison d’être, est d’être consommé, absorbé, c’est-à-dire supprimé en tant qu’objet.

3. Le monde d’aujourd’hui est post-idéologique.
La télévision réalise l’utopie post-idéologique marxienne sous forme inversée. Marx pensait que la réalité réalisée (11 thèse sur Feuerbach) pouvait prendre le relais de la philosophie. Avec la télévision, c’est la non-vérité qui se réalise de façon triomphante. L’idéologie est rendue superflue par le fait que les non-vérités sont rendues réelles : « unwahre Aussagen über die Welt – [sind] ‘Welt’ geworden » (AM 1, ). Les énoncés faux portant sur le monde sont devenues monde. De même que nous sommes incapables de départager des petits pains déjà cuits en leurs matières premières pour les cuire à nouveau, nous sommes incapables de réarticuler le monde idéologiquement arrangé, découpé et interprété de l’image télévisée.

4. Il n’y que des estampillés qui sont estampillés.
Si l’image convient si bien au consommateur, c’est que le consommateur lui-même a, de son côté, été adapté à l’image. L’homme est à la taille de ce monde de même que le monde est à sa taille. Il existe une convergence parfaite entre les deux qui fait que, l’estampillage passe sans laisser de traces.

5. L’être-là au pays de cocagne est radicalement non-libre
Notre choix se limite à la sélection des fantômes livrés par la télévision ou la radio. Nous sommes livrés à (remis aux mains de) nos livraisons. Car, il ne nous est plus possible de juger par nous même, de faire des expériences, de prendre position.

L’aliénation est double. Marx avait mis à jour la rupture du rapport entre le travailleur et son produit. Le travail n’a plus de sens pour lui comme son objet lui est dérobé. Or, selon Anders, il en est exactement de même de la consommation, ou de la jouissance. La vie aliénée ne consiste pas seulement dans un travail sans fruit du travail, mais aussi en fruits sans travail. Dans ce sens, la jouissance est tout aussi aliénante que le travail désapproprié.
Il s’ensuit que la résitance elle-même devient produit pour satisfaire la faim de l’effort. En guise de repos de la livraison permanente de marchandises, l’industrie fournit une marchandise supplémentaire : l’effort. Parmi ces marchandises, Anders range : le sport, le hobby, le « do it yourself », les cours et formations de créativité : expression de soi créative, écriture créative, etc.

La normalisation

Le bon fonctionnement de l’harmonie du monde résulte repose sur le cercle de la société conformiste. Ce cercle se décline de la façon suivante : plus un pouvoir est total, plus ses ordres sont imperceptibles. Plus les ordres sont imperceptibles, plus notre obéissance paraît évidente. Plus notre obéissance paraît évidente, plus nous avons l’illusion d’être libres. Et, finalement, plus nous nous croyons libres, plus le pouvoir s’avère total.
Et Anders d’en conclure : si, au XIXe siècle, il était possible de penser qu’il n’y avait rien à perdre hormis les chaînes, aujourd’hui nous nous croyons libres du fait de nos chaînes.



[1] La même inversion caractérise l’industrie de la guerre. Le Vietnam ne contribuait pas à la production d’armes pour la guerre, mais à la production d’une guerre pour les armes. Voir Elke Schubert (éd.), Günther Anders antwortet, p. 45.

[2] Dans ce contexte, on pensera également à la formule de Adorno : « ‘J’ai vu l’esprit du monde’, non pas à cheval, mais sur les ailes d’une fusée et sans tête, et c’est là en même temps une réfutation de la philosophie de l’histoire de Hegel. » Minima Moralia, Francfort, Suhrkamp, 1951, 1988, p. 64 ; traduction française par Eliane Kaufholz et Jean-René Ladmiral, Paris, Payot, 1991, p. 53.

[3] Ce n’est certainement pas l’un des moindres problèmes de la traduction française – L’obsolescence de l’homme –, que d’avoir systématiquement écrasé les innombrables concepts heideggeriens qui alimentent le texte original. Cette fâcheuse tendance contribue pour une très large part au sentiment de nivellement et de banalisation que l’on ressent en lisant le texte français.

[4] Voir à ce propos « Die Schein-Konkretheit von Heideggers Philosophie » dans Günther Anders, Über Heidegger, Munich, C. H. Beck, 2001.

[5] Karl Marx, Manuscrits de 1844, traduction de Jean-Pierre Gougeon, introduction et notes, de Jean Salem, Paris, Garnier Flammarion, 1996, 1er manuscrit, salaire. Ökonomisch-philosophische Manuskripte aus dem Jahre 1844, Marx Engels Werke, Berlin, Dietz Verlag, 1990, tome 40, p. 474. Désormais je citerai les Marx-Engels Werke comme MEW, suivi du numéro du volume.