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La souci de soi et l’herméneutique du sujet

Origine : http://www.humanite.presse.fr/journal/2001-04-05/2001-04-05-242328

C’est en travaillant à son Histoire de la sexualité que Michel Foucault porta son attention sur le " souci de soi " dans la culture occidentale, ouvrant alors un champ de réflexions qui le conduisit à repenser la question du sujet lui-même. Son cours du Collège de France en 1982, " l’Herméneutique du sujet " (1), est donc centré sur les notions de " gouvernement de soi ", de " culture de soi ", tels qu’elles apparaissent dans les grands textes de la philosophie. En décrivant ainsi les modes de subjectivation antique, l’auteur de Surveiller et punir cherche à rendre palpable la " précarité " du mode de constitution du sujet " moderne ".

Tout son travail - dont il confie alors l’extrême " solitude " - consiste à nous rendre encore plus " étrangers " à ce que nous croyons être " nous-mêmes ", dans le temps même où ce détour par les " Anciens " - Platon, Épicure, Sénèque... - l’amène aussi à une reformulation de la question politique : et si les luttes d’aujourd’hui n’étaient plus seulement des luttes contre les dominations ou les exploitations, mais des luttes contre des assujettissements identitaires ?

Étant entendu que, pour Foucault, il s’agit toujours d’écrire " une histoire du présent " dans sa différence avec le passé, c’est-à-dire de diagnostiquer " ce qui se passe et ce que nous sommes ", et de " replacer le sujet dans le domaine historique des pratiques et des processus où il n’a pas cessé de se transformer "...

Détermination historique, donc, mais aussi dimension éthique : de la même manière que le pouvoir ne doit pas être pensé comme loi, mais comme stratégie - la loi n’étant qu’une possibilité stratégique parmi d’autres - la morale comme obéissance à la loi n’est qu’une possibilité éthique parmi d’autres.

D’où, aussi, cette idée que le sujet n’est pas noué à sa " vérité " selon un destin fatal, mais qu’il s’agit de " transformer le discours vrai en principe permanent et actif ", sachant qu’ici, " le discours vrai ", par opposition au " discours de pouvoir ", est, au sens le plus juste et le plus littéral du terme, une RAISON DE VIVRE, que l’existence actualise ; bref, ce qui l’anime, l’éprouve, la " vérifie ". En tous sens.

Jean-Paul Monferran

(1) Michel Foucault, " l’Herméneutique du sujet " ; Hautes études, Gallimard, Le Seuil ; édition établie par François Gros, 548 pages, 160 francs.