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Origine : http://www.espritcritique.org/0503/esp0503article03.html
Revue Esprit Critique :
http://www.espritcritique.org
Paschalis, Ntagteverenis. "L'espace social comme lieu du lien
social", Esprit critique, Été 2003, Vol.05, No.03
L'espace social comme lieu du lien social Par Ntagteverenis Paschalis
Résumé:
En premier lieu, nous construisons une définition synthétique
de la notion "espace social" en nous appuyant sur ses
thématiques principales qui ont préoccupé notre
discipline, pour faire émerger les deux conceptions de l'interaction
homme/espace qui ont marqué l'approche des sciences sociales
à l'espace: l'homme face à son milieu environnemental
et l'homme en relation avec son espace vécu. Ensuite, nous
tentons d'esquisser les connotations qui sont attribué à
l'espace social au sein de la deuxième conception, celle
qui pose le problème de la reliance entre l'homme et son
espace en faveur de la fondation et de la persistance du lien social,
à travers les doctrines sur la mémoire collective,
l'imaginaire et la socialité postmoderne.
Auteur : Ntagteverenis Paschalis => Doctorant en Sociologie
(Paris V - Sorbonne), chercheur au Centre d'Etude sur l'Actuel et
le Quotidien (CEAQ - Paris V)
Introduction
Une interaction, deux problématiques, trois formes
d'appréciation de l'espace social
Tout au long de l'histoire de notre discipline, les définitions
que diverses approches sociologiques ont attribuées à
la notion de l'espace social, partent d'une évidence quelques
fois ignorée: l'appréhension de l'espace environnemental
comme espace social est le fruit de l'interaction permanente entre
l'homme et son environnement factice ou/et physique. Néanmoins,
les différenciations dans la représentation et l'interprétation
du social les ont amenées à accentuer des aspects
différents de cette interaction, en focalisant leur intérêt
à trois questions principales, à savoir les questions
sur:
a. les facteurs impliqués dans l'organisation de l'espace
social (leur "nature", leur corrélation, etc.);
b. les effets de l'organisation sociale de l'espace dans la vie
et l'évolution des habitants, des groupes occupants, des
cités entières;
c. l'importance et les limites de la fonction agrégative
de l'espace social.
Si nous voulons maintenant donner une définition complète
de l'espace social en nous appuyant aux trois questions susmentionnées,
nous pouvons affirmer que le statut social de l'espace se manifeste
de trois façons. Premièrement, dans la structuration
de cet espace, qui est produit des rapports et des pratiques des
agents sociaux (la conception de l'espace social comme un espace
structuré). Deuxièmement, dans son imposition comme
un cadre relativement contraignant, qui structure lui aussi les
actions et les situations qu'il supporte (espace structurant). Enfin,
troisième manifestation, dans la fonction symbolique de l'espace,
dans la fondation et la perdurance du lien social d'une communauté
(espace formant des communautés). Cependant, cette définition
synthétique restera inachevée si nous n'établissons
pas une relation interne entre les trois aspects de l'appréhension
de l'espace social, fondée sur la proposition épistémologique
de départ.
Arrivons donc, à notre proposition. Pour nous, les trois
aspects susmentionnés résultent des deux façons
différentes d'apercevoir l'interaction en question: une qui
juxtapose l'homme à son espace environnemental - l'homme
face à l'espace - et une autre qui insiste sur ce qui lie
l'homme à son espace - l'homme en relation avec l'espace.
Pour bien les saisir, il suffit de recourir aux recherches sur l'espace
social qui ont été réalisées les quatre
vingt dernières années, dans le cadre des sciences
sociales.
Ainsi, des premières enquêtes de l'école de
Chicago et des publications d'Halbwachs jusqu'à aujourd'hui,
on peut distinguer deux grandes problématiques. D'un côté,
se trouvent les recherches dont la préoccupation majeure
est une double structuration: celle de l'espace (qui est considérée
- selon le goût des divers auteurs - comme le produit ou le
résultat des rapports économiques, des raisons historiques,
des valeurs culturelles, des obstacles physiques, etc.) et de ses
effets dans la structuration des relations internes ou intergroupales
des groupes occupants. Cette problématique, positiviste dans
sa conception, ne peut que juxtaposer l'homme et son espace pour
assurer leur extériorité et leur fermeté, deux
conditions indispensables à chaque démarche théorique
ou empirique qui veut établir des relations causales entre
ces deux termes. La caractéristique donc, la plus frappante
des recherches impliquant la première problématique
est qu'elles ne partent pas de la totalité de l'interaction
homme/espace. Au contraire, elles recourent en dehors de celle-là,
aux grands systèmes explicatifs qui ont dominé dans
notre discipline - organicisme évolutionniste, fonctionnalisme,
historicisme, économisme marxiste - pour trouver les facteurs
qui l'influencent et qui expliquent telle ou telle structuration
de ses parties. Ce n'est pas donc par hasard que les analyses proposées
reproduisent les partialités et les conflits propres aux
débats entre les grands courants sociologiques: des explications
économiques et structurales se dressent contre des interprétations
historiques[1], des causes culturelles s'opposent aux considérations
naturelles[2]. On voit donc comment cette pensée divisante
étend la dichotomie initiale dans le niveau des réponses
fournies en minimisant ainsi le rôle de l'espace dans la vie
sociale. Pour le fonctionnalisme dominant dans les années
cinquante, il s'agissait d'un obstacle physique pour la communication
humaine dont l'élimination était possible grâce
aux bénéfices du progrès[3]. De même
pour le marxisme structural, l'espace n'était qu'un produit
surdéterminé par les lois structurales de la production
de la société globale[4]. Cependant, à côté
de ces interprétations partielles, on trouve des recherches
qui visent à comprendre l'interaction homme/espace dans sa
globalité en indiquant l'interdépendance entre la
structuration de l'espace et la structuration des relations internes
et intergroupales des groupes qui l'occupent, comme la doctrine
de l'écologie humaine (Grafmeyer-Joseph, 1990) et les travaux
de H. Lefebvre (1986).
De l'autre côté, il y a une problématique
qui pose la question de la reliance entre l'homme et l'espace. Son
objectif est de donner sens à l'attachement des individus
à leurs milieux vécus en commun, aux résistances
que provoquent leurs aménagements, bref, à l'importance
de leur stabilité pour la perdurance des groupes qui les
occupent. En reprenant la distinction que Maffesoli fait par rapport
à notre discipline[5], on peut parler de la différence
entre une approche positiviste sur l'étude de l'espace social,
qui sépare l'homme de son milieu pour trouver ensuite des
causalités linéaires et surtout utiles aux finalités
lointaines (aménagement rationnel du sol, évolution
des pratiques politiques révolutionnaires, etc.) et une approche
compréhensive qui cherche à penser la relation homme/espace
dans sa totalité et par rapport à la totalité
complexe que constitue le donné social. Pour dire la même
chose en utilisant la terminologie de Durand, il s'agit d'une attitude
représentée par le symbole du glaive, qui trace des
frontières entre l'homme et son espace au sein de leur interaction
et d'une autre, représentée par la coupe, qui veut
comprendre comment l'homme et l'espace se mêlent pour favoriser
la fondation et la persistance du lien social.
Le texte qui suit cette introduction, plutôt épistémologique,
a la prétention d'éclaircir ce que nous venons d'appeler
"la deuxième problématique". Plus précisément,
notre article visera à montrer le statut attribué
à l'espace au sein de l'interaction entre l'homme et son
espace environnemental par l'intermédiation de la mémoire
collective, de l'imaginaire et de la socialité postmoderne.
Comme "terrain" de référence, on a choisi
trois auteurs classiques à ces trois domaines: M. Halbwachs,
G. Durand, et M. Maffesoli.
L'espace et la mémoire collective
Le premier essai d'une réflexion sur la relation entre
l'homme et son espace avec le sens que nous avons donné à
celle-ci dans l'introduction, a eu lieu dans l'analyse halbwachsienne
sur la mémoire collective. C'est au sein de celle-ci que
pour la première fois se pose la question de l'attachement
groupal à l'espace vécu en commun et de ses significations
possibles, d'une façon achevée et pertinente. Dans
les lignes qui suivent, après une référence
nécessaire au statut du temps par rapport à la mémoire
collective, nous tentons de faire apparaître la place que
Halbwachs attribue à l'espace dans la relation qui nous intéresse.
La double nature du temps chez Halbwachs
La conception de la double nature du temps, apparue dans le chapitre
4 de La mémoire collective, (1997) est le produit de la critique
halbwachsienne contre la durée individuelle de Bergson et
contre le temps universel des historiens. Elle se constitue, d'un
côté, de l'appréhension du temps comme l'éternel
présent du fait vécu en commun et pour cela doté
des significations groupales et de l'autre, du temps décrit
par l'auteur comme l'historicité sociale du temps de la pensée,
comme l'organisateur de succession conceptuelle et sociale du temps
présent, passé et à venir. L'analyse qui suit,
vise à faire apparaître le sort qu'Halbwachs réserve
au temps collectif, terme placé entre la durée individuelle
et le temps universel.
Avant la présentation des arguments halbwachsiens contre
la supériorité de la durée individuelle, il
nous semble utile de rappeler en grandes lignes la thèse
bergsonienne sur la double mémoire. "La métaphore
de Bergson sur la mémoire est celle d'un cône renversé
dont la pointe est tangente à un plan. Le cône symbolise
la mémoire comme réservoir d'images accumulées
depuis le passé, le plan symbolise le présent, la
pointe du cône c'est la mémoire au présent qui
ne laisse filtrer du passé que des souvenirs-habitudes (récitation,
mode d'emploi de la mémoire dans le monde industriel et technique).
La première mémoire, celle qui est adaptée
au présent, est construite par l'intelligence pour qu'elle
soit au service de l'action sur la matière et de la communication
entre les hommes. Cette mémoire intellectuelle a pour ressort
le langage dont les mots permettent de quadriller l'espace matériel
en facilitant ainsi aussi bien l'action technique que la pensée
scientifique. Cette première mémoire, Bergson l'appelle
la mémoire-habitude. La seconde mémoire, qu'il appelle
la "mémoire pure", est tout entière faite
à partir des images que nous avons saisies au court de notre
vie. [...] Pour atteindre cette seconde mémoire, il faut,
d'après Bergson, nous isoler à la fois des autres
hommes et des exigences de l'action pour que notre conscience puisse
s'identifier à cette mémoire en une perception où
la conscience percevante dure autant que la conscience perçue"
(Namer, 1994, p317). Cette conception de la mémoire amènera
Bergson dans Durée et simultanéité à
reconnaître la supériorité de la durée
individuelle face au temps unique et artificiel des sciences. Halbwachs,
dans Les cadres sociaux de la mémoire (1994), répond
à la thèse de double mémoire en démontrant
que la mémoire n'est pas une expérience vécue
des images du passé, mais bien au contraire une reconstruction
du passé à partir des éléments et des
mécanismes actuellement présents dans la conscience
du groupe: se souvenir, c'est utiliser les cadres sociaux de la
mémoire pour situer un fait. Pour ce qui concerne la question
de la supériorité de la durée individuelle,
sa critique, parue dans La mémoire collective (1997), se
focalise sur deux points: sur la possibilité d'exister une
durée entièrement individuelle et sur sa conception
homogène et uniforme. Selon l'appréhension halbwachsienne
de la remémoration, présenté dans Les cadres
sociaux de la mémoire (1994), se souvenir est faire s'identifier
une mémoire individuelle à une mémoire collective.
Au coeur, donc, de ce processus se trouve l'expérience fondamentale
d'un sens partagé par "je" et par "les autres".
Dans La mémoire collective (1997), l'auteur pousse l'extrême
l'idée de la durée individuelle en supposant des consciences
individuelles enfermées en elles-mêmes, pour approuver
que dans cette condition, les vrais rencontres des pensées
individuelles qui envisagent simultanément un objet ne sont
pas possibles, à cause de l'absence d'une "société
des consciences" qui doterait l'objet envisagé d'un
sens commun. Ainsi Halbwachs tourne-t-il la thèse principale
de Bergson contre lui-même: "la simultanéité
signifie certes l'indépendance des consciences individuelles,
mais cette indépendance n'a lieu qu'à l'intérieur
d'une expérience collective des consciences et du monde"
(voir Namer, 1997, p262) qui suppose, elle aussi, une temporalité
spécifique. Ayant indiqué l'existence d'un temps collectif,
l'auteur avance dans sa critique en affirmant que la conscience
individuelle n'est que les points des rencontres autant des différents
et irréductibles temps collectifs que les groupes où
participe l'individu: "En réalité si, en rapprochant
plusieurs consciences individuelles, on peut replacer leurs pensées
et leurs événements dans un ou plusieurs temps communs,
c'est que la durée intérieure se décompose
en plusieurs courants qui ont leurs sources dans les groupes eux-mêmes.
La conscience individuelle n'est que le lieu de passage de ces courants,
le point de rencontre des temps collectifs" (Halbwachs, 1997,
p190). A la place donc, d'autant des durées irréductibles
l'une à l'autre que les consciences individuelles, il faut
parler d'autant des temps collectifs que les groupes séparés[6].
L'affirmation de la multiplicité de temps communs sert aussi
à la négation de l'autre pôle temporel de la
proposition bergsonienne, à savoir du temps unique et homogène,
du temps mathématique, qui inclut les durées individuelles.
Cette négation se trouve aussi au coeur de la polémique
halbwachsienne contre les historiens. Pour le successeur de Durkheim,
un temps "[...] qui s'étend à tous les événements
qui se sont produits en quelque lieu du monde, à tous les
continents, à tous les pays, dans chaque pays à tous
les groupes et, à travers eux, à tous les individus"
(Halbwachs, 1997, p159-160) au-delà du fait qu'il serait
impossible, il serait aussi inutile pour les mémoires collectives
puisqu'il se priverait des significations collectives. D'après
Halbwachs, il s'agit d'un temps vide et artificiel, oeuvre de la
mémoire d'un groupe des savants, à savoir des historiens.
Ainsi le temps universel n'est-il qu'un autre aspect du temps mathématique,
un instrument factice mais nécessaire à chaque pensée
qui veut construire l'histoire universelle. En affirmant que cette
conception du temps n'a aucun rapport avec le temps réel
qui est le temps vécu avec les autres, Halbwachs arrive à
établir la priorité de la mémoire collective,
qui vise à la stabilité et la perdurance - toujours
relatives - du groupe, face à la mémoire historique
qui, en considérant le temps et l'espace comme des instances
uniques, cherche à marquer les différences et les
changements dans l'écoulement du temps historique. Le temps
collectif, au contraire, ne s'écoule pas, il dure: "Les
événements se succèdent dans le temps, mais
le temps lui-même est un cadre immobile" (Halbwachs,
1997, p189). À propos de nos intérêts, ce point
de l'analyse halbwachsienne est le plus significatif: le temps comme
cadre social de la mémoire où recourt la pensée
quand elle cherche à remémoriser un fait vécu
auparavant, est un temps stable et immobile comme un "[...]
milieu continu qui n'a pas changé et qui est resté
tel aujourd'hui qu'hier, en sorte que nous pouvons retrouver hier
dans aujourd'hui" (Halbwachs, 1997, p180). Le temps collectif
chez Halbwachs est un temps concentré au présent,
point de départ de notre mémoire, il est un temps
cristallisé, sinon spatialisé.
L'espace-cadre et l'espace-matière
On trouve certaines analogies entre l'analyse halbwachsienne de
l'espace et celle du temps; dans le cas de l'espace, le contrepoint
de la conception d'Halbwachs est un espace vide des significations
groupales, un espace doté seulement des qualités "sensibles"
et "physiques" qui sont données immédiatement
à la conscience et sans intermédiation sociale. C'est
le cas de la conception de l'espace chez les artistes, les physiciens
et les géomètres. Halbwachs la refuse puisqu'un espace
ainsi défini serait incapable de conserver des souvenirs
au-delà de la mémoire collective de ces groupes de
savants. D'après lui, l'espace de chaque mémoire collective
constitue la condition nécessaire des significations partagées
et attribuées en commun (voir Halbwachs, 1997, p209-214.
Néanmoins, il existe une différence entre les deux
analyses: dans le cas du temps collectif, Halbwachs établit
la priorité du cadre temporel de la mémoire face à
son supporteur, le temps mathématique, tandis que dans le
cas de l'espace, il souligne la genèse réciproque
de l'espace-cadre et de l'espace-matière: "Lorsqu'un
groupe est inséré dans une partie de l'espace, il
la transforme à son image, mais en même temps il se
plie et il s'adapte à des choses matérielles qui lui
résistent. [...] C'est le groupe lui-même qui, de cette
manière, demeure soumis à l'influence de la nature
matérielle et participe de son équilibre" (Halbwachs,
1997, p195). Cette idée de la genèse réciproque
nous permet de considérer que l'espace-matière est
parti pris de la conception de l'espace collectif chez Halbwachs.
Revenons maintenant à sa propre définition de l'espace
collectif. Tout d'abord, l'espace vécu en commun est plein
de sens propres à chaque groupe séparé: "chaque
aspect, chaque détail de ce lieu a lui-même un sens
(c'est nous qui soulignons) qui n'est intelligible que par les membres
du groupe, parce que toutes les parties de l'espace qu'il a occupées
correspondent à autant d'aspects différents de la
structure et de la vie de leur société, au moins à
ce qu'il y a eu en elle de plus stable"(Halbwachs, 1997, p196).
Ainsi l'espace devient-il un langage spécifique du monde
qui nous entoure: "Mais on songe en même temps (...)
au monde qui se reconnaissait en tout cela, comme si le style d'un
mobilier, le goût d'un aménagement était lui
l'équivalent d'un langage (c'est nous qui soulignons) qu'il
comprenait" (Halbwachs, 1997, p194). En plus, l'espace occupé
par un groupe à travers ses transformations, porte les indices
de son temps collectif: "Les déménagements ou
changements de lieu, et les modifications importantes introduites
à certaines dates dans l'installation et l'ameublement d'un
appartement, marquent autant d'époques dans l'histoire de
la famille" (Halbwachs, 1997, p195)[7]. Cette définition
de l'espace-cadre montre bien qu'Halbwachs dans le chapitre 5 de
La mémoire collective (1997), tente de réorganiser
l'ensemble de l'ouvrage en attribuant une priorité au cadre
spatial. Malheureusement, sa déportation a laissé
son oeuvre inachevé et nous ne pouvons faire que des hypothèses.
Passons maintenant aux qualités de l'espace ainsi conçu
pour retirer ensuite les conséquences de la pensée
halbwachsienne sur la conception de la relation homme/espace.
Ce qui est clair dans la définition halbwachsienne du cadre
spatial de la mémoire collective, c'est que l'espace occupé
par un groupe, fait appel primordialement non aux faits mais à
"[...] une manière d'être commune à beaucoup
d'hommes" (Halbwachs, 1997, p195). C'est par exemple, le cas
de notre maison où "[...] nos meubles et la façon
dont ils sont disposés, tout l'arrangement des pièces
où nous vivons, nous rappellent notre famille et les amis
que nous voyons souvent dans ce cadre"(Halbwachs, 1997, p194).
Cette qualité de l'espace-cadre ne concerne pas seulement
la mémoire collective des groupes approximatifs (ménage,
groupes urbains) mais aussi celle des formations sociales plus abstraites
comme les groupes religieux, dont les lieux sacrés ou profanes,
réels ou symboliques, rappellent des émotions et des
croyances partagées parmi les membres de la communauté
de fidèles[8]. Au moment où l'espace-cadre fait appel
en un être-ensemble, la nature inerte de l'espace-matière
garantit sa continuité en lui prêtant son image quasi
stable et immobile: "la stabilité du logement et de
son aspect intérieur n'en impose pas moins au groupe lui-même
l'image apaisante de sa continuité" (Halbwachs, 1997,
p195). Après avoir donné des exemples sur les groupes
juridiques, économiques et religieux qui confirment l'universalité
de cette proposition, Halbwachs affirme que "la société
immobilise une partie d'elle-même, une partie de sa pensée,
celle qui est tournée vers le monde matériel. Elle
peut se persuader ainsi, et persuader ses membres, qu'elle ne change
point pour l'essentiel, qu'elle ne devient pas autre qu'elle n'était,
c'est-à-dire qu'elle dure" (Halbwachs, 1997, p235).
En résumé de ce que nous venons de décrire,
nous constatons que l'espace collectif, à savoir l'espace-cadre
et son supporteur, l'espace-matière, accomplit une double
fonction dans le cadre de la mémoire collective: il rappelle
à ses occupants des groupes dont ils sont membres et il assure,
grâce à sa nature stable, la continuité des
groupes qu'il supporte. Ainsi inaugure-t-il les deux grandes thématiques
concernant le sens de la relation homme/espace.
Ensuite, nous verrons comment ces thématiques seront dynamisées
par les théories sur l'imaginaire et la socialité
postmoderne.
L'espace et l'imaginaire
Dès les années soixante, on constate l'apparition
de nombreux ouvrages qui mettent en cause l'exclusion de l'image,
de l'imagination et du symbolique, par le terrain de recherche des
sciences sociales, à cause de leur caractère irrationnel
et par conséquent inapte à subir une élaboration
scientifique. Ce mouvement revendiquant la rappropriation par la
science de l'imaginaire (de l'autre moitié de la pensée
humaine), a radicalisé la conception de la relation homme/espace
en faisant apparaître la synergie qui existe entre l'imagination
humaine et l'espace face à l'angoisse provoquée par
l'écoulement du temps et par son actualisation, la mort.
Pour pouvoir estimer les conséquences de cette radicalisation,
nous ferons appel à la critique durandienne de la durée
individuelle de Bergson où l'auteur de Les structures anthropologiques
de l'imaginaire (1992) explique pourquoi la fonction fantastique
est du côté de l'espace et s'exprime sur les liens
du dernier avec le sens suprême de l'imaginaire, à
savoir l'euphémisme.
La critique de Durand s'attaque à la conception de la durée
individuelle d'un point de vue différent de la critique halbwachsienne
qui, comme nous l'avons indiqué, s'élève contre
la priorité de la durée en question par rapport au
temps collectif. Ce qui provoque l'objection de Durand, est l'assimilation
par Bergson de la fonction fabulatrice à la durée
concrète. Une objection tout à fait justifiée
si l'on rend compte du fait que dans tout son ouvrage sur les deux
régimes de l'image, ceux-ci se présentent comme deux
attitudes imaginatives différentes face aux "visages
du temps": le régime diurne cherche l'antidote du devenir
fatal "au niveau surhumain de la transcendance et de la pureté
des essences" (Durand, 1992, p219) tandis que le régime
nocturne " dans la rassurante et chaude intimité de
la substance ou dans les constantes rythmiques qui scandent phénomènes
et accidents" (Durand, 1992, p220). Ainsi Durand considère-t-il
que la thèse bergsonienne qui assimile la fonction fantastique
à une durée, à quelque chose de l'ordre temporel,
est inadéquate et cherche à la ruiner. D'abord, il
souligne que la durée individuelle bergsonienne est soit
impensable, soit, quand on la pense, qu'elle n'est pas durée:
"Car d'une part si on abandonne cette durée au lyrisme
ontologique, elle devient un insaisissable puzzle, sans liaison
des successions qualitatives. [...] Si d'autre part on en souligne
l'unité, on la voit se perdre dans une immobilité
statique" (Durand, 1992, p463-464). On retrouve ici le même
paradoxe que l'on a remarqué dans la définition du
temps collective chez Halbwachs: la durée bergsonienne, parce
qu'elle dure, n'est pas temporelle, un paradoxal renforcé
aussi par sa définition comme "anti-destin" (Durand,
1992, p464).
Apres avoir démontré les contradictions internes
de la durée bergsonienne, Durand s'occupe du rejet de l'hypothèse
qui justifie l'annexion de l'imaginaire au domaine du temps puisqu'il
est du domaine de la mémoire: "[...] d'un seul coup,
[Bergson] résorbe l'image et l'esprit dans la mémoire
et l'intuition de la durée. La mémoire serait acte
de résistance de la durée à la matière
purement spatiale et intellectuelle. La mémoire et l'image
du côté de la durée et de l'esprit s'opposent
à l'intelligence et la matière du côté
de l'espace" (Durand, 1992, p465). Selon l'auteur, cette proposition
bergsonienne repose sur l'erreur de l'assimilation de la mémoire
à l'intuition de la durée. D'après lui, la
mémoire échappe au temps "...dans le triomphe
d'un temps "retrouvé, donc nié" (Durand,
1992, p466). C'est dans cette condition qu'elle permet "un
redoublement des instances et un dédoublement du présent"
(Durand, 1992, p466). Mais en permettant de revenir sur le passé,
la mémoire autorise en partie la réparation des outrages
du temps, autrement dit, elle a le caractère fondamental
de l'imaginaire, qui est d'être euphémisme. En plus,
la mémoire est aussi anti-destin et se dresse contre le temps.
Elle est un "pouvoir réflexogène", à
savoir un pouvoir d'organisation d'un tout à partir d'un
fragment vécu. Cette organisation est la négation
de la puissance d'équivalence irréversible qu'est
le temps. "La mémoire - comme l'image - est cette magie
vicariante par laquelle un fragment existentiel peut résumer
et symboliser la totalité du temps retrouvé"
(Durand, 1992, p468). Ce sont ces deux qualités de la mémoire
(euphémisme, anti-destin) qui permettent le renversement
de l'hypothèse bergsonienne: la mémoire se résorbe
en la fonction fantastique, et non l'inverse.
Ayant démontré que la durée ou le temps en
général ne constitue pas le domaine de l'imaginaire,
Durand affirme qu' "il ne reste plus qu'à attribuer
l'espace comme "sensorium" général de la
fonction fantastique" (Durand, 1992, p472). Il ne s'agit pas,
bien sur, de l'hyperespace physique mais d'un espace psychologique
(un espace représentatif, conçu comme un mi-lieu entre
subjectivité et objectivité) qui n'est autre que l'espace
euclidien. Celui-ci, n'étant plus fonctionnellement "physique"
(objectif), devient un a priori d'autre chose que l'expérience:
"il devient la forme a priori du pouvoir euphémique
de la pensée, il est le lieu des figurations puisqu'il est
le symbole opératoire du distancement maîtrisé"
(Durand, 1992, p473)[9]. Enfin, Durand achève son argumentation
en indiquant que c'est grâce aux qualités de l'espace
euclidien, à savoir son ocularité, sa profondeur et
son ubiquité - qualités propres aussi à l'image
- que celui-ci peut jouer ce rôle (Durand, 1992, p474-480).
Cette synergie entre l'espace et la fonction fantastique que nous
venons brièvement de décrire, rend clair que la réévaluation
du statut de l'imaginaire entraîne aussi la réévaluation
du statut de l'espace, en radicalisant ainsi notre conception sur
la relation homme/espace: celui-ci, d'un cadre social de la mémoire
collective parmi d'autres, devient le lieu de notre imagination,
"notre ami" qui s'abstrait de l'épreuve perceptive
et temporelle, bref, la forme a priori d'une fonction dont la raison
d'être est l'euphémisme de notre destin fatal. Cette
évolution positive du statut de l'espace atteindra sa place
la plus haute dans les théories de la postmodernité.
L'espace et la socialité
Les théories de la postmodernité ont bouleversé
notre conception sur la relation homme/espace. Leur attitude critique
face aux dichotomies établies par la pensée rationnelle
entre la nature et la culture, entre la raison et l'imaginaire,
ne pourrait rester indifférente face à la césure
ontologique imposée entre l'homme et son environnement spatial.
Pour comprendre comment et pourquoi cette nouvelle appréhension
de la vie sociétale fait que l'espace "passe devant
la scène", nous suivrons la réflexion maffesolienne
sur le glissement du social vers la socialité, à savoir
d'une structure mécanique, dominée par une organisation
économico-politique où agissent des groupements contractuels,
composés par des individus avec des fonctions bien définies,
vers une structure complexe, donc organique, où le constat
est un va-et-vient entre les masses et des micro-groupes affectifs,
au sein desquels les personnes (persona) jouent leurs rôles.
Chez Maffesoli, l'espace de forme a priori du fantastique devient,
avec l'imaginaire, forme a priori de ce nouvel ordre confusionnel
et désordonné que constitue la socialité[10].
Pour saisir comment l'auteur justifie cette nouvelle promotion du
statut de l'espace, nous avons choisi un extrait d'Au creux des
apparences (1990), où Maffesoli s'exprime sur la socialité
d'une façon bien instructive à propos de nos intérêts:
"il y a un hédonisme du quotidien irrépressible
et puissant qui sous-tend et soutient toute vie en société.
Une structure anthropologique en quelque sorte. A certaines époques,
cet hédonisme sera marginalisé et occupera un rôle
subalterne; il en d'autres où, au contraire, il sera le pivot
à partir duquel va s'ordonner, de manière affichée,
discrète ou secrète, toute la vie sociale. En ces
moments-là, ce que l'on appelle les rapports sociaux, ceux
de la vie courante, des institutions, du travail, des loisirs, ne
sont plus uniquement régis par des instances surplombantes,
à priori et mécaniques; de même, ils ne sont
plus orientés vers un but à atteindre, toujours lointain,
en bref tout ce qui est délimité par une logique économico-politique,
ou déterminé en fonction d'une vision morale. Au contraire,
ces rapports deviennent des relations animées par et à
partir de ce qui est intrinsèque, vécu au jour le
jour, d'une manière organique; de plus, ils se recentrent
sur ce qui est de l'ordre de la proximité. En bref, le lien
social devient émotionnel. Ainsi s'élabore une manière
d'être (éthos) où ce qui est éprouvé
avec d'autres sera primordial. C'est cela même que je désignerai
par l'expression: "éthique de l'esthétique""
(Maffesoli, 1990, p13). Relativisme, refus du lointain et de l'abstrait,
attachement au proche et au concret, voilà les caractéristiques
de cette nouvelle forme de l'être ensemble qui vient de naître.
Causes et effets du fait que l'homme contemporain "en a marre"
d'avoir son regard tourné vers l'avenir, vers le temps qui
viendra, et il cherche le paradis promis par l'Histoire dans son
présent, aux émotions partagées avec les autres
(voir Maffesoli, 1990, chap. "La baroquisation du monde",
p151-185). Ce changement radical de point de vue renverse notre
conception du rapport espace/temps: dans nos sociétés
postmodernes, ce sont les choses de l'ordre spatial (territoire,
localisme, proximité) qui passent au devant de la scène.
C'est à ce sens qu'il faut saisir la proposition maffesolienne
selon laquelle l'espace est devenu forme a priori de la socialité.
Passons maintenant aux qualités de l'espace ainsi défini.
En prenant le cas de la mégapole contemporaine, Maffesoli
indique que l'espace "[...] est une sorte de "milieu"
entre ces entités que la tradition occidentale a fortement
trachées: nature versus culture" (Maffesoli, 1990, p208).
Cette conception maffesolienne, fidèle à son point
de vue holistique (symbolique), cherche à comprendre la ville
dans sa complexité: "L'espace qui nous occupe, est un
ensemble complexe constitué à la fois par la matérialité
des choses (rues, monuments, trafic) et par l'immatérialité
des images de divers ordres. C'est ce qui fait de cet ensemble un
ordre symbolique" (Maffesoli, 1990, p212). On ne peut pas donc
saisir la ville si, à côté de son architecture
"physique", on ne se rend pas compte de l'architecture
des divers réseaux de communication qui font circuler des
émotions, des affects et des symboles et "[...] qui
me permettent de m'accommoder (...) à l'environnement physique
qui m'est donné, et qu'en même temps je construis symboliquement"
(Maffesoli, 1990, p217). L'espace donc, en privilégiant,
grâce à son caractère mixte, toutes les choses
de l'ordre esthétique, devient "[...] la condition de
possibilité de l'existence humaine, à partir de l'existence
sociale et de l'existence naturelle. Ce qui revient à dire
que le "moi ne prend conscience de lui-même" qu'en
tant que relation" (Maffesoli, 1990, p208-209)[11].
L'espace en favorisant le sentir ensemble, est aussi condition
de la naissance de l'éthos spécifique de la postmodernité.
"C'est par la force des choses, c'est parce qu'il y a partage
d'un même territoire (qu'il soit réel ou symbolique),
que l'on voit naître l'idée communautaire et l'éthique
qui lui est corollaire" (Maffesoli, 1988, p31). C'est l'attachement
au sol où sont enterrés nos ancêtres[12], c'est
l'existence du génie du lieu[13], c'est la participation
aux divers cultes contemporains dans les hauts lieux sacrés
de nos mégapoles[14] que font que l'espace devient le ciment
de cette nouvelle manière d'être (éthos) où
ce qui est primordial, ce sont les émotions vécues
avec d'autres. L'espace donc constitue la forme par excellence de
ce que Maffesoli nomme "éthique de l'esthétique",
cause et effet de la socialité contemporaine.
Ntagteverenis Paschalis
Notes:
1.- Voir la critique de Castells (1981) sur les théories
volontaristes de l'espace social.
2.- Ce sont les critiques de l'école culturaliste contre
la théorie de l'écologie humaine. (A titre d'exemple,
voir Firey, 1947)
3.- Pour une critique sur la conception fonctionnaliste de l'espace
en France, voir la critique sur les recherches effectuée
dans les années cinquante sous le financement de la Délégation
Générale à la Recherche Scientifique et Technique
(DGRST) in Billaud (1983, p.9-13)
4.- C'est le cas de l'étude sur l'espace de Castells (1981,
chap. "Le débat sur la théorie de l'espace",
p.153-169)
5.- "A partir de cet exemple on retrouve donc la césure
qui nous occupe, cette fois-ci entre une sociologie positiviste,
pour qui chaque chose n'est qu'un symptôme d'autre chose,
et une sociologie compréhensive qui décrit le vécu
pour ce qu'il est, se contentant de discerner ainsi les visées
des différents acteurs concernés". (Maffesoli,
1985, p.18)
6.- "Chaque groupe défini localement a sa mémoire
propre et une représentation du temps qui n'est qu'à
lui". (Halbwachs, 1997, p163)
7.- Cette définition de l'espace collectif montre bien que
dans La mémoire collective (1997), Halbwachs met en question
l'isolement des trois cadres sociaux présentés dans
Les cadres sociaux de la mémoire (1994) (langage, temps,
espace).
8.- "Mais une société de fidèles est
conduit à distribuer entre les diverses parties de l'espace
le plus grand nombre des idées et images qui entretiennent
sa pensée" (Halbwachs, 1997, p208)
9.- D'après Durand, l'imagination humaine est modelée
par le développement de la vision, puis de l'audition et
du langage, à savoir des moyens d'appréhension et
d'assimilation "à distance". Le distancement donc,
ne peut avoir qu'une valeur euphémique.
10.- "Tout comme l'espace, le fantastique est ainsi une des
formes a priori de toute socialité". Maffesoli, 1979,
p91)
11.- Voir également Maffesoli, 1988 (chap. "De la proxémie",
p183-224).
12.- "L'attachement à la terre où sont enterrés
les ancêtres repose sur la conscience d'une continuité
cosmique quasi naturelle, qui nous rend tributaires de ceux qui
nous ont précédés.... La sédimentation
produite par la mort engendre le vivant". (Maffesoli, 1979,
p64).
13.- "D'où l'importance du "génie du lieu";
ce sentiment collectif qui façonne un espace, lequel rétroagit
sur le sentiment en question". (Maffesoli, 1988, p194).
14.- "Ainsi l'on pourrait dire que la mégapole est
constituée par une suite de "hauts lieux", dans
le sens religieux du terme, où sont célébrés
divers cultes au fort coefficient esthético-éthique.
Ce sont les cultes du corps, du sexe, de l'image, de l'amitié,
de la "bouffe", du sport... la liste étant, à
cet égard, indéfinie. Le dénominateur commun
est le lieu où se fait ce culte. Ainsi que je l'ai déjà
montré ailleurs, le lieu devenant lien". (Maffesoli,
1990, p214-215).
Références bibliographiques:
Billaud J.P., Regards sur la localité, (travail collectif)
Paris, Ministère de l'Urbanisme et du Logement, 1983.
Castells M., La question urbaine, Paris, éd. François
Maspero, 1981.
Durand G., Les structures anthropologiques de l'imaginaire, Paris,
Dunod, 1992.
Firey W., Land Use in Central Boston, Cambridge, Mass, Harvard
University Press, 1947.
Grafmeyer Y. et Joseph I., L'école de Chicago. Naissance
de l'écologie urbaine, Paris, Aubier, 1990.
Halbwachs M., Les cadres sociaux de la mémoire, Paris, éd.
Albin Michel, 1994.
Halbwachs M., La mémoire collective, Paris, éd. Albin
Michel, 1997.
Lefebvre H., La production de l'espace, Paris, Anthropos, 1986.
Maffesoli M., La conquête du présent, Paris, PUF,
1979.
Maffesoli M., La connaissance ordinaire, Paris, Librairie des Méridiens,
1985.
Maffesoli M., Le temps des tribus - le déclin de l'individualisme
dans les sociétés postmodernes, Paris, Méridiens,
1988.
Maffesoli M., Au creux des apparences, Paris, Plon, 1990
Namer G., "Postface", in, Halbwachs M., Les cadres sociaux
de la mémoire, Paris, éd. Albin Michel, 1994.
Namer G., "Postface", in, Halbwachs M., La mémoire
collective, Paris, éd. Albin Michel, 1997.
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