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« Le changement climatique est une chance pour la réassurance »
PETER HÖPPE - LE DIRECTEUR DU DÉPARTEMENT RISQUES GÉOGRAPHIQUES DE MUNICH
Journal Les Echos [ 27/07/07 ]

Origine : http://www.lesechos.fr/info/energie/4604962.htm


Après les ouragans Katrina, Rita, Wilma qui ont dévasté en 2005 La Nouvelle-Orléans et le golfe du Mexique, la saison des cyclones 2006 a été très calme. Une exception, estime Peter Höppe, qui rappelle que la fréquence et l'intensité de ces phénomènes climatiques devraient continuer de progresser. Il explique aux « Echos » en quoi le changement climatique va entraîner une demande croissante en matière de protection contre les risques.

La saison d'ouragans cette année peut-elle être aussi calme que l'an dernier ?

C'est peu probable. Le faible nombre d'ouragans dans l'Atlantique l'an dernier a résulté de la combinaison de deux facteurs : d'une part, le début de la saison avait été marqué par une forte concentration de particules de sable provenant du Sahara, à environ 2 km d'altitude, qui a limité la remontée des masses d'air humide ; d'autre part, en fin de saison, c'est-à-dire vers le mois d'octobre, la présence d'El Niño dans le Pacifique a modifié le régime des vents dans l'Atlantique Nord et donc freiné la formation de cyclones. Or, El Niño n'apparaît que tous les trois à sept ans en moyenne. En outre, les températures à la surface de l'eau sont supérieures à la moyenne des années précédentes, ce qui devrait favoriser la formation d'ouragans. L'agence météorologique américaine Noaa, par exemple, table sur la formation de 7 à 10 ouragans dans l'Atlantique cet été, autrement dit 2 à 3 de plus que la moyenne à long terme. D'un autre côté, la saison a déjà commencé calmement, et si le calme perdure dans l'Atlantique, les instituts pourraient être amenés à abaisser leurs prévisions. Pour l'instant, seule l'activité cyclonique au-dessus de la mer est à peu près prévisible dans l'ensemble. Il est impossible, par contre, de prédire l'arrivée des cyclones sur les côtes, ni l'endroit où ils touchent terre.

Observe-t-on déjà les effets du changement climatique sur le long terme ?

Nous sommes convaincus que le réchauffement de la planète se traduit déjà par des changements dans la fréquence et l'intensité des catastrophes naturelles et que ces effets ne vont faire qu'augmenter dans les années à venir. Des régions qui étaient rarement touchées auparavant le deviennent plus souvent, comme on a pu le constater avec les inondations en Grande-Bretagne, la sécheresse en Suisse et dans le sud de l'Allemagne au printemps ou encore les orages violents qui ont frappé les Etats-Unis. On a aussi pu observer des phénomènes totalement nouveaux, comme le cyclone Catarina dans l'Atlantique Sud ou l'ouragan Vince qui s'est formé près de l'archipel de Madère. Par ailleurs, les régions qui, déjà aujourd'hui, sont fréquemment sinistrées le seront de plus en plus souvent. Sur une très longue période, il y a eu en moyenne 6,2 ouragans par an dans l'Atlantique Nord, alors que sur les douze dernières années la moyenne était déjà de 8 chaque année. Dans les prochaines décennies, la fréquence et l'intensité de ces phénomènes climatiques devraient continuer de progresser, car la température de l'air et de l'eau augmente. Il y a aussi des cycles naturels et d'autres facteurs d'influence. Chaque année ne surpasse donc pas nécessairement l'année précédente. Mais, sur le long terme, la tendance générale est clairement à la hausse.

Le changement climatique représente-t-il une opportunité pour les réassureurs, du fait de l'augmentation des primes, ou un risque lié à la hausse des coûts ?

Le changement climatique est une chance pour le métier de la réassurance, parce que nous connaissons les risques et nous savons les calculer. Une tempête coûte, certes, beaucoup plus cher aujourd'hui qu'il y a cent ans, lorsque l'on voit les villes qui sont situées au bord des côtes, comme Miami, et sont en expansion rapide. En raison de l'aggravation de l'exposition, les primes versées aux assureurs ont fortement augmenté dans les zones à risque. En fait, les réassureurs doivent ajuster de manière dynamique leurs modèles en fonction de la modification de l'exposition. Le changement climatique offre aussi des opportunités, car une politique efficace de protection du climat ouvre la voie à de nouvelles technologies qu'il faudra assurer, comme par exemple les parcs éoliens offshore ou les grandes installations photovoltaïques. Les exploitants de ces installations souhaitent se couvrir par exemple contre un ensoleillement trop faible. Globalement, nous partons de l'idée que le changement climatique va entraîner une demande croissante en matière de protection contre les risques.

PROPOS RECUEILLIS PAR INGRID FRANÇOIS À FRANCFORT