Origine : http://fr.wikipedia.org/wiki/Erich_Fromm
Erich Fromm
Naissance : 23 mars 1900
Francfort, Allemagne
Décès : 18 mars 1980 (à 79 ans)
Locarno, Suisse
Nationalité : Allemagne puis États-Unis
Profession : psychanalyste humaniste
Erich Fromm, né à Francfort le 23 mars 1900 et mort
à Locarno le 18 mars 1980 était un psychanalyste humaniste
étatsunien d'origine juive allemande. Il fit ses études
à l'université de Heidelberg puis à celle de
Munich et enfin à l'Institut de Psychanalyse de Berlin.
Il fut avec Adorno, Herbert Marcuse et d'autres, un des premiers
représentants de l'"école de Francfort".
Il a greffé d'une façon critique et originale qui
lui est propre, la thèse freudienne sur la réalité
sociale qui s'est faite jour dans l'après-guerre jusqu'à
l'époque contemporaine aux États-unis où il
a vécu à partir de 1934. Là il a enseigné
au Bennington College, à la Columbia University, puis celle
du Michigan et à Yale, et aussi auprès de l'Université
Nationale du Mexique.
L'homme et son œuvre
Pour certains, Erich Fromm est un psychanalyste humaniste. Il a
été analysé par celle qui allait devenir sa
femme Frieda Fromm-Reichmann et Hanns Sachs. Mais, en dehors des
chapelles, Erich Fromm est bien plus connu comme un sociologue marxiste
pour avoir fait la conjonction explosive de Karl Marx à Sigmund
. Il prône l'adaptation de la psychanalyse à la dynamique
sociale à partir d'une interprétation humaniste de
Marx (La peur de la liberté, 1941 ; L'art d'aimer, 1956 ;
Société aliénée et société
saine, 1971).
Le sous-titre de Société aliénée et
société saine est bien plus éclairant. Il est
: Du capitalisme au socialisme humaniste. Psychanalyse de la société
contemporaine. Son testament intellectuel est dans Espoir et révolution.
Vers l'humanisation de la technique, 1981.
* « […] Unir Freud à Marx est conjoindre au
noyau de l'homo faber le noyau de la psyché. L'âme
est ici la notion protoplasmique, colloïdale où communiquent
la nature affective de la vie et la nature psychique de l'homme;
c'est la plaque tournante du complexe psycho-affectif. L'âme
n'est donc pas une donnée ultime mais un complexe en mouvement
difficile à définir. Les deux noyaux constituent comme
une bipolarité autour de laquelle s'ordonne le phénomène
humain. Ils fondent deux infrastructures, l'une produisant l'outil,
l'autre sécrétant le rêve. Ces deux infrastructures
dépendent mutuellement l'une de l'autre, se trouvant souvent
en communication étrange, mais on ne saurait les réduire
l'une à l'autre… »
Freud
* […] Pour Freud comme pour Marx, mais plus explicitement,
l'homme est fondamentalement et dialectiquement bon-mauvais. Fondamentalement
car l'homme est le sujet d'un conflit radical, et ce conflit est
le foyer des progressions comme des régressions, mieux, d'un
perpétuel mouvement progressif-régressif. Dialectiquement,
le bon peut naître du mauvais, le mauvais du bon. La nature
du bon-mauvais est instable, car le moi est instable, formé
génétiquement et travaillé constamment, non
seulement par l'antagonisme d'Eros et Thanatos, mais aussi par la
lutte permanente entre la pulsion et la répression, le Soi
et le Surmoi. Les dérivations sublimées des conflits
(l'art, la culture, la civilisation) sont en principe 'bonnes' mais
comportent leur poison et leur insuffisance; les régressions
névrotiques et psychotiques sont en principe 'mauvaises'.
mais les mécanismes qui se bloquent dans la névrose
ne sont-ils pas ceux qui entretiennent la santé de la vie
normale? Le plus remarquable, dans l'axe de l'anthropologie freudienne,
est que l'homme (mauvais-bon) est constitutionnellement névrosé-sain.
L'homme vit une situation névrotique permanente qui est la
condition de sa santé. Dès l'origine, la conscience
de la mort lui est un traumatisme qui le suit toute sa vie, et cristallise
la religion comme 'névrose obses-sionnelle de l'humanité';
dès l'origine, le rapport avec le monde et avec autrui l'amène
à doubler son rapport pratique (l'outil, le travail) d'un
rapport magique (le rite, le fétiche, la possession); dès
l'origine, la répression fondamentale - le tabou - qui établit
la règle sociale, le stabilise et le détraque à
la fois et refoule une part torrentueuse de lui-même dans
l'imaginaire. Ainsi l'homme social est inadapté à
son sort biologique d'être mortel; l'homme biologique est
inadapté à son sort social d'être réprimé.
Cette double inadaptation projette l'homme dans les délires,
mais en même temps le catapulte dans le devenir" (Edgar
Morin, pp. 23-24, "Introduction à une politique de l'homme",
Seuil, Paris, 1965).
Psychanalyste américain d'origine juive allemande, comme
en témoignent ses textes persillés de nombreuses références
bibliques et ses citations tirées des romantiques allemands,
Erich Fromm est inséparable de l'école psychodynamique
américaine.
Erich Fromm et l’école psychodynamique américaine
"E pluribus unum", la devise nationale des États-Unis,
signifiant de la multitude pour faire un, peut être aussi
l'emblème et le programme de l'école psychanalytique
américaine formée des entrelacements d'enchevêtrements
de différents courants d'idées et de pratiques occidentales
et orientales amenées par des "excommuniés"
et des réfugiés d'une Europe des intolérances
et des exclusions où la vague d'immigration aux États-Unis
des années 30 et 40 a fait passer la langue scientifique
de l'allemand à l'anglo-américain et l'odyssée
du "St-Louis" a donné aux États-Unis un
grand nombre des plus brillantes "têtes chercheuses"
du siècle.
L'Angleterre et le Commonwealth britannique ont été
les points de passage ou de transit pour ces fuyards de la persécution
intellectuelle et politique, comme l'Australie pour Fritz Perls
qui a ajouté différentes superstructures à
l'infrastructure freudienne pour bâtir sa "Gestalt-thérapie"
aux États-Unis et bien d'autres dissidences qui vont aboutir
jusqu'à l'antipsychiatrie de Ronald Laing et David Cooper
et la psychiatrie sociale américaine de Gregory Bateson.
Lorsque Freud s'est exprimé à propos des Américains,
c'était généralement pour dire sa grande méfiance
quant à ce qu'ils pourraient faire de la psychanalyse. Certains
exégètes freudiens ont apporté des nuances
à ces affirmations de Freud en faisant aussi valoir la fascination
qu'il avait pour l'Amérique. Quoiqu'il en soit, la psychanalyse
s'est essentiellement développée aux États-Unis
grâce à l'afflux des immigrants européens fuyant
la montée du nazisme et l'approche de la Deuxième
Guerre mondiale. Ces immigrants, parmi lesquels se trouvaient certains
des psychanalystes les plus brillants de leur époque, ont
entraîné un déplacement du centre de gravité
du monde psychanalytique du vieux continent vers la riche et puissante
Amérique. Si aujourd'hui la psychanalyse américaine
semble avoir perdu du terrain au profit de la pharmacologie et des
sciences cognitives, c'est après avoir connu une période
de gloire comme on en a rarement vu. Par contre, c’est en
France que la psychanalyse est devenu un culte.
PERSPECTIVE SOCIO-CULTURELLE ET HISTORIQUE
Au départ et dans la mythologie américaine, les colonies
anglaises d'Amérique ont été une terre d'accueil
des persécutés et l'indépendance de ces colonies,
vis-à-vis la Couronne britannique, se fondait sur quelques
"libertés" inscrites dans le mythe d'origine et
dans la constitution de la République.
* "[…] Les contacts transculturels de différentes
populations venues de différents horizons ont donné
ce que Gregory Bateson a nommé de "chismogenèse"
complémentaire et symétrique étendue de l'anthropologie
à bien d'autres domaines, comme la plupart de ses trouvailles.
La chismogenèse est définie par Bateson (op. cit.
1971, p. 221) comme un "processus de différenciation
dans les normes de comportement individuel résultant d'interactions
cumulatives entre des individus". (Gregory Bateson, pp. 217-240,
"La cérémonie du Naven", les éditions
de Minuit, Paris, /971)
Il s'agit de relations fondées soit sur l'égalité
de la symétrie, soit sur la différence se la complémentarité.
Dans la “symétrie”, les protagonistes tendent
à adopter des comportements "en miroir" du type
"de plus-en-plus divergents de la même chose" et
se caractérise par l'égalité et la minimisation
de la différence, tandis que dans la “complémentarité”,
le comportement des interactants s'ajustent et se complètent
mutuellement pour former une "Gestalt" ou "totalité
complète" et se caractérise par la différence
et se fonde sur la maximalisation de la différence.
L'interaction complémentaire en "creux" et "relief"
est celle des couples domination-soumission, exhibitionnisme-voyeurisme,
parent-enfant, maître-élève, médecin-patient
et se caractérise par la différence et se fonde la
maximalisation de la différence. Ce qui a donné la
quasi orthodoxie de l'Est avec "l'école de New York"
où la psychanalyse était une spécialité
médicale et dans laquelle se situait René Spitz (1887-1974)
qui a mis l'accent sur les carences affectives dans la relation
mère-enfant et d'autres qui ont eu peu d'influences.
L'interaction symétrique "en miroir" est du type
de la vantardise en surenchère où un exploit imaginaire
de l'un conduit à un exploit aussi imaginaire supérieur
ou au moins égal de l'autre ou du type de la course aux armements
en escalade où un bouclier plus épais conduit à
une flèche plus puissante qui conduit à un bouclier
plus épais et ainsi de suite, dans la minimisation de la
différence, et se fonde sur l'égalité. Il en
résulte "l'école culturaliste" de Chicago
pour aboutir aux constellations périphériques des
"thérapies corporelles" de la Californie.
L'école psychanalytique américaine s'est formée
à travers ces collusions complémentaires et ces altercations-alternations
symétriques de différents courants d'idées
et de pratiques et de différentes cultures et valeurs dans
le contexte de la morale des puritains et des pionniers où
le corps est surtout un corps "santé" plutôt
qu'un corps ludique et "parure" sur lequel se fondent
les prémices freudiennes de l'orthodoxie.
Le déferlement du protestantisme associé à
Martin Luther, Jan Huss et d'autres arriva en Angleterre où
il s'est identifié à la Réforme et au puritanisme
de Cromwell. Le Piétisme et la condamnation de la passion
charnelle, la haute valorisation du contrôle de soi et du
pouvoir de la volonté et la croyance en une responsabilité
personnelle envers Dieu se trouvaient au centre de la morale puritaine
qui prônait une vie pure, le zèle au travail, l'effort,
la propreté, la cohérence, l'honnêteté
et préconisait la simplicité du culte et la solidarité
envers les autres membres de la communauté puritaine.
Ces puritains ont rencontré en Angleterre une forte opposition
et, en guise de protestation, ils quittèrent la scène
anglaise. Arrivés en Amérique doté d'un climat
rigoureux et habité par une population de plus en plus hostile
à mesure que s'accentue la colonisation, il a fallu faire
face à l'adversité et inventer la “morale des
pionniers” pour former des individus robustes capables de
lutter contre la nature et les populations indigènes hostiles,
capables de défricher et cultiver la terre, de produire leur
propre nourriture, de bâtir leur propre logement et de fabriquer
leur propre vêtement où il était primordial
de savoir s'adapter à des situations changeantes et affronter
les difficultés. Les nécessités des pionniers
et les besoins des puritains se conjuguèrent et se trouvèrent
à la base du système américain de valeurs.
Ce système américain de valeurs est caractérisé
par l'autorité du groupe, la socialité des membres,
la solidarité et la responsabilité sociales, la brutalité
et la rudesse, la passion pour le changement et le culte de la réussite.
La brutalité et la rudesse sont considérées
comme nécessaires à la survie de l'individu, tandis
que la morale des pionniers croit que le plaisir sexuel amollit
l'individu. Alors, la sexualité n'a plus l'importance essentielle
conférée par Freud, mais une importance fonctionnelle
et voire existentielle.
Pour satisfaire des impératifs antagonistes, les Américains
ont aménagé leurs méthodes où un "type
régulier" (good guy ) est celui qui cède aux
tentations mais en tant que membre du groupe, c'est-à-dire
à condition de faire "comme les autres". Il peut
se permettre si le groupe se comporte de la même façon.
Il suffit de remarquer de grandes permissivités dans les
"cocktails" et "parties" typiquement américains,
alors que la privauté et l'intimité ont un effet dissuasif
et coercitif. Le réglement des résidences universitaires
américaines autorisent la libre circulation des deux sexes,
mais imposent la tradition de la "porte entrouverte".
Un comportement, jugé immoral quand il est le fait d'un
individu isolé, est accepté et exempt de tout blâme
extérieur quand il se produit en présence des autres.
La promiscuité, le jeu et la bagarre appartiennent à
cette catégorie. Les "drive in" sont aménagés
à cet effet et un certain nombre de parcs et boisées.
Les voyageurs européens sont consternés par l'étalage
de "familiarités" qui prévaut dans les "surprises-parties"
et dans les lieux comme les "allées des amoureux"
où peuvent stationner des centaines d'automobiles avec des
couples en train de s'explorer mutuellement. Parallèlement,
les congrès de ci et de ça, les réunions d'anciens
de toute sorte ou l'escale à terre d'un bateau favorisent
les frasques, les bagarres, les beuveries et les orgies d'une façon
qui ne serait pas admise dans des cas isolés.
Au sein de la famille et dans les petits groupes, par l'histoire
réelle et mythique des pionniers, la femme veille au respect
de la moralité pour l'homme, pour elle-même et pour
l'enfant, en contraste aux habitudes européennes où
les hommes incarnent et défendent la moralité et la
tradition, rendant ainsi caduque le "Nom du Père"
qui est en même temps le "Non du Père" lacaniens
où le Père est l'incarnation ou le Symbole de la Loi
et de l'Ordre.
Sur le plan intellectuel des sciences et des arts, la conformité
au groupe a fait fuir vers l'Europe de nombreux artistes et les
plus grands théoriciens scientifiques américains sont
pour la plupart nés à l'étranger et ont été
naturalisés par la suite. La pression du conformisme n'est
pas favorables aux grandes et petites trouvailles et c'est pourquoi
ce domaine a été laissé presqu'entièrement
aux Européens qui peuvent clamer oralement ou par écrit
des idées originales, nouvelles et vraiment novatrices acceptées,
adoptées et bien accueillies, puisque chacun sait qu'ils
sont de cultures différentes et qu'on tolère leurs
déviations.
En contraste aux colonies française et hispanique d'Amérique
où les colons ont été majoritairement des hommes
célibataires, la colonie anglaise d'Amérique s'est
peuplée de colons venus en famille déjà constituée,
de même que le déplacement des "Frontières"
vers l'Ouest, où la collaboration entre les hommes et les
femmes ont été une première nécessité
de survie.
Avec la fermière de la colonie et la pionnière de
l'Ouest lointain (Far West ), la phallocratie du schéma freudien
orthodoxe n'a pas été acceptée d'emblée
par le système américain de valeurs. Les bourgeoises
oisives et entretenues, les "cocottes" et les "demi-mondaines"
des grandes villes américaines de l'Est, contemporaines des
métropoles européennes, ont cédé la
place aux "pétroleuses" des mythes des "Frontières"
de la colonie et de l'Ouest.
De la grande variété des cultures et des populations
constituantes, l'ethnocentrisme du schéma freudien orthodoxe
a trouvé aussi un accueil réservé dans ce système
américain de valeurs mis en relief par Heinz Hartmann (1894-1970)
où la "psychologie du moi" (egopsychology) est
celle de multiples adaptations aux conditions changeantes de la
situation présente, selon encore ce système américain
de valeurs.
À partir des colonies européennes d'Amérique
établies sur la côte Est, l'orthodoxie est de plus
en plus secouée par les dissidences avec le temps et le déplacement
des "Frontières" vers l'Ouest, de Chicago jusqu'aux
"Nouvelles Frontières" de Californie dans les années
60, ouvrant des voies nouvelles, novatrices, plus intéressantes
et plus représentatives de l'école américaine
psychodynamique par l'originalité, la plus grande spécificité
américaine des apports multiples et la défiance à
l'ethnocentrisme et au phallocentrisme européens des quasi-orthodoxies
de l'Est qui justifiaient encore l'étiquette de "La
voix de son maître". Dans ce contexte du système
américain de valeurs, la répression sexuelle, pierre
de voute de l'édifice freudien, est beaucoup moins essentielle
que fonctionnelle pour la survie aux "Frontières".
PERSPECTIVE PRATIQUE
La pensée et la pratique américaines iconoclastes,
par rapport aux orthodoxies de tout poil, ont mis en parallèle
la cure psychanalytique avec la "médecine nègre",
l'intervention "chamanique amérindienne" et la
philosophie chinoise du "Chii" et du "Lii" .
Elles ont joint Marx et Freud avec les immigrants philosophes,
psychologues et sociologues de "l'École de Francfort",
comme Herbert Marcuse et Erich Fromm, chef de file de l'école
culturaliste américaine où les problèmes sexuels
ne sont plus considérés au centre dynamique des névroses,
mais plutôt l'effet que la cause de la structure du caractère
névrotique.
La conjonction de Freud et Marx a déplacé l'accent
de l'étiologie exclusivement intrapsychique individuelle
à une étiologie sociale dans l'interaction individu-groupe
social. D'autre part, l'insistance sur le passé dérive
vers le présent de l'ici et maintenant (Hic et Nunc) de la
situation actuelle, à la fois présente, active et
agissante (actual ).
En effet, Freud considérait les troubles présents
de l'adulte comme la répétition quasi-directe de "pulsions"
infantiles où la cure psychanalytique orthodoxe consistait
à les dissiper en révélant les expériences
infantiles sous-jacentes. La croyance en une responsabilité
individuelle de la morale des puritains précédemment
mentionnée déplace l'attention des "pulsions
instinctuelles" vers les conditions de vie qui façonnent
le caractère.
Karen Horney (1885-1952) est représentative de cette école
culturaliste américaine qui a délaissé la sexualité
au profit de la culture, le passé au profit de la situation
"actuelle", active et agissante.
Erich Fromm a pris la relève après l'excommunication
de Karen Horney et a été de tendance marxo-freudienne
à partir de laquelle il a été catégorisé
en sociologue et en psychiatre dont l'influence fut grande au Mexique
avec l'exemple illustratif et très controversé du
“Centre Interculturel de Documentation de Cuernavaca où”
a oeuvré Ivan Illich et travaillé Paul Watzlawick
avant de rejoindre le MRI (Mental Research Institute) de Palo Alto
et participer à l'élaboration des "thérapies
systémiques familiales" dans la continuité de
l'école psychodynamique américaine et sur des prémices
cybernétiques, sémiotiques et systémiques des
théories de la communication dans l’approche écosystémique.
Dans cette école psychodynamique américaine, dont
les différentes tendances seront détaillées,
le "Surmoi" freudien régulateur des exécutions
et des répressions sexuelles du "Moi" est déplacé
au profit de l'influence culturelle et le "Moi" à
celui de l'initiative, du jugement et de la volonté dans
le cadre du système américain de valeurs des pionniers
et des puritains. L'universalité freudienne, quant à
la préférence pour un garçon dans la famille,
au dépens de la fille, ne tient plus qu'à la singularité
d'une structure culturelle patriarcale et patrilinéaire d'une
bourgeoisie européenne au tournant du XXème siècle.
Dès lors, le "Moi" décrit par Freud n'est
plus un phénomène universel, mais névrotique,
la déviation de ce "Moi" individuel et spontané
un élément important dans la genèse et la persistance
des névroses qui représentent, alors, une particularité
de lutte pour la vie dans des conditions économiques et sociales
difficiles. La structure de ces névroses serait, dans cette
perspective, dans les perturbations relationnelles et les altercations
du "Moi" avec les autres.
En conséquence, la thérapeutique élaborée
se déplace de l'aide au patient à maîtriser
ses "instincts" vers la réduction de ses angoisses
pour pouvoir se passer de ses tendances névrotiques et la
restitution à l'individu de sa capacité d'être
spontané, c'est-à-dire d'être lui-même
son "centre de gravité".
Pour Fromm, la part instinctuelle diminue chez l'Homme au profit
d'un comportement qui tend à s'individualiser dans la résolution
du problème fondamental à résoudre: l'union-au-monde
dans la liberté, liberté "positive" (freedom
to ) et liberté "négative" (freedom from),
amour et haine, confiance et méfiance, créativité
et destructivité. Fromm a fait une brillante étude
sur le phénomène psychologique du nazisme en particulier
et de tout totalitarisme en général à partir
des idées de “peur de la liberté” (Fear
of Freedom) et de “évitement de la liberté”
(Escape from Freedom) dans la destructivité, la haine et
la surconsommation pour se relier au monde. Dans l'étiologie
sociale, l'union-au-monde d'Erich Fromm peut êrtre reliée
au sentiment d'infériorité par le statut social et
les conditions de vie en psychologie individuelle d'Alfred Adler.
La productivité de l'être chez Fromm ("Avoir
ou être", 1978) a été transformée
par le productivisme fordiste américain en “avoirs”
disponibles sur l'étalage du supermarché de la performance
des thérapies corporelles.
LES THÉRAPIES CORPORELLES
À l'axe culturaliste se greffent progessivement des dissidences
mettant l'importance sur tel ou tel aspect dont le plus important
est sans doute le corps. Ce qui conduit aux théapies corporelles,
prélude aux machines à guérir d'une société
hyper-industrialisante machiniste. Manifestées à travers
des techniques orientales du "Yoga", du "Zen"
et du "Tai Chi" et issues directement de Wilhelm Reich
dont l'engagement politique dépasse de loin l'élaboration
scientifique, particulièrement, sur la "cuirasse corporelle",
ces thérapies corporelles se présentent en un large
éventail, de la "bio-énergie" d'Alexander
Lowen à la "Gestalt-thérapie" de Fritz Perls
en passant par la "thérapie primale" d'Arthur Janov.
Elles sont toutes issues de l'école psychodynamiques américaine
dans leurs fondements.
Ces thérapies corporelles ont en commun le but des retrouvailles
avec le corps et du retour dans le corps disloqué, disjoint,
isolé et négligé (non-relié en lui-même
et des uns aux autres, neg-ligere: non-lier) dans les sociétés
insdustrielles où l'individu et son corps sont réduits
en "commodités" (“Commodities” : marchandises).
La "bio-énergie" de Alexander Lowen est une technique
thérapeutique qui prétend aider le patient à
retrouver son corps à travers la respiration et la libre
circulation des sensations - mais non pas du sens comme dans le
processus primaire chez Freud - pour mieux apprécier la vie
totale où, selon Lowen, en ne respirant pas profondément,
la vie du corps est diminuée, et, en ne ressentant pas totalement,
la vie du corps est rétrécie.
Pour Lowen, le corps est le siège des sensations, dans l'opposition
binaire classique corps-esprit où le dernier est le siège
du sens et de la signification, et la liberté est l'absence
de restrictions intérieures à la circulation des sensations
pour finir sur la maxime latine "Mens sana in corpore sano"
où un corps sain dénote un esprit sain. Avec la respiration
et la sensation, le corps comprend la sexualité, le mouvement
et l'expression de soi, dans l'atroce amalgame des niveaux physique,
social et culturel de l'individu.
La Gestalt-thérapie de Fritz Perls privilégie la
nourriture directement reliée à l'agressivité
et à la destruction, ce qui n'est pas une découverte
nouvelle et novatrice pour ce médecin d'origine allemande
familier avec l'humeur déterminée par le taux glycémique
du sang. Par contre, il a écarté des formes d'agressivité
générées par d'autres zones érogènes.
La primauté de la nourriture chez Perls a peut-être
l'avantage d'initier la convivialité du partage de la nourriture.
Elle initie aux interactions continues et chaleureuses de l'individu
dans sa vie privée et sociale. Les stades prédental
et dental de Perls constituent le déploiement du stade oral
chez Freud.
En cela, l'alimentation, selon Perls, est le "tire-bouchon"
des inhibitions mentales. La relation entre la nourriture et l'agressivité
a été déjà longuement étudiée
en zoologie et en anthropologie. En zoologie, la lutte intraspécifique
et extraspécifique pour la nourriture est permanente, tandis
que la lutte et la simulation de lutte pour l'accouplement sont
saisonnières. L'humanité pouvant être définie
comme une espèce d'animaux qui boivent sans soif et qui copulent
en toutes saisons, ces luttes et simulations de lutte saisonnières
et circonstancielles peuvent devenir permanentes. En anthropologie,
la convivialité, ou prise de nourriture en commun, amène
l'interdiction de tuer ou de violenter les convives.
Pour la "thérapie primale" d'Arthur Janov, il
y a des scènes primales majeure et mineure dont la différence
quantitative vient du degré de bouleversement ressenti par
l'enfant, en termes de solitude, d'abandon ou de rejet pour ce qu'il
est et que le patient doit retrouver pour la résolution du
"Moi". La scène primale majeure de Janov est beaucoup
plus large que la scène primitive de Freud qui ne consiste,
pour l'enfant, qu'à être témoin de la sexualité
de ses parents.
Il existe dans ces trois formes de thérapie corporelle un
retour à la forme prépsychanalytique explicitement
énergétique de la thérapie freudienne langagière
et une communalité dans les "abréactions"
ou décharges d'énergie dans lesquelles les émotions
tendent à se lier à des représentations mentales
dans le rapport des processus primaire et secondaire de la circulation
libre de l'énergie d'où surgit le sens.
Le tout est lié avec Ivan Illich dans l'Outil convivial
et la simplicité volontaire dans la relation entre autonomie
et hétéronomie.
Conclusion
Chef de file de l'école psychodynamique américaine
culturaliste de Chicago, Erich Fromm a laissé en héritage
toute la mouvance californienne des thérapies systémiques
familiales et des thérapies corporelles des années
60. Comme la formation des États-Unis d'un océan à
l'autre, nous pouvons remarquer l'évolution de l'orthodoxie
psychodynamique encore européenne de New York vers l'école
cultariste de Chicago avec Erich Fromm pour aboutir à la
floraison californienne qui est spécifiquement américaine
ou étatsunienne.
Commentaires
* Henri Atlan,1986, "À tort et à raison. Intercritique
de la science et du mythe", Seuil, Paris, 1986.
Commentaires talmudiques d'un médecin, grand micro-biologiste
contemporain, entre la montagne Ste-Geneviève à Paris
et le mont Scopus à Jérusalem. Il s'agit des dialogues,
dialectiques et dialogiques entre différentes formes de connaissance
et différentes façons de connaìtre. La partie
14 (pp. 258-273) est d'un intérêt particulier puisqu'il
s'agit d'un essai sur "L'opposition Freud-Jung et la scientificité
de la psychanalyse" qui précède le duel entre
André Green et Erich Fromm dans la partie 15 (pp. 273-280)
sur "Le pari scientifique dans la psychanalyse moderne".
Green est "freudien" et Fromm est "humaniste".
Le premier a souci de scientificité et le second se tourne
vers la tradition mystique orientale. Pour André Green, la
psychanalyse ne peut qu'être scientifique, même s'il
s'agit du vécu de l'expérience du transfert et de
l'affect dans son intégralité. Pour cela, Green ne
peut qu'adopter le paradigme de l'information par la systémique,
la cybernétique et la sémiotique pour rendre compte
à ce niveau de complexité de l’approche écosystémique.
Œuvres
* Psychanalyse de l'amour
* Société aliénée et société
saine 1956
* L'art d'aimer, 1968
* La crise de la psychanalyse, 1971
* Anatomie de l'agressivité humaine, 1975
* Avoir ou être, 1976
* Grandeur et limites de la pensée de Freud, 1979
* La désobéissance et autres essais, 1982
* Fuite hors du réel, 1987
* L'amour de la vie, 1987
* Psychanalyse et Religion, 1996
* "L'art d'aimer", Erich Fromm ; traduit de l'anglais
par J. Laroche et Françoise Tcheng. Paris : Editions Universitaires,
1967. - 158 p. ; 2O cm. - (Psychothèque). Titre original:
The art of loving. - réédité en 1968 aux éditions
EPI, coll. Hommes et groupes.
* L'homme pour lui-même, éditions sociales, Paris,
1967.
* Grandeur et limites de la pensée freudienne, Laffont, Paris,
1980.
* Espoir et révolution. Vers l'humanisation de la technique,
Stock, Paris, 1970.
* Avoir ou être ? : un choix dont dépend l'avenir de
l'homme, Erich Fromm ; traduit de l'américain par Théo
Carlier; postface de Ruth Nanada Anshen. Paris : Laffont, 1978.
- 43 p.; 2O cm. - (Réponses). - Titre original : "To
have or to be?" , édité chez Harper & Row
en 1976. - Bibliographie, 10 p. - ISBN 2-221-OO127- 3 (broché)
* "Bouddhisme Zen et psychanalyse", Daisetz T. Suzuki,
Erich Fromm et R. de Martino;traduction de Théo Léger.
Paris: Presses Universitaires, 1971. 200 p. ; 18 cm. - (L'actualité
psychanalytique).
* "La conception de l'homme chez Marx", Erich Fromm; traduit
de l'anglais par M. Matignon. Paris : Payot, 1977. - 151 p.; 18
cm. - (Petite Bibliothèque Payot). - Notes bibliographiques.
- ISBN 2-228-33170-8 (broché)
* "La crise de la psychanalyse : essais sur Freud, Marx et
la psychologie sociale", Erich Fromm; traduction par Jean-René
Ladmiral. Paris: Anthropos, 1971. - 292 p. ; 19 cm. - (Sociologie
et connaissance). - Titre original : The crisis of psychoanalysis.
* "De la désobéissance et autres essais",
Erich Fromm; traduit de l'américain par Théo Carlier.
Paris: R. Laffont,1982. -176 p. ; 23 cm. (Réponse. Santé/
dirigée par Jo&üml;lle de Gravelaine). - Titre original:
On disobédience and other essays. - ISBN 2-221-OO873-1 (broché).
contient:
- Disobedience as a psychological and moral problem, publié
initialement in Clara Urquhart, A Matter of Life, (Londres, Jonathan
Cape), cop. 1963.
- The application of humanist psychoanalysis to Marx's theory,
publié initialement in Socialist humanism: an international
symposium.(New-York, Doubleday), cop.1965.
- Prophets and priests, initialement publié in Ralph Schoenmann,
Bertrand Russell,philosopher of the century. cop.1967.
- Humanisme as a global philosophy of Man, publié initialement
sous le titre "A global philosophy of man" in The humanist,
Yellow spring, Ohio,1966. cop. 1965.
- Let Man prevail et Humanist socialism, initialement publiés
in Let Man prevail:a socialist manifesto and program, New-York.
cop. 196O.
- The psychological aspects of the guaranteed income, initialement
publié in R. Theobald, The Guaranteed income. N-Y:Doubleday
and C°, cop 1966.
- The case for unilateral disarmement, publié initialement
in Daedalus, cop.196O.
- Zur Theorie und Strategie des Friedens, publié initialement
in Friede im nuklearen Zeitalter.
- "Eine Kontroverse zwischen Realiste, und Utopisten, 4 Salzburger.
Humanismusgespräch", éd. à Munich, cop197O.
Le dogme du Christ : et autres essais / Erich Fromm. Paris : Complexe,
19.. . - (Textes). - suivi d'autres essais : La psychanalyse : une
science ou un parti. Le caractère révolutionnaire.
Des limites et des dangers de la psychologie.
* "Espoir et révolutions: vers l'humanisation de la
technique", Erich Fromm ; traduction de Gérard D. Khoury.
Paris : Stock, 1970. - 187 p. ; 21 cm. - Titre original: the revolution
of hope: toward a humanized technology.
* "L'homme pour lui-même", Erich Fromm;traduit
par Janine Claude. Paris: Editions sociales françaises, 1967.
- 192 p. ; 24 cm. - (Collection des sciences humaines appliquées).
- Titre original: Man for himself. -
* "Le langage oublié : introduction à la compréhension
des rêves, des contes et des mythes", Erich Fromm; trad.
par Simone Fabre.
Paris : Payot, 1975. - 210 p. ; 18 cm. - Titre original : The forgotten
language. - ISBN 2-228-32610-4
* "La mission de Sigmund Freud: une analyse de sa personnalité
et de son influence", Erich Fromm; trad. de l'américain
par Paul Alexandre. -
Bruxelles : Complexe, 1975. - 112 p. ; 23 cm. - (Textes ). - Titre
original: World perspectives series.
* "La passion de détruire: anatomie de la destructivité
humaine", Erich Fromm; traduit de l'américain par Théo
Carlier. -
Paris: Laffont, 1975. - 523 p.; 24 cm. - (Réponses ). -
Titre original : The anatomy of human destructiveness , édité
en 1973 chez Holt, Rinehart et Winston. - (broché).
* "La peur de la liberté", Erich Fromm; traduit
de l'anglais par C. Janssens. Paris : Buchet-Chastel, 1963. - 244
p. ; 22 cm. - Titre original: The fear of freedom. - la bibliographie
en annexe de "Grandeur et limites de la pensée freudienne"
de E. Fromm donne comme titre original: Escape from Freedom, édité
à New York en 1941. Edition allemande à Francfort
en 1966 : Die Furcht vor der Freiheit.
* "Psychanalyse et religion", Erich Fromm; traduit par
D. Merllie. -
Paris: EPI, 1978. - 16O p.; 2O cm. - (Hommes et groupes). - Titre
original: Psychoanalysis and religion. (broché)
* "Société aliénée et société
saine : du capitalisme au socialisme humaniste. Psychanalyse de
la société contemporaine", Erich Fromm; traduit
par Janine Claude.
Paris : Courrier du Livre, 1967. - 352 p. ; 23 cm. - (L'Université
permanente). - Titre original : The sane society, édité
à New-York: éd. Rinehart,1955. Contient : présentation
de la psychanalyse humaniste d'Erich Fromm / par Mathilde Niel.-
réédité en 1971.
* "Vous serez comme des dieux: une interprétation radicale
de l'Ancien Testament",Erich Fromm; traduit de l'américain
par Paul Alexandre; postface de Evelyne Sznycer et Serge Pahaut.
- édition revue et annotée par E.Sznycer et S. Pahaut.Bruxelles
: Complexe, 1975. - 214 p. ; 23 cm. - (Textes ). Index,(broché).
Bibliographie
Gregory Bateson & Jürgen Ruesch, "Communication et
société", la matrice sociale de la psychiâtrie,
Seuil, Paris, 1988.
Collectif,"Les écoles psychanalytiques. La psychanalyse
en mouvement", Tchou, Sète, 1981.
Récupérée de « http://fr.wikipedia.org/wiki/Erich_Fromm
»
|