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Origine : http://erich-fromm.blogspot.com/feeds/posts/default
Erich Fromm commence par une analyse linguistique consistant à
distinguer dans son usage le verbe avoir d’avec le verbe être.
Par exemple, affirmer que l'on « a une femme » comme
on « a des problèmes » ou qu’on «
a une voiture », c'est toujours ramener les choses et les
êtres à une notion de propriété. On peut
voir cela différemment et affirmer au contraire que l'on
est marié, que l'on utilise une voiture et que l'on est perplexe
ou embarrassé. Selon Fromm, cette distinction est lourde
d'implications quant à notre rapport au réel et notre
mode de vie. Être perplexe indique bien qu'il s'agit de quelque
chose qui se trouve d’abord en nous, qui peut être lié
à notre perception et sur lequel on peut agir. Avoir un problème
c'est mettre une distance, mais en même temps ajouter un élément
nouveau à tout ce que l'on possède sans parvenir à
s'en détacher et à agir dessus.
Fromm applique ensuite cette distinction entre être et avoir
à un tas de domaines : la conversation, la connaissance,
les études, l'amitié, l'amour, le travail, etc. Chaque
fois il montre comment le mode de vie avoir révèle
une approche à la fois égocentrique, utilitariste
et passive des choses, au contraire du mode de vie être. J'ai
retrouvé cette distinction dans une étude sociologique
menée auprès de travailleurs français à
propos des liens bonheur-travail. Dans les catégories populaires
les gens (en général) affirment avoir un travail pour
toucher un salaire qui permet d'acheter des choses et qui ensuite
permet (éventuellement) d'être heureux. Dans les catégories
plus favorisées (en moyenne), les travailleurs insistent
sur le fait que le travail permet — au même titre que
d'autres activités — de s'épanouir et d'être
heureux, et que l'intérêt même de ce travail
en fait une fin en soi, non un simple moyen.
Autre exemple : les études. Les étudiants du mode
avoir arrivent en cours sans connaissances, sans questions, sans
s'être intéressés au préalable au thème
qui sera traité. Ils essayent de prendre en note un maximum
d'éléments qu'ils tenteront par la suite d'ingurgiter
pour mieux recracher le tout à l'examen. Les étudiants
du mode être arrivent avec quelques idées (peut-être
des préjugés) et ne cherchent pas à noter le
cours de façon frénétique. Le cours est une
occasion de voir les choses autrement, de faire évoluer leur
compréhension du monde et de détruire justement leurs
a priori : c'est une démarche qualitative et non quantitative
(applicable si le cours est bien fait).
Pour mieux comprendre le mode de vie être, Fromm évoque
la pratique du sabbat chez les Juifs. Le jour du sabbat rien n'est
produit, rien n'est détruit. Comme il l'affirme, ce jour-là
on ne fait qu'utiliser ses pouvoirs essentiels : manger, prier,
chanter, étudier, lire et discuter, faire l'amour (beau programme
n'est-ce pas ?).
Enfin, comme beaucoup d'auteurs de la même veine, il renvoie
dos à dos capitalisme libéral et économie socialiste
qui l'un comme l'autre visent à produire toujours plus, et
fustige la société de consommation et l'idéologie
publicitaire. Chacun, chacune d'entre nous agit parfois en mode
être et parfois en mode avoir. En fonction de la société
dans laquelle nous vivons et de l'idéologie dominante, nous
serons plutôt orientés vers l'être ou l'avoir.
Dans nos sociétés occidentales, c'est l'avoir qui
l'emporte, et de loin...
Pour conclure, je crois que Fromm peut nourrir nos réflexions
quant au choix d'un mode de vie plus serein et moins matérialiste.
Son ouvrage date de 1976 mais ces idées coïncident très
bien avec les thèmes de la décroissance et de la simplicité
volontaire (notion appliquée pour la première fois
par un journaliste à propos de Gandhi, je crois).
Enfin, vous trouverez dans son ouvrage un grand nombre de références
culturelles occidentales : Socrate, Jésus, Maître Eckhart,
Freud, Marx et autres.
Stéphane Charlier
BETHUNE (FRANCE)
Du nouveau, ici et ailleurs
Ce site consacré principalement à Erich FROMM a jusqu'ici
avancé peu et lentement. Peu d'articles, un peu longs et
soigneusement travaillés. J'ai privilégié le
fond sur la forme et la réflexion sur la diffusion.
C'est pourquoi, très logiquement, il a reçu fort peu
de visiteurs ( à peine plus de 200) à comparer à
bientôt 10 000 sur mon blog d'accueil (Les blogs Jyvais) et
pas loin de 4000 (en trois mois !) sur mon blog consacré
à la Série TV française Plus Belle La vie...
Je ne crois pas pour autant que FROMM en particulier et la PSYCHANALYSE
en général soient condamnés à rester
dans l'obscurité...
Je ne crois pas non plus qu'il faille cliver impitoyablement culture
/ et / peuple : comme si celle-ci devait être réservée
à une élite soi-disant éclairée ; comme
si celui-là devait être maintenu dans une débilité
culturelle permanente.
Ce clivage est en fait une garantie que se donnent les classes possédantes
et dirigeantes pour assurer la pérénité de
leur règne. Il est bon d'enfreindre cela.
Quelle n'a pas été ma surprise de lire, il y a quelques
jours, le message de Frans Tassigny, posté de Belgique si
je ne m'abuse, m'apprenant que certains de mes articles avaient
été , par ses soins, reproduits sur son groupe de
discussion.
D'où échanges : d'informations et de bons procédés.
Je me suis inscrit à ses groupes google ainsi qu'à
celui traitant de sujets connexes nella lingua italiana dans laquelle
je n'écris pas mais que je lis et traduis volontiers. J'ai
noté ces liens sur ce site qu'ils soient accessibles à
mes rares visiteurs. Frans vient, pour sa part, de publier des informations
sur (et de) mon blog sur deux autres sites...
Bonnes lectures !
La psychanalyse est-elle un humanisme ?
UN DEBAT SUR LE BLOG "GERMINALYSE"
Non la psychanalyse n'est pas plus un humanisme qu'une "Weltanchauung"
ce qui n'empèche pas le psychanalyste de vouloir rester accrocher
à
l'humanisme et parfois mème de s'en revendiquer...
Relisez l'intro de "Télévision"
Michel Leca
C'est peut-être vrai, mais il en reste que tout change, évolue,
se transforme, voyez certains groupes où la psychanalyse
propose à ses co-listers trop "captifs" d'une pensée
unique toujours les mêmes thèmes " qu' on se demande
si certains échanges ne pouvaient pas se faire mieux entre
eux, c' est à dire, ne pas occupant l' ordinateur de chacun
tous les jours avec des dizaines de messages." (répétitifs
voire compulsifs)
je vous cède bien-sûr
"mais le mot(humanisme) ne sonne-t-il pas trop épuisé?
C' est a dire, usé par de multiples points de vue à
un point qu' il parfois sonne comme un passe-partout...
(je pense à tout l' anti-humanisme qui est évidemment
une façon de défendre 'homme, tout en dénonçant
les discours de répression qui le détruisent... C'
est à dire, il faudrait conjuguer la psychanalyse avec la
sociologie, la politique et l' anthropologie pour ne pas en faire
une espèce de religion de bonne volonté...
C'est bien pour cela qu'il faut FORGER un nouvel éclairage
sur ce concept VIEILLI et je crois que l'efficace psychanalytique
dans un champ d'ouverture à d'autres disciplines peut y souscrire.
de plus nous avons déjà un héritage ;
la preuve
Erich Fromm, le penseur et le psychanalyste (1900-1980)
Il est l'un des représentants de l'école de Francfort.
Il étudie la philosophie avec Jaspers et la psychanalyse
avec Theodor Reik. Ancien membre de l'Institut psychanalytique de
Berlin, il pratique une psychanalyse " humaniste " ou
" existentielle ".
c'est donc un formidable acquis culturel sur lequel on peut se
baser, en voici les grandes lignes :
L'humanisme de Fromm se fonde sur sa croyance et sa compétence
en psychanalyse, en vertu de cette connaissance, que l'inconscient
de l'humain est l'expression en lui de l'humain " total ",
universel et de toute l'humanité. L'humain étant un
être social, sans nulle réalité en dehors d'une
société, c'est sa société qui décide
des facultés qu'elle va favoriser en lui, par exemple à
travers les traditions culturelles. " Les besoins de la société
sont transformés en besoins personnels et finissent par constituer
le caractère de la société, la personnalité
de base de tout individu. " (" Humanism and Psychoanalysis
" in Contemporary Psychoanalysis, vol. 1, 1964, p.27.) L'esprit
d'une société dont l'humain est membre influe fortement
sur le développement de sa personnalité. Il favorise
certaines facultés présentes dans l'inconscient, les
fait émerger à la conscience, jusqu'à ce que
l'individu s'identifie à elles. Mais à l'inverse,
les facultés et dispositions allant à l'encontre des
modèles culturels d'une société, sont aussi
souvent refoulées et déniées. De là
vient que " notre conscience représente essentiellement
la société et la culture dans laquelle nous vivons,
tandis que notre inconscient représente l'homme universel
au sein de chacun de nous. " (L'humain au cœur, p.128).(Dominique
Terrazzoni)
Cet objet idéal de la pensée, je crois que l'on peut
le moderniser, l'actualiser sans pour cela tomber dans ses lacunes,
et si vous me permettez de citer Søren Kierkegaard :
«Il s'agit de trouver une vérité qui soit une
vérité pour moi, de trouver l'idée pour laquelle
je veux vivre et mourir...»
cordialment
frans tassigny
source : http://germinalyse.blogspot.com/2007/05/psychanalyse-spculative.html
UN NOUVEAU GROUPE DE DISCUSSION : GERMINALYSE
Je viens d'avoir la (bonne) surprise d'apprendre que la présentation
de ce blog vient d'être republiée par Frans TASSIGNY
sur son blog "GERMINALYSE" et sur son groupe de discussion
(Google group) du même nom. Trop rares sont les occasion d'échanger
idées et informations sur ce thème pour que l'on s'en
prive! Pour ma part j'ai adhéré au group de discussion
et je reproduis ci-dessous le MANIFESTE du groupe.
Frans TASSIGNY : MANIFESTE
Tous les membres du collectif, responsables, intervenants, contribuent
à élever la psychanalyse en un espace spéculatif,
telle une recherche
fondamentale. On n’y apprend ni des systèmes, ni des
cultes, on y
reçoit un éveil de la pensée dépassant
les limites de la psychanalyse
pure pour se tourner vers l’ethnologie à l’exemple
de Frazer ou de
Malinowski et dans ce pluralisme se dégagent des idées
non-dirigistes,
des non-certitudes en quelque sorte.
Jamais cette recherche ne prendra matrice dans une quelconque
corporation, guilde, défendant ses droits et privilèges
plutôt que la
pertinence de ses doutes. Cet enseignement ne se développera
pas à
l’encontre d’autres écoles. Telle serait la seule
façon de renouer
avec la pensée freudienne. Renouer avec ces passeurs ne consiste
pas à
enseigner la psychanalyse, ni même à prétendre
à réinventer la
psychanalyse, mais à penser, réfléchir, à
un élément même irrationnel
au collectif, quitte à déconstruire pour ensuite mieux
rebâtir, ce qui
est vrai pour un est différent pour l’autre.
Bien sûr, c’est l’étude des textes qui
sera la pierre angulaire du
“Comment savoir poser un problème” et à
lui donner une solution
argumentée, raisonnée, en évitant toutefois
d’être trop conceptuelle.
Que proposera-t-on à ces enseignants ? Avant tout une méthode
car cet
enseignement n’est pas une entreprise de formation où
le collectif
accouchera d’apprentis sorciers.
Le professeur de psychanalyse commencera la lecture d’une
œuvre
freudienne. Mais renouer avec l’héritage freudien ne
reviendra pas à
se prendre soi-même pour cette figure originaire de la pensée
psychanalytique, mais à devenir ce passeur d’idées
consistant à
comprendre et à faire comprendre leur traversée à
ce siècle tumultueux.
Réflexions sur Avoir ou Etre
Avoir ou Etre, un choix dont dépend l’avenir de l’Homme,
est l’un des derniers grands livres d’Erich Fromm. Dans
ce livre, nourri des apports de la psychanalyse, mais aussi du marxisme,
de l’humanisme classique, du bouddhisme zen, Fromm distingue
entre deux « modes » d’existence : le mode être
et le mode avoir. Ce sont, plus que des types de caractères
ou des modes de vie, de véritables orientations déterminant
l’identité et la place qu’un individu assume
dans le monde. Cela dépend de multiples facteurs, dont deux
principalement, la structure sociale, celle d’une société
humaine à une période donnée de l’histoire,
et la structure de caractère individuelle.
Notre époque se caractérise par la prédominance
du mode avoir. Cela veut dire que les choses sont le plus souvent
pensées, ressenties, vécues en termes de possession.
Dans le mode être, à l’inverse, ce qui a de l’importance
est ce qu’on est plus que ce qu’on a.
A plusieurs reprises dans Avoir ou Etre (mais cette analyse était
déjà présente dans son œuvre antérieure
) Fromm souligne comment certaines façons de s’exprimer,
dans la vie courante, traduisent la prévalence du mode avoir
ou du mode être. Ainsi, au lieu de « j’aime »,
on dira « j’ai un amour », si le mode avoir est
celui qui l’emporte. Ou « j’ai une pensée
» au lieu de « je pense ».
Le lecteur adhèrera rapidement à cette remarque d’Erich
Fromm et à la critique sociale qu’elle implique contre
l’esprit de possessivité et d’accumulation de
nos sociétés où l’on mesure les individus
en termes de valeur en fonction de ce qu’ils possèdent.
Vaut davantage celui qui a non seulement un bon compte en banque
mais aussi un bon « compte identitaire » : qui a un
amour digne de ce nom, une pensée valorisante, des amis de
valeur, une existence riche en tout point.
Mais il serait sans doute intéressant de fouiller davantage
cette question : je pense que la remarque de Fromm, prise textuellement
et limitée à cela, est somme toute assez banale (sans
être fausse pour autant). Ou trouve pas mal de réflexions
du même ordre dans le discours « baba cool » des
années soixante dix, y compris ses avatars spiritualistes,
voire sectaires. Cela peut aller jusqu’à l’appel
à se dépouiller de ses biens et de son héritage
intellectuel pour tendre vers un idéal d’ « être
» désintéressé et forcément pur…
En lisant ces phrases sur le mode avoir (« j’ai un
amour, une pensée… ») et l’être («
j’aime, je pense… ») on dérive aisément
dans une observation introspective sur soi-même et sa façon
de s’exprimer. On se surprend à s’interroger
et à scruter son propre discours : « suis-je quelqu’un
de possessif, qui thésaurise les sentiments, ou un être
actif et aimant ? La façon dont je parle trahit-elle cette
identité ? »
Dans cette petite exploration mentale on constate peut-être
une certaine tendance à « avoir » (une religion,
des idées avancées, des principes, des amours etc.).
On plaidera sans doute alors la défense suivante, face à
l’accusation de possessivité ou, osons ce néologisme,
d’ « avoirisme » : « n’existe-il-pas
des structures linguistiques dont je dépends car elles existent
avant moi et en dehors de moi, on me les a inculquées dès
mon plus jeune âge, qui m’imposent ces tournures de
phrase, sans qu’elles soient nécessairement des tournures
d’esprit… »
En fait la réflexion frommienne sur le mode être et
le mode avoir ne s’attarde pas sur l’aspect langagier
de la question ; la remarque n’est pas non plus faite par
hasard. Il s’agit d’impliquer le lecteur, de l’associer
à la réflexion de l’auteur, de solliciter de
sa part une lecture active et participative. Cette stratégie
est typique du psychanalyste Fromm. Dans l’Art d’Aimer,
il faisait une autre remarque tout aussi impliquante et dérangeante
si on s’y arrête de trop. Il proposait en effet l’idée
suivante : dans l’amour, contrairement à ce que pensent
la plupart des gens de notre temps, l’important n’est
pas d’être aimer mais d’aimer. C’est pourquoi
son « Art d’Aimer » ne sera pas un manuel du «
comment séduire et se faire des amis »… L’aimer
et non l’être aimé.
Même stratégie, mêmes effets sur le lecteur.
Qui lit l’Art d’Aimer se demande bientôt s’il
est plus préoccupé de recevoir et garder l’amour
de l’être aimé ou bien de ce qu’il (ou
elle) met en action et donne à l’autre dans l’état
amoureux.
Cette remarque de Fromm non plus n’est pas à prendre
au pied de la lettre ! Faute de quoi on aboutirait à un terrible
paradoxe amenant à la conclusion de l’impossibilité
de l’amour (au sens d’une relation réciproque
et égalitaire à deux) : si l’important est aimer
et non être aimé, et si je me soucie de l’autre
qui m’aime, l’important pour lui (elle) est de m’aimer
; je lui dois donc d’être dans cet état «
passif » du désir d’être aimé, sans
quoi je nie l’amour de l’autre… D’où
d’ailleurs la délicieuse ambiguïté de ce
terme, l’amour de l’autre : celui qu’il me porte
ou celui que j’ai pour lui ?
Après ce détour, la question de deux modes d’existence,
l’Etre et l’Avoir, doit être posée avec
la même acuité. Oui c’est aliénation de
ne plus aimer ou penser mais seulement avoir des sentiments ou des
idées… C’est le propre d’un monde ou l’on
ne veut plus : on « a » de la volonté. Mais c’est
tomber dans une autre forme d’aliénation que de s’enferrer
dans une sorte d'idéal de l’Etre-en-soi.
Etre ou Avoir : un choix dont dépend l’avenir de l’homme
? Que sont et que deviendront ceux qui n’ont rien : pas de
travail, pas de logement, pas de papiers… ?
Article publié dans FROMM-FORUM (en anglais et en ...
Article publié dans FROMM-FORUM (en anglais et en allemand)
reproduit ici avec l'aimable autorisation de l'auteur Gérard
D. Khoury
Une rencontre décisive : Erich Fromm.
Il est des êtres qui vous marquent pour la vie et sans lesquels
celle-ci aurait eu une toute autre tournure. Erich Fromm est de
ceux-là. Il a modifié le parcours de ma vie et m’a
donné les moyens - quand j’avais la vingtaine - d’affronter
les impasses d’une histoire familiale et nationale ancrée
dans un univers proche-oriental que j’ai mis plus de trente
ans, par la suite, à comprendre, parce qu’il obéit
à d’autres codes culturels et anthropologiques. Elevé
dans un monde bourgeois, où le commerce et l’argent
étaient les seules valeurs reconnues, assurant non seulement
la sécurité et le statut, mais aussi l’identité
et la liberté, j’ai eu beaucoup de mal à me
constituer, à me libérer de cet univers.
J’étais ainsi soumis à une dévalorisation
relative de la culture et de l’art et il fallait braver milieu
familial et social pour oser croire à la force des idées,
celles qui pouvaient changer ce monde largement inégal et
injuste déployé sous mes yeux. Je ne savais pas alors
que ces valeurs marchandes allaient devenir en Occident aussi prégnantes,
sous l’influence d’autres légitimations liées
probablement à l’éthique du protestantisme et
à celle de l’Amérique libérale contemporaine
qui érige le marché en arbitre suprême .
Sans aborder le détail de ce moment décisif, ma rencontre
avec Erich Fromm avait été précédée
par ma lecture de ses œuvres durant les années 1959-1960.
Je me débattais alors face à l’autorité
paternelle, ce qui n’était pas une mince affaire. Bien
plus tard seulement je me rendis compte qu’au Proche-Orient
tout était encore régi par la famille, le clan, la
communauté. Je me heurtais à un mur de déterminisme.
Aucun choix n’était possible hormis celui que me présentait
mon père. M’opposer à lui était invraisemblable
et, si je m’y risquais, c’était source de colère
de sa part et de culpabilité de la mienne. Aucune liberté
ne semblait possible et quand j’échappais momentanément
aux foudres paternelles, je devais ne pas céder aux pressions
affectives de ma mère, qui essayait par d’autres moyens
de me conduire au même but que celui souhaité par mon
père. Elle cherchait à me convaincre de suivre la
voie commerciale tracée par mon père en la faisant
évoluer vers un monde financier plus moderne que celui des
affaires paternelles, somme toute restées archaïques
et artisanales. 1
Tout choix personnel semblait exclu : un garçon était
supposé prendre la succession de son père, épouser
sa cousine germaine, vivre auprès de ses parents dans la
même maison, « le reste de son âge » pour
citer Joachim du Bellay...Ce n’est que bien longtemps plus
tard que je compris ce que signifiait l’endogamie.
Sur le plan politique, économique et social, je parvenais
difficilement à analyser la réalité libanaise.
A cette époque on parlait volontiers de miracle libanais,
de la force d’un état faible, de Beyrouth comme d’un
Paris oriental, d’un pays jeune de 6000 ans, de Suisse du
Proche-Orient et de tant d’autres clichés. Ce petit
pays, à peine indépendant, scintillait de tous les
feux du libéralisme et de la réussite matérielle,
et semblait imperméable à l’histoire de la région,
sauf pour profiter des coups d’états et des malheurs
consécutifs pour les bourgeoisies nationales qui venaient
se réfugier avec leurs capitaux dans ce havre de paix . Les
inégalités sociales ne troublaient apparemment personne
dans les cercles du pouvoir. A l’âge de la révolte
et du besoin de justice, tout m’angoissait et m’était
incompréhensible. Tout me paraissait confus : l’histoire
du Liban, l’origine des états du Proche Orient, l’existence
d’Israël, la présence au Liban des réfugiés
de Palestine, etc...
Etudiant en troisième année de Sciences économiques,
je bénéficiais d’une invitation, émanant
du Département d’Etat américain, à me
rendre avec un groupe d’étudiants arabes aux Etats-Unis.
Une des raisons qui me firent l’accepter, c’était
l’idée secrète de rencontrer Erich Fromm, après
avoir lu l’ensemble de ses écrits publiés en
anglais.
J’écrivais à Erich Fromm chez Routledge and
Kegan son éditeur anglais, sans savoir quelle serait sa réaction.
Quelle ne fut ma surprise quand je reçus quelques temps après
une réponse d’Erich Fromm par laquelle il m’invitait
à la rencontrer à New- York.
Je prévenais aussitôt Erich Fromm des dates de mon
séjour à New York et sans tarder il me proposa de
l’appeler dès que j’y serais pour me donner un
rendez-vous.
Le fait que je vienne du Proche - Orient, d’un pays arabe,
alors que Erich Fromm était juif allemand, ayant d’abord
milité dans les jeunesses sionistes, puis combattu la création
d’un état juif, devenu antisioniste, avait-il piqué
son intérêt ? Je restais saisi de la chance qui s’offrait
à moi et me sentais pousser des ailes !
Un autre hasard allait doubler l’invitation américaine
par une invitation au Mexique où se tenait un congrès
de Sociologie où je fus convié à représenter
le Liban et ceci n’est pas indifférent à la
suite. Quand j’appelais, en effet, Erich Fromm en lui proposant
de le rencontrer à New- York durant l’été
1960, avant mon départ pour Mexico, il me répondit
que nous nous verrions plus à loisir au Mexique, et il m’engagea
à lui téléphoner dès la fin du Congrès.
La première rencontre dans le bureau d’Erich Fromm
à Mexico
La première rencontre à Mexico - il me l’avouera
plus tard - le surprit. Il attendait un professeur dans la quarantaine
et c’était un jeune étudiant de 22 ans qui lui
faisait face. Après la première surprise, il chercha
à comprendre les raisons de ma venue de si loin et ce que
j’attendais de lui, puis sans hésiter, il me proposa
de venir m’installer à Cuernavaca dans une hacienda
qu’il connaissait, appartenant à un français,
une maison faisant office de pension de famille qui était
momentanément fermée, mais où il se ferait
fort de m’obtenir une chambre, et il m’assura qu’il
trouverait le temps de me voir d’une manière intensive.
Et il en fut ainsi…Deux à trois fois par semaines,
il me consacrait quatre à cinq heures d’affilée
entre 15 ou 16 heures et vingt heures.
De ces rencontres à Cuernavaca, il ne sera pas question ici,
car elles sont d’un ordre strictement intime , mais je voudrais
évoquer la figure d’Erich Fromm, telle qu’elle
m’est alors apparue.
Le pacte tacite de Fromm
Ce qui m’a frappé dès le premier abord, c’était
son regard clair, intense et doux, pénétrant et respectueux.
Ce regard exprimait immédiatement l’entière
disponibilité, transmettait le gage non dit de la confiance,
rassurait et interrogeait tout à la fois. Ce regard communiquait
- je le saurai plus tard - toute l’humanité d’Erich
Fromm qu’il offrait à son interlocuteur comme une vulnérabilité
et une force tout à la fois, signifiant son ouverture à
l’autre et l’invitant s’il le souhaitait, par
contagion peut-être, à s’ouvrir lui aussi dans
un pacte tacite. En préparant l’ouvrage « Revoir
Freud », que j’ai publié en France à l’occasion
du centième anniversaire de sa naissance, je retrouvais la
théorisation que fait Ercih Fromm de cette relation de sujet
à sujet et qu’il nomme la relation centrale. L’homme
des Lumières et celui de l’expérience mystique
Après ce regard de fraternité et de partage, je fus
frappé, cela aussi m’a marqué pour l’avenir,
par la concordance entre l’œuvre et l’homme. Erich
Fromm vivait ses idées sans hiatus. Juif allemand, né
dans une famille orthodoxe, il s’était libéré
des carcans de la religion sans toutefois renoncer à la spiritualité
du judaïsme. Homme des lumières, il gardait la capacité
d’une pensée paradoxale ; défenseur de plus
de raison, il explorait le monde de la religiosité et de
la mystique, qu’elle fut orientale ou occidentale. C’est
ainsi qu’il s’est sa vie durant penché sur l’expérience
mystique, celle des Saint Jean de la Croix, de Maître Eckhart,
de Hallaj et surtout des Bouddhistes Zen. Sa rencontre avec Suzuki
et l’ouvrage qu’ils ont fait ensemble, avec de Martino,
établit des ponts entre expérience mystique et psychanalyse.
Pour ma part, au Liban où la religion était indiquée
sur la carte d’identité et où donc tout est
imprégné par elle, je commençais avec Erich
Fromm- je songe à son ouvrage « The Dogma of Christ
» ou à « You shall be as gods » - un parcours
long et complexe de compréhension des cadres de pensée
de ma culture. Cela m’a aidé à mettre mes distances
avec tout ce qui touche aux diverses formes d’emprise du groupe
(famille, clan, communauté) et a renforcé nécessairement
mes aspirations individuelles. Il me restait à séparer
aspirations individuelles et narcissisme, ce qui fut un tout autre
travail. Le renoncement progressif à la toute puissance de
l’ego et l’apprentissage du partage m’ont aidé
à défendre des valeurs à portée politique.
Au Proche-Orient, dans la mesure où les individus n’existent
que comme des personnes membres d’un groupe (communauté,
clan, etc.), il est ontologiquement impossible pour cette société
de mettre en oeuvre un projet politique qui assure la liberté
individuelle, et cela dans tous les domaines. Pourtant le projet
politique d’une société tient aux relations
de ses membres comme individus avec cette société.
L’engagement politique :
Dans le domaine politique, Erich Fromm, en socialiste engagé,
savait que l’on ne bâtissait rien sans respecter les
legs du passé et que les révolutions n’étaient
plus possibles de la même manière qu’au XVIIIème
siècle ou même au moment de la révolution russe
de 1917, depuis que les sociétés occidentales étaient
devenues de sociétés de techno-structures. C’est
ce qu’il développa dans un livre - programme politique
en 1968 pour la campagne présidentielle de Eugène
Mc Carthy contre Richard Nixon, que j’ai traduit sous le titre
Espoir et Révolution et qui est paru fin 1970 chez Stock
à Paris. La connaissance approfondie de l’œuvre
de Marx, y compris de ses manuscrits philosophiques de 1844 et les
ouvrages d’Erich Fromm sur lui « Le concept de l’homme
chez Marx » ou encore « Au-delà des chaînes
de l’illusion » m’ont introduit au marxisme en
m’évitant d’emblée les dérives
du communisme ou du dogmatisme idéologique des exégètes
de Marx.
Ce que j’appellerais le cadeau de confiance que m’a
fait Fromm en m’accueillant, et en m’aidant à
débusquer le langage caché de la réalité
psychique, mais aussi celui de la réalité économique,
politique et sociale, a changé ma vie et m’a donné
le courage de toutes les questions et de tous les combats. Il m’a
aussi conseillé un programme de lectures très vaste
allant des pré-socratiques à Orwell. C’est dire
que Erich Fromm au-delà de la psychanalyse, dont il m’a
ouvert le champ, m’a attiré vers le monde des idées,
en me transmettant la conviction que leur force peut soulever les
montagnes, même si en apparence elles sont inopérantes.
Dans la tradition prophétique, il m’a aussi sensibilisé
au courant de pensée qui nourrit, avec la pensée grecque
- et je le saurais par la suite avec la pensée arabe- le
modernité occidentale. Il est vrai qu’aujourd’hui,
à l’heure où nous traversons une crise de civilisation
à l’échelle mondiale, on peut se prendre à
douter de la capacité des idées à changer le
monde !
Les idées d’Erich Fromm, en tout cas, ont certainement
changé ma vie. Elles m’ont dès le départ
appris à me méfier de la dichotomie entre pensée
et sensibilité, entre l’utilisation de la pensée
pour renforcer le pouvoir et la domination et l’usage de la
pensée pour renforcer la libération et la liberté.
Je manquais de confiance en moi et en mes capacités à
penser par moi-même et c’est Fromm qui m’a appris
à me méfier d’une pensée conventionnelle,
uniquement descriptive ; il m’a encouragé à
toujours rechercher la part cachée, intérieure de
la réalité. Comprendre l’autre, c’est
tenter de le comprendre de l’intérieur, analyser les
problèmes sociaux et politiques, c’est chercher à
en saisir les ressorts profonds et internes et non se contenter
de les décrire et de les cataloguer. Cela devait me servir
dans mon travail d’historien. Je savais que Erich Fromm était
un héritier de Spinoza et de Marx, dont il a fait fructifier
l’héritage, je découvre aujourd’hui qu’il
se situe aussi dans la filiation de Giambatista Vico.
En relisant les lettres échangées avec Erich Fromm
entre les années soixante et quatre vingt, je retrouve sa
présence, sa pénétration d’esprit, son
ouverture et sa disponibilité aux autres, sa lucidité,
son attention aux mots. Ne jamais accepter que les mots soient des
coquilles vides, mais des symboles de chair et de vie, des mots
incarnés où pensée et émotion sont réunis.
Ainsi, les mots amour, liberté, justice, respect, courage
constituaient tout un programme, un hymne à la vie.
Ce dont je suis redevable à Fromm :
D’abord, je voudrais insister sur le fait que les écrits
d’Erich Fromm sont lisibles et clairs et ne sont pas protégés
par un système de codage pour n’être accessibles
qu’aux spécialistes, protégeant par ce codage
la connaissance et le pouvoir. Erich Fromm s’offre et se lit
sans protection, avec cette ouverture qui est don. On a pu lui reprocher
une théorisation parfois faible, mais à la limite
ce n’était pas sa préoccupation majeure. Ce
qui lui importait, c’est la pensée vivante.
Sans le savoir quand je le lisais en 1959 et les années suivantes,
son approche théorique convenait parfaitement à mon
histoire et n’est-ce pas cela une vraie rencontre d’êtres
et d’idées ? Né au Liban, je baignais entre
deux cultures, entre deux mondes, entre deux sensibilités.
L’insistance d’Erich Fromm sur le caractère schizoide
des sociétés contemporaines, comparé au caractère
hystérique de celles du XIX ème siècle, ne
pouvait pas mieux répondre à mes attentes.
Je citerai aussi sa critique du monde de l’argent et des apparences,
qui me confortait dans ma propre critique à l’égard
de la société libanaise. Je rappelle ici que le dernier
livre publié du vivant de Fromm est : « Avoir ou Être
» et que nous nous en étions entretenus avant sa mort
en 1978 et 1979.2
Je garde enfin de ces dernières rencontres à Locarno
au moment des entretiens entrepris avec lui, le souvenir des soirées
de discussion sur beaucoup de sujets, et notamment sur la question
d’Israël et de la Palestine et donc sur le terrorisme
déjà très actif à l’époque
! Sa critique du terrorisme qu’il soit palestinien ou israélien
allait de pair avec sa défense de la cause juste des palestiniens
et il fut parmi les premiers en 1948 avec Hannah Arendt à
réclamer le retour des réfugiés de 1948.Au
moment où je traduisais « The Revolution of Hope »,
il m’avait interrogé sur les organisations palestiniennes
et je lui avais fait, dans une lettre du 7 mars 1970, un petit résumé
des plus connues, à commencer par Al Fateh en lui indiquant
les leaders et les principes de ces organisations. Il me répondait
le 4 avril : … « It was enlightening to me and I have
now for the first time an idea of the various currents and groupings
in the Arab resistance movement. This is really very helpful to
me and I appreciate very much the trouble you have taken to send
me such a detailed memo.
... I am against terror tactics. I was against them when the Israelis
applied them against the British, and I am against them when the
Arabs apply them against the Israelis. I do not believe in hate
as a constructive sentiment for the liberation of any nation, and
of course I am not a friend of nationalism, whether it is Arab or
Israeli. This is something different from undestanding deeply the
motivation for Arab nationalism and from my severe criticism of
Israeli policy, not only since the foundation of the State, but
altogether, àf a completelyr Jewish state as such. I think
the only solution would have been that suggested by Rabi Magnus,
of a by-national Jewish- Arab state, similar to the Swiss canton
system.”
Je lui répondais le 31 mai 1970: “ The by-national
Jewish-Arab state would be a rational solution if only the two parts
were sincerely willing to accept each other and live in peace. Resistance
an war are logical consequence of occupation and violence ( can
we speak of terrorism except when some Palestinian extremist group
deliberately attack civilian, as the Israeli extremists Did in the
past ( The Stern), when they for instance attacked the King David
Hotel. In this meaning, I am also against terror, but resistance
has another content when it is the only possibility left for the
Palestinians to assert their rights.”
Pour terminer ce témoignage, je citerai la réponse
d’Erich Fromm concernant le terrorisme, qui me paraît
toujours actuelle, à l’heure où la politique
américaine ne fait que renforcer le terrorisme arabe, auquel
elle a déclaré la guerre, avec des accents de croisade
contre le mal : « Thank you for your letter of May 31 st just
arrived. I have read with great interest your remarks on the Arab-Jewish
situation. I realise what you mean by differentiating between resistance
and terror but I think that while the distinction can be made theoretically,
it is very difficult to uphold it practically. As long as the guerrilla
fighters can attack an opposing army, the distinction is pretty
clear and realistic. But when the liberation fighters do not attack
an army, and for practical reasons this is often impossible, and
instead attack peaceful settlers or other civilians, then the resistance
necessarily employs terroristic methods. With attacks against individual
settlements, buses, etc., the liberation fighters have actually,
it seems to me , used terroristic methods just as the Zionist extremist
groups like the Stern gang used the same method of terror in their
fight against the British. I do not for a moment forget that the
air attacks of the Israeli army against so-called military targets
near Cairo are also for all practical purposes terroristic and that
it is no excuse if it is explained that killing children wad due
to an error or whatever excuse is. It seems to me one should introduce
another element and that is, the question whether military moves
of the resistance have any realistic chance to change the political
and military picture or whether they just vent indignation and hate
of those who have been deprived of their land against those who
sit on it. It is quite clear and has proved for many years, that
the resistance of the NLF in Vietnam has a real and indubitable
military function . It is not clear to me whether at this moment
the Arab resistance has any such function. I should like to comment
on the fact that until and including the first World war, the use
of force had been voluntarily restricted by certain compassionate
considerations mainly in two directions. One did not kill civilian
populations, and by and large did not use torture event if its use
would produce important military information. Since and during the
second World War these restrictions have been abandoned first by
all great powers and are now in a situation where force is used
on all sides without restrictions. Of course all this has nothing
to do with the full condemnation of Israeli agressiveness, its refusal
to evacuate the conquered territories, etc. etc. The refusal of
the Israeli government even to permit Nahum Goldman, the most intelligent,
realistic and humanist of Zionist leaders, to meet with Nasser is
only a glaring example of the intransigence of Israeli government.”
Trente cinq ans après, l’analyse d’Erich Fromm
reste prophétique et rejoint celle d’Edward W. Said,
l’intellectuel palestinien récemment disparu : Face
aux impasses de la violence sous toutes ses formes et aux réalités
de la démographie dans les prochaines années, la seule
solution n’est-elle pas un état bi-national et le renoncement
au terrorisme ? Ou bien continuera-t-on en Israël à
pratiquer une politique de l’exclusion, se protégeant
par un mur qui fait de l’Etat juif un grand ghetto, avec l’approbation
des Etats Unis, tandis que s’accentueront les extrémismes
islamiques et le terrorisme international, que la guerre américaine
en Irak ne fait que conforter ? Il est à craindre que le
Proche-Orient reste encore pour longtemps une zone sismique, imperméable
aux solutions équitables dans le respect de tous, malgré
la vision prophétique d’hommes justes comme Fromm et
Said.
Gérard D. Khoury, Aix en Provence, 6 août 2005
NOTES
1 Fromm m’écrivait en mars 1964 : « The real
problem seems to be a certain lack of determination and aim in your
life, a certain passivity, perhaps some amount of narcissism. I
also cannot help thinking how much all this has to do with your
father and your family. Whether you are not avoiding the solution
of the conflict between independence and temptations of what I assume
to be the protective and powerful family.”
De nouveau en août 1964 , il insistait : «… When
I read your last letter my main impression was that you are in the
situation in which so many people are, especially if they are the
sons of wealthy fathers, that they cannot really put themselves
on their own feet because their wish for independence is so weakened
by the seduction of the comforts of luxury which they can have if
they do not break with their fathers . You apparently live with
this conflict all the time.”
“... I do not know whether what I am saying here is correct,
but I cannot help thinking it because that is what I sense between
the lines. As I wrote in my previous letter, I think the main problem
is this decision, and to overcome the fear of standing on your own,
and the longing for the “flesh-pots of Egypt”. You must
also consider that in your pas you were probably so afraid of life
that your wish for security has an undue weight in your decision”
2 Ces entretiens avec Erich Fromm ont fait l’objet d’une
page du Monde ( Le Monde du 21 octobre 1979). La totalité
de ces entretiens ont été publiés dans ‘Revoir
Freud, Pour une autre approche en psychanalyse» Ed Armand
Colin, Paris, 2000.
http://admin.over-blog.com/trackback.php?Id=28568...
http://admin.over-blog.com/trackback.php?Id=2856806
La International Erich Fromm Society publie chaque année,
en langue allemande et en langue anglaise, le bulletin Fromm Forum.
Dans son numéro 10/2006, est signalée la parution
du Coq-Héron N°182 (2005 ; éditions Erès,
Toulouse) : « Erich Fromm, un psychanalyste hors normes »,
contenant un certain nombre de textes d'Erich Fromm ; une partie
a été traduite en français pour la première
fois, d'autres ont déjà été publiés
dans la collection de Gérard Khoury Revoir Freud. Pour une
autre approche de la psychanalyse (2000 ; Armand Colin, Paris).
Ci-dessous, le commentaire publié par Oedipe, le portail
français de la psychanalyse.
Le Coq-Héron« Erich Fromm, un psychanalyste hors normes
»
La question posée par ce numéro du Coq-héron
est assez simple : comment peut-on être Erich Fromm, soit
un Allemand, juif, psychanalyste, sociologue de formation et de
tendance marxiste, puis un activiste pacifiste au milieu du XXe
siècle en Allemagne puis aux États-Unis ?
Erich Fromm est né à Francfort le 23 mars 1900. Il
était le fils unique de parents juifs orthodoxes pratiquants.
Il est mort à Locarno le 18 mars 1980. Aujourd'hui oublié
tant du grand public que des psychanalystes eux-mêmes, il
a connu jusque dans le milieu des années 50 et en particulier
aux États-unis, en Italie et en Allemagne, une très
grande popularité. La particularité de ce numéro
du Coq-Héron est de nous présenter non une série
d'articles à propos d'Erich Fromm mais des textes inédits
signés d'E. Fromm lui-même, accompagnés d'une
présentation, de sa biographie par Rainer Funk et par l'historien
récemment décédé, Paul Roazen.
S'agissant du parcours de Fromm, les repères biographiques
que nous fournit le numéro indiquent clairement les difficultés
auxquelles il a dû faire face. Juif allemand dans un monde
que le nazisme gangrène rapidement, E. Fromm ne dut sa survie
qu'à sa fuite aux États-Unis. Paul Roazen signale
à ce propos la culpabilité et le dilemme des psychanalystes
viennois et berlinois craignant de prendre la fuite en abandonnant
Freud derrière eux, alors que ce dernier, malade et se sentant
à la fin de sa vie ne souhaitait pas quitter Vienne. Cette
partie de l'histoire personnelle de Fromm vient croiser celle de
l'Institut de Berlin dont il fût membre. On sait dans quels
atermoiements de type vichyssois cette institution est tombée
à l'instigation de Jones, avec l'approbation de Freud lui-même
acceptant l'inacceptable, soit l'interdiction faite aux Juifs d'en
être membres à part entière, ces derniers se
résignant à démissionner afin de préserver
l'existence de la psychanalyse en Allemagne. Fromm, membre de cet
institut, mais déjà aux États-unis à
l'époque, se trouva mêlé à un véritable
imbroglio, résultant de l'ambiguïté des positions
des instances de l'IPA dont Funk et Roazen nous retracent les méandres.
Aux États-unis, la vie de Fromm se trouva marquée
cette fois, non par la ségrégation liée à
sa judaïté, mais par le fait de vouloir appartenir à
la société des psychanalystes nord- américains
à une époque où les médecins américains
donnaient la chasse aux non-médecins dans les instances de
l'appareil de l'IPA. Ajoutons à cela que ses tendances marxisantes
puis son engagement aux côtés des pacifistes, et sa
popularité n'ont pas joué en sa faveur.
Peut-on pour autant faire de lui seulement un martyr des instances
internationales de l'IPA avec lesquelles toutes sa vie il aura maille
à partir jusqu'à créer à Amsterdam en
1962 une fédération concurrente de l'IPA dans le but,
selon Funk, de « dé-scolariser la psychanalyse »?
La réalité paraît en fait plus complexe, du
moins si l'on s'en tient aux articles présents dans ce numéro.
On y trouve en effet quelques-uns des griefs que Fromm adressait
à l'institution et à la pratique psychanalytique.
A plusieurs reprises, Fromm critiqua les dérives de la pratique
analytique et dénonça la fonctionnarisation de la
séance transformée en mise en scène inefficace
et désuète où le patient raconte longuement
des banalités dont l'analyste se contente, au motif que ce
bavardage représenterait une forme de l'association libre.
Il dénonce ce parcours interminable où chacun, patient
comme analyste, finit par s'endormir ou par transformer la séance
soit en cours de philosophie au petit pied soit en échange
mondain. « Ils consultent, ils enseignent la sagesse de vivre,
ils encouragent, ils sont gentils. Ils font toutes sortes de choses,
mais tout cela formulé en termes analytiques car le patient
ne doit pas s'apercevoir qu'ils font ce que fait un conseiller.
»
Mais, ces critiques qui rejoignent celles que Lacan formula en France,
se conjuguent avec une mise en question des fondements même
de la théorie freudienne et une approche qui manque de consistance
théorique. Tout le monde, il est vrai, ne peut pas être
Melanie Klein ou Jacques Lacan. En cela Fromm rappelle un peu Groddeck
dont il était un admirateur. Ainsi s'en prend-il à
l'un des fondements de la psychanalyse, la théorie de la
libido : « Freud n'a pas vu que les grandes passions qui agitent
les humains ne sont en fait pas déterminées par la
sexualité.»
On conçoit que dans ces conditions les psychanalystes de
l'Association Psychanalytique Américaine aient pu avoir quelques
réticences à donner à Fromm la possibilité
de parler au nom de la psychanalyse.
Au total, c'est sans aucun doute une erreur de négliger l'apport
de Fromm dans l'histoire de la pensée psychanalytique même
s'il nous faut prendre avec sa pensée le recul nécessaire
pour en saisir les éléments les plus pertinents. A
ce titre on doit saluer la publication de ce numéro et on
ne peut que souhaiter rapidement la traduction et la publication
des œuvres non disponibles en français de ce témoin
de l'histoire du monde et de la psychanalyse.
sur le site Dialectiques cette notice :
ERICH FROM...
sur le site Dialectiques cette notice :
ERICH FROMM, du freudo-marxisme
à la psychologie humaniste
Né à Francfort s/Main, en 1900, Erich Fromm fut profondément
imprégné de mystique juive. Lié au cercle de
Rabbi Nobel, il participa à la création du Freies
Jüdisches Lehrhaus, fréquenté par M. Buber. Il
se forma à la psychalyse auprès de Hanns Sachs et
Th. Reik. Il fut un des premiers psychanalystes non médicaux,
et écrivit dans les revues psychanalytiques: Zeitschrift
fur psychoanalytische Pädagogik et Imago.
En 1931, il s'intègre à l' Institute für Sozialforschung
et collabore à la Zeitschrift. note 1Ses recherches portent
sur une approche psychanalytique du marxisme, il tente de "marier"
Freud et Marx en développant une intégration de la
psychanalyse dans la pensée sociale. Il s'éloigne
progressivement du freudisme orthodoxe dès 1935. Ses critiques
susciteront l'animosité des psychanalystes classiques. Pourtant,
malgré la critique de l'universalité des concepts
freudiens (dcelui du complexe d'Oedipe par exemple) et le parallèle
qu'il établit entre les rapports oedipiens et les rapports
sociaux propres au monde capitaliste, il s'écarte de l'école
de Francfort.Ses dernières recherches dans le cadre de l'Institut
de la Recherche sociale ont trait à la formation de la personnalité
autoritaire. Mais le concept de personnalité autoritaire
développé par Fromm désigne une attitude spirituelle
autonome dégagée de tout réseau pulsionnel:
sa personnalité ne s'enracine pas dans le corps. La psychanalyse
redevient ainsi, chez Fromm, une psychologie de l'âme autonome.
On comprendra les dissensions profondes qui séparent Fromm
d'un Marcuse. Pourtant Fromm considère, que les traits qui
constituent la personnalité sont, plus que la résultante
de pulsions refoulées, le produit de processus sociaux, où
l'individu recherche la sécurité en refusant sa liberté.
Le conflit entre le potentiel inné et les obstacles sociaux
au développement humain sont à l'origine des névroses.
Pourtant, l'individu peut toujours s'adapter au milieu social et
mener une vie autonome. Cette recherche d'autonomie purement individuelle
entrainera Fromm dans les courants multiformes de la psychologie
humaniste centrée sur l'égo.
Les ouvrages repris ci dessus ne s'inscrivent donc pas dans la lignée
directe de la théorie critique spécifique de l'école
de Francfort. Ils témoignent cependant de l'évolution
d'une pensée toujours imprégnée d'un humanisme
socialiste et d'un souci de l'émancipation humaine, que Fromm
conçoit plus comme une libération individuelle que
comme une conquête révolutionnaire ou sociale. note
2
notes
note 1) notamment l'article mentionné dans la bibliographie
de "grandeur et limite de la pensée freudienne":
Uber Methode und Aufgabe einer Analytischen Sozial-psychologie:
Bemerkungen über Psychoanalyse und historischen Materialismus
in : Zeitschrift für Sozialforschung, Leipzig, 1 (1932). p.28-54.
note 2.) les sources de la notice biographique sont : ASSOUN P.L.
, l'école de Francfort., et l'article Erich Fromm in Encyclopaedia
Universalis (Thesaurus). voir aussi Martin JAY, "l'imagination
dialectique", Paris: Payot.
sur le site DIALECTIQUES, consacré à l'Ecole de Francfort,
quelques élements d'une
BIBLIOGRAPHIE DES OEUVRES D'ERICH FROMM TRADUITES EN FRANCAIS
L'art d'aimer / Erich Fromm ; traduit de l'anglais par J. Laroche
et Françoise Tcheng. - Paris : Editions Universitaires, 1967.
- 158 p. ; 2O cm. - (Psychothèque). - Titre original: The
art of loving. - réédité en 1968 aux éditions
EPI, coll. Hommes et groupes. -
Avoir ou être? : un choix dont dépend l'avenir de l'homme/
Erich Fromm ; traduit de l'américain par Théo Carlier;
postface de Ruth Nanada Anshen. - Paris : Laffont, 1978. - 43 p.;
2O cm. - (Réponses). - Titre original : To have or to be?
, édité chez Harper & Row en 1976. - Bibliographie,
10 p. - ISBN 2-221-OO127- 3 (broché)
Bouddhisme Zen et psychanalyse / Daisetz T. Suzuki, Erich Fromm
et R. de Martino;traduction de Théo Léger. - Paris:
Presses Universitaires, 1971. - 200 p. ; 18 cm. - (L'actualité
psychanalytique). -
La conception de l'homme chez Marx / Erich Fromm; traduit de l'anglais
par M. Matignon. Paris : Payot, 1977. - 151 p.; 18 cm. - (Petite
Bibliothèque Payot). - Notes bibliographiques. - ISBN 2-228-33170-8
(broché)
La crise de la psychanalyse : essais sur Freud, Marx et la psychologie
sociale / Erich Fromm; traduction par Jean-René Ladmiral.
Paris: Anthropos, 1971. - 292 p. ; 19 cm. - (Sociologie et connaissance).
- Titre original : The crisis of psychoanalysis. De la désobéissance
et autres essais / Erich Fromm; traduit de l'américain par
Théo Carlier. - Paris: R. Laffont,1982. -176 p. ; 23 cm.
-
(Réponse. Santé/ dirigée par Jo&üml;lle
de Gravelaine). - Titre original: On disobédience and other
essays. - ISBN 2-221-OO873-1 (broché). contient: Disobedience
as a psychological and moral problem, publié initialement
in Clara Urquhart, A Matter of Life, (Londres, Jonathan Cape), cop.
1963.
The application of humanist psychoanalysis to Marx's theory, publié
initialement in Socialist humanism: an international symposium.(New-York,
Doubleday), cop.1965. Prophets and priests, initialement publié
in Ralph Schoenmann, Bertrand Russel,philosopher of the century.
cop.1967.
Humanisme as a global philosophy of Man, publié initialement
sous le titre "A global philosophy of man" in The humanist,
Yellow spring, Ohio,1966. cop. 1965.
Let Man prevail et Humanist socialism, initialement publiés
in Let Man prevail:a socialist manifesto and program, New-York.
cop. 196O. The psychological aspects of the guaranteed income, initialement
publié in R. Theobald, The Guaranteed income. N-Y:Doubleday
and C°, cop 1966.
The case for unilateral disarmement, publié initialement
in Daedalus, cop.196O. Zur Theorie und Strategie des Friedens, publié
initialement in Friede im nuklearen Zeitalter. Eine Kontroverse
zwischen Realiste, und Utopisten, 4 Salzburger Humanismusgespräch,
éd. à Munich, cop197O.
Le dogme du Christ : et autres essais / Erich Fromm. Paris : Complexe,
19.. . - (Textes). - suivi d'autres essais : La psychanalyse : une
science ou un parti. Le caractère révolutionnaire.
Des limites et des dangers de la psychologie.
Espoir et révolutions: vers l'humanisation de la technique
/ Erich Fromm ; traduction de Gérard D. Khoury. Paris : Stock,
1970. - 187 p. ; 21 cm. - Titre original: the revolution of hope:
toward a humanized technology.
L'homme pour lui-même / Erich Fromm;traduit par Janine Claude.
Paris: Editions sociales françaises, 1967. - 192 p. ; 24
cm. - (Collection des sciences humaines appliquées). - Titre
original: Man for himself. -
Le langage oublié : introduction à la compréhension
des rêves, des contes et des mythes / Erich Fromm; trad. par
Simone Fabre. Paris : Payot, 1975. - 210 p. ; 18 cm. - Titre original
: The forgotten language. - ISBN 2-228-32610-4
La mission de Sigmund Freud: une analyse de sa personnalité
et de son influence / Erich Fromm; trad. de l'américain par
Paul Alexandre. - Bruxelles : Complexe, 1975. - 112 p. ; 23 cm.
- (Textes ). - Titre original: World perspectives series. -
La passion de détruire: anatomie de la destructivité
humaine /Erich Fromm; traduit de l'américain par Théo
Carlier. - Paris: Laffont, 1975. - 523 p.; 24 cm. - (Réponses
). - Titre original : The anatomy of human destructiveness , édité
en 1973 chez Holt, Rinehart et Winston. - (broché).
La peur de la liberté / Erich Fromm; traduit de l'anglais
par C. Janssens. Paris : Buchet-Chastel, 1963. - 244 p. ; 22 cm.
- Titre original: The fear of freedom. - la bibliographie en annexe
de "Grandeur et limites de la pensée freudienne"
de E. Fromm donne comme titre original: Escape from Freedom, édité
à New York en 1941. Edition allemande à Francfort
en 1966:Die Furcht for der Freiheit. Psychanalyse et religion /
Erich Fromm; traduit par D. Merllie. - Paris: EPI, 1978. - 16O p.;
2O cm. - (Hommes et groupes). - Titre original: Psychoanalysis and
religion. (broché)
Société aliénée et société
saine : du capitalisme au socialisme humaniste. Psychanalyse de
la société contemporaine/Erich Fromm; traduit par
Janine Claude. Paris : Courrier du Livre, 1967. - 352 p. ; 23 cm.
- (L'Université permanente). - Titre original : The sane
society, édité à New-York: éd. Rinehart,1955.
- contient : présentation de la psychanalyse humaniste d'Erich
Fromm / par Mathilde Niel.- réédité en 1971.
-
Vous serez comme des dieux: une interprétation radicale de
l'Ancien Testament / Erich Fromm; traduit de l'américain
par Paul Alexandre; postface de Evelyne Sznycer et Serge Pahaut.
- édition revue et annotée par E.Sznycer et S. Pahaut.
Bruxelles: Complexe, 1975. - 214 p. ; 23 cm. - (Textes ). - Index.
- (broché)
FROMM CONTRE LA DIANETIQUE
Lu sur le site antisectes.net cet article d'Erich Fromm critiquant
dès 1950 l'ouvrage clé de Hubbard, fondateur de la
scientologie :
NEW YORK HERALD TRIBUNE - Critiques des ouvrages 3.9.1950Pour ceux
qui rechercheraient un bonheur préfabriqué
DIANETICS.
(en France, le titre original était "Dianétique,
Science Moderne de la santé mentale"; il fut modifié
en "Dianétique, puissance de l'esprit sur le corps"
et finalement en dianétique, puissance de la pensée
sur le corps- pour des raisons éminemment politico-légales
(apparence pseudo-religieuse de la secte). L. Ron Hubbard.
Critique de Erich Fromm
Les gens n'ont jamais été si passionnés de
psychologie et d'art de vivre que de nos jours. L'intérêt
que portent les lecteurs potentiels envers ces sujets n'est pas
sans provoquer des inquiétudes sur l'homme, davantage que
sur les aspects matériels de l'existence. Parmi ces livres,
certains comblent le besoin de conseils rationnels, tandis que d'autres
attirent les lecteurs au moyen de promesses de bonheur préfabriqué
et de remèdes ou recettes miracle. La "Dianétique"
est le dernier de cette série d'ouvrages dans lequel l'auteur
use sans la moindre vergogne de tous les ingrédients de la
recette en vogue. "La création de la dianétique
représente une étape pour l'humanité: elle
est d'importance comparable à l'invention du feu et supérieure
à celles de la roue ou de la voûte". L'auteur
prétend avoir non seulement "découvert l'unique
source de toutes les formes de névroses, psychoses, criminalité
et maladies psychosomatiques", mais aussi "le remède
à tout cela."
"La dianétique guérit sans jamais échouer"
L'auteur présente d'abord une théorie générale
sur la structure mentale; il bâtit ensuite une théorie
portant sur les troubles mentaux, et une pratique pour en venir
à bout. "Le seul moteur de l'humanité est la
survie". L'homme survit pour lui, pour le sexe, le groupe,
l'humanité, et chacune de ces subdivisions du principe de
cette survie est dénommée une "dynamique".
Il établit une distinction entre "mental réactif"
- la partie qui mémorise les émotions négatives
et douleurs et "mental analytique", qu'il compare à
une superbe calculatrice pensant en termes de différences
et similitudes, tandis que le mental réactif ne penserait
qu'en termes d'identité/égalité. Le mental
réactif "cherche seulement à diriger l'organisme
selon un schéma de stimuli-réactions".
Ce concept de mental réactif est le fondement de la théorie
de la pratique permettant de soigner les maladies mentales. Durant
les moments de douleur physique ou d'émotion intense, le
mental analytique serait "déconnecté", les
mots prononcés alors en présence de la personne "inconsciente"
seraient alors enregistrés comme "engrammes". Ceux-ci
ne seraient pas accessibles dans les souvenirs normaux. La personne
serait alors dirigée sans le savoir par les contenus de ces
engrammes, similaires à des suggestions hypnotiques. "Si
jamais le diable a existé, il a inventé le mental
réactif... Ce mental fait tout, on peut tout lui attribuer
dans la liste des maladies mentales: psychoses, névroses,
compulsions, répressions... ainsi que tout le catalague des
maladies psychosomatiques... l'engramme est l'unique source de toute
aberration et maladies psychosomatiques..."
La thérapie dianétique est issue de ces prémices.
Le patient -"le préclair"- est malade en raison
de ses engrammes. Lorsque tous les engrammes importants - surtout
ceux de la période prénatale - sont remémorés
("on y retourne"), le patient est définitivement
"clarifié" [dans le sens des machines à
calcul, où la commande 'clear' efface les commandes précédentes,
ndt] de toutes ses "aberrations", et son intelligence
est alors supérieure à celle des autres. Le thérapeute
ou "auditeur" permet ce "retour" de l'engramme
en mettant le patient dans un état dit "rèverie
dianétique": il annonce : "Lorsque je compterai
jusqu'à sept, vos yeux se fermeront. Vous resterez conscient
de tout ce qui se passera." Puis l'auditeur compte "lentement,
calmement," jusqu'à ce que le patient ferme les eyux.
Il lui demande ensuite de "retourner" aux périodes
antérieures de son existence, éventuellement jusqu'à
la conception, et le ramène dans le présent en fin
de séance.
Chaque engramme doit être entièrement décrit-raconté
à plusieurs reprises jusqu'à "effacement complet".
Si l'on omet les prétentions colossales de l'auteur, on trouve
à peine quelques originalités dans l'ouvrage, hormis
les mots nouveaux expliquant un mélange de freudisme mal
compris et d'expériences de régression datant des
âges de l'hypnose. Quelques notions vraiment originales peuvent
pourtant surprendre: nous lisons par exemple que le patient raconte
les mots prononcés par le médecin à la mère
enceinte, ou par le père, dès après la conception.
Lorsque j'ai fait la revue de cet ouvrage et observé les
histoires de certains cas qu'on y trouve, j'ai été
tenté de croire que l'auteur avait exprès construit
une parodie subtile de certaines théories psychiatriques,
et mis à l'épreuve la crédulité du public.
On peut difficilement imaginer que l'ouvrage d'Hubbard soit une
contribution sérieuse aux sciences humaines, mais il faut
le considérer comme le symptôme d'une dangereuse tendance.
S'il ne s'agissait que d'une sur-simplification d'anciennes théories
freudiennes, il serait sans risques. Mais la dianétique dévoile
un esprit très précisément opposé aux
théories freudiennes. Le but de Freud consistait à
aider le patient à comprendre la complexité de son
mental, sa théorie se fondant sur le concept suivant: c'est
en se comprenant soi-même que l'on pourrait se libérer
de fardeaux irrationels provoquant malheur et maladie mentale. Cette
notion se rencontre dans la grande tradition orientale ou occidentale,
de Bouddha à Socrate, en passant par Spinoza et Freud. La
dianétique ne respecte pas - et ne comprend pas - les complexités
de la personnalité.
L'homme est une machine, si bien que rationalité, jugements
de valeur, santé mentale et bonheur s'obtiennent par un travail
d'ingéniérie. "Dans une science d'ingéniérie
comme la dianétique, nous pouvons travailler par pousse-boutons."
Il n'y a rien à savoir sur l'homme en dehors de l'application
des théories hubbardiennes sur l'engramme. Si l'on n'accepte
pas ces théories, c'est que l'on a d'autres motifs ultérieurs,
ou que l'on souffre d'un "dénieur" - ou "négateur"
qui "est une commande engrammique faisant croire au patient
que l'engramme n'existe pas".
Tout est excessivement simple.
Quand vous avez avalé l'ouvrage d'Hubbard, vous savez tout
ce qu'il y a à connaître sur l'homme et la société
puisque vous savez sur quels boutons appuyer. Les valeurs ou la
conscience n'existent pas; si les engrammes sont effacés,
vous n'avez plus de conflits.
Toutes les grandes religions et philosophies ont perdu leur temps.
Aucun problème n'a pas pour origine un ordre engrammique,
si bien que tout ce qui a été pensé avant Hubbard
n'a pas de sens, vu que les penseurs ignoraient la découverte
hubbardienne. Il reste difficle de croire l'auteur lorsqu'il écrit
que "les écritures hindoues anciennes, les oeuvres des
anciens grecs ou romains y compris Lucrèce, les travaux de
Francis Beacon, les recherches de Darwin et certaines de pensées
d'Herbert Spencer" composeraient "les bases philosophioques"
de son travail: la dianétique ne se soucie certes pas de
ces prédécesseurs. La découverte selon laquelle
"la survie serait le seul et unique but de la vie" n'exprime
certainement pas les préoccupations des anciens hindouistes,
ou des grecs anciens: c'est plutôt une expression biologique
brutale selon laquelle les valeurs éthques seraient subordonnées
à la pulsion de survie - si tant est qu'elle existe.
Peut-être l'élément le plus maladroit de la
dianétique réside-t'il dans le style. Ce mélange
de quelques vérités hyper-simplifiées, de demi-vérités
et de pures absurdités, s'ajoutant à la technique
propagandiste consistant à impressionner le lecteur par l'affirmation
de grandeur, d'infaillibilité et de nouveauté du système
de l'auteur, ou cette promesse de résultats immanquables
directement accessibles par le simple biais de l'adoption des techniques
dianétiques, tout cela retentit hélas dans les domaines
médecine et politique. Ce serait aussi grave en cas d'application
à la psychothérapie et à la psychiatrie.
Cette critique négative sur la dianétique ne résulte
pas de croyances présentes selon lesquelles le critique affirmerait
que les méthodes actuelles de la psychiatrie et de la psychologie
sont satisfaisantes: elles ont besoin d'idées et d'expérience
nouvelles. Fort heureusement, nombre de psychiatres et psychologues
en sont conscients et cherchent les méthodes permettant d'approcher
l'inconscient (entre autres, le test de Slesinger "Looking-in").
Mais on doit au minimum prendre comme point de départ le
renforcement de la responsabilité, de la perspicacité
et de l'esprit critique du patient.
Le Dr Fromm, psychanalyste, est co-auteur de "Famille et Autorité",
auteur de "S'échapper de la liberté" et
"L'homme en soi". Son dernier ouvrage "Psychanalyse
et religion" sortira en fin d'année [1950]. PRESENTATION
à visiter : http://www.erich-fromm.de/e/index.htm
Erich Fromm, né en 1900, mort en 1980, a publié ses
premiers écrits en 1932. Son œuvre considérable
élabore, au cours d'une cinquantaine d'années d'écriture,
d'enseignement, et de pratique thérapeutique, une pensée
riche et complexe, écrite pourtant en des termes aisément
accessibles, qui doit beaucoup à deux de ses principales
références : Sigmund Freud et Karl Marx.
Afin d'éviter toute confusion (ce contre quoi Fromm lui-même
s'était élevé) avec d'autres tentatives de
"synthétiser" psychanalyse et marxisme, celle de
W. Reich puis celle de H. Marcuse pour l'essentiel, j'évite
d'employer le vocable "freudo-marxiste" pour qualifier
la pensée d'Erich Fromm. Cette précision importe d'autant
plus en France où la pensée et l'œuvre d'E. Fromm
restent largement méconnues dans le monde universitaire en
général, chez les marxistes et chez les freudiens
en particulier. Pourtant, comme ce fut le cas dans de nombreux pays,
à commencer par les États-Unis d'Amérique,
l'œuvre de Fromm bénéficia d'une large diffusion
dans les années 70-80 (tous ses ouvrages publiés ont
été traduits et édités en français)
et d'un réel succès de librairie pour plusieurs d'entre
eux ( ainsi la Passion de détruire et surtout l'Art d'aimer).
Si la pensée frommienne connut dans ce pays comme dans d'autres
les faveurs d'un vaste public cultivé, à la recherche
d'une interprétation de la crise de la société
contemporaine et de solutions progressistes -voire "radicales",
révolutionnaires, selon E. Fromm- pour la transformer, il
n'en fut pas de même chez les spécialistes. Existe-t-il
un autre pays où, dans la période située -en
gros- après 1968, les dits spécialistes (marxistes
et freudiens respectivement) se soient davantage qu'ici comportés
en farouches gardiens d'une soi-disant orthodoxie parée de
tous ses attributs : dogmatisme, conformisme, respect littéral
des saints textes fondateurs, esprit de chapelle, anathème
sur les hérétiques, hermétisme, langage d'initiés,
et j'en passe car chacun saura compléter le tableau.
Or cette orthodoxie est le plus sûr moyen connu pour stériliser
une pensée active. Elle est la voie éprouvée
pour transformer une pensée contestataire et anti-conformiste
en instrument d'intégration et de paix sociale. Contre les
orthodoxies et leurs clergés, Erich Fromm s'est élevé
avec force et l'Université française l'a tenu, avec
un certain dédain, hors de portée de l'étudiant
soucieux de reconnaissance et de succès dans ses études.
La France des années 70 est pourtant le pays de Lacan, d'Althusser,
de leurs élèves, et d'autres esprits peu conformistes,
eux -mêmes plus ou moins en rupture d'École. Mais l'originalité
et la vivacité de ces pensées en rupture se manifestèrent
d'abord dans des domaines et sur des objets de recherche bien spécifiques
et délimités. Dans des champs épistémologiques
clos. Les sciences humaines étant un domaine général
juxtaposant des sciences particulières tandis que la philosophie,
comme un ciment tenant cette mosaïque, se devait d'être
la science particulière du Général. Hors certains
espaces libérés, Communes radicales mais trop localisées
du savoir, le poids des institutions et des orthodoxies continuait
de jouer. Et lesquels de ces radicaux n'étaient-ils pas à
leur tour tentés de se constituer eux-mêmes, chemin
faisant, selon le modèle dominant, en grands prêtres
de nouvelles orthodoxies ? En somme, toute prétention à
l'universel, à une vision globale du monde, à une
théorie générale, fut dans ce pays soit récusée,
soit tenue en haute suspicion : dans les années 70, au nom
de pensées totalisantes prétendant à partir
d'un seul lieu (le marxisme, la psychanalyse, etc.) dériver
une pensée capable à elle seule, sans apports ou emprunts
extérieurs, d'embrasser l'ensemble de l'univers ; dans les
années 80 au nom de la négation simple de ces totalitarismes,
s'insurgeant sous le drapeau de la "nouvelle philosophie"
contre tout espoir de comprendre et transformer radicalement le
monde. La pensée d'Erich Fromm n'avait pas de place dans
les amphis mais dans les cafés et les cours de récréation
: ce fait n'est pas à lui seul un label de pertinence et
de radicalité mais qu'on veuille bien m'accorder qu'il s'agit
déjà d'un commencement de preuve.
J'ai pu ainsi éprouver, il y a 25 ans puis il y a 20 ans,
toute la difficulté qu'il y avait de mener dans un cadre
universitaire peu favorable un travail sur Erich Fromm : j'avais
entrepris d'abord une thèse de philosophie puis un doctorat
de psychologie clinique, travaux que j'ai finalement laissés
en plan malgré tous les encouragements et utiles conseils
des éminents professeurs qui avaient accepté de les
diriger. Mais personne, dans ce pays, ne connaissait le sujet et
ne souhaitait s'y intéresser sérieusement. J'étais
"le" spécialiste potentiel et cette solitude du
chercheur isolé m'a suffisamment rebuté pour que ces
travaux restent en chantier malgré l'abondante, très
actuelle et vivante matière que constitue l'œuvre d'Erich
Fromm.
LIMITES DE LA PSYCHANALYSE FREUDIENNE
Le projet de la Psychanalyse humaniste est de poursuivre la révolution
scientifique accomplie par Sigmund Freud, quelques décennies
auparavant dans l’étude de la psychologie humaine.
Pour cela, il s’agit de mettre à jour les aspects contradictoires
du freudisme, de repérer les découvertes fondamentales
et de se débarrasser des notions « idéologiques
» nuisibles à la poursuite de la « révolution
psychanalytique ».
Comme toute production intellectuelle, comme tout système
de pensée ou d’explication, comme toute découverte
scientifique, la psychanalyse n’est pas exempte d’entraves
idéologiques. C’est pour cela que Fromm pose ce principe
général, concernant tout système de pensée
créatif : « on ne peut tenter de comprendre avec succès
le système de Freud -ou celui de tout autre penseur créatif
systématique- si on ne commence pas par saisir que tout système,
tel qu’il est développé et présenté
par son auteur est nécessairement erroné ».
Ces erreurs qui entravent inévitablement le développement
des idées nouvelles proviennent d’une contradiction
propre à toute pensée créative :
Toute pensée créative est une pensée critique.
Elle exprime des concepts jusqu’alors impensables, c’est
à dire inacceptables pour les catégories de pensée
admises à une époque donnée. Le penseur créatif
est donc contraint -par une nécessite incontournable, à
exprimer les idées nouvelles en des termes et selon des modèles
de pensée établis et dominants ceux-là même
qu’il est en train de dépasser : « il en résulte
que la nouvelle pensée telle qu’elle est formulée
par lui, est un mélange de ce qui est vraiment nouveau et
de la pensée conventionnelle transcendée par ce qui
est nouveau. Le penseur, cependant, n’est pas conscient de
sa contradiction ».
Ce n’est que plus tard que les disciples du penseur créatif
peuvent, les catégories dominantes ayant évolué,
amorcer un processus de révision faisant en quelque sorte
le tri entre l’ancien et le nouveau, mettant en évidence
ce qui est vraiment novateur.
Trop souvent, hélas, les disciples cherchent à masquer
les contradictions : ils tentent « par toutes sortes de subterfuges,
d’harmoniser les contradictions immanentes de son système
».
La faiblesse intrinsèque de la psychanalyse freudienne tient
à son inscription dans le cadre idéologique d’un
système philosophique dont Freud ne parvint jamais à
se démarquer : celui du matérialisme mécaniste.
Ce « matérialisme bourgeois » postulait «
qu’il n’y a pas de force sans matière ».
Telle était la philosophie professée par un des principaux
maîtres de Freud, Von Brücke. Partant de ce postulat
philosophique, Freud « ne pouvait concevoir qu’il y
eût des puissances psychiques considérables dont nul
n’était capable de démontrer les racines physiologiques
spécifiques ».
A ces référence et cadre idéologiques, le matérialisme
mécaniste, Fromm propose de substituer ceux d’un humanisme
dialectique. Sur cette base idéologique révolutionnaire
-qui faisait défaut à Freud- la Psychanalyse humaniste
peut fournir aux concepts de la psychanalyse un cadre nouveau, ouvert
et dynamisant, qui leur permet de transcender les limites du Freudisme.
LA PSYCHANALYSE HUMANISTE D'ERICH FROMM
« Ce qui fait l’importance de la découverte de
Freud, c’est qu’il mit au point une méthode qui
permet d’accéder à la vérité au-delà
de ce que l’individu croit être vrai, et il a pu faire
cela en découvrant les effets du refoulement et, en corrélation
des rationalisations.
Il a démontré empiriquement que le chemin de la guérison
passe par la connaissance exacte, de la part du patient, de sa propre
structure mentale et, de là, par le défoulement. Cette
application du principe selon lequel la vérité libère
et guérit est le grand, et, sans doute, le plus grand exploit
de Freud, même si sa façon d’appliquer ce principe
a subi bien des distorsions et a souvent produit de nouvelles illusions
». (E.F. Grandeur et limites de la pensée freudienne
p 8)
Ces quelques lignes, extraites de l’introduction de Grandeur
et limites de la pensée freudienne résument assez
bien l’attitude générale d’Erich FROMM
envers le fondateur de la psychanalyse : il considère les
découvertes de Sigmund Freud comme une contribution capitale
à la connaissance de l’homme, comme une théorie
radicale offrant un «potentiel révolutionnaire »
de transformation de la société : « la découverte
de Freud était potentiellement révolutionnaire parce
qu’elle aurait pu amener les individus à ouvrir leurs
yeux à la réalité de la structure de la société
où ils vivent et, de là, à désirer la
changer en accord avec les intérêts et les aspirations
de l’immense majorité »
Ce qui est radical et fondamental dans l’approche freudienne,
ce n’est pas sa théorie de la sexualité, ni
la métapsychologie psychanalytique. C’est la mise en
relief « (du) rôle capital du refoulement et la signification
fondamentale du secteur inconscient de notre vie mentale ».
Freud, après Galilée et Darwin, a fait tomber (virtuellement)
la « dernière illusion », en quelque sorte :
« cette théorie était radicale parce qu’elle
s’attaquait à la dernière forteresse de la croyance
de l’homme en son omnipotence et en son omniscience, la croyance
en sa pensée consciente considérée comme donnée
primordiale de l’expérience humaine (...) ; personne
n’avait mis en doute que sa pensée consciente était
la dernière donnée sur laquelle (l’homme) pouvait
compter. Freud a privé l’homme de l’orgueil qu’il
plaçait dans sa rationalité. Il est allé jusqu’aux
racines -c’est ce qu’exprime littéralement le
mot « radical »- et a découvert qu’une
bonne partie de notre pensée consciente ne fait que dissimuler
nos pensées et nos sentiments véritables et nous cache
la vérité : la plus grande partie de notre pensée
consciente est un faux-semblant, une simple rationalisation de pensées
et de désirs dont nous préférons ne pas avoir
conscience ».
C’est autour de cet axe central que s’organise l’apport
fondamental de Sigmund Freud à la connaissance de l’être
humain. C’est cet apport que revendique avant tout la Psychanalyse
humaniste dans l’héritage freudien. JV
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