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Le dopage et le Tour de france
Les performances parlent d'elles-mêmes

Origine : http://www.liberation.fr/actualite/evenement/evenement1/195900.FR.php

http://cyclisme.dopage.free.fr/portraits/vayer.htm

http://cyclisme.dopage.free.fr/actualite/2006-07-28-liberation.htm


Tour de France. Antoine Vayer, ancien entraîneur de Festina et directeur d'une cellule de recherche sur la performance :

«Les performances parlent d'elles-mêmes»

Par Grégory SCHNEIDER

QUOTIDIEN : Vendredi 28 juillet 2006 - 06:00

Professeur de sport et ancien entraîneur de Festina, Antoine Vayer dirige AlternatiV, une cellule de recherche sur la performance, à Laval (Mayenne). Chroniqueur sur le Tour pour Libération, il revient sur les «exploits» d'un Landis qu'il a mis en doute tout au long de l'épreuve dans ces colonnes.

Pourquoi la testostérone ?

Reprenons : le dopage le plus efficace se fait en dehors des périodes de compétition. Exemple : l'autotransfusion. On se retire 1,5 litre de sang (pour 5 litres !), dont on se réinjectera les globules rouges par la suite. Quand on vous pompe une telle quantité, vous êtes en anémie. Quatre ou cinq semaines sans compétition sont nécessaires pour récupérer, pendant lesquelles les coureurs prennent de l'EPO et des anabolisants pour recouvrir plus vite. Déjà, si on regarde attentivement le calendrier d'un cycliste comme Landis, on voit très nettement apparaître ces plages de repos.

Mais quel lien avec la testostérone ?

On y arrive. Pendant les compétitions, pour compenser les effets de ces périodes de «préparation», certains coureurs ont recours aux injections d'insuline et d'anabolisants, donc de testostérone. La testostérone peut aussi être utilisée en appui des corticoïdes. Si les corticoïdes ont un effet antidouleur et euphorisant, ils font fondre la masse musculaire. Or, la testostérone se fixe sur les récepteurs des corticoïdes et empêche la diminution du muscle. Le dopage consiste à prendre un produit, puis un autre pour contrer les effets indésirables du premier, puis un troisième pour contrer les effets indésirables du deuxième, etc. On empile les produits.

Comment prend-on de la testostérone ?

Le patch est indiqué. Il permet une diffusion progressive, régulière du produit. Les carabiniers en ont trouvé lors du dernier Tour d'Italie. Soit la prise est millimétrée, bien encadrée, et elle passe inaperçue. Soit les coureurs se font prendre comme des cadets, ce qui renvoie à la «fringale de cadet» (lire Libération du 25 juillet) que Landis a prétextée dans La Toussuire. Tous les observateurs avisés avaient plutôt décelé un «blocage» dû à un protocole dopant mal maîtrisé.

L'équipe de Landis, la Phonak, a déjà un lourd passif dans le vélo...

Ah oui ! En 2004, Tyler Hamilton et Santi Perez sont tombés pour avoir pratiqué l'homotransfusion : le coureur se promène avec un ami dont le sang est compatible et «boosté». Quand on en a besoin, on prend du sang au second pour l'injecter au premier. Problème : la lutte antidopage a mis en évidence les cellules étrangères dans le sang du coureur. Donc, une partie du peloton est passée à l'autotransfusion : on remplace le porteur qu'on trimballe avec soi par des poches contenant son propre sang. C'est plus lourd à gérer. Ce mode de dopage a été mis en lumière par l'affaire Puerto, où deux autres coureurs de la Phonak ­ le Colombien Santiago Botero et l'Espagnol José Enrique Gutiérrez ­ ont été suspendus par leur équipe.

L'encadrement technique est forcément dans le coup ?

Ils savent tout. Ils vivent avec les coureurs, ils disposent de relevés sur les paramètres physiologiques. Les performances parlent d'elles-mêmes. Je ne vois qu'un équivalent à «l'exploit» de Landis lors de l'étape de Joux-Plane le 20 juillet : celui de Piotr Ugrumov au début des années 90, quand le critère de sélection pour le Tour était un taux d'hématocrite supérieur à 60 %, ce qui s'obtenait grâce à la prise d'EPO.

Le dopage dans le vélo, c'est insoluble ?

Mais non ! Certes, l'espoir de trouver les modifications de l'expression de certains gènes est mince. Reste le contrôle longitudinal très rapproché : c'est-à-dire prises de sang et d'urine, fiche anthropométrique pour mesurer les os (pour détecter la prise d'hormone de croissance), le tout géré par un organisme indépendant : on connaît les moyens.

28/07/2006 - Libération - Grégory SCHNEIDER



A savoir : un peu d'histoire sur le dopage

QUOTIDIEN : Vendredi 28 juillet 2006 - 06:00

http://www.liberation.fr/actualite/sports/195898.FR.php

Le 13 juillet 1967

Le Britannique Tom Simpson s'écroule sur le bas-côté de la route dans l'ascension du mont Ventoux par plus de 40 degrés. Le médecin du Tour tente de le ranimer pendant 40 minutes. En vain. Le coureur décède. Sous son maillot, on retrouve de nombreux tubes d'amphétamine et l'autopsie démontre qu'il était dopé.

En 1978

Le Belge Michel Pollentier l'emporte au sommet de L'Alpe d'Huez et décroche le maillot jaune. Quelques heures plus tard, il est exclu du Tour. Lors du contrôle antidopage, il est surpris avec, sous son aisselle, une poire reliée à un tube contenant de l'urine «propre».

En 1988

L'analyse des urines du maillot jaune Pedro Delgado (Espagnol), montre la présence d'un diurétique, suspecté d'avoir des effets masquant. La probénécide figure sur la liste des produits interdits par le Comité international olympique, mais pas... par l'Union cycliste internationale. Delgado n'est pas sanctionné et remporte le Tour de France.

En 1998

L'équipe Festina et son leader Richard Virenque sont exclus du Tour après l'arrestation du soigneur Willy Voet qui démontre que l'équipe se dope. L'Italien Marco Pantani remporte le Tour. En 1999, il est exclu du Giro, à la veille de l'arrivée, à cause d'un taux d'hématocrite hors norme. Pantani est mort d'une overdose, en 2004.

Le 28 juillet 2002

Le Lituanien Raimondas Rumsas termine le Tour à la 3e place sur les Champs-Elysées. Sa femme fait l'objet d'un contrôle de routine non loin de Chamonix alors qu'elle regagne l'Italie. Dans son coffre : des produits dopants, dont de l'EPO. Trois ans et demi de procédures plus tard, le couple écopera de quatre mois de prison avec sursis.

Le 24 août 2005

«L'Equipe» révèle que l'examen d'échantillons d'urine d'Armstrong, prélevés lors du Tour 1999, indique la présence d'EPO. Année de la première des sept victoires du Texan sur la Grande Boucle. Aucune sanction n'est prise. Armstrong conserve son titre.



Hypocrisie

Par Antoine de GAUDEMAR

http://www.liberation.fr/actualite/sports/195901.FR.php

Vendredi 28 juillet 2006 - 06:00

Pauvre Tour de France !

Bien mal en point au départ, après l'exclusion de plusieurs de ses stars impliquées dans un énième scandale de dopage, l'épreuve reine du cyclisme avait cru au miracle trois semaines plus tard, avec la victoire de Floyd Landis. Victoire célébrée à coups de trémolos peu convaincants sur le «Tour du renouveau», les vertus du grand nettoyage et le retour aux vraies valeurs du sport, etc.

Un résultat inespéré.

Car même le public, pourtant si indulgent à l'égard de ses favoris, avait fini par réagir : moins de spectateurs sur les routes, moins d'audience à la télévision, une ambiance forcée. Et puis les rebondissements de la course aidant, Jean-Marie Leblanc pensait avoir sauvé son Tour et sa sortie. La lamentable affaire Landis ­ qui s'est fait prendre comme un bleu à moins qu'il se soit cru tout permis, ayant été à bonne école comme équipier d'Armstrong ­ fiche tout par terre et prouve, comme s'obstinent à le crier quelques Cassandre, que le milieu cycliste est atteint d'une maladie incurable. A quelques moutons blancs près, le vélo est accro, les officines médicales tournent à plein régime et tout le reste n'est qu'hypocrisie et mensonge. Le phénomène est tel que le vélo ressemble de plus en plus au catch, royaume d'anges déchus :

un spectacle qui a toutes les apparences d'un sport et toutes les réalités d'un simulacre, où la tricherie est un art. Il y en a ­ de moins en moins, il est vrai ­ à qui ça plaît toujours. Dans un tel univers, on pourrait même imaginer autoriser le dopage, sinon le rendre obligatoire. Une solution radicale, mais qui aurait le mérite de mettre tous les coureurs à égalité devant la compétition et d'en faire les cobayes consentants d'une société qui a fait du rendement la championne des valeurs.