D’un procès qui fera date au ‘bloc noir.’
Djamel, aux commandes de sa bicyclette
Maréchaussée ne vit,
Car confiant, en ville comme à la campagne
De sa bonne étoile de sans-papier,
Il avait quitté enfin le jardin,
Pour aller dans la ville trouver domicile.
Et le gendarme gagne-denier lui fit cette question sarcastique
:
‘ Vous avez vos papiers ?’
notre ami Djamel avait-il préparé sa réponse
depuis longtemps, toujours est –il qu’avec une fausse
ingénuité, il demanda aussi sec :
« Mais qu’est-ce que c’est que cette histoire
de papiers ? »
En France pays tracassier, sur les papiers, les formulaires,
On ne demande pas au quidam ce qu’il en pense de cette sombre
affaire :
Ni papiers ni pays, ni frontières, a dit en son temps Khalil
Ghibran
Il n’y a que les mots qui nous séparent, que nous
franchissons à coups de dictionnaires.
A cette question donc, l’autorité publique ne fit
nulle réponse :
Non pas qu’ils soient bêtes, encore que...
Mais une trop longue explication à la baguette aurait laissé
le temps à notre sans-papiers de prendre la poudre d’escampette.
‘salut Djamel’ le salua en coeur la foule accourue
au tribunal en ce jour pluvieux
qui nous aurait presque fait regretter de n’être pas
tous ailleurs
foule ignorant jusqu’au nom de Saïd Rehaidi, l’ai-je
dit ?
au fait, indiquez moi l’adresse de cette résidence
que l’on nomme 'centre de rétention'
Où fleurissent en mille palimpsestes des tags griffonnés
dans toutes les langues du monde ou presque.
Une chambre ouverte à la poésie, pour lutter contre
la carcéro-phobie
Où Djamel offre à chacun de ses 1000 visiteurs un
café.
Là on me dit que de Djamel Rehaidi il n’ en a point
ici.
J’ai pourtant pas parlé arabe dans le texte
Ni tordu dans tous les sens notre langue comme une antenne de radio.
« je vis de subsides que l’on me donne »
On en est tous là mon pauvre Djamel la formule élégante
cacherait t’elle des trafics que notre république ne
saurait voir ?
mais un vrai désir d’intégration, nécessite
un peu d’imprégnation de la bêtise d’ici
bas
c’est ça ou trois mois de voyage aux portes de l’Europe
A méditer sur un préfet, très «’deus
ex machina’ » qui téléphone au beau milieu
d’un procès pour rétablir le droit au dépend
de la liberté. Comme toujours.
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un texte de Vincent Lemarie
Décembre 2007
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