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Tiré d'une conférence (1) donnée lors du 9ème
Congrès International de BIEN (2).
Origine : http://fr.ekopedia.org/Distributisme
Principes
Tiré d'une conférence (1) donnée lors du 9ème
Congrès International de BIEN (2).
« L'économie distibutive, c'est d'abord la reconnaissance
que chacun d'entre nous est co-héritier des fruits du travail
des générations qui nous ont précédé.
C'est l'économie de l'abondance, par opposition à
l'économie actuelle qui reste basée sur des lois héritées
d'une économie de rareté.
La mutation technologique informationnelle (Robin, 1997) (a)
« À la veille de la Deuxième Guerre Mondiale,
l'automatisation des machines énergétiques s'était
répandue avec une si forte ampleur qu'un esprit averti et
précurseur comme celui de Jacques Duboin pouvait prévoir
« la grande relève du travail des hommes par la machine
». Mais il ne pouvait imaginer qu'au milieu du XXe siècle,
les humains acquerraient la capacité de saisir, dans les
occurrences de la matière dans l'espace et dans le temps,
une caractéristique inédite : on débusque à
côté de la masse et de l'énergie, une nouvelle
grandeur physique mesurable (dénuée de sens). Établie
en bits, elle est dénommée avec maladresse : information.
Elle fonctionne par des signaux, des codes, des mémoires,
des langages. Des technologies inédites naissent de cette
nouvelle connaissance : l'informatique, la robotique, les télécommunications
informationnelles, les biotechnologie|biotechnologies.
« À l'ère énergétique se substitue
alors progressivement l'ère informationnelle et à
l'automatisation des outils et des machines succède une informatisation
généralisée en réseau|réseaux
des artefacts créés par l'homme. À côté
de bien d'autres bouleversements que nous n'aborderons pas ici,
la logique des systèmes économiques en place et le
travail salarié lui-même voient se briser progressivement
leurs mécanismes :
* le champ économique s'étend de manière
foudroyante dans l'espace et le temps, c'est la mondialisation ;
* les règles de l'échange économique traditionnel
sont détruites : la commande informatisée (et/ou clonée)
permet la duplication à faible coût et l'entrée
dans le monde inédit de la reproductibilité semi-gratuite
des biens comme des services;
* la croissance du PIB et de l'investissement ne favorisent plus
la montée de l'emploi à la grande stupéfaction
des économistes orthodoxes;
* surtout, le travail humain salarié (qui cesse d'être
matériel pour devenir logiciel) est toujours de moins en
moins sollicité pour produire toujours plus de richesses
(biens et services).
« L'économie capitaliste de marché sur laquelle
est plaquée la mutation informationnelle ne fait pas bon
ménage avec elle ; elle révèle ainsi son incapacité
naturelle à réguler l'abondance possible dans la création
de richesses quantitatives et à résorber les déséquilibres
produits; aussi le non-emploi, la précarité, la pauvreté
se développent-ils à grande allure dans les pays développés
en particulier là où l'on veut préserver la
sécurité sociale et l'art de vivre acquis depuis un
siècle. Et ce n'est que le début car la mutation technologique
se poursuit. Partout dans le monde, un sombre avenir se dessine
: la précarité de vie pour un nombre exorbitant de
citoyens en contrepartie de l'enrichissement scandaleux de quelques-uns.
La montée des violences de toutes sortes qui accompagnent
cette situation fait craindre à juste titre une implosion
générale catastrophique.
« Aussi longtemps que la signification de la mutation technologique
informationnelle ne sera pas acceptée par les responsables
ni expliquée à l'opinion publique, l'avenir si riche
pour tous qu'elle pourrait offrir, sera barré ; et cela au
nom de la défense d'une économie de marché
incapable par nature de maîtriser toute situation d'abondance
et de répartir des richesses qui ne cessent d'augmenter avec
de moins en moins de labeur humain ».
L'abondance possible
[…] je vais rappeler quelques chiffres. En France, entre
1850 et 1997, le nombre d'heures de travail annuel d'un salarié
est passé de 5 000 à environ 1 600. Rapportée
à la durée totale du temps éveillé sur
l'ensemble du cycle de vie, le temps de travail qui était
de 70 pour cent en 1850 ne représente plus que 14 pour cent
aujourd'hui. Cette évolution est observée dans tous
les pays industrialisés. Et malgré cela, de 1960 à
1990, la production mondiale par habitant, donc en dépit
de la croissance démographique, a été multipliée
par 2,5. En France, en 10 ans, le PIB s'est accru de 1.350 milliards
de francs, soit en moyenne, de 30,5 euros par personne et par mois.
Aux États-Unis d'Amérique, il a augmenté en
20 ans de 2.000 milliards de dollars, soit de 75 pour cent. Rappelons
aussi qu'en 30 ans, la production alimentaire mondiale est passée
de 2 300 kilocalories quotidiennes par individu à 2 700,
soit respectivement de 90 pour cent à 109 pour cent des besoins
fondamentaux, et ces résultats ont été obtenus
avec un nombre d'agriculteurs de plus en plus réduit.
Le revenu social
Puisque la richesse augmente alors que le travail de production
diminue il faut se donner les moyens d'assurer le partage équitable
des richesses produites. C'est ce que réalise l'économie
distributive en attribuant un « revenu social » à
chacun, de sa naissance à sa mort. C'est sa part d'héritage
! « La communauté doit donc faire vivre tous ses membres
puisque, grâce à eux, elle en a définitivement
les moyens. Son rôle n'est pas et n'a jamais pu être
de leur procurer du travail (entreprise chimérique même
dans l'ère de la rareté), mais de procurer des produits.
Ainsi le droit aux produits et aux services découle uniquement
du fait que l'on appartient à la race humaine. C'est l'imprescriptible
droit à la vie que l'homme possède à l'état
sauvage et auquel il ne peut renoncer si le hasard de la naissance
l'introduit dans une société modernement équipée.
Le droit aux produits et aux services doit-il être égal
pour tous ? On répondra affirmativement puisque le labeur
humain, conjugué aujourd'hui avec l'outillage dont on dispose,
fournit un rendement qui n'est plus proportionnel au labeur. Comment,
dans ces conditions, discriminer la part qui revient à chacun
? Certes, je conviens que cette prétention apparaît
exorbitante à première vue car elle heurte brutalement
les usages, les préjugés et, disons le mot, les préventions.
Empressons-nous de dire que l'égalité économique
absolue de tous n'est pas indispensable à l'économie
de l'abondance.
Il est possible de prévoir, surtout dans les débuts,
tel ou tel mode de distribution avantageant par exemple l'ancienneté,
les aptitudes, la responsabilité, la collaboration intellectuelle.
En fait, je ne vois pas le critérium dont on pourra se servir,
car l'idée d'abondance hurle d'être accouplée
à celle d'une distribution variant avec les individus, l'abondance
excluant la nécessité de faire des portions ».
Un service social
Puisque nous sommes tous cohéritiers d'un patrimoine mondial
qu'il s'agit d'améliorer autant que possible et de transmettre
aux générations futures après en avoir partagé
équitablement l'usufruit, nous devons participer à
la vie de la société dans la mesure de nos moyens
respectifs et selon les besoins de cette société.
« Tout homme doit un certain labeur pour avoir droit, non
pas à sa place au soleil, mais à sa part dans le surplus
social que crée la communauté dont il fait partie.
Je dis tout homme, sans exception, comme aujourd'hui tout homme
bénéficie de l'organisation de la défense nationale,
même s'il fit un soldat déplorable pendant son service
militaire. L'idée de récompenser le labeur fait encore
partie de l'ère de la rareté. Tout ce que la société
peut exiger de ses membres, c'est l'effort, quelle que soit son
efficacité puisque celle-ci dépend de circonstances
étrangères à la volonté humaine. Pourquoi
le fait d'être plus intelligent ou plus vigoureux créerait-il
un titre à une rémunération plus élevée
? Si le travail du bœuf est plus considérable que celui
de l'âne, récompensez-vous le bœuf et punissez-vous
l'âne ? La justice sociale est un bienfait qu'apporte l'ère
de l'abondance. L'effort seul est réclamé, dans la
mesure des aptitudes, alors que le résultat dépend
des facultés de chacun » (Duboin J., 1936) (#ref|b).
Une autre monnaie
À cette nouvelle économie qui n'est plus basée
sur l'échange, il faut une nouvelle monnaie qui se substitue
à la monnaie actuelle. C'est la monnaie distributive gagée
sur les richesses produites, proportionnellement à leur empreinte
écologique. C'est une monnaie de consommation qui, par essence,
ne peut pas rapporter d'intérêt, et qui s'annule quand
elle a servi à faire passer un bien ou un service du producteur
au consommateur (comme un ticket de métro ou un billet de
chemin de fer). Elle n'est donc qu'un pouvoir d'achat et son nom
vient de ce que c'est là sa seule fonction.
Il n'y a aucun obstacle technique à la mise en place de
la monnaie distributive : le montant de la masse monétaire
émise pendant une période donnée est égal
au prix total des biens mis à la vente. Ainsi, à toute
nouvelle production correspond l'émission d'une nouvelle
quantité de monnaie. Tous les citoyens ont un compte individuel
qui est périodiquement réapprovisionné. Ces
comptes sont débités à chaque achat, la somme
correspondante étant annulée. Il suffit pour cela
qu'un organisme public soit seul habilité à alimenter
chacun des comptes personnels. La plupart des commerçants
sont déjà équipés de machines qui débitent
les comptes en lisant une carte à puce. Certains, en France,
sont même équipés de nouvelles machines permettant
de traiter des achats de très faible valeur (pain, journaux,
...) dans le cadre de l'expérimentation actuellement en cours
de ce que l'on appelle le « porte-monnaie électronique
».
D'autre part, les processus de création monétaire
et d'annulation de crédit sont des opérations classiques;
les banque|banques les pratiquent tous les jours : elles ouvrent
un crédit par un simple jeu d'écriture, c'est-à-dire
qu'elles enregistrent dans un ordinateur le montant des sommes «
prêtées » et elles annulent les crédits
correspondant, lorsque leurs clients les remboursent, par un autre
jeu d'écriture comptable (en tapant un signe - sur leur clavier
d'ordinateur). La différence est que dans le système
actuel ces moyens sont le privilège des banques, qui créent
la monnaie selon leurs propres critères et en tirent au passage
un intérêt, sous forme d'un pourcentage ; alors qu'en
économie distributive, ce sont des organismes publics qui
en assument la responsabilité, en exécutant des décisions
prises démocratiquement en prenant en compte des critères
autres que financiers. En outre, ils ne prélèvent
aucun intérêt. »
Voir aussi
* Économie alternative
Webographie
(1) MON, Jean-Pierre, Conférence Pour une conditionnalité
transitoire, Donnée lors du 9ème Congrès International
de BIEN : « Sécurité du revenu : un droit »,
Genève, Bureau International du Travail, 12-14 septembre
2002, (consulté le 30 décembre 2006), < http://economiedistributive.free.fr/spip.php?article40
>
(2) BIEN, Site du Basic income european network (Réseau
européen pour une allocation universelle), (consulté
le 23 septembre 2004), < http://www.etes.ucl.ac.be/BIEN/Index.html
>
(3) Libération, (GRASSET, éd.). Disponible en Pdf,
(page consultée le 30 décembre 2006), < http://economiedistributive.free.fr/spip.php?article28
>
Bibliographie
(a) Robin J., « Travail salarié : deux données
centrales » in La Fin de quel Travail ?, La Grande Relève
n° 972, décembre 1997.
(b) Duboin, Jacques, Libération, Grasset éd., 1936,
p. 234. (3)
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