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1.La désobéissance civile est la violation
délibérée, spécifique, de la loi, au nom
d'un principe social essentiel. Elle devient non seulement justifiable
mais nécessaire quand un droit humain fondamental est menacé
et quand les moyens légaux pour faire respecter ce droit sont
inadaptés. Il peut prendre la forme de violation d'une loi
injuste, de protestation contre une situation injuste ou d'application
symbolique d'une loi ou d'une situation souhaitable. Qu'elle soit
reconnue comme légale, au nom d'un droit constitutionnel ou
international, ou non, son but est toujours de combler la brèche
qui sépare la loi de la justice, dans un processus infini de
développement de la démocratie.
2.Il ne faut reconnaître aucune valeur sociale
à l'obéissance absolue comme à la désobéissance
absolue à la loi. Prôner l'obéissance à
des mauvaises lois, comme façon d'inculquer un certain servilisme
abstrait à « l'ordre légal » ne peut qu'encourager
les tendances déjà très répandues des
citoyens de se courber devant le pouvoir de l'autorité, de
refuser tout affrontement avec l'ordre établi. Exalter l'ordre
légal comme quelque chose d'absolu est la marque du totalitarisme,
et il est possible de créer une atmosphère totalitaire
dans une société qui possède nombre des attributs
de la démocratie. Revendiquer le droit des citoyens à
désobéir à des lois injustes et le devoir de
désobéir à des lois dangereuses, c'est la véritable
essence de la démocratie, qui accepte que le gouvernement
et ses lois ne sont pas sacrés mais qu'ils ne sont que des
instruments, au service de certaines fins : la vie, la liberté,
le bonheur. Les instruments sont accessoires ; pas les fins.
3.La désobéissance civile peut demander
la violation de lois qui ne sont pas injustes par elles-mêmes,
pour protester à propos d'une question que l'on estime très
importante. Dans tous les cas, l'importance de la loi transgressée
doit être mesurée en relation à l'importance
de la question. Une règle du code de la route, transgressée
temporairement, n'est pas aussi importante que la vie d'un enfant
renversé par une auto ; l'occupation de bureaux publics l'est
moins que l'homicide de civils au cours d'une guerre ; l'occupation
illégale d'un bâtiment est moins injuste que le racisme
à l'école. Non seulement des lois déterminées,
mais aussi des situations personnelles peuvent être insupportables
et la transgression de lois normalement acceptables peut agir comme
mode de revendication.
4.Si un acte déterminé de désobéissance
civile est un acte de revendication moralement justifiable, il s'ensuit
que l'emprisonnement de ceux qui l'ont commis est injuste et devrait
être opposé et contesté jusqu'au bout. Celui
qui revendique doit refuser la condamnation autant qu'il refusait
de respecter la règle transgressée. Il peut exister
des cas où les personnes impliquées dans une revendication
peuvent décider d'aller en prison comme moyen de continuer
leur acte de protestation, pour rappeler à leurs concitoyens
l'injustice qu'elles subissent, ce qui ne veut pas dire que l'emprisonnement
fait nécessairement partie d'une règle gouvernant
la désobéissance civile. L'important est que l'esprit
de la revendication soit conservé dans tous les cas, que
l'on aille en prison ou non. Accepter la prison comme acte de pénitence
en accédant aux « règles » signifie retomber
abruptement dans le même esprit de servilité, et minimiser
la gravité de la revendication.
5.Ceux qui s'engagent dans la voie de la désobéissance
civile devraient choisir des tactiques aussi peu violentes que possible,
en accord avec l'efficacité de la revendication et l'importance
du sujet. Le degré de désordre provoqué doit
être raisonnablement en rapport avec l'importance de la question
traitée. La distinction entre tort infligé aux personnes
et tort infligé aux biens doit être primordiale. Les
tactiques appliquées aux biens peuvent comprendre (toujours
: en considérant l'efficacité et l'importance de la
question) : la dévalorisation (comme dans le cas des boycotts),
la dégradation, l'occupation temporaire et l'appropriation
permanente. Dans tous les cas, la force impliquée dans tout
acte de désobéissance civile devrait agir clairement
et spécifiquement sur l'objet de la revendication.
6.Le degré de désordre dans la désobéissance
civile ne devrait pas être mesuré en rapport à
une fausse « paix » supposée exister dans l'ordre
établi, mais contre le vrai désordre et la violence
qui font partie de la vie courante, qui se manifestent ouvertement
au plan international dans des guerres, mais qui se cachent aussi
localement derrière le masque de « l'ordre »
occultant l'injustice de la société actuelle.
7.Lorsque nous réfléchissons sur
la désobéissance civile, nous ne devons jamais oublier
que nos intérêts sont différents de ceux de
l'état et que nous ne devons jamais laisser les agents de
l'état nous persuader du contraire. L'état veut le
pouvoir, l'influence, la richesse, comme des fins en elles-mêmes.
Les individus recherche la santé, la paix, l'activité
créatrice, l'amour. L'état, grâce au pouvoir
et aux richesses qu'il détient, ne manque pas de porte-paroles
pour défendre ses intérêts. Cela signifie que
les citoyens doivent comprendre la nécessité de penser
et d'agir par eux-mêmes ou en accord avec d'autres membres
de la collectivité.
Texte traduit par Herve apo33
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