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Souffrance en France (la banalisation de l'injustice sociale)
Christophe DEJOURS
1998 - LE SEUIL

Origine : http://www.actuchomage.org/modules.php?op=modload&name=PagEd&file=index&page_id=29

Christophe Dejours - psychiatre, professeur au CNAM et directeur du Laboratoire de Psychologie du Travail - n'en est pas à son premier essai autour de ce thème dont il est un éminent spécialiste.
Outil d'émancipation structurant ou source d'aliénation pathogène ? Pour ses bénéficiaires comme pour ses victimes, Dejours estime que le travail est devenu un laboratoire d'expérimentation et d'apprentissage de l'iniquité.
Ici, il a choisi d'étudier la souffrance muette de ceux qui triment, ainsi que celle des chômeurs et des exclus.

Pourquoi, comment souffre-t-on quand on travaille (et quand on ne travaille plus) ? Quelles sont nos limites ? Entre ce qu'on inflige à soi-même et ce qu'on inflige à autrui pour résister et exister dans une société qui se prétend en état de "guerre économique" permanente, l'auteur s'interroge sur notre tolérance croissante à la souffrance et à l'injustice. Pourquoi cette banalisation générale depuis une trentaine d'années ? C'est franchement inquiétant.

Au risque de déranger, Christophe Dejours va très loin et n'hésite pas à faire des parallèles avec les travaux d'Hannah Arendt (Eichmann à Jérusalem) : comment de "braves gens" font mine d'ignorer l'exercice du mal et finissent même par y collaborer, en dépit de leur sens moral ?
La résignation, le déni ou la bêtise n'expliquent pas tout.
Comment se forme l'acceptation collective d'un dispositif d'injustice et d'asservissement ?
Peu à peu, le processus de la banalisation du mal nous est brillamment dévoilé...

Et de conclure que tout système fondé sur la domination, qu'il soit nazi ou néolibéral, ne peut se nourrir que de peurs et de mensonges (au passage, Christophe Dejours égratigne les valeurs viriles : il y a de saines vérités qu'il faut accepter d'entendre).
Passionnant, troublant, cet ouvrage nous rappelle que nous sommes tous responsables.

Sophie HANCART