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Women@work (Belgrade)
PAR LAPEG


Confronter les clichés qui traînent à la réalité ambiante . Oubliez une part de ce que vous pensez des féministes et entrez dans le féminisme pragmatique, intellectuel politique et pratique, surtout pratique parce que les crises successives, les guerres, les viols sont la réalité ambiante…

Confronter les clichés qui traînent à la réalité ambiante . Oubliez une part de ce que vous pensez des féministes et entrez dans le féminisme pragmatique, intellectuel politique et pratique, surtout pratique parce que les crises successives, les guerres, les viols sont la réalité ambiante. Pour beaucoup il faut des raisons pour se se battre sur le terrain de l'égalité des sexes comme si jamais on ne pouvait regresser et revenir sur ce qui a été acquis. Je fais la vaisselle, tu travailles, alors qu'est ce que tu veux de plus. L'antisémitisme et le racisme étaient des histoires passées en france : regardez comme le naturel revient au galop, au détour des élections. Mais, je m'éloigne.

La nébuleuse ex-yougoslave était un territoire où le féminisme avait sa place et un écho dans les années soixante dix. De grandes conférences se sont déroulées par là, le capitalisme d'état égalitariste leur avait fait une place, les études, le travail, l'égalité des femmes. Comme ici, celles qui se battent pour la féminisation des noms se prennent de face la violence installée, quotidienne faite aux autres femmes hors cadre, hors périph, les crises post-titisme, et la guerre, les guerres ont ramenés les associations de femmes sur des terrains de luttes concrètes. Comme si le féminisme ne pouvait qu'être cantonné dans la lutte corporelle -corporatiste : pas pour aujourd'hui et remises à plus tard la redéfinition des genres, au bénéfice de tous, fendues et quequettes comprises. Attaquées, toujours, dans la chair, juste au corps...alors on reprend tout à zéro, on attaque par les fondamentaux.

C'est dans ce contexte que naît Zene Na Delu, (Femmes au travail). Après des année soixante dix actives, d'autre groupes se forment dans l'après Tito, avant les guerres, dans l'axe Lubjana- Zagreb-Belgrade, d'abord en créant des hotlines contre les violences. Les guerres se succèdent avec leur cortège de violences sexuelles, de retour au fourneau et à l'effort de guerre : nourrir soigner, et faire des soldats. Les rangs des associations féministes grossissent au fur et à mesure des exactions : groupes de soutien, soins, mais aussi pacifisme politique, antinationalisme, antifacisme(voir les femmes en noir par exemple). Les groupes de femmes serbes sous embargo se retrouvent isolés. Les aides massives aux groupes croates créent des tensions, les ONG sont omniprésentes, leur argent et leur impérialisme politique aussi. Les liens d'avant guerre se distandent, les communications téléphoniques sont coupées.

« Grâce à Zamir, un serveur alternatif mis en place par Eric, un objecteur de conscience américain vivant en allemagne depuis la guerre du vietnam, tout le monde, associations de resistance, militants se sont mis à l'utilisation intensive du e-mail et du chat. L'e-mail commença à être utilisé partout comme la poste entre nous, Sarajevo, l'etranger, entre les villes et les campagnes, les liens très forts entre les groupes viennent de là. » nous dit Laurence, une américaine co-fondatrice de Zeene na delu. « Les groupes avaient besoin d'argent, de contact et de formations et tout c'est fait comme ça , grâce entre autres aux electronic witches, un projet cyberféministe de formation aux ordis pendant la guerre ».

Les guerres ont accentué les clivages, d'autant plus que comme nous l'explique, la voix pleine de colère Milica, l'autre pillier de Zene na delu, "on nous a délaissé, parce ce qu'on est serbes, alors forcément on est les fascistes, même nous des associations féministes, anti fascistes... on n'a jamais été pour la guerre, on est pacifistes, anti-racistes, tu comprends ?" Et quand finallement on s'interesse à elles, « la plupart des fonds allaient aux hommes dans les associations." Le concept de Zene na delu est parti de là. Plutôt que l'argent que recevaient les associations féministes aillent à des hommes parce que la voiture démarre pas ou que la machine à laver est cassée, faire que le peu d'argent aille à des femmes. " On a alors commencé à faire un réseau économique pour valoriser les femmes et leur travail, les identifier etc... en créant un repertoire de 250 femmes dans différents metiers de services avec des noms feminisés comme doctoresse ou plombière ;-)) »

Et le cyber lab qui nous interesse me direz-vous. Il arrive.

« Les organisation internationales financent surtout des formations couture, coiffure et ordis pour les refugiés. Dans une situation de crise, Zene pense plutot formation pratique, gros oeuvres et moyens de communication et d'information. » rappelle Laurence. Les premiers ateliers de l'assoce seront donc des cours de réparation d'electro menager et de mecanique, de menuiserie et de recyclage et la mise en place d'une imprimerie-maison d'édition « galactika- feministicka » qui publie des traductions et des textes originaux. Puis, elles créent une mailing liste postale et une newsletter qui diffusent à plus de 7000 exemplaires dans toute la région, dans le but de prolonger les liens, coordonner et informer.

Une frange du collectif est plutôt contre les ordis, tendance limite luddite et old-school. Mais bientôt, plusieurs associations se regroupent pour travailler contre le trafic sexuel par l'education et le travail . C'est dans le cadre de ce projet et grâce au dévouement d'une nouvelle generation de féministes enthousiastes et délurées - plusieurs membres du cyber lab font parties de groupes fameux , guess what man : l'ingénieure réseau joue de la guitare- que se monte que se monte le cyberfem-lab . Elles sont jeunes, elles sont sacrément remontées, et elles aiment les ordis...

L'un des principes de Zene na delu, c'est que les cours doivent être gratuits et les formatrices payées. « Les femmes travaillent assez gratuitement comme ça , pour que nous fassions la même chose » ajoute Milica, depuis le petit appart qui accueille le cyber-lab « alors, même si c'est un arrachement pour moi qui vient plutôt de la scène dyi-non profit, je monte des dossiers et je vais chercher les fonds où ils sont. Les ONG sont les seules à ne nous avoir pas lâchés . On a besoin d'argent, on est obligé de faire avec. Il faut que notre activité dure. La situation ici est critique. Toi même tu trouve étonnant le nombre de casinos dans la ville, les traffics ont germé de partout pendant l'embargo et celui des femmes est le plus florissant. Notre truc c'est l'égalité par le travail, si les femmes ont leurs revenus propres elles ne sont plus dépendantes de leur familles, et avec les ordis, on ne veut pas faire des secrétaires, même si c'est par ça qu'on commence, on veut des admins-sys, des ingénieurs réseaux, des programmeuses. »

Les membres du cyber-lab oscillent entre volonté individuelle de réussite personnelle et action-collective-conscience-politique , mues par l'envie de sortir d'une vie de crises successives : « C'est tentant, tout est là , je ne comprends pas ce que tu appelle l'alter-mondialisation », nous dit l'une d'entre elles « nous, on veut aussi des nike, je ne comprends pas quand tu dis que ça te choque la pub mac do à l'aéroport, j'ai des fois deux travail et je suis obligée de rester chez mes parents, surement jusqu'à ce que je me marie, je ne peux pas avoir une vie autonome. J'ai étudié, je suis ingénieure, je gagne 150 € par mois, on ne me propose que des postes de secrétaire. C'est vraiment difficile de rejeter ce qui commence à nous arriver, » dit-elle alors qu'on se balade dans le futur belgrade-chic - toute la ville est en travaux, mais des enseignes connues et des vitrines aux agencements et achalandements familliers commencent à envahir la ville aussi horrible, grise et « stalinienne » que vous pouvez l'imaginer qu'est Belgrade - « on en a marre de ne connaître que les privations ».

Entre la guerre et les crises économico-politiques qui les ont suivies, plus de 500 00 jeunes ont quitté le pays. Pour ceux qui sont restés, il est devenu quasi impossible de partir, et la situation locale est peu brillante, entre une jeunesse marquée par le nationalisme et une situation quotidienne catastrophique, il reste peu de place pour d'autres voix même si B92, la célèbre radio continue à émettre et des centres comme le REX sont toujours hyper actifs. C'est surtout les médias commerciaux qui ont pris le dessus.

A ce tableau idyllique s'ajoute, en ce qui nous concerne ici , la main mise par Microsoft sur l'informatique locale. La tactique habituelle est en marche : les rues sont innondées de logiciels piratés à 1 €, les fondations équipent les associations en matériel compatible avec winwin préinstallé, et les alternatives n'ont que peu le droit de citer. « On apprend l'info sur papier et avant d'en sortir on en voit pas la couleur des ordis » nous raconte l'une des profs du cyber-lab , une espèce de PJ Harvey locale, « Résultat, on connaît tout sur le papier et quand on arrive à avoir des machines on se retrouve dans le monde windows et puis c'est tout. Les logiciels libres ça nous passe pas mal au dessus de la tête, ne serait-ceque parce que vu la dérégulation qui fait rage ici, personne ne paye rien, et est à milles lieux d'imaginer ce qu'est une licence de logiciels, un logiciel libre ou quoi que ce soit. » La firme du gros Bill, a signé en juin 2001,un contrat d'exclusivité avec le gouvernement : en échange de l'engagement de Micro$ à financer à hauteur de 8 millions de dollars le gouvernement s'est engagé à lutter (sic) activement contre le piratage et le marché noir de logiciels et à faire de l'entreprise tentaculaire son conseiller en matière technologiques. Ainsi, c'est toute l'artillerie qui se déploîe : cours, conseils, logiciels, machines, consultants, et spy ware tissent la toile stratégique de l'empire informatique.

« Les logiciels libres, on en entend parler que depuis très peu de temps,mais on est déjà débordées alors on fait avec ce qu'on a, comme on peut , on a vraiment beaucoup de boulot, l'atelier informatique ce n'est qu'une partie de notre travail. Alors oui au libre, mais on a besoin d'apprendre, d'avoir l'occasion de pratiquer ».

Des membres de Zeene na delu et de Constant (Belgique) viendront débattre de ces problématiques de femmes, ordis et travail dans le cadre de la zelig. voir programme

Un atelier organisé grâce au soutien des Pénélopes par 28J/Les Fendues.


Mise en ligne : lundi 2 décembre 2002, par LP
INFORMATION WANT TO BE FREE !!!
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La page origine de "femmes de Belgrade" http://www.zelig.org/article.php3?id_article=18