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Feu nourri du barreau contre le tout-répressif
Ouest France Édition Rennes du lundi 09 juillet 2007

Origine : http://www.rennes.maville.com/Feu-nourri-du-barreau-contre-le-tout-repressif/re/actudet/actu_loc-424283-----_actu.html

Feu nourri du barreau contre le tout-répressif
À l'occasion de la Journée nationale sur la situation dans les prisons et autres lieux de rétention, les avocats ont brossé un tableau très critique.

Invité au point presse du bâtonnier, Jean Bouessel du Bourg, le directeur de la maison d'arrêt Jacques-Cartier, Pascal Vion, s'est retrouvé en situation délicate. Les membres du barreau ont tiré à feu nourri sur une justice qui serait de plus en plus répressive, dénonçant les atteintes à la dignité des personnes. Invité à s'exprimer, le fonctionnaire de l'administration pénitentiaire s'est gardé de tout commentaire. Il est là pour appliquer la loi. Souhaite-t-il que la grâce présidentielle fasse un peu de place dans son établissement ? Là aussi, ce n'est pas à lui d'avoir un avis. Les avocats le font à sa place. « Il y a une tradition qui ne nuit pas à la politique pénale. Je souhaite qu'elle puisse encore s'appliquer », souligne le bâtonnier.

Le centre de rétention : « Mauvais souvenirs »

Garde à vue, détention provisoire, peines plancher, centre de rétention administratif pour les sans-papiers : le panorama du barreau ressemble à un réquisitoire. Le bâtonnier sortant Bondiguel pousse même un coup de gueule quand il aborde le dossier du travail clandestin qui donne lieu à un procès médiatisé. « On dit au donneur d'ordres (Cardinal) qu'il aurait dû faire ce que les autorités n'ont pas fait. C'est de l'arrogance. » L'avocat s'interroge sur l'avenir d'une société qui met l'accent, à chaque nouvelle réforme, sur le tout-répressif. « On ne sait plus travailler sur le volet préventif. Il y a une sorte de désespérance de l'homme. On ne sait plus croire en l'autre. »

Jean Bouessel du Bourg est dans le même registre quand il évoque la construction, à Saint-Jacques-de-la-Lande, d'un bâtiment de 10 millions d'euros, avec le drapeau français au milieu. Son ouverture est prévue le 1er août. « Le centre de rétention administratif est destiné à recevoir des milliers de sans-papiers, dont des enfants. Je vois des baraques avec des grillages. Ça me rappelle de mauvais souvenirs. » L'avocat s'inquiète déjà des coûts de fonctionnement. « Il y aura 60 gendarmes en permanence. Mais les avocats n'auront droit qu'à un seul local pour des missions presque gratuites. »

A Rennes, Mickaël Goubin est spécialisé dans la défense des personnes sans-papiers. Il a vu l'arsenal législatif se renforcer tous les ans. « La garde à vue peut durer sept à huit jours. A notre demande, la préfecture a fini par aménager un local au commissariat. Les gens nous disent que la rétention administrative est parfois pire que la prison. La question est de savoir si la politique mise en oeuvre est conforme à la dignité des personnes et aux conventions internationales. »

Selon les avocats, certains clients innocents gardent des séquelles psychologiques de leurs conditions de garde à vue. « Quand il n'y a plus de place, les gens sont placés en cellules de dégrisement, comme à Fougères. C'est parfois immonde. » Le bâtonnier a déjà écrit au préfet. « Il m'a répondu qu'il menait l'enquête. Ce traitement dégradant n'est pas acceptable. » Président de la commission pénale à l'Ordre des avocats, Fabian Lahaie dénonce les dérives de la détention provisoire, qui « plombe » les conditions d'accueil. « Je suis directeur à Rennes depuis trois ans. J'ai toujours connu une surpopulation. »

Alain THOMAS.