|
Article trouvé sur IndyMédia Nantes
dimanche 16 novembre 2003 :
ÉTUDIANT-E : LUTTE ET ÉMANCIPE TOI !
Grève à l'Université de Rennes 2. Tract du
collectif Huch !
ÉTUDIANT-E LUTTE ET ÉMANCIPE TOI !
Les étudiant-e-s, classe sociale parmis les plus précaires,
s'apprêtent à subir de nouvelles dégradations
de leur condition de vie. Salariat en parallèle aux études,
loyers inaccessibles, système éducatif déjà
fort inégalitaire,… C'est déjà un fait,
même si quelques bribes d'acquis sociaux issues de longues
luttes peuvent rendre ce système moins inacceptable. Mais
aujourd'hui, avec les nouvelles réformes touchant l'enseignement
supérieur, le masque tombe. La machine à rentabiliser
est en route La première réforme concerne l'organisation
pédagogique de l'université. Elle institue, parallèlement
à un système de points ECTS (European Credit Transfert
System) dont l'attribution selon les formations risque fort de dépendre
de leur rentabilité sur le marché du travail, une
organisation autour de trois diplômes : la licence en 3 ans,
le mastaire en 5 et le doctorat en 8. Avec la disparition du DEUG,
il faudra donc désormais 3 ans avant d'obtenir son premier
diplôme, ce qui risque de faire une sélection entre
les étudiant-e-s, beaucoup ayant déjà des difficultés
à assurer le financement de 2 ans d'études. Cette
réforme, issue d'accords européens, préparée
par C.Allègre et J.Lang est actuellement mise en pratique
par leur successeur L.Ferry. Vient aussi une seconde réforme,
encore à l'état de projet de loi sur l'autonomie des
établissements d'enseignement supérieur ou réforme
« de modernisation universitaire ». Son examen, repoussé
aux printemps dernier sous la pression du mouvement social des enseignant-e-s
et du personnel de l'éducation, est imminent. Elle pose un
principe de désengagement financier et pédagogique
de l'État. Ce qui pourrait apparaître comme une victoire
sur un centralisme écrasant n'en est pas une. Loin de là.
Car pour compenser ce retrait financier, le projet de loi prévoit
la possibilité de faire appel aux collectivités territoriales
et au bassin local d'emploi - les politiciens, les patrons et autres
souverains locaux dont le contrôle sur les contenus pédagogiques
s'effectuera par le biais d'un conseil d'orientation stratégique
qui sera consulté pour l'élaboration et la réalisation
du projet et du contrat d'établissement. Et nulle ne doute
- même si le conseil ne sera que « consultatif »
- qu'il sera décisionnel en dernière analyse, puisque
se seront ses membres qui paieront. Le projet prévoit aussi
la possibilité d'augmenter les frais d'inscription, remettant
ainsi en cause le principe de gratuité et d'égalité
des chances. Il est évident que ces deux réformes
sont intimement liées, et qu'elles se soutiennent avec une
cohérence effrayante. On le voit surtout en ce qui concerne
le risque de généralisation de la création
de licences professionnelles conduisant soit directement à
la vie active, soit à un mastaire professionnel à
l'issue duquel l'accès au doctorat sera impossible. Ces diplômes
existent déjà à une certaine échelle
(610 licences professionnelles proposées à la rentrée
2002). Leurs intitulés sont éloquents : « électricité
et électronique option capteurs, instrumentation optique
pour télécommunications » (Lannion). On imagine
ce que seraient devenus les détenteur-trice-s de ce genre
de diplômes si ce principe avait été appliqué
au secteur de la métallurgie en Lorraine dans les années
70… Ne nous égarons pas Contrairement à ce qui
peut s'entendre, ce n'est pas la décentralisation qu'il faut
contester, mais sa gestion capitaliste et l'intrusion supplémentaire
du capital dans l'éducation qui devrait être factrice
d'émancipation, non un moyen de fournir de la viande à
travail. Certain-e-s opposent au système LMD/ECTS une «
véritable harmonisation basée sur un service public
européen d'éducation qui soit égalitaire ».
On en est loin et tant mieux, l'Europe n'étant encore qu'un
conglomérat d'États et qu'une telle vision laisse
présager une Europe comme nouveau pouvoir central, fantasme
de technocrate faisant fi de la réalité des multiples
spécificités au sein des peuples européens.
L'Europe sociale ne peut pas exister, car l'Europe est une construction
purement capitaliste dont la raison d'être est la compétition
économique avec l'Amérique du Nord.
L'actuel mouvement qui se développe à partir de
Rennes II soulève des questions cruciales sur la forme de
la lutte ainsi que sur la riposte constructive à apporter
à l'État. Ensemble construisons l'alternative La question
de la grève a beaucoup fait débat. La grève
est indispensable car elle permet de prendre le temps pour réfléchir,
s'informer, discuter du système, pour construire l'alternative
et lutter ; et pour cela, quelques jours de grève ne suffiront
pas. Mais la grève ne se suffit pas à elle-même
et ne serait rien sans l'occupation et le blocage total de la fac
car, outre un moyen de réveil des consciences, c'est le seul
moyen de pression efficace, et évite de pénaliser
et de sacrifier les grévistes. Cela force à se questionner,
prendre position et aller au bout de ses idées. Mais surtout,
l'occupation est une fin en soi car elle sous-tend la réappropriation
de l'université par les étudiants et engendre des
habitudes d'autogestion, de démocratie directe, de solidarité
et d'auto organisation qui sont de véritables investissements
individuels pour de futures luttes. Il y a donc le difficile (mais
normal) apprentissage de la démocratie, et ce malgré
les tendances anti-démocratiques et stalinoïdes de certain-e-s
syndicalistes. De plus, ne nous faisons pas d'illusions sur les
autres formes d'actions que l'on pourrait nous proposer, comme les
manifs ou les grèves ponctuelles. Celles-ci, aussi importantes
et fréquentes soient-elles, sont des actions épidermiques,
des coups d'épée dans l'eau. L'expérience des
mouvements sociaux du printemps dernier (retraites, éducation,
intermittents,…) en est la preuve la plus proche. De plus,
les médias aux ordres se sont ingéniés à
imposer l'idée d'une sorte de « dictature syndicaliste
» qui prendrait les « honnêtes citoyens »
en otage. Contre cela, il faut une dynamique de lutte qui réveille
les gens et les pousse à quitter leur télévision.
Il ne faut pas non plus compter sur un quelconque salut venant «
d'en haut », des élus et des syndicats co-gestionnaires.
La logique de « démocratie » représentative
étant directement la cause des périls qui pèsent
sur l'éducation. Or, la démocratie c'est agir tous
les jours, comme ce qui se passe actuellement sur Rennes II, ce
n'est pas voter tous les deux ans. Car les élections sont
des délégations aveugles qui mènent à
la dépossession collective (de la fac, des outils de production,
du fruit du labeur des travailleurs, de la prise de décision
à la base, etc.). Le syndicalisme co-gestionnaire n'est qu'un
rouage de ce système, impuissant au retour ultérieur
des réformes sous d'autres formes. Il faut aussi revenir
à l'attitude des non grévistes et autres « solidaires
sur les revendications mais pas sur les formes ». Ces dernier-e-s
se taisent quand l'État prend des décisions sur lesquelles
ils ne peuvent avoir aucun pouvoir. Qui parle alors de « prise
d'otage » quand le flicage et la vidéosurveillance
se généralisent ? Pourquoi ce refus de participer
à un système réellement démocratique,
au sein d'assemblées générales ouvertes à
tou-te-s ? Cette attitude inerte est révélatrice d'habitudes
de consommation de l'éducation c'est à dire la prise
en compte exclusive des intérêts individuels à
court terme (les examens dans quelques semaines). Le mouvement étudiant
sur Rennes II doit s'élargir aux autres catégories
socioprofessionnelles et à l'ensemble de l'éducation
afin d'éviter l'essoufflement et l'enfermement du mouvement
sur sa base arrière (la fac). Une tendance très sensible
dans le mouvement actuel rejette toute syndicalisation et ce du
fait de l'attitude de certain-e-s « petit-e-s chef-e-s »
et de l'image des syndicats co-gestionnaires. C'est un tort car
si la plupart des syndicats ont une attitude néfaste, celle-ci
est à des années-lumière de ce que devraient
être des syndicats, des collectifs, des mouvements basés
sur des pratiques autogestionnaires et d'émancipation des
individus. Ne laissons pas l'éducation à l'État
et au patronat, réapproprions-nous nos savoirs-faire, nos
cultures, nos langues, nos moyens de production et de décision.
UNIVERSITÉ LIBRE SANS ÉTAT NI PATRON ! BREIZH DIZALC'H
HEP STAD NA MESTR !
Le site du Collectif Huch http://www.huch.lautre.net
dimanche 16 novembre 2003
Le lien d'origine : http://nantes.indymedia.org/
|