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Alex Türk (Cnil) : « Je suis inquiet pour l'avenir de la Cnil »

Origine : http://www.01net.com/article/274380.html

A l'occasion de la présentation de son rapport annuel d'activité, le président en exercice de la Cnil, dénonce le manque de moyens financiers et humains dont dispose son organisation.

Propos recueillis par Philippe Crouzillacq , 01net., le 21/04/2005 à 15h00

01net. : La Cnil a récemment autorisé un syndicat professionnel, le Sell (Syndicat des éditeurs de logiciels de loisirs) à traquer les pirates de jeux vidéo sur Internet. De la même manière prévoyez-vous de contrôler les éventuelles dérives de ce type d'organisme dans la recherche d'informations ?

Alex Türk : Tout d'abord ce type de décision fait partie des attributions de la Cnil. Ensuite nous avons maintenant, ce qui est nouveau, une véritable stratégie de contrôle avalisée en session plénière et qui concerne des secteurs sensibles ou en forte progression.

Ces contrôles peuvent être diligentés suite à des plaintes reçues par la Cnil et être effectués de manière inopinée. Dans le domaine du peer-to-peer cela ne s'est pas encore produit mais rien n'est exclu pour l'avenir.

Au cours de l'année 2004, la Cnil a-t-elle donné des avertissements particuliers à telle ou telle institution ou constaté des dérives dans les gestions des fichiers administratifs, ou de police ?

Nous avons notamment adressé cinq nouveaux avertissements à des établissements financiers qui n'avaient pas respecté la réglementation relative au FICP (fichier national des incidents des remboursements des crédits aux particuliers géré par la Banque de France). En comparaison, depuis sa création la Cnil n'avait adressé que 30 avertissements. Je crois à la vertu pédagogique de ce genre de mesure. Et je pense que dans le secteur bancaire le message est passé que l'on ne pouvait plus faire n'importe quoi avec la gestion de tels fichiers.

Quant aux fichiers nationaux de police judiciaire (et plus particulièrement le fichier Stic - Système de traitement des infractions constatées -), une plus grande rigueur dans la mise à jour des données a paru indispensable. Depuis la fin 2004, le ministère de l'Intérieur a mis en oeuvre un programme automatique d'épurement des données touchées par la limite de conservation qui a abouti en octobre et novembre 2004 à la suppression de plus d'un million de données obsolètes. C'était indispensable, car cela touche à la liberté des personnes.

Depuis l'été 2004, la loi attribue de nouveaux pouvoirs à la Cnil (notamment en matière de sanction et de contrôle a posteriori). A-t-elle les moyens de les exercer ?

Nous avons de nouveaux pouvoirs dans les textes. Mais d'un point de vue budgétaire, je suis très inquiet pour l'avenir. Par le passé la Cnil a été puissante, mais, au fil des années, il y a eu comme un endormissement et l'on n'a pas réclamé de nouveaux personnels, comme cela aurait dû être fait.

Or sans moyens supplémentaires, ces pouvoirs resteront lettre morte. Je prendrai deux exemples. Aujourd'hui, nous développons considérablement le nombre des contrôles. De 1978 à 2003, il y en avait une douzaine par an. En 2005, nous tablons sur une centaine d'opérations de ce type. Mais tout cela se fait à effectif constant. Et la Cnil ne dispose toujours que de trois contrôleurs informatiques ce qui est bien insuffisant.

Par ailleurs, l'organisation a aujourd'hui un véritable pouvoir de sanction financier, mais tout cela induit la mise en place d'une formation restreinte de jugement qui soit à même de respecter les droits de la défense en entendant notamment les avocats des structures mises en cause. Or nous n'avons clairement pas les moyens de ces ambitions législatives.

L'une des principales nouveautés définies par la loi est la création d'un CIL ( Correspondant Informatique et libertés ) au sein des entreprises et des collectivités. Serez-vous à même de mettre en place dans le délai ce nouveau service ?

Selon nos informations, les décrets d'application devraient sortir au mois de juin. Les délais seront serrés. Je prévois la mise en place du correspondant des correspondants vers la fin de l'année.

Mais quoi qu'il arrive, nous allons être coincés car au niveau local les gens vont désigner leurs correspondants et il faudra bien structurer tout cela. Par ailleurs, à terme nous prévoyons de déployer des délégations interrégionales, vraisemblablement au nombre de quatre suivant la division des préfixes téléphoniques, qui auront un rôle de coordination au niveau local. C'est aussi pour cela que nous demandons aujourd'hui une augmentation sensible de nos effectifs.

Enfin sur ce dossier du CIL, j'ajouterai une dernière chose : les petites collectivités et les petites entreprises auront la possibilité d'externaliser la gestion de leurs correspondants (communautés de communes pour les collectivités). Quant aux plus grandes structures, elles devront certainement créer un service spécial pour le correspondant CIL.

Quel est aujourd'hui le budget de la Cnil et quelle place occupe-t-elle par rapport à ses équivalents européens ?

Après plus de vingt-cinq ans d'existence, le budget de la Cnil est de 7 millions d'euros, avec un effectif de 80 personnes. A ce titre la situation française est aberrante ! Songez qu'en Allemagne, l'homologue de la Cnil dispose de 400 collaborateurs. Ils sont 240 au Royaume-Uni et même 90 en Roumanie. Il y a trois semaines, j'ai remis au Premier ministre, Jean-Pierre Raffarin, un rapport dans lequel je demande un doublement de nos effectifs sur quatre ans de manière à rejoindre la moyenne basse européenne.

Avez-vous confiance dans le pouvoir politique pour redresser cette situation ?

A vrai dire je n'en sais rien. La réalité c'est qu'aujourd'hui, la Cnil est pauvre, il faut le dire, et que nous sommes dans une situation dangereuse. Pour en avoir parlé avec lui, je sais que Jean-Pierre Raffarin est sensible à cette problématique.

Dans le rapport que nous avons remis à Matignon, j'ai expliqué les choses telles qu'elles sont. Les grands projets publics comme Copernic , l'Administration électronique , le dossier médical personnalisé ( DMP ) ou encore INES, pour la future carte d'identité électronique représentent un investissement public d'un milliard d'euros.

Il s'agit juste de se demander quelle force de contrôle nous devons mettre en place pour garantir le bon déploiement de ces projets au regard de la protection des données personnelles. Pour l'instant, nous attendons une réponse de la part du gouvernement, mais au jour d'aujourd'hui nous sommes toujours dans l'inconnu.


Alex Türk
Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.

http://fr.wikipedia.org/wiki/Alex_T%C3%BCrk

Alex Türk est un homme politique français né le 25 janvier 1950 à Roubaix. Il est sénateur du département du Nord (Nord-Pas-de-Calais) et président de la CNIL. Ancien membre du RPR, il démissionne le 4 septembre 1992 de son parti et est maintenant étiqueté divers droite. Il est marié et a quatre enfants.

Alex Türk a suivi une formation juridique et fini docteur en droit. Il est également diplômé d'études supérieures de droit public et de sciences politiques. En 1978, il est assistant parlementaire, élu au conseil municipal et nommé premier adjoint au maire de Marcq-en-Barœul en 1983. En mars 1983, il est élu au conseil régional de la région Nord-Pas-de-Calais et est réélu à ce poste le 16 mars 1986. En 1985, il devient maître de conférences en droit public à la faculté de droit de l'université de Lille II. Il est également chargé de cours à l'Université catholique de Lille et de l'institut d'études de sciences politiques de Lille de 1991 à 1994. De 1989 à 1995, il fut conseiller municipal de la ville de Lille. il est aussi Conseiller général du Nord (canton : Lille-centre) Il a été élu sénateur le 24 septembre 1992 et réélu le 23 septembre 2001. Il est membre de la Commission sénatoriale des lois depuis 1992 et membre de la CNIL. Il devient vice-président de la CNIL en 2002, puis président depuis le 3 février 2004. Il a également été président de l'autorité de contrôle Schengen de 1995 à 1997, président de l'Autorité de contrôle commune des fichiers d'Europol de 2000 à 2002 et président de l'autorité d'EURODAC depuis décembre 2002.

Ancient Mandat

* Membre de la Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes
* Conseiller régional du Nord-Pas-de-Calais
* Conseiller municipal de Lille

Mandat Actuel
* Conseiller général du Nord (canton : Lille-centre)
* sénateur depuis 1992