Origine : http://www.lematin.ch/nwmatinhome/nwmatinheadactu/actu_suisse/le_plaisir_feminin.html
SEXUALITÉ
Après la télévision alémanique, la TSR
ose le clitoris. «Le clitoris, ce cher inconnu» est
programmé mardi sur TSR2. Les Romands n'y retrouveront pas
les témoignages qui ont tant fait parler en Suisse alémanique,
mais en apprendront beaucoup sur l'organe du plaisir
FANNY OBERSON
08 juillet 2006
Diffusé en Suisse alémanique en décembre dernier,
le documentaire «Klitoris» avait scotché un demi-million
de spectateurs à leur écran. Raflant ainsi près
de 46% des parts de marché et faisant couler beaucoup d'encre
dans la presse. La TSR a programmé le documentaire mardi
à 22 h 35, mais les Romands ne découvriront pas la
version qui a passionné les Alémaniques.
«Le clitoris, ce cher inconnu», oeuvre
originale de Michèle Dominici, réalisé par
Variety Moszinski et Stephen Firmin, avait en effet été
adapté en intégrant des interviews de femmes alémaniques.
«Ces modifications ont été faites sur le documentaire
original, déjà passé sur Arte, et considéré
comme une oeuvre intouchable, explique Irène Challand, responsable
de l'unité des documentaires de la Télévision
romande. Quand nous avons contacté la maison de production,
elle a refusé que cette version «complétée»
soit diffusée.»
Nous serons donc privés des témoignages des Suissesses
qui avaient suscité beaucoup d'attention outre-Sarine. «Ils
étaient très touchants et donnaient au documentaire
une dimension plus humaine», reconnaît Irène
Challand. Ce qui n'enlève rien à la qualité
de l'oeuvre originale, très didactique, et qui fait le bilan
de l'évolution - très lente! - des connaissances sur
l'anatomie et la physiologie sexuelle féminine.
Curieux en effet de constater que dans une société
où le sexe est omniprésent, le clitoris reste très
mal connu. On le découvre en gros plan, on apprend qu'il
mesure en moyenne huit centimètres et est la seule partie
du corps ayant pour fonction unique le plaisir. Un tabou que le
documentaire approche également dans sa dimension historique.
Rien n'avait été entrepris pour explorer l'anatomie
du clitoris avec les moyens de la médecine moderne, ce depuis
plus d'un siècle. Le fonctionnement de la sexualité
féminine commencerait enfin à être étudié
avec sérieux. Ellen Laan, professeur associé de psychologie
clinique à l'Université d'Amsterdam, balaie quelques
préjugés autour de l'orgasme féminin. «Seules
30% des femmes ont des orgasmes au cours des rapports sexuels. Et
donc suggérer que les 70% de femmes qui n'ont pas d'orgasme
au cours des rapports sexuels sont en quelque sorte immatures ou
souffrent d'une dysfonction, c'est une chose que je me garderai
bien de défendre. Pourquoi ne pas dire simplement que la
pénétration n'est pas un moyen vraiment efficace pour
exciter sexuellement les femmes?» La théorie freudienne
en prend pour son grade.
Selon Ellen Laan, toutes les femmes bien portantes peuvent avoir
un orgasme et très vite, il suffit d'apprendre. «La
thérapie de la masturbation dirigée est la seule qui
se soit montrée efficace», affirme-t-elle. Il s'agit
d'enseigner aux femmes qui ne connaissent pas l'orgasme à
se masturber en suivant des instructions pour l'atteindre.
Pour Jo Adams, directrice du Center for HIV and Sexual Health de
Sheffield, il est important que les femmes affirment plus
leur droit au plaisir. Cette éducatrice - surnommée
«l'évangéliste du clitoris» par les journaux
anglais - aborde sans tabou la question du plaisir avec les adolescentes.
«On se heurte toujours à l'idée que si on enseigne
la sexualité aux jeunes, ils vont se précipiter pour
la mettre en pratique, mais toutes les études réalisées
montrent que c'est le contraire.»
Nul doute que les mystères du plaisir féminin en
attireront beaucoup devant le petit écran, tous curieux de
les percer à jour.
Le Matin
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