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La société de décroissance sera-t-elle le nouvel " Empire du moindre mal " (J.-C. Michéa) ?
Brèves remarques à propos de la feinte-dissidence au travers de ses multiples visages verdâtres.
Clément et Sébastien
Octobre 2007


Origine : échanges mails


Que la Méga-machine de croissance au niveau mondial soit tel un bateau ivre sans pilote dont tout le monde se foutrait de savoir l'âge du capitaine ou de la destination finale, cela ne saurait plus étonner. Mais que ceux qui s'autoproclament les opposants à un tel manque de réflexion, soient eux aussi bourrés comme des coings, quand plus simplement ils n'arrêtent pas de se contredire, ce n'est déjà plus étonnant mais toujours de plus en plus comique à mesure que croit la vacuité intellectuelle de votre coach personnel dont le métier est celui de fournir le foin d'une critique d'élevage pour adolescent : la journaliste Sophie Divry.

C'est qu'il faut d'abord admirer la prouesse avec laquelle dans un même et seul numéro du journal officiel de La Décroissance, on organise à grande échelle, le Grand n'importe quoi confusionnel qui sert de critique des sociétés économiques. Ce qui fait déjà du grand virage écologique actuel que l'on nous annonce dans le cadre de la naissance d'un Capitalisme Vert mondialisé ou encore d'une société de décroissance qui n'impliquerait pas de sortir collectivement de l'économie, que le renouvellement par stocks trimestriels des mots du Spectacle. C'est-à-dire le nouvel Empire du moindre mal qui a toujours le discours de la sacro-sainte et supposée nécessité évidente, naturelle et transhistorique (de l'économie, de l'Etat, de la démocratie-marché, de la technique) à la bouche, pour l'appliquer comme seule " politique " ou seule " alternative ", en tant que moindre mal possible. Et dans les habits neufs de la feinte dissidence, la décroissance n'est pas la plus vilaine de ces nouvelles mariées.

Sophie Divry, la journaliste du journal La Décroissance dans son numéro 43 (octobre 2007), dans un seul et même numéro, est ainsi capable (p. 14) d'affirmer que « le dernier livre de Jean-Claude Michéa [L'Empire du moindre mal, Essai sur la civilisation libérale, Flammarion, septembre 2007] (...) est certainement un de ses ouvrages les plus intéressants et les plus aboutis », ou encore de parler d' « une réflexion riche et sensible qui n'oublie pas au passage de fustiger le culte actuel de la Croissance et ses veaux d'or » (puis racontant que finalement l'idée de " l'unité du libéralisme " - libéralisme politique, culturel, économique - serait pertinent), pour avouer finalement page 5, que soit elle n'y a manifestement rien (rien !) compris, soit que son dogmatisme archi-politichien, progressiste, écolo-étatiste, pro-libéralisme politique, lui empêche de changer ses pauvres et indécrottables idées favorables à la poursuite de la délégation générale et illimitée de la vie.

En effet, S. Divry n'a pas peur des hautes sphères de la contradiction et des brumes épaisses de la confusion, quand après s'être dite en accord avec l'ouvrage de J.-C. Michéa (justement intitulé L'Empire du moindre mal, mais le sens du titre lui a peut-être échappé), d'écrire (p.5) dans un de ses vibrants, poignants et inimitables plaidoyers :

" C'est peut-être ringard pour Patrick Viveret, mais c'est pour cela que nous avons depuis plus de deux siècles une représentation politique que nous nommons la démocratie, qui est la moins bonnes formes de gouvernement... à l'exception de toutes les autres. Donc vive le politique et, oui, qu'il prenne sa place ! "

Winston Churchill père de la décroissance (sic !), en effet, un gros réactionnaire de droite, petit soldat de la Première guerre mondiale, où il a donné des ordres absurdes à ses soldats pour aller à la boucherie, sans compter par là suite ses propos " dégueulasses " comme dit notre jeune secrétaire d'Etat à la ville, à propos des juifs, etc.

Et Hormis le côté comique et le plaisir depuis quelques années, de prendre nos « Pavlov » de la décroissance à contre-poils à l'endroit où on sait qu'ils démarrent au quart de tour rangé comme des petits soldats (on peut lire ainsi dans Les Cahiers de l'IEESDS, n°1, déc. 2006, « Pour la décroissance le rôle de l'Etat est essentiel » 1), on ne peut s'empêcher de citer le préambule de Jean-Claude Michéa à justement l'empire du moindre mal de Winston Churchill :

« Winston Churchill disait de la démocratie qu'elle était le pire des régimes " à l'exception de tous les autres ". Il serait difficile de trouver une formulation plus appropriée de l'esprit libéral. Autant ce dernier, en effet, manifeste un optimisme sans faille quant à la capacité des hommes de se rendre " maîtres et possesseurs de la nature ", autant il fait preuve d'un pessimisme profond dès qu'il s'agit d'apprécier leur aptitude morale à édifier par eux-mêmes un monde décent. Comme on le verra plu loin, ce pessimisme trouve son origine dans l'idée, éminemment moderne, selon laquelle c'est précisément la tentation d'instituer, ici-bas, le règne du Bien et de la Vertu, qui constitue la source ultime de tous les maux qui n'ont cessé d'accabler le genre humain. Cette critique de la " tyrannie du bien " a, naturellement, un prix. Elle oblige à considérer la politique moderne comme un art purement négatif : celui de définir, en somme, la moins mauvaise société possible. C'est en ce sens que le libéralisme doit être compris, et se comprend lui-même, comme la politique du moindre mal »

Et c'est là seulement... la toute première page du livre de Michéa, mais notre libérale pessimiste qui nous fout un revolver sur la tempe pour nous asséner la négativité des idéologies modernes des sociétés de croissance, pour qui finalement la démocratie en tant que moins mauvais des régimes, est un moindre mal, n'a peut-être jamais appris à lire, ou du moins, notre dyslexique trentenaire n'a même pas réussi à déchiffrer le titre de l'ouvrage. Et certains qui publient des livres sur l'art de parler des livres dont on n'a jamais lu... tous nos journalistes, de quelques bords qu'ils soient, ont donc tous les mêmes principes déontologiques.

L'ouvrage de Michéa, au contraire de la soupe écologiste et décroissante (et dans son ouvrage, quand il parle de la décroissance, il ne cite que l'ouvrage de S. Latouche Le Pari de la décroissance malgré toutes les ambiguïtés et contradictions de l'oeuvre stimulante de Latouche -, et " les petits collectifs de la décroissance "), montre au contraire l'unité des libéralismes, pour montrer que le projet des Lumières (le libéralisme politique et culturel) que défendent nos décroissants en chef (au travers de l'universalisme, de « l'étatisme démocratique et républicain », de la délégation générale de la vie qu'incarne la représentation politique, de l'attachement à la supposé dimension évidente, naturelle et transhistorique de l'économie, etc.), est justement celui du libéralisme économique. L'univers intellectuel et philosophique qui encore au XVIIè et XVIIIè siècles ne fait seulement que penser et imaginer l'homme sous les traits d'un égoïsme calculateur, s'incarne alors particulièrement dans les années 1920 dans la réalité sociale réagencée par la place totale qu'a pris l'échange au dedans de nos vies, en tant qu' « abstraction réelle », et que décrit pour la première fois G. Lukacs au travers du concept de « réification » 2 : c'est alors « la base qui rejoint son propre concept » en formant les sociétés de croissance mondialisées. Et la boucle est bouclée.

L'imaginaire des culottes-courtes de l'opposition simulée aux nuisances est donc bien celui que décrit Michéa, l'idée qui fonde la philosophie politique moderne : une anthropologie pessimiste née dans le contexte du XVIe et du XVIIe siècle, lors des guerres européennes de religion, et pour qui par nature, par essence, l'homme est un loup pour l'homme. Dans le Léviathan de Hobbes, la justification de la monarchie absolue et de l'Etat, passait déjà par une vision de l'homme tel un Robinson Crusoë, séparé des autres et centré sur l'utilitarisme et l'égoïsme de son comportement supposé naturel. Et tous les partisans du moindre mal étatique, politicien, technicien, nécro-technologique ou économique, ont finalement comme fondement cette vision atomisée de nos existences 3. Le Léviathan de Hobbes, comme toutes les justifications politiques des Lumières (despotisme éclairé de Voltaire, Diderot, etc), ont pour fondements cette vision ultra-pessimiste de l'homme : Sans l'Etat, sans le Droit, sans l'économie, sans le Progrès, l'homme est un loup pour l'homme, car il est travaillé seulement par ses passions égoïstes, ses intérêts mesquins, etc, tout ce qui fonde l'utilitarisme économique et le libéralisme utilitariste politique (Droit, Etat libéral, politiques publiques qui se font toujours dans le dos des individus vivants, etc.), qui voit dans cette anthropologie pessimiste sa profonde unité, comme le montrait déjà Michéa : « Dans les deux cas, l'Etat républicain et le Marché libéral (c'est-à-dire les deux développements, à la fois opposés et complémentaires du postulat individualiste moderne) fondent leur légitimité essentielle sur une capacité proclamée à assurer enfin la paix civile et la concorde des esprits » 4. « C'est pourquoi ni le Droit, ni l'Economie ne peuvent jamais, si nécessaires et émancipateurs soient- ils par ailleurs, constituer le point de départ philosophique ou la base pratique d'une communauté véritablement libre, c'est-à-dire d'une communauté d'individus dont l'autonomie ne trouve pas ses conditions de possibilité dans leur atomisation » 5.

Et oui, comme l'a dit Churchill, on est tellement mauvais nous les humains aux dents pointues et aux yeux gorgés de sang, que la démocratie est pour nous, un moindre mal. Vos papiers ! Circulez, il n'y a plus rien à voir ! C'est là dans le Meilleur des mondes possible qui sert d'organisation mondiale de la survie, la politique de la nécessité 6 qui sert de seule politique possible. Et toute la justification de l'ORDRE Etabli (économique, politique, technique, écologiste, etc.) fonctionne sur le regain incessant de ce refrain pessimiste là. C'est ainsi que la grande mue écologiste actuelle au sein de la Méga-machine mondiale nous fait toujours passer les politiques écologiques tant espérées comme l'ultime moindre mal pour faire perdurer l'administration industrialisée des nuisances, pour que l'on puisse continuer à vivre dans le confort des sociétés de consommation, pour plus directement organiser la survie. Toute politique est n'est plus qu'une politique de la nécessité, un moindre mal. Et tous les écologistes ont cette politique de la nécessité (éco-taxes, principe pollueurs-payeurs, législations écologiques, revenu minimum garanti, vélib', politiques publiques écologiques, internalisation des coûts écologiques, etc.), dans le rétroviseur, des Verts au comique PPLD, en passant par la faune biodiverse et variée des associations écologistes. Tout le monde ne réfléchie que sous les catégories de la « civilisation libérale », de l'administration des simples choses, sous le soleil de la gestion et de la maintenance écologiste des sociétés de croissance au travers de politiques publiques mondiales, fédérales, étatiques, territoriales. Vous avez parlé de " joie de vivre "... ? alors que tout, sous cette anthropologie pessimiste de l'homme, transpire la mort !

Qu'en particulier nos décroissants en chef partagent cette anthropologie pessimiste qui est au fondement des sociétés de croissance, il nous suffit de lire la très comique BD il est vrai - dans le journal La Décroissance de « Steph le décroissant » de Druilhe (qui a dans son art du talent, mais hélas rien dans la tête, ou alors simplement la soupe idéologique qui sert de justification aux sociétés de croissance), qui illustre au plus haut point quel sont ces présupposés anthropologiques que partagent finalement Attali, Strauss-Khan, Sarkozy, Greenspan, Goshn, Al Gore, Chevenement, Divry, Cassen, Hulot, Taylor, Debray, et toute la bande des paumés de l'altermondialisme, etc. Cette BD (La Décroissance, n°43, octobre 2007, p. 12-13) reprend exactement, à la caricature, cet imaginaire ultra-pessimiste et nous dit : voyez sans Etat, sans le Léviathan, sans l'économie, sans le progrès et le « phénomène technique » (au sens d'Ellul) ce que serait la nature humaine, voilà l'homme à l'état de nature, Ecce Homo : un loup pour l'homme, une bande d'abrutis où règne mafia, pouvoir arbitraire, vie sanglante, quasi animale, loi du plus fort, guerres de tous contre tous, etc. Or croirait lire Hobbes, Robespierre et sa nécessité symbolique d'Etat, etc ! Et Druilhe-le-dessinateur non seulement reprend les arrières odeurs de la propagande coloniale (on croirait lire Tintin au Congo du colonialiste repenti Hergé) quand il donne pour exemple de ce supposé état de nature de l'homme pour le situer (té allez au hasard !) en Afrique (terre des " sauvages " à qui il faut apporter la civilisation !), mais reprend pour argumentation l'idée que finalement sans l'Etat, justement, l'humanité ne serait qu'une bande de connards sanguinaires, des incapables, des moins que rien, des pauvres larves à côté de laquelle la « civilisation des moeurs » (N. Elias) et le « développement » serait passé. Ce n'est plus la guerre de religion qui fonde l'imaginaire et l'inconscient politique d'un imbécile comme Druilhe, comme pour les libéraux du XVIIe siècle, c'est l'Afrique telle qu'on la lui présente le soir au 20h avachi devant sa télévision. (alors que tous les spécialistes de l'Afrique nous disent que cette image télévisée de l'Afrique c'est là une énorme déformation de la réalité : cf. pour exemples récents le coups de gueule de Sylvie Brunel dans le magazine L'Histoire été 2007 - à propos du Darfour, ou encore L'Autre Afrique de S. Latouche, qui montre justement que dans l'informel, ce n'est jamais cette guerre générale de loups, qui se réalise, mais l'entraide, l'auto-organisation, la coopération, le système D, etc). Et n'en parlons même pas, la lumière-basse-réflexion qu'est notre dessinateur préféré ne connaît évidemment pas les travaux de Sahlins, Clastres (La Société contre l'Etat), Dumont, etc... Et que dire de ce que George Orwell appelle la " common decency ", cette fierté et cette dignité d'être malgré tout encore des vivants alors que ici, là-bas comme ailleurs règne la mort des représentations économiques tout autour de nous. Non c'est donc entendu, à " l'état de nature ", l'humain est forcément un sauvage au couteau dans les dents. Même au pays des " décroissants ", les pires stéréotypes et autres représentations sociales dignes de l'exposition coloniale de 1931 et qui fondent le progressisme historique n'imaginant l'histoire que sous la forme de la Grande Marche Royale du Progrès, colonisent encore et vraiment de la manière la plus grossière, les imaginaires.

On nage donc là en plein dans l'imaginaire des sociétés de croissance. Et ceux qui nous font rire quand ils prétendent s'opposer à celles-ci, ont exactement le même imaginaire que les économistes, les penseurs libéraux, les néo-managers ou les nécroscientifiques : une vision ultra-pessimiste de l'homme qui fait du seul monde possible la nécessité d'un moindre mal, tellement l'homme c'est le mal à l'état pur. Voilà " l'opposition " qu'ils veulent mener, une opposition interne au cadre de toujours le même imaginaire pessimiste qu'ils ne sont pas prêts de décoloniser. Voilà donc la confiance légendaire que les libéraux de tous bords (politiques, économistes, décroissants en chef, policiers écologistes, etc) ont en l'homme, voilà comment ils nous pensent pour toujours mieux nous contrôler, nous biffer, nous éplucher, nous " moraliser ", nous foutre un flic de l'écologie politique derrière la porte.

On savait que les décroissants n'étaient que les clowns de la critique de la croissance, mais dans la pleine lumière de l'organisation médiatique des contradictions confusionnelles dans un seul et même numéro, on comprend que la situation n'a plus rien de comique, elle fait plutôt froid dans le dos comme toute l'écologie politique, c'est-à-dire l'écologie qui ne sait penser

qu'au travers des catégories de la civilisation libérale 7- tellement elle baigne dans toujours le même imaginaire croissanciste, quand finalement elle n'est peut-être que la réalité pathétique et ordinaire de cette vacuité, de cette nullité et de ce vide sidéral de la réflexion qui nous promet toujours un revolver sur la tempe, le Meilleur des mondes possible.

On nous le dit partout, la société de décroissance sera le nouvel Empire du moindre mal.

Clément et Sébastien, 10 octobre 2007.


Notes :

1 Voir « Paul Ariès vu de près : la décroissance doit elle rentrer dans le moule politique ? »

http://www.decroissance.info/La-decroissance-doit-elle-rentrer

ou encore le texte de Catherine Tarral « La Décroissance, l'économie et l'Etat »

http://www.decroissance.info/La-decroissance-et-Francois

On pourra également lire une critique récente de nos éco-tartuffes du Contre-Grenelle de l'environnement sous la plume de Jean-Pierre Tertrais, « Grenelle de l'environnement. Com' et tartufades, chronique d'un échec annoncé », Le Monde libertaire, n°1488, du 4 au 10 octobre 2007, p. 11-13
: « Faudrait-il, pour autant, cautionner la tenue, le 6 octobre prochain, du `` contre-sommet de l'écologie '' à Lyon, organisé par La Décroissance (...) ? Faudrait-il faire confiance à ceux qui aimeraient limiter la décroissance à des interrogations, à un contre-pouvoir, au nom d'une méfiance à l'égard de l'idéologie, à ceux qui lançaient un appel des Etats généraux de la `` décroissance équitable '' en vue... des élections présidentielles et législatives de 2007 : à ceux qui feignent de croire que l'action régulatrice et redistributrice de l'Etat... pour justifier leurs ambitions, à ceux qui affirment que `` la société croissanciste finira par sombrer, minée de l'intérieur '' (Paul Ariès) ce qui les dispense de s'impliquer dans une action révolutionnaire. L'ambiguïté se trouve levée quand on lit, dans Les Cahiers de l'IEESDS (n°1) : `` la décroissance s'inscrit dans une logique de transformation contre une logique de révolution '' et ailleurs `` Pour la décroissance le rôle de l'Etat est essentiel ''. Assez de diversion ! C'est bien le capitalisme en tant que système qui, avec la complicité de l'Etat, a engendré le saccage de l'environnement. La croissance continue [de l'Etat au XXE siècle] que le capitalisme exige pour masquer les inégalités, pour remédier à l'absence de partage des richesses, est responsable du fait que l'empreinte écologique mondiale de l'humanité dépasse aujourd'hui de près de 30% les capacités biologiques de la planète ».

2 G. Lukacs, Histoire et conscience de classe, 1923 (et en particulier les corrections analytiques qu'il donne à son ouvrage dans sa préface de 1967)

3 « Comme les particules libres de Galilée, les Robinsons de Hobbes doivent d'abord être conçus comme des unités destinées à être additionnées, chacune d'elles pouvant être équilibrée par un agrégat convenable de certaines autres. Hobbes souligne bien que les différences de force physique ou de talent sont négligeables : plusieurs hommes peuvent s'allier contre un seul. Vus du point de vue de la souveraineté absolue, ces Robinsons, si féroces soient-ils, ne sont que des grains de sable, des unités de convoitise, des boules de billard pathétiques se faisant la guerre, que chaque effort pour se différencier enlise encore plus dans une grande équivalence. Si le Souverain peut prétendre s'identifier à un centre de coercition absolue, c'est parce qu'il fonctionne d'abord comme horizon-opérateur qui " met en perspective ", qui fabrique d'emblée de l'homogène pour discerner ensuite et distribuer les distinctions. Ce qui est crucial ici, c'est la capacité du Souverain à tirer parti d'un état de contingence mécanique pour le transformer en champ d'équivalence. », Gilles Châtelet, Vivre et penser comme des porcs, De l'incitation à l'envie et à l'ennui dans les démocraties-marchés, Gallimard, 2004, p. 51-52.

4 J.-C. Michéa, Impasse Adam Smith. Brèves remarques sur l'impossibilité de dépasser le capitalisme sur sa gauche, Climats, 2002, p. 61.

5 J. C. Michéa, op. Cit., p. 78.

6 cf. aussi J. Ellul, L'illusion politique qui montre bien que toute politique publique est par la force des choses, une solution technique ; voir aussi le groupe allemand Krisis (A. Jappe, R. Kurz, etc), qui démontre que toutes politiques alternatives a forcément besoin de la forme-valeur, et donc du capitalisme, pour mener sa supposée lutte anticapitaliste, et qui donc se réclame non pas d'un « anti-politisme », mais d'une anti-politique publique. Cf. le texte de Anselm Jappe, « La politique n'est pas la solution » dans Les Aventures de la marchandise. Pour une nouvelle critique de la valeur : http://www.decroissance.info/La-politique-n-est-pas-la-solution

7 On verra pour une première mise en garde contre la tentation de l'écologie politique, Bernard Charbonneau, Le Feu Vert. Auto-critique du mouvement écologique (bientôt republié).