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Démission des dirigeants d'Otor, en guerre contre leur actionnaire
Jacques Follorou
Le Monde

Origine : http://www.bcarayon-ie.com/articles/050323Monde.html


a bagarre féroce qui oppose, depuis 2001, les dirigeants du papetier français Otor et son actionnaire minoritaire, le fonds d'investissement américain Carlyle, connaît un nouvel épisode. Le PDG du groupe, Jean-Yves Bacques, et sa directrice générale, Michèle Bouvier, ont annoncé, lundi 21 mars, s'être démis de leurs mandats "jusqu'à la résolution du conflit".

Le conseil d'administration a désigné Fabien Chalandon, banquier conseil d'Otor, en qualité de président du conseil d'administration. Jean-Marie Paultes, directeur général délégué, présent dans le groupe depuis 1988, devient directeur général responsable de la gestion opérationnelle du groupe. Selon les deux démissionnaires, cette décision "devrait permettre de traiter séparément la gestion opérationnelle de l'entreprise et le règlement des conflits entre les actionnaires".

Début 2000, Otor faisait face à de graves difficultés financières. Pour sortir du gouffre, l'entreprise opte pour l'entrée de Carlyle, qui investit 46 millions d'euros. En contrepartie, la PME française signe un contrat d'objectif. Celui-ci ne sera pas atteint, entraînant, comme le stipulait le pacte, la demande de conversion anticipée des obligations en actions donnant à Carlyle les clés de la société.

Cette issue, inacceptable pour M. Bacques et Mme Bouvier, va déclencher une véritable guérilla procédurale dont l'écho aura autant plus d'ampleur que les dirigeants d'Otor placent le débat sur le terrain de la défense des intérêts économiques français face à la volonté du complexe militaro-industriel Carlyle de faire main basse sur des actifs français sensibles.

Les dirigeants d'Otor déposent un recours devant le tribunal arbitral, compétent pour les litiges entre actionnaires, pour casser un pacte qu'ils jugent léonin. Le jugement doit être rendu le 31 mars. Ils font appel à des cabinets de lobbying et d'intelligence économique pour tenter de déstabiliser Carlyle. Ils obtiennent le soutien du député (UMP) du Tarn, Bernard Carayon, auteur d'un rapport sur l'intelligence économique.

MÉTHODES BRUTALES
Ces cabinets portent même le conflit devant la justice américaine, qui doit rendre son avis fin mars, en accusant le fonds américain de collusion avec le Crédit lyonnais. Ils ont sollicité, pour ce faire, les conseils de François Marland, homme d'affaires français dont les déclarations auprès de l'avocat américain Gary Fontana sont à l'origine de la coûteuse affaire Executive Life. M. Fontana acceptera de porter la défense d'Otor.

Carlyle, qui n'a jamais nié le caractère brutal de ses méthodes pour s'emparer légalement d'actifs industriels, a réagi. Déclarant, tout d'abord, qu'il réclamait son dû puisque les "objectifs n'avaient pas été atteints", le directeur général de Carlyle Europe, Jean-Pierre Millet, a été épaulé par divers conseils, dont l'agence de communication DGM.

Enfin, Carlyle s'est constitué partie civile dans le volet pénal de cette affaire. M. Bacques et Mme Bouvier sont, en effet, poursuivis, à Paris, depuis le 9 décembre, pour "abus de biens sociaux et usage de faux". On leur reproche d'avoir fait payer par Otor une partie de la campagne menée contre l'un de leurs actionnaires, Carlyle.

Jacques Follorou
Article paru dans l'édition du 23.03.05