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Introduction provisoire à la problématique d'enCOmmUNS
par Jean-Paul 'Patlotch' Chabard, alias Henri Lassagne
POUR UNE AUTOPRAXIS d'EMANCIPATION
Pour une culture et un langage de rupture (le et la politique)


Origine site de l'auteur : http://patlotch.free.fr/text/text/1e9b5431-718.html

Lien du texte complet : http://patlotch.free.fr/text/text/4bb419cb-28.html

Le contact de l'AUTEUR : patlotch@free.fr <patlotch@free.fr>


Date: 10 Mars 2004
S ubject: [multitudes-infos] Pour une autopraxis d'émancipation

Introduction provisoire à la problématique d'enCOmmUNS
par Jean-Paul 'Patlotch' Chabard, alias Henri Lassagne

POUR UNE AUTOPRAXIS d'EMANCIPATION
Pour une culture et un langage de rupture (le et la politique)


La nécessité d'une culture politique de rupture et d'émancipation

Ceux qui veulent l'émancipation humaine ont à résoudre ensemble un problème majeur : élaborer et mettre en oeuvre une stratégie commune de changement. Une majorité de l'humanité souffre, de multiples formes d'exploitations, d'oppressions, de guerres, d'aliénations. La vie sur la planète est menacée. Partout la situation porte de nouveaux périls dans l'état de guerre sociale délibérée qu'organisent les puissants. L'idée même que des solutions puissent exister relève pour la plupart d'un rêve irréalisable, d'une utopie.

Quand on n'y croit plus, quand on ne sait plus au juste comment faire, il est bien difficile de s'y engager. A considérer la profondeur des maux dans la civilisation, les résistances qui s'organisent sous toutes latitudes paraissent bien faibles pour en éradiquer les causes. Ces luttes semblent déboussolées, manquer de cohésion et de puissance. Voire.

Quoiqu'il en soit, un tâche s'impose, partant des réalités concrètes et de leurs analyses, pour dessiner les modalités théorico-pratiques d'une transformation sociale radicale, c'est-à-dire d'élaborer, en termes marxiens, une praxis, une nouvelle culture politique de rupture (1)

Le besoin d'un langage commun : les mots pour le dire

La pensée révolutionnaire a perdu, historiquement, une guerre des mots. La culture commune du changement passera par l'appropriation d'un langage commun, qui traduise la subjectivité collective (2), les besoins et désirs de changement des intéressés, en tant qu'acteurs politiques entrant en scène dans le politique.

La séparation par le langage, qui traduit la séparation politique, revêt plusieurs aspects.

Elle présente une dimension idéologique, liée à la dérive communicationnelle des sociétés post-modernes, et que traduit bien cette formule de Debord dans La société du Spectacle : "le vrai est un moment du faux". Dire les choses sans détours, dans nos sociétés de l'image qui 'donne le change', est mis hors compétition, y compris dans le vocabulaire de la gauche institutionnelle. Comme le non-voyant l'aveugle, les gens ou les citoyens ont remplacé le prolétariat ou la classe ouvrière, dans une ambiguïté qui cache mal la régression conceptuelle et l'abandon des classes exploitées derrière le rejet de notions vidées de pertinence par l'évolution même du capitalisme. Le concept de multitude, par exemple, est d'autant plus séduisant qu'il ratisse large en ne disant rien du rapport social interne au capital : remonter à la philosophie politique pré-marxiste (Spinoza, mAchiavel) ne va pas sans poser quelques problème à la théorie politique, à la praxis.

Ensuite, le vocabulaire théorique, celui de la philosophie politique, coupé d'une praxis politique, est devenu la propriété de cercles universitaires spécialisés, fussent-ils animés des meilleures intentions. Certes, on assiste depuis quelques années à un réveil de la pensée critique, qui accompagne celui des luttes sociales et politiques. Plusieurs mouvances théoriques se structurent autour de corpus théoriques et tentent de promouvoir de nouveaux concepts, des idées d'avant-garde, plus qu'une avant-garde, groupe éclairé guidant "le peuple". Mais on peine à y discerner les enjeux permettant d'élaborer une praxis. C'est d'autant moins aisé que les débats stratégiques sont rares, et les oppositions obscures entre systèmes clos de philosophie politique. La majorité de ceux qui pourraient les éclairer d'expériences concrètes en sont absents, parce qu'ils ne peuvent y accéder. Les comportements sociaux et relationnels des intellectuels radicaux marquent davantage l'appartenance ! identitaire à leur strate sociale qu'ils ne s'adressent à ceux pour qui ils prétendent penser. Cette séparation est comparable à celles qui existent entre niveaux hiérarchiques, entre décideurs ou manageurs et exécutants dans les entreprises, les organisations, administrations, et traditionnellement entre intellectuels supposés penser et manuels supposer faire, dans une qualité totale. Mais l'avantage de ceux qui font est d'avoir un corps, de savoir par le corps et les affects, autant que par le raisonnement. Nos intellectuels radicaux ressemblent le plus souvent à ce qu'ils sont socialement, dans la technostructure et sur la scène du Spectacle, dans sa variante cérébralo-occidentale pluriséculaire. En ce sens, les "gens d'en bas "sont les nègres esclaves d'une technostructure occidentalisée, quelle que soit son obédience politique.

Les mots ne disent que ce qu'on leur fait dire et ce qu'on fait en les disant. Ainsi des concepts de 'classe', 'prolétariat', 'peuple', 'sujet politique' 'souveraineté' etc dont la signification n'est pas figée à tel moment de l'histoire des idées politiques, mais change comme toute langue par son usage dans la vie, pas seulement la vie intellectuelle. De ce point de vue, on n'invente pas un concept nouveau chaque matin. On n'est pas philosophe en jouant sur les mots, en changeant le langage pour donner le change dans le flou d'une praxis introuvable. On ne dévoile ainsi qu'une attitude pré-marxienne, pré-nietzschéenne, et au final idéaliste, utopique.

La séparation entre dirigeants et bases des organisations est ainsi prolongée par celle entre penseurs d'élite et acteurs sociaux. Un fossé d'incompréhension est creusé par les différences de langages, qui reproduisent une forme de domination idéologique par le savoir.

La nécessité d'un langage politique commun devient par conséquent un enjeu incontournable. Il ne s'agit pas de vulgariser, de didactiser après coup, dans une nouvelle vulgate, des théories élaborées par de super-cerveaux collaborant entre eux. Il s'agit de mettre à jour par le langage une collaboration fondée sur la pensée pratique (3), d'être attentif à ce qui, par des mots parfois différents, exprime la même urgence. Nous ne sommes pas ici obsédés par l'invention de concepts nouveaux, mais en quête d'un langage collectif mettant en relation les idées et les êtres, pour favoriser des changements révolutionnaires : le politique doit être fait par tous, non par un.

Traverser les frontières : refuser les systèmes conceptuels clos et coupés des réalités

EnCOmmUNS souhaite traverser les frontières. Cela signifie refuser les systèmes conceptuels clos sur eux-mêmes, incapables de supporter la confrontation avec d'autres. Refuser, derrière les formules à la mode, les faux concepts, non validés par une expérience politique pratique. Refuser les oppositions formalistes qui produisent ces discussions interminables et stériles entre clans s'identifiant davantage à des gourous qu'ils ne font vivre la pensée critique. Oui, les têtes sont encore fécondes d'où sortent les idéalismes, les attitudes sectaires, les croyances politiques relevant de la foi religieuse plus que de la scientificité que voulait Marx. Non, toutes les théories ne sont pas compatibles, mais aucun système totalisant ne convient plus à la complexité, à la multiplicité, à la diversité des situations à affronter. Seules les expérimentations sociales et politiques et leurs analyses peuvent prouver la validité de propositions théoriques, et elles font justement défaut o! u sont trop peu connues. Traverser les frontières entre ceux qu'arment le même désir, c'est aussi traverser les frontières entre leurs langages, et c'est ici que le concept de créolisation du monde (4) forgé par Edouard Glissant, présente un intérêt qui dépasse sa genèse caraïbe et son sens de dépassement des origines forgées par l'histoire de la suprématie occidentale et du colonialisme. Car c'est dans un langage commun que se tisseront les relations humaines qui permettront une subjectivation étendue, une intervention autonome des mouvements populaires au sein même des rapports sociaux en des lieux et moments situés, y compris quand ils paraissent surdéterminés par des causes globales et lointaines.

Qu'entendons-nous par auto-praxis d'émancipation ?

"L'émancipation des travailleurs sera l'oeuvre des travailleurs eux-mêmes". Tel fut un principe de la première Internationale. Tout ce qui a été tenté en ce sens a raté, par erreur, insuffisance, ou trahison. Jamais dans l'Histoire, de fait, la multitude (5) ne s'est constituée comme sujet politique (6) pour soi. Cet échec est patent aux temps où la classe ouvrière -le prolétariat, le "peuple travailleur"- était identifiée comme LE sujet politique de la révolution. Car ces sujets-là ont toujours été violés, dépossédés de leur puissance constituante (7), et celle-ci détournée soit dans l'irréalisme utopique (anarcho-syndicalisme, anarchisme), soit dans la représentation (bolchévisme, parti DE la classe ouvrière puis parti-Etat, ou aspirant à l'Etat quand il n'était pas au pouvoir : le mensonge du siècle, disait Debord (8)). Le réformisme et le bolchévisme ont été les deux faces de la monnaie social-démocrate (au sens originel), de l'étatisme, qui a privé les classes populaire! s de toute maîtrise de leurs combats donc de leur devenir.

Cette question de l'émancipation par les intéressés eux-mêmes émergent pourtant de façon récurrente, sous divers vocables, dans l'histoire des idées comme dans celle des pratiques révolutionnaires. Avec des heures de gloire et d'autres de déboires. Le problème n'est pas tant d'identifier ou de définir le sujet politique de l'émancipation. Si tel était le cas, cela ne signifierait-il pas que certains méritent d'y participer plus que d'autres ? Alors, quelle singulière idée de l'émancipation de chacun pour tous (9)! Pourtant, de l'utopie anarchiste-libertaire à la démocratie absolue (Negri), en passant par le renversement de perspective (9) des situationnistes, ou par l'égalité (10) de Jacques Rancière... dans les revendications d'autonomie ou d'autogestion des années soixante-dix, dans la formulation plus récente d'auto-organisation, empruntée à la biologie et aux théories de la complexité etc. il s'agit bien, sinon d'une même conception philosophico-politique, du moins du mê! me désir pour celui ou celle d'en bas de compter pour un-e, d'y être pour quelque chose. Bien fou qui ferait le délicat en opposant 'en l'air' des 'concepts' avant de les remettre en chantier théorico-pratique, entre leur historicisation et leur déclinaison au présent du futur.

Puisqu'il est question d'un nouveau langage pour une nouvelle culture, il nous a semblé intéressant d'adopter, dans le titre de cette rubrique, ces mots : auto-praxis (12) d'émancipation. Pourquoi ? Tout simplement parce que ce double terme tient, en lui-même et ensemble, les exigences conceptuelles évoquées plus haut : la praxis et l'auto-émancipation des sujets politiques (13). Il condense bien l'objectif prioritaire formulé par Alain Bertho : "la construction d'une nouvelle culture, d'un en-commun subjectif et linguistique qui se constitue à la fois comme la fin et le moyen de la politique" (voir note 1). L'auto-praxis d'émancipation n'est donc pas une praxis au sens de théorie pratique apportée de l'extérieur aux sujets politiques.

Communisme ?

On peut dire, en référence à un autre débat terminologique, que cette auto-praxis collective des sujets politiques de l'émancipation, c'est le moteur du communisme, dans sa double signification de"mouvement réel qui abolit l'état actuel" (14) et d'organisation sociale, comme visée de société à construire, à inventer en marchant, en résistant et créant (15) et non à partir d'un modèle, d'un dogme : le sens de l'histoire n'est pas donné pour celle à faire, au futur, mais à comprendre pour celle à écrire, du passé. Pour autant, le communisme, la révolution, l'égalité etc. ne sont pas dans leurs noms, car en leurs noms on a pu le trahir autant qu'on peut y contribuer sans leurs noms. Aujourd'hui encore, l'usage de ce vieux vocabulaire est problématique, car il signifie pour ceux qui l'utilisent y compris en amis des choses différentes. La maladie infantile perdure, qui se gargarise de grands mots pour se vautrer dans la pureté de l'impuissance face aux réalités de notre temps. D! ans certaines bouches, ces mots ne valent pas plus que les prières dans celles des dévotes, pas plus que les formules magiques des apprentis-sorciers avant-gardistes.

Penser, agir, inventer de nouvelles articulations

Pour élaborer et mettre en oeuvre cette auto-praxis d'émancipation, les obstacles sont les causes mêmes qui empêchent la constitution de ce sujet politique collectif. Ces obstacles se dressent en trois champs : le capital, les pouvoirs, les bio-pouvoirs (16).

Dépasser ou abolir le capitalisme suppose d'abord de la connaître dans ses fondements comme dans ses mutations actuelles (avec les débats sur la valeur, la marchandise, la propriété, le capital cognitif ou informationnel). Contrer les pouvoirs, en ces temps de durcissement liberticides, c'est comprendre mieux l'Etat d'exception (17), abordé dans une rubrique spécifique. Combattre les bio-pouvoirs, c'est saisir mieux leurs fonctionnements pour trouver les moyens de les combattre.

Ces champs sont à investir d'autant de chantiers révolutionnaires. Ils pointent la nécessité pour le mouvement (du communisme) de réaliser en cohésion des articulations nouvelles :
1. Entre le 'faire du/de la politique' et l'institutionnel
2. En faisant de la politique frontalement ou pas contre le capital
3. En détruisant le système idéologique des bio-pouvoirs (la bio-politique)
4. en construisant du neuf social' politiquement, hors les murs et contre les murs. Ces articulations s'inscrivent, dans le mouvement historique de la société entre le droit écrit et le droit naturel, entre les luttes pour l'égalité et les institutions, entre les réformes et la révolution.

Construire et promouvoir jusqu'à l'hégémonie (18) cette nouvelle culture politique de rupture, ce serait réaliser ensemble ces articulations nouvelles, et c'est en quoi consisterait la subjectivation (19) de la multitude comme sujet politique. La première, dynamique, n'a pas lieu de remplacer le second, comme position 'pour soi'. La subjectivation, dans ce sens, serait la tâche d'une fonction politique émancipatrice...

Créer aujourd'hui le rapport de forces favorable, ce serait parvenir à construire en puissance ces articulations, sur toutes les lignes (20) et sans en privilégier une sur, voire contre les autres.

L'articulation entre luttes frontales, luttes 'en fuyant' (marronnages (21), luttes en créant, est indispensable... C'est une erreur de mettre tous les oeufs dans le même panier, que ce soit en privilégiant une stratégie systématique de la fuite, ou, à l'inverse, en chantant dans le vent la messe du frontal, d'une lutte de classes introuvable dans ses apparitions anciennes.

Construire l'en-commun, c'est métisser ces articulations

Cela ne signifie pas un oecuménisme dans lequel toutes les théories et les pratiques politiques seraient compatibles : il y a bien un kampfplatz théorique, autant que des débats de politique pratique et des combats sociaux politiques à mener, avec de prétendus amis qui compliquent les choses : de nouveaux réformismes qui ne disent pas leur nom, par exemple dans citoyennisme, sous les vocables d'ultra-libéralisme, d'altermondialisme, de radicalités. Le devenir hégémonique d'une culture politique de rupture avance aux rythmes de son appropriation et ses expérimentations dans des pratiques social'politiques : l'auto-praxis d'émancipation traduit cette articulation entre pensée et pratique.

Organisation : des structures statiques aux dynamiques auto-organisées

Le problème objectif de la multitude, et le problème subjectif des plus conséquents, de l'en-soi au pour-soi, c'est en résumé de "faire la révolution". Et c'est se trouver, au bout des ratages passés, devant le paradoxe d'avoir à prendre le pouvoir dans une forme pour le transformer en d'autres, par des formes (de combats) qui la préfigurent.

L'autopraxis est donc démocratique dans son essence, par définition. Son appropriation stratégique, hégémonique donc massive, ne peut passer par des modes d'organisation anciens (partis de la classe ouvrière, ou même des multitudes, conçus comme avant-garde organisée...). En effet, la représentation, la délégation de pouvoir l'empêcheraient explicitement de prendre corps : ce sont les butoirs historiques de l'ancienne culture révolutionnaire (bolchévique) d'inspiration républicaine bourgeoise. Ces formes sont inadéquates pour affronter le capitalisme actuel, impuissantes contre les biopouvoirs, dépourvues d'efficience pour intervenir en situations, dans les rapports sociaux, qu'elles ne saisiront jamais aussi bien que ceux qui les vivent, dans comme hors les lieux de travail.

La question de l'organisation doit être renversée de son sens de structure, statique, dans son sens dynamique, d'auto-organisation, tenant la complexité et la multiplicité des lignes de front dans les trois champs (capital, pouvoirs, bio-pouvoirs).

La possibilité pour la multitude de s'auto-organiser est déterminée par l'appropriation de la culture politique adéquate. C'est pourquoi la question de l'organisation, du moins comme structure, ne peut être posée indépendamment de la culture qui doit en déterminer les formes.

Réinventer la fonction politique et le militantisme

C'est donc la fonction politique, la fonction communiste, le militantisme lui-même, qui sont à réinventer parallèlement à l'appropriation de la culture politique de rupture (ça ne signifie pas que tout le monde fait tout ou la même chose, mais qu'une cohésion (22) est à construire où chacun fait ce qu'il peut de mieux là où il doit, c'est-à-dire où il est, un local avant un global).

Néanmoins se pose la question d'organiser, de s'organiser a minima pour élaborer et mettre en oeuvre cette nouvelle conception politique, dans une multiplicité d'affrontements, idéologiques et théoriques, anticapitaliste, institutionnels etc. Dans le même temps, la vie continue. Les luttes frontales, les fuites, les résistances, les revendications radicales sont autant d'expérimentations, aussi importantes et plus déterminantes que la théorie, car elles participent de sa construction, parfois sans le savoir (ex. l'évolution des luttes depuis 1968, la période coordination, déc 95, forums sociaux, intermittents... et l'expérience engrangée au positif comme au négatif, mais s'arrachant aux formes anciennes, par ceux qui se battent et par ceux qui le pensent, frontière à traverser).

En bref

Ce texte introductif a pour objet de cerner quelques thématiques incontournables pour une culture de rupture. Notre site (en construction) et notre liste de diffusion ont pour ambition de contribuer à sa gestation et à son élaboration dans un langage commun, sans pour autant évacuer la personnalité de ceux qui veulent y participer. A partir de ces préoccupations, nous nous proposons, au-delà de nos propres apports et de leurs insistances, de regrouper des textes existants et de faire appel à des contributions sans ambiguïté d'orientations, mais sans frontières identitaires. Ces lieux ne prétendent remplacer ni ceux où se forgent les idées nouvelles, ni ceux où se décident les devenirs concrets : ils veulent articuler les deux. Nous recevons toutes contributions sur notre liste de diffusion : mailto:encommuns-request@ml.free.fr?subject=subscribe. A bientôt :)

(version provisoire du 8 mars 2004)

Patlotch, Troguble, Jean-Paul Chabard, HenriLassagne / Encommuns


1 Culture politique de rupture : Voir Alain BERTHO, L'Etat de guerre, La Dispute, 2003, p. 132 : "La priorité politique de l'heure n'est pas de dessiner de nouvelles perspectives - elles se construiront dans la résistance et la mobilisation - ni de ciseler le nouvel outil historique - le parti -, dans une dialectique des fins et des moyens qui n'a plus cours. La priorité de l'heure est la construction d'une nouvelle culture, d'un en-commun subjectif et linguistique qui se constitue à la fois comme la fin et le moyen de la politique."

Voir aussi Michel VAKALOULIS, Jean-Marie VINCENT, Pierre ZARKA : Vers un nouvel anticapitalisme /Pour une politique d'émancipation. Editions du Félin, 2003, p 168 : "La culture politique qu'il faut promouvoir n'a rien à faire avec une culture de la protestation qui serait un retrait de la politique, elle a tout à voir avec une culture de la rupture des équilibres économiques, sociaux et politiques du monde actuel. (...) La culture de la rupture doit donc dire et dépeindre autrement événements et situations en renversant les perspectives."

2 Subjectivité : Voir par ex, Alain BIHR, Actualiser le communisme, IV- Quelques propositions stratégiques : "Ainsi, les développements récents du capitalisme ont-ils fait mûrir les conditions objectives du communisme ; tout en compromettant, simultanément, certaines de ses conditions subjectives parmi les plus importantes. Si, en dépit de son simplisme apparent, cette conclusion possède une certaine pertinence, elle autorise la conclusion suivante : la tâche essentielle du mouvement révolutionnaire consiste aujourd'hui à reconstituer un moment subjectif à la mesure des possibilités objectives contenues dans le développement actuel du capitalisme."

3 Pensée pratique : que Miguel BENASAYAG distingue de la pensée théorique, dans Du contre-pouvoir (avec Diego SZUTULWARK, 2000).

4 Créolisation du monde : "J&8217;appelle créolisation, la rencontre, l&8217;interférence, le choc, les harmonies et disharmonies entre les cultures, dans la totalité réalisée du monde-terre" Edouard Glissant / le Traité du tout-Monde (Ed. Gallimard, coll. Blanche,1993)

http://www.lehman.cuny.edu/ile.en.ile/paroles/glissant.html

5 Multitude : Nous empruntons ce concept à Empire, de Toni NEGRI et Mickael HARDT, Exils 2000, tout en le conférant ici une validité rétrospective.

6 Sujet politique : la Revue Multitudes prépare un futur numéro sur ce thème, autour des pensées de Toni Negri, Jacques Rancière, etc. Ce dossier est préparé par le philosophe ICHIDA Yoshihiko, traducteur de Louis Althusser au Japon.

7 Puissance constituante : ce concept a été popularisé également par Empire, dont les auteurs l'empruntent à Spinoza. On le trouve également dans les idées de Miguel BENASAYAG.

Debord : voir le numéro spécial de la revue Conjonctures, http://trempet.uqam.ca/Conjonctures/

9 Emancipation : Manifeste du parti communiste, 1848 : le libre développement de chacun est la condition du libre développement de tous (et non pas l'inverse, comme longtemps traduit et mis en oeuvre par le "socialisme réel".

10 Renversement de perspective : tel est le titre du dernier chapitre du Traité de savoir-vivre à l'usage des jeunes générations, de Raoul VANEIGEM, 1967, Gallimard.

11 Egalité : voir Jacques RANCIERE, Aux bords du politique, 1998, Folio 2004, 4ème de couverture

"Parler du politique et non de la politique, c'est indiquer qu'on parle des principes de la loi, du pouvoir et de la communauté et non de la cuisine gouvernementale.

Le politique est la rencontre de deux processus hétérogènes. Le premier est celui du gouvernement. Il consiste à organiser le rassemblement des hommes en communauté et leur consentement et repose sur la distribution hiérarchique des places et des fonctions. Je donnerai à ce processus le nom de police.

Les second est celui de l'égalité. Il consiste dans le jeu des pratiques guidées par la présupposition de l'égalité de n'importe qui avec n'importe qui et par le souci de la vérifier. Le nom le plus propre à désigner ce jeu est celui d'émancipation."

12 Autopraxis : l'invention' de l'autopraxis' passerait, en quelque sorte, d'un concept 'sans nom' (Benbow), à un concept nommé "historische Selbsttätigkeit" par Marx, que Rubel traduit judicieusement par 'autopraxis'.

13 Cohérence du concept d'auto-praxis : si la praxis peut être adéquate, comme 'philosophie politique', au sujet 'classe ouvrière', d'autant mieux que les prolétaires ne sont pas sujets, celui d'autopraxis permet le renversement de perspectives dans la théorie même. On comprendrait alors qu'il n'intéresse pas du tout ceux qui font pouvoirs de leurs savoirs, qu'ils soient dirigeants, militants, ou intellectuels politiques. L'autopraxis casse la représentation comme elle casse la philosophie philosophante : les néo-bolchos comme ceux des intellos qui entretiennent la séparation. C'est évident puisqu'il s'agit, en entrant "tous en scènes", de casser les tréteaux du spectacle. Il n'y a plus de scène : nous y sommes, sans y être, si nous ne le savons pas, si nous y figurons (voir aussi sur le 'rôle', le Vaneigem du Traité de 1967).

14 Communisme : Karl MARX et Friedrich ENGELS, L'Idéologie allemande, Karl MARX et Friedrich ENGELS, L'Idéologie allemande, 1845 (première édition 1926) "Le communisme n'est pour nous ni un état qui doit être créé, ni un idéal sur lequel la réalité devra se régler. Nous appelons communisme le mouvement réel qui abolit l'état actuel. Les conditions de ce mouvement résultent de prémisses actuellement existantes."

15 Résister, c'est créer : titre d'un ouvrage de Florence AUBENAS et Miguel BENASAYAG, La Découverte et Syros, 2002

16 Bio-pouvoirs : concept forgé par Michel FOUCAULT, avec celui de bio-politique, les deux étant repris par les auteurs d'Empire.

17 État d'exception : d'après le concept emprunté à Giorgio AGEMBEN, L'Etat d'exception, Homo Sacer II, Seuil 2003

18 Hégémonie : à la Gramsci, revisitée par la complexité, la multiplicité des singularités en situations diverses composant la multitude)

19 Subjectivation : cf le débat autour de Paolo Virno

20 Lignes : cf Gilles Deleuze

21 Marronnages : voir en rubrique Post-colonialisme et créolisation du monde, concept créé par Edouard Glissant

22 Cohésion : la cohésion de singularités multiples (puissance d'une multitude de sujets...) est différente d'une convergence vers une unité. C'est ce que signifie le pluriel d'encommUNS. cf AUBENAS BENASAYAG


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