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Date: 10 Mars 2004
S ubject: [multitudes-infos] Pour une autopraxis d'émancipation
Introduction provisoire à la problématique d'enCOmmUNS
par Jean-Paul 'Patlotch' Chabard, alias Henri Lassagne
POUR UNE AUTOPRAXIS d'EMANCIPATION
Pour une culture et un langage de rupture (le et la politique)
La nécessité d'une culture politique de rupture et
d'émancipation
Ceux qui veulent l'émancipation humaine ont à résoudre
ensemble un problème majeur : élaborer et mettre en
oeuvre une stratégie commune de changement. Une majorité
de l'humanité souffre, de multiples formes d'exploitations,
d'oppressions, de guerres, d'aliénations. La vie sur la planète
est menacée. Partout la situation porte de nouveaux périls
dans l'état de guerre sociale délibérée
qu'organisent les puissants. L'idée même que des solutions
puissent exister relève pour la plupart d'un rêve irréalisable,
d'une utopie.
Quand on n'y croit plus, quand on ne sait plus au juste comment
faire, il est bien difficile de s'y engager. A considérer
la profondeur des maux dans la civilisation, les résistances
qui s'organisent sous toutes latitudes paraissent bien faibles pour
en éradiquer les causes. Ces luttes semblent déboussolées,
manquer de cohésion et de puissance. Voire.
Quoiqu'il en soit, un tâche s'impose, partant des réalités
concrètes et de leurs analyses, pour dessiner les modalités
théorico-pratiques d'une transformation sociale radicale,
c'est-à-dire d'élaborer, en termes marxiens, une praxis,
une nouvelle culture politique de rupture (1)
Le besoin d'un langage commun : les mots pour le dire
La pensée révolutionnaire a perdu, historiquement,
une guerre des mots. La culture commune du changement passera par
l'appropriation d'un langage commun, qui traduise la subjectivité
collective (2), les besoins et désirs de changement des intéressés,
en tant qu'acteurs politiques entrant en scène dans le politique.
La séparation par le langage, qui traduit la séparation
politique, revêt plusieurs aspects.
Elle présente une dimension idéologique, liée
à la dérive communicationnelle des sociétés
post-modernes, et que traduit bien cette formule de Debord dans
La société du Spectacle : "le vrai est un moment
du faux". Dire les choses sans détours, dans nos sociétés
de l'image qui 'donne le change', est mis hors compétition,
y compris dans le vocabulaire de la gauche institutionnelle. Comme
le non-voyant l'aveugle, les gens ou les citoyens ont remplacé
le prolétariat ou la classe ouvrière, dans une ambiguïté
qui cache mal la régression conceptuelle et l'abandon des
classes exploitées derrière le rejet de notions vidées
de pertinence par l'évolution même du capitalisme.
Le concept de multitude, par exemple, est d'autant plus séduisant
qu'il ratisse large en ne disant rien du rapport social interne
au capital : remonter à la philosophie politique pré-marxiste
(Spinoza, mAchiavel) ne va pas sans poser quelques problème
à la théorie politique, à la praxis.
Ensuite, le vocabulaire théorique, celui de la philosophie
politique, coupé d'une praxis politique, est devenu la propriété
de cercles universitaires spécialisés, fussent-ils
animés des meilleures intentions. Certes, on assiste depuis
quelques années à un réveil de la pensée
critique, qui accompagne celui des luttes sociales et politiques.
Plusieurs mouvances théoriques se structurent autour de corpus
théoriques et tentent de promouvoir de nouveaux concepts,
des idées d'avant-garde, plus qu'une avant-garde, groupe
éclairé guidant "le peuple". Mais on peine
à y discerner les enjeux permettant d'élaborer une
praxis. C'est d'autant moins aisé que les débats stratégiques
sont rares, et les oppositions obscures entre systèmes clos
de philosophie politique. La majorité de ceux qui pourraient
les éclairer d'expériences concrètes en sont
absents, parce qu'ils ne peuvent y accéder. Les comportements
sociaux et relationnels des intellectuels radicaux marquent davantage
l'appartenance ! identitaire à leur strate sociale qu'ils
ne s'adressent à ceux pour qui ils prétendent penser.
Cette séparation est comparable à celles qui existent
entre niveaux hiérarchiques, entre décideurs ou manageurs
et exécutants dans les entreprises, les organisations, administrations,
et traditionnellement entre intellectuels supposés penser
et manuels supposer faire, dans une qualité totale. Mais
l'avantage de ceux qui font est d'avoir un corps, de savoir par
le corps et les affects, autant que par le raisonnement. Nos intellectuels
radicaux ressemblent le plus souvent à ce qu'ils sont socialement,
dans la technostructure et sur la scène du Spectacle, dans
sa variante cérébralo-occidentale pluriséculaire.
En ce sens, les "gens d'en bas "sont les nègres
esclaves d'une technostructure occidentalisée, quelle que
soit son obédience politique.
Les mots ne disent que ce qu'on leur fait dire et ce qu'on fait
en les disant. Ainsi des concepts de 'classe', 'prolétariat',
'peuple', 'sujet politique' 'souveraineté' etc dont la signification
n'est pas figée à tel moment de l'histoire des idées
politiques, mais change comme toute langue par son usage dans la
vie, pas seulement la vie intellectuelle. De ce point de vue, on
n'invente pas un concept nouveau chaque matin. On n'est pas philosophe
en jouant sur les mots, en changeant le langage pour donner le change
dans le flou d'une praxis introuvable. On ne dévoile ainsi
qu'une attitude pré-marxienne, pré-nietzschéenne,
et au final idéaliste, utopique.
La séparation entre dirigeants et bases des organisations
est ainsi prolongée par celle entre penseurs d'élite
et acteurs sociaux. Un fossé d'incompréhension est
creusé par les différences de langages, qui reproduisent
une forme de domination idéologique par le savoir.
La nécessité d'un langage politique commun devient
par conséquent un enjeu incontournable. Il ne s'agit pas
de vulgariser, de didactiser après coup, dans une nouvelle
vulgate, des théories élaborées par de super-cerveaux
collaborant entre eux. Il s'agit de mettre à jour par le
langage une collaboration fondée sur la pensée pratique
(3), d'être attentif à ce qui, par des mots parfois
différents, exprime la même urgence. Nous ne sommes
pas ici obsédés par l'invention de concepts nouveaux,
mais en quête d'un langage collectif mettant en relation les
idées et les êtres, pour favoriser des changements
révolutionnaires : le politique doit être fait par
tous, non par un.
Traverser les frontières : refuser les systèmes
conceptuels clos et coupés des réalités
EnCOmmUNS souhaite traverser les frontières. Cela signifie
refuser les systèmes conceptuels clos sur eux-mêmes,
incapables de supporter la confrontation avec d'autres. Refuser,
derrière les formules à la mode, les faux concepts,
non validés par une expérience politique pratique.
Refuser les oppositions formalistes qui produisent ces discussions
interminables et stériles entre clans s'identifiant davantage
à des gourous qu'ils ne font vivre la pensée critique.
Oui, les têtes sont encore fécondes d'où sortent
les idéalismes, les attitudes sectaires, les croyances politiques
relevant de la foi religieuse plus que de la scientificité
que voulait Marx. Non, toutes les théories ne sont pas compatibles,
mais aucun système totalisant ne convient plus à la
complexité, à la multiplicité, à la
diversité des situations à affronter. Seules les expérimentations
sociales et politiques et leurs analyses peuvent prouver la validité
de propositions théoriques, et elles font justement défaut
o! u sont trop peu connues. Traverser les frontières entre
ceux qu'arment le même désir, c'est aussi traverser
les frontières entre leurs langages, et c'est ici que le
concept de créolisation du monde (4) forgé par Edouard
Glissant, présente un intérêt qui dépasse
sa genèse caraïbe et son sens de dépassement
des origines forgées par l'histoire de la suprématie
occidentale et du colonialisme. Car c'est dans un langage commun
que se tisseront les relations humaines qui permettront une subjectivation
étendue, une intervention autonome des mouvements populaires
au sein même des rapports sociaux en des lieux et moments
situés, y compris quand ils paraissent surdéterminés
par des causes globales et lointaines.
Qu'entendons-nous par auto-praxis d'émancipation ?
"L'émancipation des travailleurs sera l'oeuvre des
travailleurs eux-mêmes". Tel fut un principe de la première
Internationale. Tout ce qui a été tenté en
ce sens a raté, par erreur, insuffisance, ou trahison. Jamais
dans l'Histoire, de fait, la multitude (5) ne s'est constituée
comme sujet politique (6) pour soi. Cet échec est patent
aux temps où la classe ouvrière -le prolétariat,
le "peuple travailleur"- était identifiée
comme LE sujet politique de la révolution. Car ces sujets-là
ont toujours été violés, dépossédés
de leur puissance constituante (7), et celle-ci détournée
soit dans l'irréalisme utopique (anarcho-syndicalisme, anarchisme),
soit dans la représentation (bolchévisme, parti DE
la classe ouvrière puis parti-Etat, ou aspirant à
l'Etat quand il n'était pas au pouvoir : le mensonge du siècle,
disait Debord (8)). Le réformisme et le bolchévisme
ont été les deux faces de la monnaie social-démocrate
(au sens originel), de l'étatisme, qui a privé les
classes populaire! s de toute maîtrise de leurs combats donc
de leur devenir.
Cette question de l'émancipation par les intéressés
eux-mêmes émergent pourtant de façon récurrente,
sous divers vocables, dans l'histoire des idées comme dans
celle des pratiques révolutionnaires. Avec des heures de
gloire et d'autres de déboires. Le problème n'est
pas tant d'identifier ou de définir le sujet politique de
l'émancipation. Si tel était le cas, cela ne signifierait-il
pas que certains méritent d'y participer plus que d'autres
? Alors, quelle singulière idée de l'émancipation
de chacun pour tous (9)! Pourtant, de l'utopie anarchiste-libertaire
à la démocratie absolue (Negri), en passant par le
renversement de perspective (9) des situationnistes, ou par l'égalité
(10) de Jacques Rancière... dans les revendications d'autonomie
ou d'autogestion des années soixante-dix, dans la formulation
plus récente d'auto-organisation, empruntée à
la biologie et aux théories de la complexité etc.
il s'agit bien, sinon d'une même conception philosophico-politique,
du moins du mê! me désir pour celui ou celle d'en bas
de compter pour un-e, d'y être pour quelque chose. Bien fou
qui ferait le délicat en opposant 'en l'air' des 'concepts'
avant de les remettre en chantier théorico-pratique, entre
leur historicisation et leur déclinaison au présent
du futur.
Puisqu'il est question d'un nouveau langage pour une nouvelle culture,
il nous a semblé intéressant d'adopter, dans le titre
de cette rubrique, ces mots : auto-praxis (12) d'émancipation.
Pourquoi ? Tout simplement parce que ce double terme tient, en lui-même
et ensemble, les exigences conceptuelles évoquées
plus haut : la praxis et l'auto-émancipation des sujets politiques
(13). Il condense bien l'objectif prioritaire formulé par
Alain Bertho : "la construction d'une nouvelle culture, d'un
en-commun subjectif et linguistique qui se constitue à la
fois comme la fin et le moyen de la politique" (voir note 1).
L'auto-praxis d'émancipation n'est donc pas une praxis au
sens de théorie pratique apportée de l'extérieur
aux sujets politiques.
Communisme ?
On peut dire, en référence à un autre débat
terminologique, que cette auto-praxis collective des sujets politiques
de l'émancipation, c'est le moteur du communisme, dans sa
double signification de"mouvement réel qui abolit l'état
actuel" (14) et d'organisation sociale, comme visée
de société à construire, à inventer
en marchant, en résistant et créant (15) et non à
partir d'un modèle, d'un dogme : le sens de l'histoire n'est
pas donné pour celle à faire, au futur, mais à
comprendre pour celle à écrire, du passé. Pour
autant, le communisme, la révolution, l'égalité
etc. ne sont pas dans leurs noms, car en leurs noms on a pu le trahir
autant qu'on peut y contribuer sans leurs noms. Aujourd'hui encore,
l'usage de ce vieux vocabulaire est problématique, car il
signifie pour ceux qui l'utilisent y compris en amis des choses
différentes. La maladie infantile perdure, qui se gargarise
de grands mots pour se vautrer dans la pureté de l'impuissance
face aux réalités de notre temps. D! ans certaines
bouches, ces mots ne valent pas plus que les prières dans
celles des dévotes, pas plus que les formules magiques des
apprentis-sorciers avant-gardistes.
Penser, agir, inventer de nouvelles articulations
Pour élaborer et mettre en oeuvre cette auto-praxis d'émancipation,
les obstacles sont les causes mêmes qui empêchent la
constitution de ce sujet politique collectif. Ces obstacles se dressent
en trois champs : le capital, les pouvoirs, les bio-pouvoirs (16).
Dépasser ou abolir le capitalisme suppose d'abord de la
connaître dans ses fondements comme dans ses mutations actuelles
(avec les débats sur la valeur, la marchandise, la propriété,
le capital cognitif ou informationnel). Contrer les pouvoirs, en
ces temps de durcissement liberticides, c'est comprendre mieux l'Etat
d'exception (17), abordé dans une rubrique spécifique.
Combattre les bio-pouvoirs, c'est saisir mieux leurs fonctionnements
pour trouver les moyens de les combattre.
Ces champs sont à investir d'autant de chantiers révolutionnaires.
Ils pointent la nécessité pour le mouvement (du communisme)
de réaliser en cohésion des articulations nouvelles
:
1. Entre le 'faire du/de la politique' et l'institutionnel
2. En faisant de la politique frontalement ou pas contre le capital
3. En détruisant le système idéologique des
bio-pouvoirs (la bio-politique)
4. en construisant du neuf social' politiquement, hors les murs
et contre les murs. Ces articulations s'inscrivent, dans le mouvement
historique de la société entre le droit écrit
et le droit naturel, entre les luttes pour l'égalité
et les institutions, entre les réformes et la révolution.
Construire et promouvoir jusqu'à l'hégémonie
(18) cette nouvelle culture politique de rupture, ce serait réaliser
ensemble ces articulations nouvelles, et c'est en quoi consisterait
la subjectivation (19) de la multitude comme sujet politique. La
première, dynamique, n'a pas lieu de remplacer le second,
comme position 'pour soi'. La subjectivation, dans ce sens, serait
la tâche d'une fonction politique émancipatrice...
Créer aujourd'hui le rapport de forces favorable, ce serait
parvenir à construire en puissance ces articulations, sur
toutes les lignes (20) et sans en privilégier une sur, voire
contre les autres.
L'articulation entre luttes frontales, luttes 'en fuyant' (marronnages
(21), luttes en créant, est indispensable... C'est une erreur
de mettre tous les oeufs dans le même panier, que ce soit
en privilégiant une stratégie systématique
de la fuite, ou, à l'inverse, en chantant dans le vent la
messe du frontal, d'une lutte de classes introuvable dans ses apparitions
anciennes.
Construire l'en-commun, c'est métisser ces articulations
Cela ne signifie pas un oecuménisme dans lequel toutes les
théories et les pratiques politiques seraient compatibles
: il y a bien un kampfplatz théorique, autant que des débats
de politique pratique et des combats sociaux politiques à
mener, avec de prétendus amis qui compliquent les choses
: de nouveaux réformismes qui ne disent pas leur nom, par
exemple dans citoyennisme, sous les vocables d'ultra-libéralisme,
d'altermondialisme, de radicalités. Le devenir hégémonique
d'une culture politique de rupture avance aux rythmes de son appropriation
et ses expérimentations dans des pratiques social'politiques
: l'auto-praxis d'émancipation traduit cette articulation
entre pensée et pratique.
Organisation : des structures statiques aux dynamiques auto-organisées
Le problème objectif de la multitude, et le problème
subjectif des plus conséquents, de l'en-soi au pour-soi,
c'est en résumé de "faire la révolution".
Et c'est se trouver, au bout des ratages passés, devant le
paradoxe d'avoir à prendre le pouvoir dans une forme pour
le transformer en d'autres, par des formes (de combats) qui la préfigurent.
L'autopraxis est donc démocratique dans son essence, par
définition. Son appropriation stratégique, hégémonique
donc massive, ne peut passer par des modes d'organisation anciens
(partis de la classe ouvrière, ou même des multitudes,
conçus comme avant-garde organisée...). En effet,
la représentation, la délégation de pouvoir
l'empêcheraient explicitement de prendre corps : ce sont les
butoirs historiques de l'ancienne culture révolutionnaire
(bolchévique) d'inspiration républicaine bourgeoise.
Ces formes sont inadéquates pour affronter le capitalisme
actuel, impuissantes contre les biopouvoirs, dépourvues d'efficience
pour intervenir en situations, dans les rapports sociaux, qu'elles
ne saisiront jamais aussi bien que ceux qui les vivent, dans comme
hors les lieux de travail.
La question de l'organisation doit être renversée
de son sens de structure, statique, dans son sens dynamique, d'auto-organisation,
tenant la complexité et la multiplicité des lignes
de front dans les trois champs (capital, pouvoirs, bio-pouvoirs).
La possibilité pour la multitude de s'auto-organiser est
déterminée par l'appropriation de la culture politique
adéquate. C'est pourquoi la question de l'organisation, du
moins comme structure, ne peut être posée indépendamment
de la culture qui doit en déterminer les formes.
Réinventer la fonction politique et le militantisme
C'est donc la fonction politique, la fonction communiste, le militantisme
lui-même, qui sont à réinventer parallèlement
à l'appropriation de la culture politique de rupture (ça
ne signifie pas que tout le monde fait tout ou la même chose,
mais qu'une cohésion (22) est à construire où
chacun fait ce qu'il peut de mieux là où il doit,
c'est-à-dire où il est, un local avant un global).
Néanmoins se pose la question d'organiser, de s'organiser
a minima pour élaborer et mettre en oeuvre cette nouvelle
conception politique, dans une multiplicité d'affrontements,
idéologiques et théoriques, anticapitaliste, institutionnels
etc. Dans le même temps, la vie continue. Les luttes frontales,
les fuites, les résistances, les revendications radicales
sont autant d'expérimentations, aussi importantes et plus
déterminantes que la théorie, car elles participent
de sa construction, parfois sans le savoir (ex. l'évolution
des luttes depuis 1968, la période coordination, déc
95, forums sociaux, intermittents... et l'expérience engrangée
au positif comme au négatif, mais s'arrachant aux formes
anciennes, par ceux qui se battent et par ceux qui le pensent, frontière
à traverser).
En bref
Ce texte introductif a pour objet de cerner quelques thématiques
incontournables pour une culture de rupture. Notre site (en construction)
et notre liste de diffusion ont pour ambition de contribuer à
sa gestation et à son élaboration dans un langage
commun, sans pour autant évacuer la personnalité de
ceux qui veulent y participer. A partir de ces préoccupations,
nous nous proposons, au-delà de nos propres apports et de
leurs insistances, de regrouper des textes existants et de faire
appel à des contributions sans ambiguïté d'orientations,
mais sans frontières identitaires. Ces lieux ne prétendent
remplacer ni ceux où se forgent les idées nouvelles,
ni ceux où se décident les devenirs concrets : ils
veulent articuler les deux. Nous recevons toutes contributions sur
notre liste de diffusion : mailto:encommuns-request@ml.free.fr?subject=subscribe.
A bientôt :)
(version provisoire du 8 mars 2004)
Patlotch, Troguble, Jean-Paul Chabard, HenriLassagne / Encommuns
1 Culture politique de rupture : Voir Alain BERTHO, L'Etat de
guerre, La Dispute, 2003, p. 132 : "La priorité politique
de l'heure n'est pas de dessiner de nouvelles perspectives - elles
se construiront dans la résistance et la mobilisation - ni
de ciseler le nouvel outil historique - le parti -, dans une dialectique
des fins et des moyens qui n'a plus cours. La priorité de
l'heure est la construction d'une nouvelle culture, d'un en-commun
subjectif et linguistique qui se constitue à la fois comme
la fin et le moyen de la politique."
Voir aussi Michel VAKALOULIS, Jean-Marie VINCENT, Pierre ZARKA
: Vers un nouvel anticapitalisme /Pour une politique d'émancipation.
Editions du Félin, 2003, p 168 : "La culture politique
qu'il faut promouvoir n'a rien à faire avec une culture de
la protestation qui serait un retrait de la politique, elle a tout
à voir avec une culture de la rupture des équilibres
économiques, sociaux et politiques du monde actuel. (...)
La culture de la rupture doit donc dire et dépeindre autrement
événements et situations en renversant les perspectives."
2 Subjectivité : Voir par ex, Alain BIHR, Actualiser le
communisme, IV- Quelques propositions stratégiques : "Ainsi,
les développements récents du capitalisme ont-ils
fait mûrir les conditions objectives du communisme ; tout
en compromettant, simultanément, certaines de ses conditions
subjectives parmi les plus importantes. Si, en dépit de son
simplisme apparent, cette conclusion possède une certaine
pertinence, elle autorise la conclusion suivante : la tâche
essentielle du mouvement révolutionnaire consiste aujourd'hui
à reconstituer un moment subjectif à la mesure des
possibilités objectives contenues dans le développement
actuel du capitalisme."
3 Pensée pratique : que Miguel BENASAYAG distingue de
la pensée théorique, dans Du contre-pouvoir (avec
Diego SZUTULWARK, 2000).
4 Créolisation du monde : "J&8217;appelle créolisation,
la rencontre, l&8217;interférence, le choc, les harmonies
et disharmonies entre les cultures, dans la totalité réalisée
du monde-terre" Edouard Glissant / le Traité du tout-Monde
(Ed. Gallimard, coll. Blanche,1993)
http://www.lehman.cuny.edu/ile.en.ile/paroles/glissant.html
5 Multitude : Nous empruntons ce concept à Empire, de
Toni NEGRI et Mickael HARDT, Exils 2000, tout en le conférant
ici une validité rétrospective.
6 Sujet politique : la Revue Multitudes prépare un futur
numéro sur ce thème, autour des pensées de
Toni Negri, Jacques Rancière, etc. Ce dossier est préparé
par le philosophe ICHIDA Yoshihiko, traducteur de Louis Althusser
au Japon.
7 Puissance constituante : ce concept a été popularisé
également par Empire, dont les auteurs l'empruntent à
Spinoza. On le trouve également dans les idées de
Miguel BENASAYAG.
Debord : voir le numéro spécial de la revue Conjonctures,
http://trempet.uqam.ca/Conjonctures/
9 Emancipation : Manifeste du parti communiste, 1848 : le libre
développement de chacun est la condition du libre développement
de tous (et non pas l'inverse, comme longtemps traduit et mis en
oeuvre par le "socialisme réel".
10 Renversement de perspective : tel est le titre du dernier
chapitre du Traité de savoir-vivre à l'usage des jeunes
générations, de Raoul VANEIGEM, 1967, Gallimard.
11 Egalité : voir Jacques RANCIERE, Aux bords du politique,
1998, Folio 2004, 4ème de couverture
"Parler du politique et non de la politique, c'est indiquer
qu'on parle des principes de la loi, du pouvoir et de la communauté
et non de la cuisine gouvernementale.
Le politique est la rencontre de deux processus hétérogènes.
Le premier est celui du gouvernement. Il consiste à organiser
le rassemblement des hommes en communauté et leur consentement
et repose sur la distribution hiérarchique des places et
des fonctions. Je donnerai à ce processus le nom de police.
Les second est celui de l'égalité. Il consiste dans
le jeu des pratiques guidées par la présupposition
de l'égalité de n'importe qui avec n'importe qui et
par le souci de la vérifier. Le nom le plus propre à
désigner ce jeu est celui d'émancipation."
12 Autopraxis : l'invention' de l'autopraxis' passerait, en quelque
sorte, d'un concept 'sans nom' (Benbow), à un concept nommé
"historische Selbsttätigkeit" par Marx, que Rubel
traduit judicieusement par 'autopraxis'.
13 Cohérence du concept d'auto-praxis : si la praxis peut
être adéquate, comme 'philosophie politique', au sujet
'classe ouvrière', d'autant mieux que les prolétaires
ne sont pas sujets, celui d'autopraxis permet le renversement de
perspectives dans la théorie même. On comprendrait
alors qu'il n'intéresse pas du tout ceux qui font pouvoirs
de leurs savoirs, qu'ils soient dirigeants, militants, ou intellectuels
politiques. L'autopraxis casse la représentation comme elle
casse la philosophie philosophante : les néo-bolchos comme
ceux des intellos qui entretiennent la séparation. C'est
évident puisqu'il s'agit, en entrant "tous en scènes",
de casser les tréteaux du spectacle. Il n'y a plus de scène
: nous y sommes, sans y être, si nous ne le savons pas, si
nous y figurons (voir aussi sur le 'rôle', le Vaneigem du
Traité de 1967).
14 Communisme : Karl MARX et Friedrich ENGELS, L'Idéologie
allemande, Karl MARX et Friedrich ENGELS, L'Idéologie allemande,
1845 (première édition 1926) "Le communisme n'est
pour nous ni un état qui doit être créé,
ni un idéal sur lequel la réalité devra se
régler. Nous appelons communisme le mouvement réel
qui abolit l'état actuel. Les conditions de ce mouvement
résultent de prémisses actuellement existantes."
15 Résister, c'est créer : titre d'un ouvrage de
Florence AUBENAS et Miguel BENASAYAG, La Découverte et Syros,
2002
16 Bio-pouvoirs : concept forgé par Michel FOUCAULT, avec
celui de bio-politique, les deux étant repris par les auteurs
d'Empire.
17 État d'exception : d'après le concept emprunté
à Giorgio AGEMBEN, L'Etat d'exception, Homo Sacer II, Seuil
2003
18 Hégémonie : à la Gramsci, revisitée
par la complexité, la multiplicité des singularités
en situations diverses composant la multitude)
19 Subjectivation : cf le débat autour de Paolo Virno
20 Lignes : cf Gilles Deleuze
21 Marronnages : voir en rubrique Post-colonialisme et créolisation
du monde, concept créé par Edouard Glissant
22 Cohésion : la cohésion de singularités
multiples (puissance d'une multitude de sujets...) est différente
d'une convergence vers une unité. C'est ce que signifie le
pluriel d'encommUNS. cf AUBENAS BENASAYAG
Le contact de l'AUTEUR : patlotch@free.fr <patlotch @ free.fr>
Origine site de l'auteur : http://patlotch.free.fr/text/text/1e9b5431-718.html
Lien du texte complet : http://patlotch.free.fr/text/text/4bb419cb-28.html
m u l t i t u d e s - i n f o s
Liste transnationale des lecteurs de "Multitudes"
................................
: http://listes.samizdat.net/wws/info/multitudes-infos
Site Web de la revue multitudes : http://multitudes.samizdat.net
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