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origine http://politique.eu.org/archives/2006/02/12.html
L’ouvrage de Thomas Coutrot, Démocratie contre capitalisme
|1|, marque sans doute une étape dans les approches critiques
du capitalisme contemporain. Son point de départ est que,
sous le néolibéralisme, la démocratie perd
chaque jour de sa substance. Elle n’est pas seulement menacée
par « les extrémismes », elle est gangrenée
de l’intérieur. Faire face à la crise démocratique
contemporaine, c’est pour l’auteur promouvoir son élargissement,
jusque dans la sphère économique. Car il n’est
pas vrai que le régime actuel soit le seul où soient
compatibles libertés démocratiques et efficacité
économique. De là le titre de cet ouvrage, écrit
par un économiste et dont l’originalité tient
dans le triple défi qu’il veut relever.
Premièrement déplacer quelque peu l’angle d’attaque.
Ce n’est plus seulement les mécanismes inégalitaires,
l’injustice et la précarisation qu’il convient
de reprocher au système économique, c’est avant
tout sa capacité à éroder en permanence l’ensemble
des avancées démocratiques, à supplanter aux
compromis négociés entre forces sociales un «
exercice unilatéral du pouvoir ». Fondamentalement,
nous dit Coutrot : « le néolibéralisme est une
entreprise de dépolitisation de la politique économique
», il vise à soustraire du débat public tout
choix économique au profit de véritables « lois
d’airain » connues des seules instances indépendantes
de régulation et autres banques centrales... Le projet politique
est là, limpide : mettre à l’abri des revendications
citoyennes l’action des pouvoirs économiques. Ce faisant,
il enclenche et aggrave un processus où la démocratie
s’étiole et où sa légitimité s’effrite.
Dans un contexte « où le néolibéralisme
économique tend à saper les fondements même
du libéralisme politique », la revitalisation démocratique
acquiert une dimension anticapitaliste.
Deuxièmement, faisant sien l’adage : c’est en
forgeant qu’on devient forgeron, ce théoricien, au
lieu de nous proposer un modèle, nous invite à scruter
avec attention les pratiques sociales. Celles qui émergent
dans le sillage de la critique altermondialiste, de la résistance
à l’OMC, des mouvements paysans, de la redynamisation
des activités coopératives et de l’économie
solidaire, de l’intérêt croissant pour le commerce
équitable et le budget participatif. De l’Argentine
à la France, en passant par le Brésil ou les États-Unis,
toutes ces pratiques des mouvements sociaux peuvent être rassemblées
sous le vocable de « résistances économiques
citoyennes ». Son analyse, qui accorde une grande attention
à ces phénomènes émergeants, n’évite
cependant pas de s’interroger sur le diagnostic qu’il
faut porter sur le mouvement ouvrier et syndical classique, à
partir des interrogations majeures du moment, celles de la condition
salariale et de la fin du travail.
Troisièmement, il prend à bras le corps la question
de « l’alternative ». Pas celle qui oscille entre
une social-démocratie convertie au libéralisme et
un social-libéralisme bon teint. Ce dont il est question
c’est bien d’une alternative globale tant sur le plan
de l’organisation économique, que des structures de
propriétés et de contrôle, que des mécanismes
de décisions et de régulation démocratique.
Les impasses du socialisme étatique et l’échec
de la voie soviétique, l’effondrement des États
qui s’en réclamaient ont placé le mouvement
ouvrier et social face à un trou noir. Ainsi, ont été
engloutis, non seulement le socialisme étatique, mais aussi
toutes les conceptions émancipatrices forgées par
deux siècles d’histoire : de l’associationnisme
ouvrier aux courants autogestionnaires en passant par les libertaires
et autres conseillistes. Il y a là un enjeu majeur à
renouer avec ces conceptions, non seulement en termes de débat
intellectuel |2| mais aussi en termes de projet politique. Certes,
on n’est pas à la veille du « grand soir »,
mais redéfinir une perspective d’ensemble permettrait
de consolider et de donner sens à des pratiques sociales
aujourd’hui fort dispersées. Citant Jaurès qui
affirmait en 1900 que si les travailleurs « n’entrevoyaient
pas la possibilité d’une société nouvelle
et plus juste ; s’ils croyaient, s’ils pouvaient croire
à l’éternelle nécessité du système
capitaliste (...) ils renonceraient à redresser le système
d’injustices ». Plaidant, pour que la question de l’alternative
soit posée comme condition du combat quotidien, Coutrot se
mouille et propose de renouer avec le fil d’un courant autogestionnaire,
dans une forme qu’il caractérise de « socialisme
participatif » et dont le chemin serait tracé par une
mobilisation des acquis démocratiques étendus vers
une démocratie économique et participative.
Cette présentation de l’ouvrage est cependant fort
injuste. Car elle risquerait de le faire passer pour une sorte de
fuite en avant idéologique devant les difficultés
des résistances présentes et de la faible prise que
semble avoir les anciens et les nouveaux mouvements sociaux sur
l’ordre des choses. Or la réflexion de Coutrot est
à la fois bien ancrée dans le réel et n’esquive
pas les leçons du passé.
D’abord parce que son livre traduit un investissement de
longue date dans les mouvements sociaux. Économiste militant
- il est membre du conseil scientifique d’Attac -, il a participé
aux divers forums sociaux à l’échelle internationale.
Il est également l’un des animateurs de l’Appel
des économistes pour sortir de la pensée unique et
intervient dans le débat sur les questions économiques
|3|. C’est aussi un chercheur qui tire sa connaissance du
néolibéralisme d’une étude de première
main sur l’entreprise néolibérale |4| et l’organisation
du travail.
Un carburant nommé insécurité
Le premier chapitre pose d’abord une équation fondamentale
: « le déclin de la démocratie [signalé
par exemple par la hausse des abstentions] est étroitement
lié à la montée de l’insécurité
sociale ». Celle-ci, à son tour, favorise la résignation
et la passivité politique des dominés. Cette insécurité
sociale trouve son origine au cœur même de l’entreprise
néolibérale et du déploiement de ces méthodes
de gestion (flexibilité, just in time...) dans un contexte
où rationalisations, fermetures, peuvent impliquer toutes
les catégories de personnel. En dehors de l’entreprise,
le chemin vers l’emploi quand il existe est précaire,
parsemé de contrats à temps partiels ou d’engagements
à durée déterminée.
Cette insécurité permanente se répercute également
dans la vie psychique, affective et familiale à grande échelle.
Il n’y a pas à s’étonner que pour une
part croissante de la population, ceux d’en bas, la politique
soit vécue comme impuissante ou pire comme corrompue. Ce
diagnostic, appuyé par de nombreuses données, conduit
à poser la refonte de la sécurité sociale comme
une condition de la revitalisation démocratique.
Cela débouche sur une série de pistes pour une sécurité
sociale professionnelle qui garantirait à la fois une certaine
continuité de la rémunération dans les situations
de chômage, de mobilité ou de formation et la limitation
du droit de licenciement. Sans glisser dans une fuite en avant que
l’on rencontre chez certains tenants de l’allocation
universelle, ou de la fin de la centralité du travail, les
propositions de Coutrot visent à garantir une sorte de droit
universel (inconditionnel) au revenu et à l’emploi.
Ces mesures s’accompagneraient d’une gestion renouvelée
de ces systèmes par toutes les parties concernées
(entreprises, syndicats, associations, collectivités locales...).
Il établit ainsi un lien très fort entre la gestion
sociale et le contrôle économique. Des instances démocratiques
seraient conduites à prendre position et éventuellement
à contraindre la décision économique qui aujourd’hui
a été mise hors de portée. Une véritable
hérésie pour les tenants de la séparation de
l’économique et du social qui ne voient celui-ci que
comme redistribution des gains obtenus dans la production de richesse.
Résistances économiques
Vient ensuite un bilan très documenté sur une série
de réactions à la montée en puissance de la
dérégulation néolibérale des deux dernières
décennies.
Tout un chapitre prend en compte le mouvement de fond qui a démarré
en 1998, avec la mise en échec par une campagne citoyenne
internationale de l’Ami (Accord multilatéral sur l’investissement)
concocté par l’OCDE |5|. Ce recul a marqué l’entrée
en scène du mouvement altermondialiste et sa jonction avec
les organisations syndicales, comme à l’occasion de
l’opposition à l’AGCS |6|, à la directive
Bolkestein, aux privatisations des services publics.
Cette vaste nébuleuse s’organise d’abord autour
du slogan « le monde n’est pas une marchandise ».
Elle exprime le refus de l’extension de la logique marchande
au vivant, à la culture, à l’ensemble des services
de santé et d’éducation... Mais, Coutrot insiste
sur un autre aspect, celui de l’exigence d’un «
contrôle citoyen de l’économie », véritable
fil rouge que l’on retrouve dans les campagnes et actions
de ces mouvements. On retrouve cette exigence démocratique
du respect de la volonté et des intérêts du
plus grand nombre tant dans la mise en question du rôle des
institutions internationales comme la Banque mondiale, le Fonds
monétaire international, l’Organisation mondiale du
commerce, sans oublier la Banque centrale européenne. Ce
n’est pas seulement le contenu de l’orientation néolibérale
des politiques préconisées qui sont prises sous le
feu de la critique, c’est aussi et avant tout l’absence
de légitimité démocratique de ces instances
pour formuler de tels diktats, sans consultation, sans représentation
et sans légitimité démocratique.
Cette indigence démocratique est nécessaire à
l’avancée des thèses néolibérales.
Et l’auteur en fournit une illustration tout à fait
pertinente à partir de plusieurs points, parfois très
controversés, comme la libéralisation de l’agriculture
ou l’ouverture des marchés occidentaux aux produits
du Sud, ou à l’introduction des cultures sur base des
OGM. La réponse aux discours - souvent hypocrite - de ces
instances internationales pour un libre-échange sans rivage
ne réside pas dans la négation de la thèse
de l’adversaire. Contrairement à ce qu’elles
veulent nous faire croire, ce n’est pas une question de principes,
mais bien une question de choix politiques. « Plutôt
que de condamner les échanges commerciaux par principe, le
problème est d’en maîtriser la dynamique politique
et sociale : il ne s’agit pas d’être pour le protectionnisme
ou pour le libre-échange, mais de savoir qui et quoi doit
être libre, qui et quoi doit être protégé
». Et cette question ne peut à son tour être
résolue que dans une extension démocratique de ces
débats, en faisant entendre la voix des acteurs sociaux (syndicats,
organisations paysannes, mouvements de consommateurs...) et pas
seulement celles des experts gouvernementaux et supra gouvernementaux.
Un autre angle d’attaque de cette exigence démocratique
est la contestation du pouvoir exorbitant des firmes transnationales.
Ici aussi le projecteur est braqué non pas en premier lieu
sur le poids économique et social des décisions de
ces nouveaux Léviathans, mais sur la mise en question de
leurs emprises sur la culture et les médias. Reprenant la
thèse de Naomi Klein, qui affirme que c’est le succès
même des marques qui en gagnant l’identification des
consommateurs ont ainsi perdu « le privilège de l’indifférence
à leurs activités mondiales », Coutrot montre
que se déploie un espace de contestation à l’égard
du rôle de ces firmes tant sur le plan social (travail des
enfants, licenciements boursiers...), qu’écologique
ou éthique (le soutien aux dictatures...). Tout cela n’est
pas resté sans conséquences et les transnationales
ont pris la mesure du danger en ouvrant des contre-feux. Non pas
pour légitimer leur rôle économique, mais bien
pour souligner leur responsabilité sociale. Depuis une décennie
s’est développée la fameuse notion de «
responsabilité sociale des entreprises », ou «
d’investissements responsables ou éthiques ».
Bref, tout un champ de débats, de controverses et d’actions
s’ouvre ainsi, connectant encore une fois, par un biais particulier
le domaine de l’économique à la politique |7|.
Économie solidaire
Un long chapitre est consacré aux ambiguïtés
et aux promesses de l’économie solidaire. Derrière
ce vocable, se cachent des réalités et des conceptions
bien différentes. Certaines remontent à la révolution
industrielle et aux tentatives de certains travailleurs qualifiés
d’échapper à la logique du capital. Comme, à
cette époque, la fin du dernier siècle a vu surgir
des initiatives économiques et sociales, ni capitalistes,
ni étatiques en réaction aux effets de la crise et
à la montée du chômage. De plus, tout une série
d’associations d’action sociale, de mutuelles ou de
coopératives de crédit et d’assurances qui existaient
de longue date, sont aujourd’hui embarquées dans ce
que l’on nomme : tiers-secteur, économie sociale ou
encore non marchande.
Scruter ce foisonnement, voir quelles sont les logiques à
l’œuvre, rechercher les points communs ou les écarts
entre toutes ces formes d’organisations et d’initiatives
devrait contribuer à éclairer l’opposition bien
réelle qui existe entre une tendance à voir dans ce
secteur le stabilisateur social d’un système économique
en perpétuelle crise ou au contraire une ébauche d’une
contestation des logiques qui y sont à l’œuvre.
Mais avant de chercher les promesses, il convient de ne pas négliger
les ambiguïtés, voir les faiblesses. Et pour bien les
apprécier, il s’agit d’estimer à sa juste
grandeur ce dont on parle. Toutes les estimations, quels que soient
les critères retenus, montrent deux choses : une rapide croissance
de ce secteur, et une augmentation de son rôle dans les politiques
sociales. Citant un rapport de l’OCDE portant sur 35 pays,
l’emploi dans les associations non lucratives représentent
la moitié de l’emploi public et connaît une croissance
largement supérieure à celle de tous les autres secteurs.
Cette hausse du tiers-secteur est clairement parallèle à
la crise de la protection sociale qu’il est chargé
par ailleurs de contribuer à résoudre.
À juste titre, Coutrot met l’accent sur l’instrumentalisation
possible du secteur associatif et de l’économie sociale
dans un processus de privatisation à un moindre coût
des missions remplies jusqu’ici par le service public. Cette
perspective, quoique peu exaltante, est bel et bien présente.
Mais, d’une part, elle ne résume pas à elle
seule l’essor de l’économie sociale des vingt
dernières années et, d’autre part, ces associations
sont elles aussi traversées par un débat sur le rôle
qu’elles veulent jouer, sur l’orientation qu’elles
veulent imprimer à leurs actions. Ainsi, il n’est pas
rare de voir des associations d’insertion et d’aide
aux chômeurs, malgré leur subventionnement, venir en
appui au mouvement revendicatif des chômeurs qu’a connu
la France.
Cependant, il y a peu de place pour l’angélisme dans
l’analyse. L’économie sociale et solidaire est
marquée par une sorte d’ambiguïté que l’on
retrouvera dans toutes ses composantes. Il n’est pas simple
d’échapper aux logiques du système au sein duquel
on agit. Que ce soit la logique de l’instrumentalisation par
les pouvoirs publics (qu’ils soient locaux, nationaux ou européens...),
celle de la mise en concurrence avec les firmes privées ou
celle de la logique financière du capital. Le long développement
sur le commerce équitable est assez éclairant. D’un
côté, la démonstration concrète est faite
que « ça marche », qu’il peut y avoir une
autre rationalité économique basée sur un autre
système de prix. Mais de l’autre côté,
la récupération par les grandes chaînes de distribution
du label et des filières est, elle aussi, au rendez-vous.
Enfin, il se demande pourquoi, même dans les pays scandinaves
où cette pratique est fort développée, les
pouvoirs publics ne pèsent pas plus dans les négociations
internationales pour étendre ces pratiques. De nouveau, resurgit
la nécessité de prolonger l’expérimentation
économique par un débat démocratique sur les
choix politiques.
En fait, nous dit Coutrot, ce qui se dessine à travers ces
expériences et ces mouvements sociaux, c’est non seulement
une demande de nouvelles régulations publiques face à
un néolibéralisme qui ne peut tenir ses promesses,
mais c’est aussi une lente remontée des aspirations
populaires à plus d’autonomie, à une volonté
d’avoir une prise sur le réel et donc aussi sur les
conditions de production de notre existence. Une revendication de
nouveaux droits, à l’horizon du prochain siècle
pour l’information, le contrôle et l’initiative
dans le domaine économique. Ces aspirations et ces questions
ont déjà été posées par les tenants
de l’autogestion, dont il rappelle dans un chapitre toute
l’importance dans l’histoire, y compris récente,
du mouvement ouvrier.
Démocratie économique participative
Cette réhabilitation du courant autogestionnaire n’est
évidemment pas gratuite, elle vise à servir de soubassement
à la stratégie qu’il propose dans un dernier
chapitre consacré à la démocratie économique
et participative. La perspective générale est celle
d’une extension de la démocratie dans le domaine économique
à la fois par une augmentation de la participation de la
population organisée à l’élaboration
des budgets publics, à la gestion des équipements
scolaires et sanitaires... mais aussi par la conquête de nouveaux
droits pour la représentation des travailleurs. Ce dessine
ainsi une nouvelle alliance mobilisant les citoyens tour à
tour comme travailleurs, usagers, consommateurs, élus. Cette
nouvelle stratégie participative, que Coutrot appelle de
ces vœux, agirait simultanément sur les structures économiques
par l’extension des droits des travailleurs, ainsi que ceux
des usagers, des riverains... et sur la démocratie politique
en obligeant les élus à se rapprocher de leurs mandants
et en multipliant les lieux de prises de décisions par les
personnes directement concernées.
Dans ce sens, la stratégie proposée peut apparaître
révolutionnaire, car elle peut être vue comme une remise
en cause de la liberté d’action que s’accordent
les détenteurs de capitaux. Mais, affirme Coutrot, «
il s’agit aussi et d’abord d’une stratégie
réformiste. Aucune des avancées démocratiques
évoquées n’est par elle-même une rupture
de l’ordre existant ». Estimant que le vieux clivage
entre réformistes et révolutionnaires n’est
pas opératoire dans la période actuelle, il lui préfère
celui qui « sépare ceux qui veulent aménager
l’ordre actuel néolibéral sans contester le
pouvoir de la finance, de ceux qui visent de nouvelles avancées
démocratiques par une extension de la participation des citoyens
aux décisions qui les concernent dans tous les domaines ».
Face au néolibéralisme contemporain, il ne saurait
être question d’en revenir à une stratégie
étatiste, que ce soit à la mode léniniste ou
social-démocrate.« La démocratie participative
parie sur l’auto-organisation populaire tant dans la sphère
étatique que dans l’économique. » Cependant,
ajoute-t-il, l’intervention publique reste essentielle, à
condition de renforcer et de relayer les initiatives de la société
civile sans les confisquer. « Il ne peut être question
que le politique soit entièrement soumis au mouvement social
: le politique doit rester un lieu de confrontation et d’arbitrage
entre les intérêts et les aspirations forcement divers
qui émanent des groupes et mouvements sociaux ». Il
subsiste donc pour l’instance politique un rôle primordial
de la construction d’un intérêt général,
ce qui implique que « la démocratie participative ne
peut se substituer à la démocratie représentative
». Une mise au point cruciale mais qui aurait mérité
quelques développements pour situer ces deux modalités
d’exercice de la démocratie.
Voilà donc un livre qui nous en apprend beaucoup sur les
mouvements sociaux contemporains, chez nous et au loin |8|, qui
s’efforce de rapprocher des phénomènes aussi
éloignés que l’émergence de l’économie
sociale et la refonte nécessaire de nos systèmes de
sécurité sociale. Sans tabou, il revisite les grands
débats qui ont marqué le mouvement ouvrier depuis
des lustres et tente d’intégrer les travaux les plus
récents sur de nouvelles approches du socialisme. Mais, son
mérite principal reste cependant de nous avoir montré
que l’extension de la démocratie est sans doute l’arme
la plus radicale que nous ayons encore à notre disposition,
malgré tout.
Gabriel Maissin
|1| Thomas Coutrot , Démocratie contre capitalisme, Paris,
La Dispute, 2005.
|2| Ce débat est particulièrement bien alimenté
dans le monde anglo-saxon. Pour une présentation plus systématique,
voir l’article de T. Coutrot, « Socialisme participatif
», dans le Dictionnaire de l’autre économie,
(dir. Laville et Cattani), Desclée De Brouwer, 2005.
|3| Avenue du plein-emploi, Paris, Mille et une nuits, 2001.
|4| L’entreprise néolibérale, nouvelle utopie
capitaliste, La Découverte, 1998 et Critique de l’organisation
du travail, La Découverte, 1999.
|5| Organisation de coopération et de développement
économique. Regroupe une trentaine de membres : États-Unis,
pays européens, Canada, Australie, Turquie, Mexique.... Instance
internationale, surtout connue par ces fameux rapports qui enjoignent
aux États d’appliquer une politique de rigueur budgétaire,
de modération salariale et de dérégulation.
|6| Accord général sur le commerce des services.
(Voir POLITIQUE n° 28 et 34)
|7| Voir le dossier de POLITIQUE (n°42, décembre 2005)
« Le capitalisme peut-il être moral ? À propos
de la responsabilité sociale des entreprises ».
|8| Brésil, Argentine, mais aussi États-Unis...
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