"Nouveau millénaire, Défis libertaires"
Licence
"GNU / FDL"
attribution
pas de modification
pas d'usage commercial
Copyleft 2001 /2014

Moteur de recherche
interne avec Google
DE LA SUBVERSION DE LA SOCIETE PAR L'ART, A LA SUBVENTION DE L'ART PAR LA SOCIETE
Barthélémy Schwartz



On ne peut comprendre l'art d'aujourd'hui sans revenir un moment sur l'art de la première moitié du siècle. Les avant-gardes des années 20 et 30, et les philosophies de l'art et de l'histoire qu'elles exprimaient, faisaient d'une part fusionner la finalité artistique et la finalité révolutionnaire, l'idée était qu'il ne pouvait y avoir de réalisation de l'art sans suppression du capitalisme ; et d'autre part, intégraient dans la formation du langage artistique l'importance de l'expression inconsciente. Poussé par la révolution russe et son attraction, l'art de la première moitié du siècle (Dada, surréalisme, expressionnisme allemand...) était en rupture avec la gestion capitaliste de la société, il était donc également en rupture avec l'ensemble des valeurs de la bourgeoisie. Il valorisait l'importance de la psychanalyse comme instrument de connaissance, et ne considérait pas l'artiste comme un héros ou un génie. L'art devait être fait par tous, car n'étant qu'affaire d'expression il devait être l'affaire de tous. Quand Marcel Duchamp introduisait en 1917 une pissotière dans une exposition d'oeuvres d'art, il n'avait pas à l'esprit que celle-ci était une oeuvre d'art, il remettait en question, par cette provocation, la culture élitiste de son époque. Pour mémoire, cinq ans auparavant, Apollinaire, introduisait des commentaires de la vie quotidienne dans la poésie ("Les directeurs les ouvriers et les belles sténodactylographes, du lundi matin au samedi soir quatre fois par jour y passent", Zone). On attendait enfin de la révolution sociale qu'elle donne à tous les moyens matériels de se consacrer à la poésie.

La guerre d'Espagne a marqué la fin de la période révolutionnaire de l'entre-deux guerres. Le mouvement révolutionnaire abattu, les conditions étant réunies, la guerre a pu éclater et résoudre provisoirement par la destruction et la mort les contradictions de l'économie capitaliste.

Les théories d'économie politique qui ont fondé la société d'économie mixte après la seconde guerre mondiale voulaient remplacer les mécanismes d'équilibre opérant librement par le marché et qui avaient abouti à la grande crise de 1929 et à la guerre mondiale, par un équilibre établi consciemment par l'intervention de l'État dans l'économie. A défaut de supprimer ce cauchemar du capitalisme qu'est la récurrence des crises économiques, on espérait au moins en atténuer les effets. La société d'économie mixte avait pour vocation d'être une société sans crise, ni sociale ni économique.

L'art d'économie mixte est l'art de cette période qui s'étend de la Libération (en fait la fin des années 50) au retour de la crise aujourd'hui. Ses éléments constitutifs sont les mêmes que ceux de l'économie mixte : le consensus et le partenariat privé-Etat. On ne peut comprendre l'art de la seconde moitié du siècle si on garde à l'esprit le découpage linéaire par mouvement artistique retenu en histoire de l'art : nouveau-réaliste, pop art, art minimal, art conceptuel, land art, figuration libre, etc. L'art d'économie mixte regroupe deux grandes familles d'oeuvres et d'artistes : [1]

- d'une part, celle des artistes simulacres du privé (les artistes et les oeuvres miroirs de la machine, qui s'inscrivent de façon plus générale dans un art miroir de la production, dont les traits essentiels sont l'accumulation, la destruction, la mise en série, etc.) ;

- d'autre part, celle des artistes simulacres de la fonction publique et de l'État (les "artistes-fonctionnaires", dont les caractéristiques sont la taxinomie, la mise en boite, l'étiquetage, le classement, la définition, la nomination, etc.).

La façon de procéder des premiers s'apparente à celle des personnels de l'industrie, voire aux grands cycles de la production (l'accumulation, la série, la destruction), celle des seconds à la façon de procéder des fonctionnaires de l'État (la taxinomie). C'est essentiellement un art de la procédure avec les objets, et du renoncement à l'inconscient et à la subjectivité. En art d'économie mixte, je est un on, et ce on est celui de l'idéologie dominante, faussement objective comme les publicités. C'est pourquoi les oeuvres d'art d'économie mixte ressemblent aux objets ménagers présentés dans les publicités. On a ainsi une première esquisse de ce qu'est l'art d'économie mixte, qui constitue l'art contemporain officiel, tel qu'il est omniprésent depuis plusieurs décennies dans les galeries, les espaces publiques, les musées, les cours intérieures des grandes entreprises, les espaces verts autour des centrales nucléaires, les cours des ministères. L'art qui nous intéresse est ailleurs.

Pendant près d'un siècle, l'art s'est constitué en rupture avec les valeurs de la bourgeoisie et des fonctionnaires de l'État :" [Du Salon des refusés (1863)] jusqu'aux années 40 et 50 de notre siècle, la chronique abonde en querelles, erreurs monumentales et aveuglements obstinés. Il y a eu l'entêtement du Louvre, qui refusait d'accrocher l'Olympia de Manet, qu'une souscription avait achetée à la veuve du peintre, pour éviter qu'elle ne soit acquise par un étranger. Il y a eu la misérable affaire du legs Caillebotte, collection d'impressionnistes reçue avec dédain par une administration qui tolérait Renoir et méprisait Cézanne. Il y a eu l'indifférence absolue des musées français, qui n'ont acheté ni Matisse ni Picasso jusqu'à la seconde guerre mondiale. Sans la générosité de quelques donateurs, tel Marcel Sembat à Grenoble, et quelques dons des artistes, il n'y aurait pas eu un fauve ni un cubiste dans les collections nationales en 1939." [3]. L'art d'économie mixte, au contraire, se présente avant tout comme un art intégré, subventionné par le privé et les pouvoirs publics. Il ne connaît pas de Salon des refusés, ses commandes sont celles de l'État et des grandes entreprises. Car le consensus social, première pierre de la société d'économie mixte, a aussi été un consensus culturel. La subvention de l'art par la société depuis la libération a été le moyen de transformer la subversion de la société par l'art qui avait prévalue dans la première moitié du siècle. Comme le note Rainer Rotchlitz, "les subventions accordées à la création, à l'échelle municipale, régionale, nationale et internationale [ont été] l'équivalent des "acquis sociaux" de l'après-guerre et [ont fluctué] au même rythme qu'eux." [4].

Marx qui n'avait pas prédis la société d'économie mixte, avait écrit à son époque que "la production capitaliste est hostile à certains secteurs de la production intellectuelle, comme l'art et la poésie, par exemple" [5]; la société d'économie mixte réconcilie l'art et le capitalisme en intégrant la production artistique dans l'industrie du tourisme, où les grandes expositions coordonnées par des commissaires rassemblant des artistes reconnus internationalement l'emportent progressivement sur l'artisanat des galeries d'art réservée à une élite culturelle et sociale. Les grandes expositions-shows organisées par les commissaires sont aussi le lieu où l'idéologie peut réécrire l'histoire [6].

L'artiste d'économie mixte est le produit d'une époque qui a cru à son intemporalité. Il était de bon ton, dès les années 60, de penser que la société avait atteint un point de développement à partir duquel elle pouvait intégrer n'importe qu'elle forme de contestation culturelle. Tout avait été fait en art, et tout avait été intégré sans grande difficulté depuis la fin des années 50, l'incapacité de l'art à faire frémir le bourgeois en était la preuve incontournable. Il ne s'agissait que d'un leurre. Les limites de l'intégration de la société d'économie mixte sont celles de l'économie mixte elle-même : le retour de la crise économique qui marque la faillite de cette philosophie de l'économie, marque aussi la fin de l'idéologie de l'intégration. Le retour de la crise aujourd'hui, annonce la fin du consensus social comme du consensus dans la culture. Il marque la fin de l'art d'économie mixte.

La société d'économie mixte fondée sur le consensus laisse la place, avec le retour de la crise, à un nouveau modèle fondé, lui, sur la confrontation sociale et sur l'attaque frontale. Ce nouveau modèle, qui n'est finalement qu'une forme plus brutale de gestion de la crise, n'est autre que le nouvel ordre mondial, économique, politique et social. Il comporte plusieurs aspects : le premier, c'est la remise en cause de tout ce qui avait été négocié par le partenariat depuis la fin de la seconde guerre mondiale (salaire, retraite, assurance, etc.), elle prend la forme immédiate d'une très forte crispation sociale (licenciements brutaux, politique du lock out, criminalisation du syndicalisme, du droit de grève, du droit de manifester, de critiquer, de s'exprimer, d'informer, etc.)[7] , et rappelle à ceux qui l'auraient oublié ces dernières années que le capitalisme est déterminé essentiellement par l'exploitation de la plus-value, qui est la clef de voûte autour de laquelle s'organise l'ensemble économique, social, politique et culturel, et qu'il ne développe, n'encourage, que ce qui va dans ce sens. Le second aspect, c'est l'aménagement de l'idéologie. Celle-ci était consensuelle et intégrait les valeurs qui lui étaient hostiles, désormais, de la même manière que les frontières se ferment sur le territoire pour repousser les étrangers et les exclure, les frontières se ferment également dans la culture. Les idées étrangères aux soient-disantes valeurs occidentales deviennent suspectes, plusieurs se prêtent à rêver d'un art occidental grec et romain débarrasé de ce qu'il a assimilé au cours des siècles. On peut ainsi lire dans une revue sur l'art (disponible par exemple à la librairie La Hune à Paris 5ème, au rayon art) que "la trahison qui a donné naissance à l'art moderne s'est faite par une greffe assumant l'altérité, prenant en compte les cultures étrangères à l'Europe et à la civilisation européenne [8], sur le même ton de la réaction, on peut également lire, dans la revue Esprit, sous la plume d'un certain Jean Molino, que "l'art risque sans doute de se confondre avec l'acception la plus large de la culture et l'on constate qu'il n'y a plus guère de différence entre les musées des Beaux-Arts et les musées éthnographiques" [9]. Attaques répétées qui annoncent les expositions des "Arts dégénérés" de demain.

Avec la fin de l'économie mixte, on assiste à un retour des valeurs qui ont toujours accompagné le conservatisme politique et social : la morale, la famille, la religion. Le droit de critiquer, dans l'entreprise et hors de l'entreprise, qui était permis relativement dans les temps consensuels n'est plus de mise aujourd'hui. Les idées qui s'écartent des valeurs morales s'apparentent désormais à des valeurs subversives, et sont traitées comme telles, sans ménagement. Avec le retour de la crise et la fin du consensus, on voit aujourd'hui réapparaître les mêmes sinistres figures blâmer les manquements aux valeurs et aux moeurs, dénoncer les oeuvres "immorales et scandaleuses". C'est en Autriche, véritable laboratoire de la réaction, qu'un film récent de Werner Schroeter (l'auteur du Tambour), Le Concil d'Amour, d'après l'oeuvre d'Oscar Panizza, a été confisqué par le gouvernement parce qu'il était jugé anticlérical et accusé d'avoir heurté les sentiments religieux des catholiques tyroliens (Libération, du 7/10/94). Dans ce même pays où l'extrême droite fait jeu égal avec les partis politiques classiques, des artistes contemporains sont montrés du doigt dans les médias, dénoncés comme des criminels et des pornographes. Un projet de musée d'art contemporain à Vienne est abandonné après une campagne virulente menée par l'extrême droite. "Nous sommes les premiers visés après les immigrants par l'extrême droite, disait récemment un artiste autrichien" [10].

Ce à quoi on assiste aujourd'hui, c'est à la fois à la faillite de l'art d'économie mixte et à la criminalisation de la figure de l'artiste. La première accompagne la fin de la société d'économie mixte, la seconde le retour de la crise et des conflits sociaux, et la fin du consensus. C'est cela aussi le nouvel ordre mondial.
NOTES : Publié dans

- Le Monde Libertaire, Hors série N0.4, juillet-août 1995

- Ab irato N0.7 décembre 1995

Origine : http://abirato.free.fr/1book/aem/delasub.htm
Note de lecture du livre par Jean-Philippe Uzel :
« Rochlitz, Rainer -- Subversion et subvention : art contemporain et argumentation esthétique. »

Paris : Gallimard, 1994. -- 238 p. -- (NRF Essais).

En ouvrant l'ouvrage de Rainer Rochlitz, Subversion et subvention, nous sommes tentés, dans un premier temps, de le classer parmi la série de libelles qui depuis quelques années s'acharnent à démontrer que l'art contemporain n'est qu'une vaste entreprise de mystification.

La thèse centrale de l'ouvrage sonne en effet comme un constat d'échec : la subversion artistique, inaugurée par les avant-gardes historiques dans les années 1910 est, depuis les années 1960, gérée et sollicitée par les institutions artistiques qu'elle avait pour but de détruire.

La création contemporaine se trouve donc en contradiction flagrante avec son système de diffusion.

Les artistes contemporains qui prétendent s'attaquer à l'autonomie de l'art ne font, finalement, que la renforcer -- on reconnaîtra ici la thèse que Peter Bürger a soutenue dans Theorie der Avantgarde (Francfort : Suhrkamp, 1974).

Puis, en avançant dans la lecture de l'ouvrage, un doute nous saisit.

Même si l'auteur n'est pas familier avec la création contemporaine, son livre est bien documenté et ne tombe jamais dans la généralisation abusive.

Rainer Rochlitz ne peut se confondre avec un Jean Clair ou un Jean-Philippe Domecq, il condamne d'ailleurs cette critique radicale de l'art contemporain : «La dénonciation pure et simple de l'art contemporain comme supercherie est impuissante» (p. 64).

Mais qu'est-ce qui fait courir Rochlitz, pourrait-on dès lors se demander.

La réponse tient en une seule formule : la «rationalité esthétique».

À l'heure où le «n'importe quoi» règne en maître et où tout jugement de valeur a définitivement disparu de la scène artistique, Rochlitz souhaite réhabiliter la dimension normative de l'oeuvre d'art.

La rationalité esthétique nous permet de caractériser les oeuvres d'art et d'évaluer leur réussite, c'est-à-dire la justesse avec laquelle elles articulent la subjectivité du créateur et la compréhension universelle qu'elles prétendent atteindre (toute oeuvre, comme l'a démontré Kant, a la prétention d'intéresser sinon de plaire au plus grand nombre).

C'est dans ce passage du singulier à l'universel, dans cette «publication de l'intime» (p. 103) comme le dit joliment Rochlitz, que se joue la validité de l'oeuvre d'art.

Sans cette cohérence, la création ne peut faire l'objet d'une justification rationnelle et perd son statut d'oeuvre d'art : «une prétendue oeuvre d'art dont la qualité artistique ne peut être justifiée par aucune bonne 'raison' n'en est pas une» (p. 91).

On aura compris que la rationalité esthétique, selon Rochlitz, fait cruellement défaut à l'art contemporain.

Reprenant un constat déjà établi par Raymonde Moulin et Yves Michaud, Rochlitz déplore la logique tautologique qui gouverne actuellement aux destinées de l'art : tel artiste expose car il est jugé important et il est jugé important car il expose.

C'est précisément pour cacher ce déficit du jugement de valeur que le monde de l'art opère, selon notre auteur, un glissement aux conséquences dévastatrices : le contenu politique de l'oeuvre se substitue peu à peu à sa cohérence interne et tient lieu de critère de validité esthétique («le fait d'être 'politiquement juste' suffit pour légitimer une oeuvre d'art», p. 193).

La subvention va désormais à la subversion, dernier rempart avant le vide.

Cette absence totale de légitimation esthétique a un effet désastreux sur le grand public qui se désolidarise de plus en plus d'un art qu'il ne comprend pas («le public a l'impression d'être la dupe de l'art contemporain», p. 187).

Pour enrayer cette situation, Rochlitz propose donc de rétablir au plus vite une rationalité esthétique qui permette aux médiateurs culturels (critiques, directeurs d'institutions muséales… de mettre à jour la cohérence et la validité interne de la création et de justifier ainsi la pertinence de leur choix auprès du public.

Malgré une argumentation très nuancée, le principal problème de l'ouvrage de Rochlitz est son incapacité à penser la médiation art-politique.

La distinction qu'il établit entre les «avant-gardes purement formelles» et les «avant-gardes artistiques à motivation politique» (p. 193) n'est que le symptôme du partage abyssal qui existe selon lui, entre l'art et la politique.

L'idée qu'une oeuvre d'art puisse être à la fois politiquement critique et esthétiquement valide ne semble jamais l'effleurer.

C'est ainsi qu'il déclare au sujet de l'oeuvre d'art : «Plus son message politique est univoque, moins ses caractéristiques artistiques sont irremplaçables.

Plus l'oeuvre, au contraire, élabore son propre univers formel et compositionnel, sa technique et sa matière, moins il sera facile d'en déduire une intention politique claire» (p. 199).

C'est, entre autres, ce refus de penser la médiation art-politique qui lui permet de justifier le non-sens d'un art subversif subventionné.

Une autre faiblesse sur laquelle repose cette thèse (due peut-être à la trop longue fréquentation de Walter Benjamin, auquel Rochlitz a consacré un précédent essai) est le fait de considérer qu'un art politique est forcément «subversif», que son but est un bouleversement de l'ordre social au profit d'un monde totalement renouvelé.

Or nous savons que le mouvement de «retour au musée» des artistes à la fin des années 1960 s'accompagne d'un abandon des visées subversives et utopiques, mais ne signifie d'aucune manière un renoncement à la contestation politique.

Tout au contraire.

En réintégrant l'institution muséale, la critique a perdu en radicalité, mais il y a fort à parier qu'elle a gagné en efficacité.

Les artistes abandonnent la fonction révolutionnaire et utopique de l'art car ils ont compris, comme le dira par la suite Michel Foucault, que «la résistance n'est jamais en position d'extériorité par rapport au pouvoir» (Michel Foucault, La Volonté de savoir, Paris, Gallimard, 1976, p. 126).

Les artistes, en retournant au musée, adoptent ce que certains ont appelé «une nouvelle attitude critique» (René Payant, Vedute, Laval : Trois, p. 353).

Ils s'installent dans l'institution, épousent ses mécanismes de légitimation afin de les faire travailler contre eux-mêmes, en les exposant (Daniel Buren, Hans Haacke), en les retournant (Michael Asher) ou en les parodiant (Marcel Broodthaers).

En déplaçant la critique sur l'institution ces artistes s'attaquent directement à la prétendue neutralité du musée et à son corollaire l'autonomie de l'art.

Ce faisant ils remettent en cause les fondements mêmes d'une modernité qui suppose une séparation radicale entre l'art, la politique et la science.

Rainer Rochlitz rétorquerait que les institutions artistiques récupèrent à leur tour cette critique qui leur permet de masquer la vacuité sur laquelle reposent leurs choix esthétiques.

Mais comment expliquer alors qu'en 1971, un des plus grands musées d'art moderne au monde, le Guggenheim Museum de New York, rejette tour à tour une oeuvre de Hans Haacke (Shapolsky et al. Manhattan Real Estate Holdings, a Real-Time Social System, as of May 1, 1971) et de Daniel Buren (à l'occasion de la VIe Exposition Internationale du Guggenheim).

Cette liste des refus et des rejets ne fera que s'agrandir dans les années suivantes jusqu'aux récentes affaires Robert Mapplethorpe et Andres Serrano, sans parler des menaces qui pèsent actuellement sur le National Endowment for the Arts, principale source de subventions publiques pour les artistes américains.

Mais de ça, Rochlitz ne parle pas.

Jean-Philippe Uzel
Origine : http://media.macm.org/vt/vt-8370.htm