"On peut être pour ou contre la "doctrine philosophico
religieuse" de Pierre de Coubertin mais on ne peut pas pas faire
comme si elle n'était pas un système de pensée.
On ne peut pas être sportif ou non-sportif (pour ou contre les
Jeux Olympiques) innocemment".
Cher(e)s ami(e)s,
Vous trouverez en fichier joint le numéro 3 de la Lettre
anti-olympique qui s'interroge sur les "valeurs" de l'Olympisme
(et sur ses dangers). N'hésitez pas à la faire circuler.
Le débat sur l'Olympisme a été esquissé
début mars avec la venue de la délégation du
CIO. Il reste trois mois pour approfondir sérieusement la
discussion, et faire de cette "religion des temps modernes"
un thème de réfléxion qui aille au-delà
de la simple question du coût des Jeux à Paris.
Bien amicalement à vous
Mouvement Critique du Sport
Au sommaire de la Lettre anti-olympique n°3
Les dangers de la « religion des temps modernes »,
l'Olympico-sportisme
(Extraits)
L'Olympisme est-il un phénomène marginal sans véritable
influence sur le climat socio-politique des pays ? Ou au contraire
n'a-t-on pas affaire avec lui à un système de pensée
d'une importance inversement proportionnelle à la qualité
des études qu'il engendre ?
Fidèle à ses maîtres et ses pionniers, et avant
tout autre à Pierre de Coubertin, l'idéologie olympique
se veut génératrice d'une révolution spirituelle
et créatrice d'une nouvelle civilisation communautaire où
seraient parfaitement intégrées toutes les couches
de la société (.).
Cette société olympico-sportiste n'est pas le champ
de bataille où s'affrontent idées politiques et groupes
sociaux mais une collectivité humaine et harmonieuse (l'idéal
olympique de la fraternité et de l'amitié) ; elle
jouit d'une unité morale dont l'émanation est le gouvernement
mondial du sport (le Comité international olympique en premier
lieu) et dont la puissance repose sur l'unanimité spirituelle
de la masse (.).
L'olympico-sportisme, cette profonde révolution morale et
spirituelle impressionne par son omnipotence tranquille et sa capacité
à établir un consensus presque total. Tout le monde
admire les qualités morales des sportifs : le dévouement,
le sacrifice, l'amitié virile, l'élan de ces hommes
et ces femmes chargés de toute l'ardeur que donne d'avoir
trouvé une foi et un sens à la vie (.)
L'anti-intellectualisme et l'idéalisme sont les piliers
de ce sportisme qui constitue bien un ensemble idéologique
sur la nature duquel il est difficile de se tromper pour peu qu'on
se donne la peine d'en déchiffrer le message.
Tout renseignement au Mouvement Critique du Sport :
E-Mail : critique.sport
at libertysurf.fr
téléphone : 02.38.42.00.08 -
site :
http//mouvement.critique.du.sport.chez.tiscali.fr -
adresse : 58, rue de la Bretonnerie, 45 000 Orléans -
From: "mouvement critique du sport" <critique.sport
at libertysurf.fr >
Au sommaire de la Lettre anti-olympique n°3
Les dangers de la « religion des temps modernes » :
l’Olympico-sportisme
La Lettre anti- olympique du Mouvement Critique du Sport
Contre l’organisation des Jeux à Paris en 2012
N°3 – 1er avril 2005
« Limiter l’analyse du sport, phénomène
social majeur, à ce qu’il montre, c’est ignorer
tout ce qu’il occulte et qui est loin d’être secondaire
».
« Ceux qui prennent au sérieux notre critique du sport
et de l’Olympisme, n’arrivent pas à combattre
en eux-mêmes cette volonté de ne pas savoir qui est
justement l’une des manifestations les moins contrôlées
de l’incorporation du système sportif (et social) dans
les individus et la marque de leur adhésion à ce système.
Quand le fait sportif s’incorpore et s’intériorise,
il se transforme en inconscient social ».
Contre le slogan « Paris 2012 » qui déferle
dans les rues de la capitale et sur les murs de certains édifices
publics, contre l’étouffante propagande olympique,
le Mouvement Critique du Sport répond « NON à
l’organisation des Jeux de 2012 à Paris » et
OUI à un débat ouvert et argumenté sur l’Olympisme,
son histoire et sur ses prétendues valeurs.
Chaque mois jusqu’au 6 juillet 2005, date de la désignation
de la ville par le CIO, le Mouvement Critique du Sport, Centre de
recherche et d’analyse des fonctions politiques, idéologiques
et économiques du sport, fera paraître, une brève
lettre de réflexion dont l’objectif est de permettre
d’ouvrir la discussion et d’en finir avec les croyances
et le refus de savoir.
Le matraquage olympique, le discours du « toute la France
assemblée derrière les Jeux » n’est pas
digne d’un pays démocratique. Il est temps de faire
exploser le faux consensus.
Cette longue Lettre n°3 montre que l’Olympisation et
la sportivisation de la planète sont lourdes de menaces.
Les dangers de l’Olympico-sportisme
En tant que phénomène historique (le sport est né
à la fin du 19ème siècle), le SPORTISME apparaît
à trois niveaux : il est une idéologie, un mouvement
et un système c'est-à-dire un ensemble hiérarchisé
d'institutions et de mécanismes de décisions.
L’Olympisme est-il un phénomène marginal sans
véritable influence sur le climat socio-politique des pays
? Ou au contraire n'a-t-on pas affaire avec lui à un système
de pensée (1) d'une importance inversement proportionnelle
à la qualité des études qu'il engendre ? Le
sport ne peut se limiter aux listes de résultats, au nombre
de records battus, aux «morceaux de bravoure», aux exploits
historiques, aux matches de légende (il y a un match du siècle
tous les six mois !), pas même au nombre de pratiquants et
de spectateurs conduits par des démagogues particulièrement
habiles. Et l’Olympisme ne peut pas, lui non plus, se limiter
au classement des médailles, aux sourires de Laure Manaudou
et d’Emilie Le Pennec, ou au doublé d’Hicham
El Guerrouj à Athènes.
La question du poids de l'idéologie sportiste en France
et dans le monde ne peut plus être occultée ; elle
est d'autant plus centrale que le sujet est tabou et dramatiquement
consensuel.
Façonner le monde
Fidèle à ses maîtres et ses pionniers, et avant
tout autre à Pierre de Coubertin, l'idéologie olympique
se veut génératrice d'une révolution spirituelle
et créatrice d'une nouvelle civilisation communautaire où
seraient parfaitement intégrées toutes les couches
de la société.
Cette société olympico-sportiste n'est pas le champ
de bataille où s'affrontent idées politiques et groupes
sociaux mais une collectivité humaine et harmonieuse (l'idéal
olympique de la fraternité et de l'amitié) ; elle
jouit d'une unité morale dont l'émanation est le gouvernement
mondial du sport (le Comité international olympique en premier
lieu) et dont la puissance repose sur l'unanimité spirituelle
de la masse. Et ce gouvernement (qui fut longtemps dirigé
par des personnalités très « politiques »
comme MM. Brundage et Samaranch) est le gardien de cette unité
qu'il développe en utilisant tout moyen susceptible de la
confirmer : la propagande, les medias-supporteurs, les clubs, l'éducation
(sportive plus que physique). Le matraquage qui entoure la candidature
de Paris 2012 s’inscrit dans une longue tradition.
La mentalité, la sensibilité de l’olympico-sportisme
font partie intégrante de notre culture. Le spiritualisme
et l'idéalisme qu'il préconise fournissent les moyens
d'une révolution, la seule qui puisse ne pas porter les caractéristiques
de la lutte des classes : une révolution morale. Le sportisme
est le levier d'une transformation profonde des esprits et des âmes,
le problème de la décadence étant longtemps
resté (il reste encore chez certains fidèles) l'une
de ses préoccupations majeures. C'est la raison pour laquelle
il faut créer un homme nouveau, porteur de ces classiques
vertus que sont l'héroïsme, l'énergie en éveil
permanent, le sens du devoir et du sacrifice, et l'acceptation de
la primauté de la collectivité sur les individus qui
la composent. La toute première des qualités des sportifs
est la foi en la puissance de la volonté.
Le corporatisme olympico-sportiste et un gouvernement mondial fort
constituent les moyens de cet assaut contre la société
morcelée en classes antagonistes, et contre le dépérissement
de la civilisation. Le sportisme n'est pas qu'une simple forme de
chauvinisme et de nationalisme exacerbés ; il constitue -
et l’olympisme avec lui - un système d'idées
organisé pour façonner le monde. La très large
et pourtant très impalpable et très souterraine diffusion
de ces idées atteste que ses racines sont profondes et son
influence considérable.
L’olympico-sportisme qui s'attaque à sa manière
au désordre économique et plus encore au désarroi
moral propose des solutions de rechange à la lutte des classes
: l’Olympisme et sa « grande fête quadriennale
» de la fraternité, et le sport lieu d'harmonie, facteur
d'intégration, remède aux fléaux de la drogue,
de l'alcoolisme, de l'abus sexuel, du tabac (2). Le sport avec ses
« valeurs olympiques » est le lieu d'embrigadement d'un
peuple unifié, sans distinction de couleur et de statut social,
dans le cadre d'un système notoirement et habilement autoritaire
et anti-social.
L’Olympisme exerce un attrait beaucoup plus profond que ce
que voudraient admettre ceux qui pratiquent mais aussi ceux qui
regardent le sport, qui en parlent ou qui en subissent l'extraordinaire
et inquiétante présence (combien d'heures d'antennes
à la radio et à la télévision, de pages
dans les journaux?).
Une révolution spirituelle
L’olympico-sportisme, cette profonde révolution morale
et spirituelle - Pierre de Coubertin ne disait pas autre chose quand
il parlait de la «religion athlétique» et de
la nécessité de «rebronzer les corps et les
esprits» - impressionne par son omnipotence tranquille et
sa capacité à établir un consensus presque
total. Tout le monde admire les qualités morales des sportifs
: le dévouement, le sacrifice, l'amitié virile, l'élan
de ces hommes et ces femmes chargés de toute l'ardeur que
donne d'avoir trouvé une foi et un sens à la vie.
Tout le monde applaudit aux performances de cette jeunesse paisible,
s'incline devant sa passion fière et dure, sa volonté
de grandeur, sa rude noblesse, sa supériorité morale.
L’olympico-sportisme c'est à la fois un hymne à
cette jeunesse bien sage (à 30 ans on est vieux en sport)
et la victoire de la force sur ceux qui haïssent l'effort pour
l’effort.
L'anti-intellectualisme et l'idéalisme sont les piliers
de ce sportisme qui constitue bien un ensemble idéologique
sur la nature duquel il est difficile de se tromper pour peu qu'on
se donne la peine d'en déchiffrer le message. Il doit son
rayonnement véritable au fait que de l'essence de ses idées
(de sa pensée) participent de vastes secteurs de l'opinion.
Les milieux contestataires les plus divers demeurent facilement
perméables à l'appel de l’olympico-sportisme
ou au moins à certains de ses éléments. Nombreux
sont ceux qui répondent à cet appel d'ardeur juvénile
et accueillent avec bienveillance cette religion purificatrice dans
un univers économique impitoyable. Le soutien aveugle, ni
débattu ni argumenté, des syndicats représentatifs
et des principaux partis politiques français en fournit un
attristant exemple.
Prenons garde. L'idéologie sportiste (l'idéologie
du don, de la compétition naturelle, de la collaboration
des classes, le culte du chef, de la discipline, l'apologie de la
douleur et de la souffrance, etc.) s'infiltre toujours plus dans
la société, remonte à la surface et saisit
les leviers de commande. Le sport jouit d'un préjugé
favorable (on parle même de 88 % de Français favorables
aux Jeux de Paris 2012 et le Ministre Jean-François Lamour
en voudrait 100 % !) et cette bonne dose de sympathie met en marche
« l'engrenage collaborationniste ». Le peu de résistance
que rencontre la sportivisation de la planète est lourd de
menaces.
Charles Tardieu écrivait dans un livre paru en 1940 et préfacé
par Jean Borotra, alors Commissaire général à
l'Education générale et sportive : «Le sport
pourrait être pour les jeunes la première école
d'application d'une morale générale. Des maîtres
avertis et choisis, s'efforceront de créer dans des cerveaux
malléables et dociles, jusqu'à l'indépendance
de la virilité, une véritable religion nouvelle du
sport désintéressé, chevaleresque, discipliné,
altruiste (...). Bref, la révolution nationale sportive doit
être avant tout une révolution des esprits appuyés
sur des méthodes nouvelles» (3). Croire que le sport
est un jeu, ne rien faire et ne rien dire sur les valeurs qu'il
véhicule et sur la vision du monde qu'il propose relève
au mieux d’une dangereuse insouciance, d’un terrible
refus de savoir, au pire de ce «crime d'indifférence»
dont parlait Herman Broch en 1945.
_________________
(1) Lire par exemple l' Essai de doctrine du sport publié
en 1965 par le parti gaulliste, sur l'initiative du Haut Comité
des sports.
(2) Au cours du siècle, on a toujours voulu faire croire
que l'on allait résoudre les problèmes sociaux grâce
aux clubs sportifs. En 1915, Coubertin déclarait : «J'ai
toujours déploré que les sociétés antialcooliques
n'aperçoivent pas dans le sport le véritable antidote
auquel il convient d'avoir recours dans la lutte contre le fléau».
(3) Charles Tardieu, Le Sport, ta joie, ta santé, Paris,
Sequana Editeur, 1940, p 93-94. Sur ce thème général
de la Révolution nationale se reporter aux différents
ouvrages de l'historien Zeev Sternhell et à son article synthétique
et précieux «Sur le fascisme et sa variante française»
paru dans Le Débat n°32, novembre 1984.
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