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Chantage et abus de pouvoir dans les universités
Envoyé : dimanche 29 mai 2005 22:09
Objet : Abus de pouvoir, universités; le cas de
Daniel Weltzer Lang
Texte paru dans le Bulletin de l'Association Nationale des Etudes
Féministes n° 46, 2005, pp.97-100
Chantage et abus de pouvoir dans les universités
Fin novembre 2004, comme des dizaines d'autres centres et réseaux
d'études féministes en France et à l'étranger,
l'ANEF a dénoncé auprès de la Présidence
de l'Université de Toulouse-Le Mirail l'attribution du poste
de professeur de sociologie fléché « Rapports
sociaux de sexe - Travail, genre et sociétés »
à Daniel Welzer-Lang, titulaire d'un poste de maître
de conférences dans cette université depuis 1995.
La création de ce poste de professeur visait à accroître
le potentiel d'encadrement de l'équipe d'accueil doctoral
Simone-SAGESSE. Or, en juillet 2003, Daniel Welzer-Lang avait été
suspendu de l'équipe Simone-SAGESSE. Invité à
plusieurs reprises à s'expliquer sur ses pratiques déontologiques,
Daniel Welzer-Lang avait préféré démissionner
de l'équipe, en septembre 2003, avant de demander son rattachement
à un autre laboratoire de sociologie du Mirail (le CERS-CNRS),
en précisant qu'il comptait quitter Toulouse dans les plus
brefs délais.
Dans le milieu des études féministes, la dénonciation
collective de la promotion de Daniel Welzer-Lang en raison de «
désaccords déontologiques » a pu apparaître
comme un euphémisme puisque plusieurs témoignages,
écrits et oraux, font état de situations de harcèlement
sexuel, de harcèlement moral, d'abus d'autorité et
d'atteinte à la dignité des personnes de la part de
cet enseignant-chercheur sur des étudiant-e-s et des salarié-e-s
sur des contrats de recherche menés sous sa direction, tant
à l'université que dans le cadre de l'association
« Les Traboules ».
En octobre 1998, des étudiantes déclarèrent
avoir été « invitées » à
son domicile et soumises à des sollicitations sexuelles.
Nos collègues de Toulouse ont alors sévèrement
tancé Daniel Welzer-Lang. En l'absence de plaintes formalisées
en justice par les étudiantes concernées et en l'absence
de procédures disciplinaires clairement établies au
sein même de l'université, les membres de l'équipe
avaient alors compté sur son engagement à s'amender.
Pourquoi a-t-il fallu attendre une nouvelle dénonciation
collective des doctorant-e-s de l'équipe pour prendre la
mesure des dimensions de l'atteinte à l'intimité et
à la dignité des femmes que son enseignement à
l'université et la réalisation de ses contrats de
recherche semblaient générer ? En effet, ce n'est
qu'en juillet 2003 que les membres de l'équipe Simone-SAGESSE
ont décidé, au terme de multiples débats internes,
de suspendre Daniel Welzer-Lang. Cette décision s'est imposée
en raison de nouveaux témoignages, faisant état de
pressions de l'ordre du harcèlement sexuel et moral et de
leurs effets à long terme, ainsi que sur les handicaps qui
peuvent s'ensuivre dans les parcours universitaires et personnels
des étudiant-e-s concerné-e-s. Certaines personnes,
qui ont publiquement fait état de leurs expériences,
ont arrêté leurs études, d'autres ont changé
d'université ou de direction de thèse, toutes en sont
meurtries.
Une grande part des travaux de Daniel Welzer-Lang repose sur l'exploration
de domaines de recherche rarement investis par les sociologues (échangisme,
minitel rose, prostitution, etc.). Cette exploration suppose, à
ses yeux, l'élaboration de modes particuliers d'expérimentation
méthodologique. Ici, il ne s'agit ni de nier l'intérêt
ou la légitimité des recherches sociologiques sur
les sexualités, ni de minimiser le fait qu'elles nécessitent
des méthodologies particulières. Pour nous, à
l'évidence, les préoccupations éthiques dans
les recherches sur les questions sensibles ne doivent pas seulement
concerner ceux/celles que l'on observe, mais également ceux/celles
qui réalisent l'observation. Si la formation à la
recherche sociologique - en matière d'analyse des sexualités,
comme dans bien d'autres domaines - amène à aborder
une multiplicité de questions taboues et à démonter
nombre de préjugés, il n'en demeure pas moins que
l'enseignement, plus encore dans ce domaine que dans d'autres, doit
être infiniment attentif à respecter les convictions
personnelles des étudiant-e-s. Rien n'est pire, sous le faux
argument « d'innovation pédagogique » ou de «
politisation du privé », que d'user de son autorité
d'enseignant pour mettre en demeure les étudiant-e-s de renoncer
à toute protection de leur intégrité morale
et physique. Proposer comme partie intégrante de l'enseignement
de sociologie une expérience participante sur un terrain
d'échangistes naturistes ne devrait se concevoir qu'avec
un encadrement pédagogique tout à fait rigoureux et
qui ne puisse en rien mettre en cause la dignité de la personne
ou la contraindre de quelque manière que ce soit, par des
arguments d'autorité scientifique ou autres. Au regard des
témoignages recueillis à ce jour par l'ANEF, un tel
encadrement rigoureux et respectueux des personnes semble avoir
fait singulièrement défaut dans ce cas précis.
Quand plusieurs étudiantes et doctorantes, sur le long terme,
de manière récurrente, allèguent de façon
concordante de sollicitations sexuelles directes de leur directeur,
assorties de promesses d'encadrement de leurs travaux universitaires,
de recrutement sur des contrats de recherche, voire de valorisation
des travaux par des publications conjointes, il existe un risque
inacceptable de manipulation et d'abus de pouvoir.
Pourquoi les raisons de la suspension de Daniel Welzer-Lang de
l'équipe Simone-SAGESSE n'ont-elles pas parues recevables
aux yeux de la plupart des enseignant-e-s/chercheur-e-s et des responsables
de l'Université de Toulouse-Le Mirail ? Pourquoi ont-elles
été, le plus souvent, considérées comme
des rumeurs ou de la malveillance, éventuellement fondées
sur la rivalité ? La parole et la souffrance des étudiant-e-s
ne peuvent-elle être entendues ? Il est aujourd'hui de bon
ton de dénoncer le silence et l'inertie des victimes de violences
masculines, dès lors qu'elles sont supposées citoyennes
à part entière, disposant d'un arsenal juridique leur
permettant d'agir en justice contre leurs agresseurs supposés
et d'obtenir réparation des souffrances infligées.
Le cas d'étudiantes, majeures, disposant d'un bagage culturel
largement supérieur à la moyenne, semble émouvoir
encore moins l'opinion publique et les instances de décision
universitaires que le cas d'autres victimes.
Au-delà du scandale de la promotion de Daniel Welzer-Lang
au rang de professeur des universités, l'ANEF se préoccupe
de la situation des étudiant-e-s, doctorant-e-s ou enseignant-es.
Elle souhaite attirer l'attention sur la difficulté, voire
l'impossibilité actuelle, de sanctionner les agressions en
matière de situations d'abus de pouvoir, de harcèlement
moral, sexuel ou toute autre forme de violence, dès lors
qu'elles se déroulent à l'Université. Elle
souhaite montrer les effets pervers des diverses tentatives de «
gestion interne », au sein même des universités,
des départements, des équipes de recherche, des services
sociaux ou de médecine préventive, de faits qui devraient
normalement relever de signalements auprès du Procureur de
la République.
En dépit des menaces de Daniel Welzer-Lang de poursuivre
en justice quiconque rendrait publiques les raisons de son départ
de l'équipe Simone-SAGESSE, l'ANEF a décidé
de publier cette mise au point et de mettre un certain nombre d'informations
à la disposition de ceux et celles qui la solliciteront,
dans le respect de la confidentialité et des droits à
la protection de la vie privée. Cette démarche vise
à relancer le débat, ouvert en 2002 par le CLASCHES,
sur le harcèlement sexuel à l'Université et
à poursuivre la mise en oeuvre, dans les établissements
d'enseignements et de recherche, de mesures permettant de sanctionner
les pratiques illicites et condamnables. Ce n'est pas parce que
la parole des victimes se fait difficilement entendre que l'impunité
de certains agresseurs doit s'imposer. Il est nécessaire
et urgent que soit brisé le silence.
Association Nationale des Etudes Féministes
CLASCHES (Collectif de Lutte Anti-Sexiste Contre le Harcèlement
dans l'Enseignement_
Supérieur) : http://membres.lycos.fr/clasches
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ezekiel@univ-tlse2.fr
Equipe Race et Genre
Simone-SAGESSE
http://www.univ-tlse2.fr/simone/spip/0start.php3
Université de Toulouse-Le Mirail
author of Feminism in the Heartland
http://www.ohiostatepress.org/index.htm?/books/bookpages/ezekielfeminism.html
editorial board, Women in Social Movements
http://womhist.binghamton.edu/
http://www.alexanderstreet6.com/wasm/index.html
listmistress of WISE-L and etudesfeministes-l
etudesfeministes-l:
http://listes.univ-tlse2.fr/wws/info/etudesfeministes-l
WISE-L:
https://listserv.uta.fi/cgi-bin/wa?SUBED1=wise-l&A=1
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prostates-discussion mailing list
https://poivron.org/mailman/listinfo/prostates-discussion
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