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origine : http://www.philomag.com/article,entretien,axel-honneth-sans-la-reconnaissance-l-individu-ne-peut-se-penser-en-sujet-de-sa-propre-vie,180.php
Axel Honneth, actuel chef de file de l'école de Francfort,
où il succède à Jürgen Habermas, se réclame
d'une philosophie sociale. Il s'attache à identifier les
mécanismes qui, dans le capitalisme contemporain, empêchent
les êtres humains d'accéder à la réalisation
de soi.
C'est au lycée d'Essen, sa ville natale, où il se
retrouve en compagnie d'élèves provenant de milieux
ouvriers, qu'Axel Honneth, fils de médecin, prend conscience
de l'importance du statut social et des affects qui l'accompagnent,
comme la honte ou le mépris. Inscrit en doctorat de philosophie
après avoir renoncé à des études de
lettres et de théâtre, il publie ses premiers articles
dans les années 1970. L'un est consacré à Jürgen
Habermas, qu'il n'a jamais rencontré. C'est dire sa surprise
quand ce dernier lui demande d'être son assistant à
Francfort – ce qu'il devient dans les années 1980.
Coup d'envoi d'une brillante carrière qui le conduit à
diriger, depuis 2001, l'Institut de recherche sociale de Francfort.
À 57 ans, l'auteur de La Société du mépris
est l'un des rares critiques de la société contemporaine
dont l'oeuvre originale pourrait contribuer à refonder une
pensée de gauche cohérente. Comment retrouver une
relation vraie à autrui, à soi-même et au monde
?
En insistant sur l'importance de la reconnaissance et du respect
de l'individu, en mettant au jour la façon dont le capitalisme
néolibéral y porte atteinte, Axel Honneth prolonge
avec force la Théorie critique des fondateurs de l'école
de Francfort.
Philosophie magazine : Qu'est-ce qu'une société
qui fonctionne bien ?
Axel Honneth : C'est une société dont l'environnement
social, culturel ou politique permet aux individus de développer
une identité autonome ou une relation positive à soi-même.
C'est une société dans laquelle chacun devrait pouvoir
devenir ce qu'il souhaite être sans avoir à en passer
par l'expérience douloureuse du mépris ou du déni
de reconnaissance. S'il me fallait résumer d'une phrase mon
projet philosophique, je dirais qu'il consiste à réfléchir
aux contours que devrait prendre une société pour
assurer à ses membres les conditions d'une « vie bonne
». Je pars ainsi du constat qu'il existe dans nos sociétés
des déficiences découlant moins d'une violation des
principes de justice que d'une atteinte concrète aux conditions
de l'autoréalisation individuelle.
L'idée qu'une société peut aussi échouer
dans ce sens-là était déjà au coeur
de la Théorie critique élaborée par les fondateurs
de l'école de Francfort (lire encadré page 55). Ils
s'étaient donné comme horizon d'oeuvrer à l'avènement
d'une « communauté d'hommes libres ». Si la perspective
marxiste qui dominait cette approche me paraît en partie dépassée,
sa visée éthique n'a, elle, rien perdu de sa charge
explosive en ce début du XXIe siècle. À l'heure
de la mondialisation, l'évolution prise par le capitalisme
s'oriente de fait dans une direction où les conditions du
respect et de l'estime de soi risquent d'être considérablement
meurtries, que ce soit à travers les tendances à la
marchandisation, à la destruction des relations privées
ou à travers les exigences de performance qui pèsent
sur chacun.
Par cette visée éthique, l'école de
Francfort ne s'inscrit-elle pas dans le sillage de ce que vous appelez
la « philosophie sociale » ?
Absolument, bien que la notion de « philosophie sociale »,
dont je me réclame, soit rarement employée en France.
J'entends par là cette grande tradition qui assigne à
la philosophie la tâche spécifique de diagnostiquer
les pathologies sociales, autrement dit les perturbations qui réduisent
ou détruisent les conditions requises pour mener une «
vie réussie ». De Jean-Jacques Rousseau à Cornelius
Castoriadis ou Charles Taylor, en passant par Karl Marx, Max Weber,
Michel Foucault ou Jürgen Habermas, ce courant de pensée
va ainsi inventer un nouveau genre d'enquête philosophique
dont la préoccupation première n'est pas tant de pointer
les inégalités ou les injustices sociales, que de
mettre au jour les critères éthiques d'une vie accomplie
ou plus humaine. Hannah Arendt a, par exemple, accordé une
valeur particulière à la participation active des
citoyens à la vie démocratique, cette pratique permettant
aux individus de parvenir à la conscience de leur propre
liberté.
Pouvez-vous nous éclairer sur la notion de «
lutte pour la reconnaissance », au coeur de votre réflexion
?
Pour en saisir la nouveauté, il faut partir du modèle
utilitariste encore dominant dans les sciences sociales. Ce modèle
considère la société comme une collection d'individus
motivés par le calcul rationnel de leurs intérêts
et la volonté de se faire une place au soleil. Du coup, il
est incapable de rendre raison de ces conflits qui naissent d'attentes
morales insatisfaites et que je place au coeur même du social.
En m'appuyant sur le jeune Hegel, mais aussi sur les acquis de la
psychologie sociale (de George Herbert Mead à Donald Winnicott),
je propose de comprendre les confrontations sociales sur le modèle
d'une « lutte pour la reconnaissance ». Cela suppose
que la réalisation de soi comme personne dépende très
étroitement de cette reconnaissance mutuelle. C'est pourquoi
je distingue trois sphères de reconnaissance, auxquelles
correspondent trois types de relations à soi. La première
est la sphère de l'amour qui touche aux liens affectifs unissant
une personne à un groupe restreint. Seule la solidité
et la réciprocité de ces liens confèrent à
l'individu cette confiance en soi sans laquelle il ne pourra participer
avec assurance à la vie publique. La deuxième sphère
est juridico-politique : c'est parce qu'un individu est reconnu
comme un sujet universel, porteur de droits et de devoirs, qu'il
peut comprendre ses actes comme une manifestation – respectée
par tous – de sa propre autonomie. En cela, la reconnaissance
juridique se montre indispensable à l'acquisition du respect
de soi. Mais ce n'est pas tout. Pour parvenir à établir
une relation ininterrompue avec eux-mêmes, les humains doivent
encore jouir d'une considération sociale leur permettant
de se rapporter positivement à leurs qualités particulières,
à leurs capacités concrètes ou à certaines
valeurs dérivant de leur identité culturelle. Cette
troisième sphère – celle de l'estime sociale
– est indispensable à l'acquisition de l'estime de
soi, ce qu'on appelle le « sentiment de sa propre valeur ».
Si l'une de ces trois formes de reconnaissance fait défaut,
l'offense sera vécue comme une atteinte menaçant de
ruiner l'identité de l'individu tout entier – que cette
atteinte porte sur son intégrité physique, juridique
ou morale. Il s'ensuit qu'une des questions majeures de notre époque
est de savoir quelle forme doit prendre une culture morale et politique
soucieuse de conférer aux méprisés et aux exclus
la force individuelle d'articuler leurs expériences dans
l'espace démocratique au lieu de les mettre en actes dans
le cadre de contre-cultures violentes.
Appliquée à la situation qui prévaut
en France, cette grille de lecture paraît très éclairante
: crise des banlieues, loi sur le port du voile à l'école,
concurrence des mémoires… Quel regard portez-vous sur
ces évolutions ?
Il convient d'être très attentif aux effets négatifs
engendrés par la dépréciation de certains modèles
de réalisation de soi. S'ils n'entrent pas en conflit avec
les valeurs universelles, il y a un risque à les dévaluer.
Que ceux qui se conforment à ces modèles particuliers
ne puissent plus accorder à leur existence la moindre signification
positive eu égard aux fins éthiques communes que s'assigne
la collectivité. Sur le voile islamique, je qualifierais
ma position d'agnostique : dans la mesure même où nous
ne pouvons pas connaître avec certitude les raisons qui poussent
un certain nombre de jeunes filles à porter le foulard, on
ne devrait pas l'interdire dans l'espace public. Si le désir
de porter le voile peut traduire une forme d'oppression, familiale
ou communautaire, il peut aussi relever d'une logique d'émancipation
ou d'une volonté d'affirmation de soi autonome. Quant aux
récentes controverses autour du « devoir de mémoire
», elles montrent combien la reconnaissance sociale est liée
à la dimension du passé. Il me semble légitime
que certains individus échouent à se sentir membres
à part entière de la société dans laquelle
ils sont nés aussi longtemps que l'histoire de l'oppression
ou du génocide subis par leur groupe n'a pas été
publiquement reconnue et débattue.
Toute proportion gardée, n'oublions pas que la pleine reconnaissance
par les Allemands des crimes commis contre les Juifs a conditionné,
après-guerre, le retour de ces derniers dans la vie publique.
On retrouve d'ailleurs dans le débat français contemporain
certains des arguments échangés en Allemagne lors
de la « querelle des historiens » (Historikerstreit)
de 1986-1987 à propos du passé national-socialiste.
Les uns disaient en avoir assez de la culpabilité, de la
repentance et de l'autoflagellation, revendiquant le droit de marcher
la tête haute. Les autres, dont Jürgen Habermas, soutenaient
que, pour marcher la tête haute, il faut assumer la responsabilité
du passé et se montrer capable d'en débattre ouvertement.
L'interprétation de ces polémiques en termes
de « prolifération des victimes » ne vous paraît
donc pas pertinente ?
Le statut de victime étant désormais valorisé,
il convient d'être prudent. Reste qu'entre une vraie victime
(même indirecte s'il s'agit de descendants d'esclaves ou de
colonisés) et une fausse (celle qui instrumentalise l'histoire
pour se promouvoir sur la scène médiatique), la distinction
n'est pas bien difficile à établir. Encore une fois,
la lutte pour la reconnaissance publique des faillites morales du
passé me semble légitime, et on peine, de ce côté-ci
du Rhin, à comprendre pourquoi tant d'intellectuels français
s'y montrent aussi peu sensibles. J'avancerai un autre argument
: c'est justement la reconnaissance publique des crimes du passé,
même commis il y a fort longtemps, qui détermine la
sortie de l'état de victime. Sans cette reconnaissance, l'individu
ne peut en venir à se penser en sujet à part entière
de sa propre vie.
Vous consacrez la dernière partie de La Société
du mépris à explorer les « paradoxes »
du capitalisme néolibéral. Ce thème constitue
aussi le fil directeur de La Réification, votre prochain
livre à paraître en français. La critique du
capitalisme aurait-elle encore un avenir ?
Ces paradoxes ou ces « pathologies » tiennent à
mes yeux à ce que les idéaux d'émancipation,
qui ont beaucoup progressé dans le monde occidental au cours
des trois dernières décennies, semblent presque entièrement
récupérés par le néolibéralisme
et, de là, retournés en leur contraire. Si les possibilités
d'épanouissement individuel se sont élargies (avec
l'éducation, les voyages, le temps libre, la consommation,
etc.), elles se trouvent désormais détournées
au profit de l'idéologie managériale de la performance
économique. On peut à cet égard parler de régression
morale. Le principe de réalisation de soi ainsi instrumentalisé
donne naissance à de nouvelles pathologies – sentiment
de vide intérieur, d'inutilité, d'anxiété,
etc. L'énorme pression néolibérale contraint
les individus à se penser eux-mêmes comme des produits
et à se vendre en permanence : il faut sans cesse se présenter
comme étant hypermotivé, flexible, adaptable, etc.
Ce n'est donc plus l'aptitude au dialogue intérieur et à
la solidarité qui se trouve privilégiée, mais
ce qui contribue au contraire à ruiner cette aptitude : l'extension
d'un rapport de plus en plus marchand et stratégique à
soi-même et aux autres. En ce sens, la reconnaissance, qui
conduit à reconnaître en autrui une commune appartenance
à l'humanité, doit être prolongée par
une autoreconnaissance, soit l'assomption par chacun de son unicité,
laquelle transcende tout traitement comme un objet.
Étant donné qu'il ne s'agit pas de revenir au monde
d'hier, la question demeure de savoir comment contrebalancer ces
tendances pathogènes que la mondialisation ne fait qu'accroître.
Ma réponse ne se situe pas, à la manière de
certains républicains français, du côté
d'une restauration des communautés politiques nationales.
Des solutions ne pourront émerger que dans le cadre d'une
Europe forte à même de résister aux aspects
négatifs de la globalisation, mais à condition de
ne pas faire dériver la solidarité européenne
de nos traditions culturelles ou de nos racines chrétiennes.
Cette dernière approche me paraît peu féconde.
Je pense que le sens de la solidarité ne se consolide vraiment
qu'à la faveur d'expériences partagées dans
le domaine de la « productivité » – non
pas seulement économique, mais aussi artistique ou intellectuelle.
Vous semblez toujours vous situer à égale
distance de l'éthique libérale et d'une éthique
communautarienne…
Ma tentative pour mettre en lumière la grammaire morale
des conflits sociaux partage avec Kant et la tradition libérale
l'attachement
à la notion d'autonomie ainsi qu'à des normes aussi
universelles que possible. Je crois cependant avec les « communautariens
» [courant de philosophie politique, critique des méfaits
de l'individualisme libéral, Ndlr] que l'autoréalisation
de l'être humain exige des formes de relations intersubjectives,
les individus ne se constituant en personne que lorsqu'ils apprennent
à s'envisager – à partir d'un « autrui
» approbateur ou encourageant – comme des êtres
dotés de qualités et de capacités positives
.
Gilbert Corniglion - 27 Avril
Du lumineux et de l'à peu prés
Lumineuse sa définition de la société qui
fonctionne bien et épanouit les individus.
Dérobade ou ignorance sa réponse à la question
du voile.
Deux heures de bonnes lectures interdisciplinaires sur le sujet
lui aurait permis d'éviter l'insignifiance décevante
de sa réponse.
L.Samuel - 19 Août
La reconnaissance dans le face à face
La lecture d'Habermas a pour moi été une impasse,
mais une impasse qui m'a ouvert une voie. C'est par l'intermédiaire
de la lecture de l'agir communicationnel que j'ai découvert
l'agir dramaturgique - pléonasme s'il en est, dès
lors que "drama" signifie action. Je dois avouer depuis
ne pas m'être intéressé aux suites de l'Ecole
de Francfort, reste que celle-ci me stupéfait par sa justesse.
Habermas avouait ne pas s'en être tiré avec l'agir
dramaturgique de Goffman et cela s'en ressent cruellement. Alors
que l'expression "perdre la face" pouvait mettre en jeu
la reconnaissance effective ou non d'une personne, sa lecture me
semble comme chez beaucoup d'autres auteurs s'être enlisée
dans un jeu d'apparences proche d'un calcul d'intérêt
en termes de paraître. "Perdre la face" est ici
le risque qu'encourt chaque individu dans l'équilibre de
la situation qu'il partage avec d'autres. Quant à cet équilibre
il est en jeu dans la définition commune de cette situation,
soit le récit collectif qui en est fait, mais cette définition
est le plus souvent tacite, tacitement visible dans l'équilibre
collectif des scènes de face à face. Si cette définition
tacite ou implicite ne permet pas à un partenaire du face
à face de se reconnaître, non seulement il peut ne
pas sentir reconnu, mais défiguré si le rôle
qui lui est attribué le rend méconnaissable à
ses propres yeux. En tous cas, c'est ce qu'il est possible de pressentir
chez Goffman à condition de ne pas faire du théâtre
une imposture, mais bien plutôt de faire place à ce
qu'il est une mise en scène d'actions qui donnent lieu à
des événements au travers desquels se définit
l'équilibre en suspens – au propre comme au figuré
– d'une situation ou plusieurs situations en fonction des
quels le rôle de chacun varie. Le théâtre ne
dit pas que tel ou tel personnage est tel, il le montre au travers
d'actions et des situations qui en émergent, mais il faut
pour cela relativiser les classes sociales et les codes sociaux
pour donner la primauté à la singularité des
événements. Pour avoir fait place à cette singularité,
la sociologie de Goffman fut cataloguée à ses débuts
de sociologie à la limite de la démence. La singularité
des événements, plus encore celle de leur perspective
dramaturgique dans la position de chaque acteur qui y assiste en
tant que spectateur ne permettait évidement pas de subordonner
les jugements d'une telle approche dans des catégories. Goffman
s'est ainsi replié du théâtre sur les rites
plus facilement subordonnables afin de sortir de la démence
dans laquelle il avait été catalogué. Reste
que s'il est une chose des plus difficile à faire reconnaître,
c'est la singularité de l'histoire de chacun, mais nous vivons
dans une époque où c'est chacun son histoire. Le fait
d'avoir une histoire plutôt que d'être tenu pour un
fait ne donne lieu qu'à un nihilisme subjectif où
la subjectivité du vécu propre à chacun est
le plus souvent nié au nom d'une prétendue objectivité
au lieu de parler d'intersubjectivité en termes d'histoires.
Au final, c'est la version de l'histoire du plus fort qui l'emporte
et d'une certaine manière, le fil de l'histoire se perd dès
lors que la définition de la situation qui en résulte
se retrouve des plus partielles sinon des plus partiale.
Nous retrouvons ici, en dehors de l'idéal socialiste, le
matérialisme historique de Marx, soit l'idée d'un
rôle inscrit dans le cours des événements et
peut-être le succès le plus brillant du marxisme, l'affirmation
de la matérialité de l'histoire et la reconnaissance
de faits historiques qui en ont résulté à l'époque.
L'expression courante, « C'est passé !?! C'est passé
! » avorte l'idée même d'histoire plutôt
que d'affirmer le fait que cela ce soit passé et le plus
souvent, ce qui est finalement reconnu s'être passé
n'est que ce qui ne peut être nié de la sorte, c'est
dire la partialité de ce qui est retenu comme ayant valeur
d'histoire. Une chose est de penser la moralité universellement,
mais historiquement, l'universalité se retrouve confrontée
au choc sublime de la contingence, hors des lieux communs dont l'universalité
nous permet de communiquer. Face à la réalité,
nos beaux discours, le sentiment commun de leur beauté ne
peut qu'être heurté par la singularité des événements
tel que c'est le cas avec le sublime kantien. Aux travers des discours,
nos valeurs brilleront toujours de plus belles, mais ce ne sera
jamais que pour mieux souffrir le choc de la réalité
obscure sur laquelle ils sont sensés faire la lumière
pour ne pas être que de belles paroles. Cela n'enlève
en rien le mérite de l'héritage hégélien
de la lutte pour la reconnaissance qu'identifie le matérialisme
historique de Marx qui permit à son époque d'affermir
le droit des classes ouvrières de faire entendre leur manque
de reconnaissance, mais cela en montre toute la difficulté.
Dans les sociétés occidentales, les ouvriers ont aujourd'hui
des droits, mais la philosophie tout juste le droit de se taire
devant la réalité actuelle car ce n'est pas demain
la veille qu'elle gagnera son pain, un pain que mange grassement
la classe manageuriale moins encombrante quant à la lumière
qu'il est possible de faire sur certains faits, mais la philosophie
le veut elle vraiment ?!? Mettre son nez là où cela
fait des histoires ?
Ma question est valable du plus méconnu des diplômés
de philosophie au plus connu, y compris moi-même !?! Qui voudrait
manger de ce pain là ? Qui se battrait pour le manger, ce
pain noir d'obscurité ?!? Celui qui n'a pas d'autre choix
que de le manger et faire des études met bien souvent à
l'abris d'une telle éventualité !
Dornon - 19 Octobre
une philosophie de l'émancipation
L'intérêt des travaux d'Axel Honneth réside
dans le fait qu'il part toujours des expériences singulières
et des expériences négatives ressenties par les individus
au plus profond de leur chair.C'est la raison pour laquelle il ne
dissocie pas la politique d'expériences psychologiques.
Cette option théorique implique une méfaince vis
à vis de l'universel abstrait et de la morale kantienne,
Honneth reprend à son compte la distinction hégélienne
entre la Möralität et la Sittlickeit. Il ne privilégie
pas la vue surplombante.
On peut dire qu' Honneth construit une philosophie de l'émancipation
car il met en doute l'idée selon laquelle les institutions
libérales des sociétés démocratiques
suffiraient à satisfaire les individus et à donner
des conditions de la vie bonne c'est- à- dire des conditions
qui permettent des conditions minimales de reconnaissance et d'estime
de soi qui sont les seuls et uniques éléments de la
construction d'un rapport positif à soi.
Enfin Honneth se réfère aux mutations du nouveau
capitalisme et donne des exemples précis de fragilisation
des identités sociales au sein de conditions de vie stigmatisantes
et disqualifiantes, ce qui est particulièrement vrai dans
son dernier livre traduit en français La société
du mépris.
Comme sa pensée fonctionne sur le perincipe de la mise à
jour , c'est une pensée qui démystifie les pratiques
faussement libératrices du nouveau capitalisme et c'est la
raison pour laquelle la notion marxienne d'idéologie conserve
toute sa fécondité et sa virtualité critique.
Il est ainsi très facile aux lecteurs d'épouser son
raisonnement car il est rare que les mécanismes sociaux du
capitalisme néolibéral n'engendrent pas des expériences
du déni de reconnaissance.
Céline DORNON
Titulaire d'un master 2
Ecole Normale Supérieure Lettres et sciences humaines
Céline DORNON
Titulaire
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