Origine : http://www.societal.org/docs/55.htm
TRANSVERSALES/SCIENCE-CULTURE a publié (n° 3, 3e trimestre
2002) un article d’André Gorz, considéré
comme une autorité en matière d’économie,
de politique et d’écologie (à quoi il faut ajouter
un « essai expérimental sur soi-même »,
Le Traître, qui a compté dans les années 50,
et en 1977 une œuvre de caractère philosophique, les
Fondements pour une morale). Cet article montre comment le distributisme
dépasse les contradictions du capitalisme/redistributisme
et réalise les espérances exprimées chez de
nombreux auteurs dont la générosité ne fait
aucun doute mais qui en restent à l’énoncé
de principes généraux dans le cadre d’une réforme
du système.
A partir d’un exemple précis, le revenu inconditionnel
d’existence, A. Gorz fait comprendre la différence
entre le redistributisme (ou capitalisme ou économie de marché)
et le distributisme (ou économie de partage).
Le texte de l’article, version quasi intégrale, est
accompagné de commentaires entre crochets et en italique.
Les notes de bas de page sont de l’auteur.
Pour un revenu inconditionnel suffisant
André Gorz
J’ai longtemps refusé l’idée d’un
revenu social qui permette de « vivre sans travailler ».
Et cela pour des raisons inverses de celles des disciples de Rawls
pour lesquels « le travail » est « un bien »
qui, au nom de la justice, doit être distribué équitablement.
Non, le travail n’est pas « un bien » : c’est
une activité nécessaire, exercée, à
l’époque moderne, selon les normes définies
par la société, à la demande de celle-ci et
qui vous donne le sentiment que vous êtes capable de faire
ce dont la société a besoin. Elle vous reconnaît,
vous socialise et vous confère des droits par sa demande.
Le « travail » vous tire ainsi de la solitude privée
; il est une dimension de la citoyenneté. Et il est plus
fondamentalement (comme travail qu’on fait), au-delà
de sa détermination sociale particulière, une maîtrise
de soi et du monde ambiant nécessaire au développement
des capacités humaines.
A mesure que le poids de sa nécessité diminue, l’équité
exige à la fois qu’il diminue dans la vie de chacun
et qu’il soit équitablement réparti sur tous.
C’est pourquoi dans de précédents ouvrages,
je voulais que la garantie à chacun d’un plein revenu
soit liée à l’accomplissement par chacun de
la quantité nécessaire à la production des
richesses auxquelles son revenu donne droit : par exemple 20000
heures que chacun pourrait répartir sur toute sa vie en autant
de tranches qu’il le souhaiterait, à condition que
l’intervalle entre deux périodes de travail ne dépasse
pas une certaine durée.
Cette formule, que je préconisais à partir de 1983,
était cohérente avec la perspective de l’extinction
du salariat et de la « loi de la valeur » : le revenu
social garanti n’était plus un salaire.[1] Elle était
cohérente avec l’appropriation et la maîtrise
du temps. Mais elle n’était pas cohérente avec
les perspectives et les changements introduits par le post-fordisme.
Je l’abandonne donc pour un ensemble de quatre raisons que
voici.
¤ 1 ¤
Quand l’intelligence et l’imagination (…) deviennent
la principale force productive, le temps cesse d’être
la mesure du travail ; de plus, il cesse d’être mesurable.
La valeur d’usage produite peut n’avoir aucun rapport
avec le temps consommé pour produire. Elle peut varier très
fortement selon les personnes et le caractère matériel
ou immatériel de leur travail. Enfin le travail-emploi continu
et payé au temps est en régression rapide. Il devient
de plus en plus difficile de définir une quantité
de travail incompressible à accomplir par chacun au cours
d’une période déterminée.
¤ 2 ¤
L’inconditionnalité du droit à un revenu de
base suffisant soulève des objections immédiates :
ne va-t-elle pas produire une masse croissante d’oisifs vivant
du travail des autres ? Ces autres ne vont-ils pas refuser de porter
le fardeau de la nécessité et exiger que l’oisiveté
soit interdite, le travail rendu obligatoire, sous la forme du workfare
ou du service civil obligatoire « d’utilité sociale
» ?
De nombreux partisans de l’allocation universelle, tant
libéraux que socialistes, soulèvent ces objections.
Mais ils rencontrent alors la difficulté suivante : quel
contenu donner au travail obligatoire exigible en contrepartie de
l’allocation de base ? Comment le définir, le mesurer,
le répartir quand l’importance du travail dans l’économie
devient de plus en plus faible ? Comment éviter, d’autre
part, que le travail obligatoire ne concurrence et ne détruise
une proportion croissante d’activités et d’emplois
publics normalement rémunéré ?
Si l’on veut que l’allocation universelle d’un
revenu de base soit liée à l’accomplissement
d’une contre-prestation qui la justifie, il faut que cette
contre-prestation soit un travail d’intérêt dans
la sphère publique et que ce travail puisse avoir sa rémunération
(en l’occurrence le droit à l’allocation de base)
pour but sans que cela altère son sens. S’il est impossible
de remplir cette condition et si l’on veut que l’allocation
universelle serve au développement d’activités
bénévoles, artistiques, culturelles, d’entraide,
etc., il faut alors que l’allocation universelle soit garantie
inconditionnellement à tous. Car seule son inconditionnalité
pourra préserver l’inconditionnalité des activités
qui n’ont tout leur sens que si elles sont accomplies pour
elles-mêmes.
¤ 3 ¤
L’allocation universelle est le mieux adaptée à
une évolution qui fait « du niveau général
des connaissances la force productive principale »[2] et réduit
le temps de travail à très peu de chose en regard
du temps que demandent la production, la reproduction et la reproduction
élargie des capacités et compétences constitutives
de la force de travail dans l’économie dite immatérielle.
Pour chaque heure, ou semaine, ou année de travail immédiat,
combien faut-il de semaines ou d’années, à l’échelle
de la société, pour la formation initiale, la formation
continue, la formation des formateurs, etc. ? Et encore la formation
elle-même est peu de chose en regard des activités
et des conditions dont dépend le développement des
capacités d’imagination, d’interprétation,
d’analyse, de synthèse, de communication qui font partie
intégrante de la force de travail postfordiste. Dans l’économie
de l’immatériel, « le travailleur est à
la fois la force de travail et celui qui la commande ». Elle
ne peut plus être détachée de sa personne
¤ 4 ¤
Il y a plus. L’allocation universelle d’un revenu
inconditionnel correspond le mieux à l’économie
qui se dessine au-delà de l’impasse dans laquelle s’enfonce
l’évolution actuelle. Un volume croissant de richesses
est produit avec un volume décroissant de capital et de travail
; la production distribue par conséquent à un nombre
décroissant d’actifs un volume décroissant de
rémunérations et de salaires [redistribue aurait été
plus pertinent, puisque les salaires dépendent d’un
circuit de redistribution des bénéfices monétaires]
; le pouvoir d’achat d’une proportion croissante de
la population diminue, chômage, pauvreté, misère
absolue se répandent. La productivité rapidement croissante
du travail et du capital entraîne un excédent de force
de travail et de capital.
Wassily Léontieff résumait la situation par cette
métaphore : « Quand la création de richesses
ne dépendra plus du travail des hommes, ceux-ci mourront
de faim aux portes du Paradis à moins de répondre
par une nouvelle politique du revenu à la nouvelle situation
technique ».[3]
Leontieff ne précisait pas à quelle nouvelle politique
du revenu il pensait, mais Jacques Duboin avait déjà
indiqué en 1931 la « porte de sortie », [plus
tard : en 34-35[4]] et Marx en 1857, dans les Grundrisse que Duboin
ne pouvait connaître[5] : « La distribution des moyens
de paiement devra correspondre au volume de richesses socialement
produites et non au volume du travail fourni. »
La distribution des moyens de paiement ne sera plus un salaire,
mais ce que Duboin déjà appelait un « revenu
social ». Celui-ci ne correspond plus à la «
valeur » du travail (c’est à dire aux produits
nécessaires à la reproduction de la force de travail
dépensée) mais aux besoins, désirs et aspirations
que la société se donne les moyens de satisfaire.
Elle suppose la création d’une autre monnaie non thésaurisable,
que Duboin appelle « monnaie de consommation ».[6]
Tel est de fait le sens de l’évolution présente.
Elle rend caduque la « loi de la valeur ». Pensée
jusqu’au bout de ses implications, l’allocation universelle
d’un revenu social suffisant équivaut à une
mise en commun des richesses socialement produites.
Allocation universelle n’est pas assistance
La garantie inconditionnelle à toute personne d’un
revenu à vie aura toutefois un sens et une fonction foncièrement
différent selon que ce revenu est suffisant ou insuffisant
pour protéger de la misère.
- a - Destinée, selon ses partisans, à être
substituée à la plupart des revenus de redistribution[7]
(allocations familiales et de logement, indemnités de chômage
et de maladie, RMI, minimum vieillesse, etc.…), la garantie
d’un revenu de base inférieur au minimum vital a pour
fonction de forcer les chômeurs à accepter des emplois
au rabais, pénibles, déconsidérés (…).
Il faut donc subventionner ces emplois en permettant le cumul d’un
revenu social de base insuffisant pour vivre avec un revenu du travail
également insuffisant
On créera de la sorte un « deuxième marché
du travail » protégé contre la concurrence des
pays à bas salaires mais aussi, bien évidemment, contre
les dispositions du droit au travail, vouées à disparaître.
Plus le revenu de base est faible, plus « l’incitation
» à accepter n’importe quel travail sera forte
et plus aussi se développera un patronat de « négriers
» spécialisé dans l’emploi d’une
main d’œuvre au rabais dans des entreprises hautement
volatiles de location et de sous-location de services.
Le workfaire américain, légalisé fin juillet
1996 par le président Clinton, lie le droit à une
allocation de base (le welfare) très faible et l’obligation
d’assurer un travail « d’utilité sociale
» non payé ou à peine payé à la
demande d’une municipalité ou d’une association
homo-loguée. Le workfare a de nombreux partisans en France
ainsi qu’en Allemagne où des municipalités ont
commencé à menacer les chômeurs de longue durée
de leur supprimer l’aide sociale s’ils n’accomplissaient
pas des tâches « d’utilité publique »
(travaux de nettoiement, de terrasse-ment, de déblayage,
etc.) pour lesquels une indemnité de 2 DM leur est versée,
destinée à couvrir leurs frais de transport et de
vêtement.
Toutes les formes de workfare stigmatisent les chômeurs
comme des incapables et des fainéants que la société
est fondée à contraindre au travail - pour leur propre
bien. Elle se rassure de la sorte elle-même sur la cause du
chômage : cette cause, ce sont les chômeurs eux-mêmes
: ils n’ont pas, dit-on, les qualifications, les compétences
sociales et la volonté nécessaires pour obtenir un
emploi. (…)
En réalité, le taux de chômage élevé
des personnes sans qualification ne s’explique pas par leur
manque d’aptitudes professionnelles mais par le fait que (…)
le tiers des personnes qualifiées ou très qualifiées
occupe, faute de mieux, des emplois sans qualification (…).
Au lieu de subventionner les emplois non qualifiés par
le biais d’un revenu de base, c’est donc des emplois
qualifiés qu’il conviendrait de subventionner la redistribution
en y abaissant fortement le temps de travail[8].
Selon cette conception le « revenu d’existence »
doit permettre un travail-emploi intermittent et même y inciter.
Mais le permettre à qui ? Là est toute la question.
Un « revenu d’existence » très bas est,
en fait, une subvention aux employeurs. Elle leur permet de se procurer
du travail en le payant en-dessous du salaire de subsistance. Mais
ce qu’elle permet aux employeurs, elle l’impose aux
employés. Faute d’être assurés d’un
revenu de base suffisant, ils seront continuellement à la
recherche d’une vacation, d’une « mission »
d’intérim ; donc incapables d’un projet de vie
multiactive. Le « revenu d’existence » permet
dès lors de donner un formidable coup d’accélérateur
à la déréglementation, à la précarisation,
à la « flexibilisation » du rapport salarial,
à son remplacement par un rapport commercial. Le revenu continu
pour un travail discontinu révèle ainsi ses pièges.
A moins, bien entendu, que les intermittences du travail, sa discontinuité
relèvent non pas du pouvoir discrétionnaire du capital
mais du droit individuel et collectif des prestataires de travail
à l’autogestion de leur temps.
- b - L’allocation à tout citoyen d’un revenu
social suffisant relève d’une logique inverse : elle
ne vise plus à contraindre les allocataires à accepter
n’importe quel travail à n’importe quelle condition,
mais à les affranchir des contraintes du marché du
travail.
Le revenu social de base doit leur permettre de refuser le travail
et les conditions de travail « indignes » ; et il doit
se situer dans un environnement social qui permette à chacun
d’arbitrer en permanence entre la valeur d’usage de
son temps et sa valeur d’échange: c’est-à-dire
entre les « utilités » qu’il peut acheter
en vendant du temps de travail et celles qu’il peut produire
par l’autovalorisation de ce temps. L’allocation universelle
d’un revenu suffisant ne doit pas être comprise comme
une forme d’assistance, ni même de protection sociale,
plaçant les individus dans la dépendance de l’Etat-providence.
Il faut la comprendre au contraire comme le type même de ce
qu’Anthony Giddens appelle une « politique générative
» (generative policy)[9] Elle doit donner aux individus des
moyens accrus de se prendre en charge, des pouvoirs accrus sur leur
vie et leurs conditions de vie.
Notes de J-P Lambert (Rédacteur en chef de la revue PROSPER)
Les familiers du distributisme comprendront facilement d’où
provient le « revenu suffisant » et d’où
il tire sa « suffisance ». [10] Le lecteur de Transversales/science-culture
aura par contre quelque difficulté à en saisir l’origine.
Le texte de Jacques Duboin[11], que nous reproduisons ci-dessous
(en déployant distinctement ses trois points pour en faciliter
la lecture), ne contient en effet rien qui permette de s’en
faire une idée concrète.
Qu’on en juge :
Réduisons l’ambition à tenter de nous mettre
d’accord sur quelques principes généraux, puis
à examiner s’ils pourraient servir de base à
une économie rationnellement organisée. Voici quel
pourrait être le premier :
*L’homme possède le droit à la vie, car il
le tient des lois de la nature. Il a donc droit à sa part
dans les richesses du monde. Grâce à son travail, il
pourrait se procurer cette part et ainsi gagner sa vie. Il le pourra
désormais de moins en moins, car son travail est progressivement
éliminé par un gigantesque appareil de production
qui rend tous les jours le labeur humain un peu moins nécessaire.
Cependant les progrès techniques qui se succèdent
en libérant l’homme de ses occupations matérielles
ne doivent pas le priver des biens créés sous prétexte
que son travail n’est plus nécessaire. En effet si
l’homme est dénué de moyens d’existence,
son droit à la vie devient un leurre. Mais si l’homme
l'a inventé n'est il pas juste qu’elle travaille pour
lui ? (…) La fortune des hommes de notre temps réside
dans l’efficience des techniques qui permettent de créer
ces richesses. Nous avons donc tous le droit de profiter des découvertes
de nos devanciers : d’où ce deuxième principe
:
* L’homme est l’héritier d’un immense
patrimoine culturel qu’il trouve aujourd’hui en naissant,
car l’équipement agricole et industriel n’est
qu’une œuvre collective poursuivie pendant des siècles
par une foule innombrable de chercheurs et de travailleurs, tacitement
associés pour l’amélioration continuelle de
la condition humaine. Cependant, si l’homme est l’héritier
de ce prodigieux patrimoine, il n’est que l’usufruitier
des richesses qu’il permet de créer. Sous quelle forme
pourrait-il en percevoir sa part ? Ecartons la fameuse prise au
tas, qui se concilie mal avec l’ordre qui doit régner
dans une économie rationnelle (…). Dans le monde moderne
la part d’usufruit ne se conçoit que sous la forme
de pouvoir d’achat, donc de monnaie, puisqu’elle ne
constitue plus qu’un titre de créance. Il faut que
tout le monde possède de l’argent pour vivre, comme
tout le monde a de l’air pour respirer. D’où
ce troisième principe :
*Les droits politiques ne suffisent plus à assurer la liberté
des hommes, car, pour vivre, il faut avoir de quoi vivre. Les droits
du citoyen doivent se compléter des droits économiques
du consommateur, concrétisés par un « revenu
social » auquel il aura droit du berceau au tombeau.
L’énoncé de ces trois principes ne va pas
plus loin que ce qu’exprime Marx dans le texte cité
plus haut. Cinquante ou cent cinquante ans après, on piétine.
A la question « sous quelle forme l’usufruitier peut-il
recevoir sa part ? » Duboin répond : « sous une
forme monétaire ». Il n’expliquera lui-même
que dans un tout dernier opuscule d’où cette forme
peut, dans l’économie distributive telle qu’il
la conçoit (et telle qu’elle serait encore possible
si on ne tenait pas compte de l’aspect positif des nouvelles
données économiques, sociales, écologiques,
etc.), tenir sa consistance.
Or elle la tient d’un procédé qui n’a
rien d’original, puisqu’il reprend celui de la création
monétaire ex-nihilo telle que la pratiquent déjà
tous les banquiers en inscrivant d’un trait de plume une ligne
de crédit au compte d’un entrepreneur et en anticipant
ainsi sur les « rentrées » que doit produire
son activité.
Cette monnaie « scripturaire », est en fait déjà
en partie une « monnaie de consommation », au sens étroit
où vos rentrées annulent votre crédit. L’argent
dont les particuliers comme les entreprises seront demain crédités
s’annulera au moment de leurs achats. Mais il ne produira
plus d’intérêt. Il n’aura plus d’autre
fonction que pour renseigner sur ce qui a été acheté
et doit être renouvelé.
Cet argent émis sans intérêt n’est pas
la grande ni la seule nouveauté du distributisme. [Un système
relativement proche, le créditisme, vise également
à instaurer cet « argent sans dette », et s’arrête
d’ailleurs là , le « revenu social » devant
être complété dans les mêmes conditions
et avec les mêmes risques qu’André Gorz dénonce).]
Sa vraie nouveauté tient avant tout au fait que le système
de la création scripturaire se trouve en réalité
détourné de son usage (pour le plus grand bénéfice
des banquier).
C’est exactement avec le même système que les
distributistes d’aujourd’hui proposent, dans un premier
temps (le second étant la gratuité totale) de sortir
l’activité économique d’une triple dépendance
: à l’égard des profits monétaires, de
la croissance qui seule permet de rembourser les intérêts,
et de celle qu’instaure la concurrence dans un Marché
mondialisé.
Ces quelques indications suffiront à faire comprendre que
le ralliement d’André Gorz à l’économie
distributive va bien au-delà du « revenu suffisant
».
[1] Cf André Gorz, Les Chemins du Paradis. Mon argumentation
est reprise et brillamment redéveloppée, souvent dans
les mêmes termes, dans Alain Bihr, Du Grand Soir à
l’Alternative, Ed. Ouvrières 1991.
[2] Karl Marx, Grundrisse, p. 594 de l’édition originale.
4. Wassily Leontieff, La distribution du travail et du revenu, Pour
la Science n°61, Avril 1942 (note d’A.G.)
[5. Gustave Rodrigues a franchi le seuil de la porte un peu avant
Duboin. Nous ne pouvons reprocher à André Gorz de
ne pas en être informé, car il faut s’être
armé de patience historique pour en savoir plus que La Grande
Relève n’en disait sur le sujet (mais rien ne prouve
que l’ignorance de la fille de Jacques Duboin ait été
feinte). Rappelons que Rodrigues, professeur de philo à Jeanson
de Sailly, a tenu la tribune de Nouvel Age revue rivale de La Grande
Relève, de 1935 à 1940, en double avec Georges Valois.
Etant juif, il s’est suicidé au rocher de Biarritz
en 1940. Valois meurt en déportation en 1945.]
[5] Les Grundrisse n’ont été publiés
sous le titre Rohenwurf (ébauche à l’état
brut) qu’en 1939 par l’Institut Marx-Engels-Lénine
à Moscou. La première édition accessible au
public a été publiée par Dietz en 1953 à
Berlin. (note d’A.G.)
[6] [note d’A. Gorz] Jacques Duboin prévoyait déjà
que cette monnaie de consommation devait être annulée
par l’acte d’achat qu’elle permettait. C’est
qu’elle ne provient pas d’un prélèvement.
Elle ne peut en provenir, dans une économie qui ne distribue
[redistribue est ici le terme approprié] plus guère
de salaires. La monnaie qui solvabilise la demande n’y peut
être qu’une monnaie sociale dont l’émission
et la masse relèvent de décisions politiques.
[7] [par l’emploi de ce mot André Gorz montre qu’
il a parfaitement compris que les « partisans » du revenu
d’existence ne sortaient pas du cadre redistributif.]
[8] Voir à ce sujet l’article de P. Frémeaux,
« Rééquilibrer le marché du travail »,
dans l’excellent dossier de G. Duval, Alternatives économiques
n°135, mars 1996.
[9] Anthony Giddens, Beyond Left and Right. The Future of Radical
Politics, Cambridge, Polity Press, 1994.
[10] [Ils ont retenu qu’en économie distributive le
prix des biens et services disponibles ne dépend plus de
leur cours sur le marché. Le jour D, on chiffre l’ensemble
de la production provisoirement au prix du Marché et on divise
la somme entre tous les usagers. Ils peuvent donc acheter tout ce
qui est produit. Or nous croulons sous les produits. Nous (et les
peuples auxquels nous les imposons) craindrons d’autant moins
d’en manquer que leur production ne sera pas raréfiée
(cf OGM) pour faire monter les prix.
[11] Les yeux ouverts, 1955.
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